Catholicisme au Canada | l'Encyclopédie Canadienne

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Catholicisme au Canada

Le mot grec katholikos veut dire « général » ou « universel ». Il se réfère plus couramment au christianisme qui est en communion avec le pape et l’Église de Rome, c’est-à-dire aux croyances et aux pratiques de l’Église catholique. Le mouvement œcuménique moderne désigne généralement tous les chrétiens partageant le catholicisme de l’Église, dérivé du guide universel et du règne du Christ. Selon le recensement de 2021, 10,9 millions de personnes au Canada (29,9 %) s'identifient comme étant catholiques.

Origines

Saint Ignace d’Antioche (décédé environ 110 après Jésus-Christ) est le premier à employer le terme « église catholique ». Saint Vincent de Lérins (5e siècle) définit plus tard la foi catholique comme étant « celle qui a été crue partout, toujours et par tous ». D’après la croyance de l’Église, Dieu est le créateur et le père de tous, et Dieu le fils (le Christ) possède un royaume universel qui est l’Église. Les premières églises chrétiennes, fondées dans une grande variété de langues, de cultures et de peuples, se considèrent comme formant une seule sainte Église catholique du Christ.

Sacrements de l’Église catholique

L’Église catholique reconnaît sept rites religieux appelés sacrements : le baptême, administré en général aux bébés; la confirmation; l’eucharistie (la communion) qui est célébrée au milieu de la messe (le culte public) et offerte aux baptisés seulement; la confession, qui implique la pénitence et l’absolution du requérant par un prêtre; l’ordination (la consécration à l’un des trois degrés ecclésiastiques); le mariage; et l’onction, qui est normalement administrée uniquement si le bénéficiaire est gravement malade ou si sa mort est imminente.

Le gouvernement de l’Église est assuré par une hiérarchie d’évêques, de prêtres et de diacres sous l’autorité du pontife (prêtre suprême) ou pape, qui est l’évêque de Rome et le chef de l’Église catholique. Le gouvernement de l’Église se trouve au Vatican, à Rome. Les cardinaux sont des archevêques ou des évêques nommés par le pape. À la mort d’un pape, ceux-ci ont la responsabilité d’élire le prochain pape. Chaque évêque est à la tête d’un diocèse et est responsable, entre autres choses, de l’ordination des nouveaux prêtres. Les prêtres sont responsables de leurs paroisses et congrégations individuelles. La doctrine de la succession apostolique soutient que l’autorité spirituelle conférée par le Christ à ses apôtres est descendue à travers une succession ininterrompue au pape actuel, aux évêques et aux prêtres, qui possèdent cette autorité à divers degrés. Tous les membres du clergé doivent être des hommes. L’Église compte de nombreuses communautés religieuses chrétiennes composées d’hommes ou de femmes qui font vœu de chasteté, comme le font les prêtres et les évêques de rite occidental.

Marie de l'Incarnation

Débuts de l’Église catholique au Canada

Le catholicisme arrive dans ce qui est aujourd’hui le Canada avec les premiers explorateurs, mais il s’implante lentement. Même si Jacques Cartier arrive vraiment accompagné d’aumôniers en 1535, le catholicisme ne s’implante pas jusqu’à ce que Samuel de Champlain persuade l’Église de France de donner suite à sa campagne de colonisation. Les circonstances sont favorables à l’esprit missionnaire qui mène à la fondation d’une Église catholique canadienne. Ces circonstances incluent l’intérêt de la papauté et des ordres religieux pour le Nouveau Monde; la fin des guerres de religion en France; les réformes suite au concile de Trente, qui régénèrent l’Église française; et l’enthousiasme des dévots pour les missions étrangères. Avec l’appui de bienfaiteurs de la noblesse et du clergé français, des membres de l’Ordre des Récollets franciscains s’établissent au Québec en 1615, suivis par les jésuites en 1625. Les missionnaires retournent en France pendant l’occupation anglaise de 1629 à 1632, mais ils reviennent ensuite en force (bien que, par ordre du cardinal de Richelieu, seuls les jésuites ont l’autorisation de reprendre leur travail).

Cette jeune Église canadienne se consacre presque entièrement à l’évangélisation des peuples autochtones. Sans négliger le nombre de plus en plus grandissant de colons en Nouvelle-France, les Jésuites (puis les Sulpiciens) se concentrent sur la vie avec les peuples autochtones. Les comptes-rendus de leurs travaux, publiés dans les documents Relations des Jésuites, les aident à maintenir l’intérêt des catholiques en France. De généreuses donations permettent de financer le Collège des Jésuites (1635), la réserve Sillery (1637), l’école du Couvent des Ursulines (1639) dirigée par Marie de l’Incarnation, l’ Hôtel-Dieu (1639) et Ville-Marie (1642), où sont établies les mêmes institutions que celles de Québec. L’Église soutient la colonie et domine même en politique, le supérieur des jésuites ayant souvent plus de pouvoir que le gouverneur.

Sainte-Marie-des-Hurons

Vers les années 1650, la situation change totalement. De 1648 à 1650, les Iroquois détruisent la Huronie ainsi que la mission la plus prometteuse des jésuites, Sainte-Marie-Des-Hurons. Par la suite, les jésuites travaillent dans des missions dispersées parmi les peuples autochtones, mais ils doivent consacrer une attention croissante à la population française qui ne cesse d’augmenter. L’Église reçoit son premier prélat (ecclésiastique supérieur) en 1659. Bien que François de Laval n’est alors que vicaire apostolique (évêque par intérim lorsqu’il n’y a pas de hiérarchie), il a la juridiction nécessaire pour coordonner l’établissement des institutions nécessaires, incluant le Séminaire de Québec. Après la réorganisation en tant que colonie royale de la Nouvelle-France en 1663, l’Église doit accepter l’intervention de l’État dans les questions d’intérêt commun (par exemple, la fondation de paroisses) et dans les questions purement religieuses (par exemple, la réglementation des communautés religieuses). En revanche, elle peut compter sur l’appui de l’État, incluant son appui financier. Le premier diocèse est établi au Québec en 1674.

Peu à peu, un christianisme distinctif se développe. Il est homogène, car les protestants ne sont admis dans la colonie que pour de brèves visites (voir Huguenots). La plupart des membres de la population pratiquent leur foi en suivant un catholicisme sévère, instauré principalement par Monseigneur de Saint-Vallier (voir Jansénisme). La paroisse est la charpente de la vie religieuse et est financièrement administrée par les marguilliers (seuls dignitaires élus de la Nouvelle-France), qui sont généralement influencés par le curé. En 1760, le Canada compte environ 100 paroisses, et la plupart d’entre elles sont dirigées par un clergé diocésain (84 membres), dont les quatre cinquièmes sont nés au Canada. Ces prêtres sont assistés de 30 sulpiciens, 25 jésuites et 24 récollets, ainsi que plus de 200 religieuses appartenant à 6 communautés, qui se chargent de l’éducation et des œuvres de charité. Ces communautés d’hommes et de femmes peuvent offrir leurs services gratuitement parce que le roi leur a accordé des terres et un soutien financier. Cet équilibre, qui caractérise les relations entre l’Église et l’État de 1660 à 1760, est vulnérable aux changements de l’harmonie des forces qui le composent.

L’Église sous le régime britannique

Après la Conquête de 1759-1760, l’Église catholique du Québec, déjà affaiblie par les répercussions de la guerre, doit également composer avec de nouveaux maîtres britanniques et protestants (voir Protestantisme). On s’attend à ce que les nouvelles autorités favorisent l’Église anglicane (voir Anglicanisme) et tentent de convertir leurs nouveaux sujets catholiques. La liberté de pratiquer les rites catholiques est garantie dans les termes de la capitulation. Même si ces pratiques ne sont tolérées que par les Britanniques, la liberté progressive des catholiques évolue rapidement. Néanmoins, les Britanniques interviennent dans la nomination des évêques, et parfois des prêtres, et exigent que le clergé communique à ses paroissiens certains documents gouvernementaux. L’Acte de Québec de 1774 garantit encore davantage la liberté de pratique du catholicisme et facilite l’accès des catholiques à des fonctions publiques. Pour protéger ces nouvelles libertés, les évêques prêchent l’obéissance (à divers degrés), poussent la population à résister aux envahisseurs américains en 1775 et chantent des hymnes d’Action de grâces en l’honneur des victoires britanniques contre les Français pendant la Révolution américaine.

L'Acte de Québec, 1774

Parmi d’autres régions de ce qui est le Canada actuel, l’Église française fonde des missions dans les Maritimes au début du 17e siècle, et à Terre-Neuve au milieu du même siècle, mais des catholiques non francophones s’installent également rapidement dans ces régions. À la fin du 17e siècle, des catholiques irlandais commencent à arriver à Terre-Neuve, qui est sous la juridiction du Québec jusqu’en 1713, année où la France cède Terre-Neuve à la Grande-Bretagne par le Traité d’Utrecht, et où la juridiction ecclésiastique sur l’île passe au vicaire apostolique de Londres. En 1796, Terre-Neuve devient un diocèse distinct sous l’évêque J.L. O’Donnell.

Croissance de l’Église

À la fin du 18e siècle, de nombreux catholiques écossais s’installent à l’Île-du-Prince-Édouard et en Nouvelle-Écosse. Cependant, pour diverses raisons personnelles, politiques et ecclésiastiques, l’Église dans ces régions et dans d’autres régions colonisées de ce qui est aujourd’hui le Canada, à l’exception de Terre-Neuve, demeure sous la juridiction de l’évêque de Québec jusqu’en 1817; cette année-là, la Nouvelle-Écosse devient un vicariat apostolique séparé sous la direction de l’évêque Edmund Burke. Par la suite, de nombreux vicariats et diocèses apparaissent avec l’expansion des colonies. La croissance de l’Église au Canada anglophone est stimulée plus particulièrement par l’arrivée d’un nombre important d’immigrants irlandais au 19e siècle.

Au début du 19e siècle, de nombreux catholiques du Bas-Canada, en particulier ceux de la classe professionnelle montante, se détachent de leur église. Les prêtres n’arrivent pas à diriger la population comme ils l’ont fait auparavant, et les gens commencent à négliger leurs pratiques religieuses. Les autorités de l’Église contrecarrent les efforts des confessions laïques et obtiennent la reconnaissance officielle de la part de l’évêque pour encourager l’éducation (incluant les vocations religieuses), et donner un second souffle à la foi catholique. Mais les 323 prêtres ne sont pas en mesure de répondre aux besoins des 500 000 habitants du Québec, et ils ne peuvent plus compter sur le soutien des communautés religieuses masculines qui ont disparu (à l’exception des Sulpiciens) ni des communautés religieuses féminines, qui sont en difficulté. Le Parti Patriotes (fondé en 1826), qui fait l’objet d’un appui massif, propose un programme libéral qui alarme le clergé et déclenche un prosélytisme de style protestant, principalement autour de Montréal. L’évêque de Québec assailli remporte la nomination d’un auxiliaire de Montréal, Monseigneur Jean-Jacques Lartigue, devenu évêque de Montréal en 1836. Monseigneur Lartigue avait condamné les rébellions de 1837, mais en raison de cet appui au gouvernement, il est temporairement rejeté par son peuple.

L’Église est aussi gravement ébranlée que le reste de la société par les séquelles de l’insurrection, mais elle est la première à se remettre sur pied. Sous le règne du dynamique évêque de Montréal, Monseigneur Ignace Bourget (établi en 1840), le clergé détient un pouvoir grandissant. Monseigneur Bourget entreprend de « christianiser » et de « régénérer » la société, en appliquant les idées de son prédécesseur et en se servant des sermons populistes du français Monseigneur Charles de Forbin-Janson (voir Évangélisme et évangélistes). Monseigneur Bourget utilise pleinement la presse religieuse dirigée par des laïques spécialisés; il mène des collectes de fonds dans la ville et fait des voyages de mendicité en Europe. Il travaille pour le peuple, alliant son église à Rome au sujet de la liturgie, des études théologiques et des dévotions. Il appuie des campagnes pour la moralité sociale (par exemple, les campagnes de tempérance et la lutte contre la « mauvaise » littérature, menée par L’œuvre des bons livres et les Cabinets de lecture paroissiaux), il dirige un programme d’aide sociale pour les pauvres, les malades, les orphelins et les handicapés, et il prêche l’entraide sociale. L’exemple de Montréal est suivi à travers le Québec, mais à un degré moindre.

Au cours de la même période, une nette augmentation des vocations religieuses mène à des paroisses plus nombreuses et mieux desservies; le nombre de diocèses (10 en 1900) augmente avec le taux de natalité. Les prêtres, maintenant plus nombreux, s’impliquent souvent dans les activités laïques, et semblent tout gérer au Québec. Les paroisses font périodiquement appel à des spécialistes (jésuites, oblats, rédemptoristes, dominicains et franciscains) pour prêcher aux missions de renouveau spirituel. La réponse laïque semble satisfaisante : la plupart des gens sont pratiquants et une élite pourrait même être qualifiée de dévouée.

Le catholicisme du Canada anglais et français sont alignés avec le catholicisme international, dont l’autorité devient progressivement plus défensive et craintive de la société occidentale post-révolutionnaire (américaine et française). Durant le début du 19e siècle, la violence sectaire augmente, comme en témoignent les combats entre les catholiques et protestants irlandais (voir Ordre Orange) qui ont lieu à plusieurs reprises dans le Haut-Canada, et les batailles impliquées dans la Guerre des Shiners des années 1840. Les hommes d’Église catholique voient le bouleversement social résultant de l’industrialisation et de l’urbanisation comme étant l’œuvre du diable, de la Révolution française, de la franc-maçonnerie, du socialisme, et du laissez-faire capitaliste, et ils exhortent les fidèles à revenir à un ordre social stable tel que celui qui régnait au Moyen-Âge.

Église catholique et écoles

19e siècle

L’Église a toujours été active dans le domaine social qu’est l’éducation. Les membres du clergé catholique à travers le Canada sont pionniers de l’éducation au début du 19e siècle, en établissant de petites écoles locales dont les enseignants ont pour principale préoccupation l’éducation morale de leurs élèves. Toutefois, vers le milieu du siècle, l’État commence à fournir de la scolarisation, s’engageant ainsi dans un domaine d’activité sociale qui a été la responsabilité de l’Église pendant des siècles. La première loi scolaire (1841) de la Province du Canada vise à établir un système scolaire chrétien, mais non confessionnel. Cependant, les réalités politiques font en sorte que le Canada-Est développe rapidement un système scolaire confessionnel double (catholique et protestant), tandis que le Canada-Ouest permet la création d’un système scolaire divisé et soutenu par l’État, une section étant non confessionnelle (publique) et l’autre étant confessionnelle (Écoles séparées). Les écoles confessionnelles ne tardent pas à devenir largement catholiques. Pendant les décennies suivantes, d’autres provinces établissent leur système scolaire en se basant sur les modèles québécois ou ontarien. Au fur et à mesure que l’État prend en charge la scolarisation de la population canadienne, les écoles confessionnelles et catholiques obtiennent une reconnaissance légale.

Au cours de la seconde moitié du 19e siècle, la hiérarchie catholique canadienne est déterminée à solidifier ses écoles catholiques, alors que les partisans de l’école publique argumentent que seules leurs écoles publiques devraient bénéficier du soutien de l’État. Ainsi s’ensuivent de longs et virulents débats tels que la Question des écoles du Nouveau-Brunswick de 1871, la Question des écoles du Manitoba dans les années 1890 et la Question des écoles du Nord-Ouest au tournant du siècle. La Question des écoles de l’Ontario de 1912 à 1927 est non seulement un combat entre protestants anglophones et catholiques francophones, mais également le résultat d’une lutte de pouvoir entre les religieux canadiens-français et les Canadiens irlandais au sein de l’Église.

D’autres régions du Canada connaissent des querelles semblables alors que les groupes ethniques se disputent le contrôle de l’Église, mais ce faisant, certains membres du clergé apprennent à valoriser la diversité et à se respecter les uns les autres. Pendant ce temps, l’Église fonde de nombreuses institutions confessionnelles d’enseignement supérieur. Un nombre d’universités canadiennes ont vu le jour de cette façon, comme l’Université d’Ottawa et la University of St. Michael’s College, à Toronto. Dans la plupart des cas, leur administration est progressivement passée entre des mains laïques.

À mesure que l’Église accroît son influence sur la société, plus particulièrement au Canada français, certains membres du clergé sont tentés par la politique. Partisan des principes ultramontains (voir Ultramontanisme) et craignant les réformes suggérées par le Parti libéral, le clergé du Québec accuse ce parti de soutenir le libéralisme, et il le dénonce pendant les élections. En 1871, des laïcs appuyés par Bourget et par Monseigneur Louis-François Laflèche publient un manifeste électoral, le Programme catholique, qui aurait pu conduire au contrôle religieux du Parti conservateur provincial. La forte réaction de trois évêques (l’archevêque Elzéar-Alexandre Taschereau, Monseigneur Charles Larocque et Monseigneur Jean Langevin) et de certains politiciens condamne le projet et rend publique la division entre les ultramontains modérés et les ultramontains intransigeants (alors appelés les programmistes).

En 1875, les deux groupes s’unissent pour dénoncer vigoureusement le libéralisme catholique. En 1876, les résultats des élections dans deux circonscriptions provinciales sont annulés pour motif d’abus d’influence de la part du clergé. La tension monte entre l’Église et l’État. Le Vatican est consulté et celui-ci envoie un délégué apostolique, Monseigneur George Conroy, pour rétablir l’harmonie entre les prélats et les forcer à déclarer que leur condamnation du libéralisme catholique ne s’adresse pas au Parti libéral. Par la suite, les interventions du clergé en politique se font plus discrètement.

Vers la fin du 19e siècle, le catholicisme québécois se découvre une vocation missionnaire qui perdure encore de nos jours. Des religieuses, des prêtres et des frères établissent d’abord des missions au Canada anglais (y compris dans les provinces des Prairies et les Territoires du Nord-Ouest actuels) et aux États-Unis, et ensuite à travers le monde (voir Missions et missionnaires). Initialement, les missionnaires oblats de France et le clergé canadien (surtout du Québec) fondent et soutiennent fortement des missions, des hôpitaux et des écoles à travers les Prairies, la Colombie-Britannique et le Nord. L’Église s’occupe également de questions sociales plus vastes. Divers sociologues du 19e siècle reconnaissent que de nouvelles formes de société, avec de nouveaux besoins, sont créées par une industrialisation et une urbanisation croissante. Les protestants lancent donc le Mouvement Social Gospel en réponse à cette nouvelle question sociale.

20e siècle

Au tournant du 20e siècle, le catholicisme québécois est préoccupé par des problèmes sociaux. Conscient des problèmes créés par la nouvelle technologie, par la migration vers les villes et défié par l’encyclique Rerum Novarum (1891) du pape Léon XIII, le clergé élabore une doctrine sociale pour guider la nouvelle société. Au Québec, les jésuites sont particulièrement actifs à travers l’École sociale populaire. Leur Programme de restauration sociale (fondé en 1933) constitue la principale source d’inspiration des mouvements politiques de l’Action libérale nationale, du Bloc populaire canadien, et, dans une moindre mesure, de l’Union nationale. Ils appuient et dirigent des syndicats catholiques formés de 1907 à 1920, des caisses populaires, des coopératives, ainsi que des ligues de toutes sortes, tous ayant le catholicisme comme caractéristique principale.

Lionel Groulx

Par ailleurs, l’Église du Québec continue de contrôler l’éducation. Les activités laïques ne laissent qu’environ 45 % du clergé pour s’occuper des fonctions paroissiales. Ce déséquilibre ne pose guère de problèmes, car le clergé de la province continue d’augmenter en nombre : on compte 2091 prêtres en 1890, 3263 prêtres en 1920, et 5000 prêtres en 1940 (un rapport de 567, de 578 et de 539 paroissiens pour chaque prêtre), et ce, sans compter les communautés religieuses. Les fidèles sont guidés par leurs prêtres, et leur pratique religieuse est surtout centrée sur les missions paroissiales, les pèlerinages et les conférences provinciales, régionales et locales. L’ Action catholique contribue à former de nouveaux catholiques, dont les méthodes dérangent les traditionalistes et entraînent parfois des conflits avec le clergé.

Au sein de l’engagement du catholicisme canadien envers les activités sociopolitiques, la doctrine et la morale sont sévères, et l’engagement politique et social est sans compromis. La Crise des années 1930 teste à nouveau la volonté des catholiques de faire face à de graves problèmes sociaux. La période difficile qui donne naissance à la Co-operative Commonwealth Federation (CCF) marque également, chez les catholiques, les débuts du mouvement d’Antigonish. De nombreux évêques catholiques condamnent le CCF à cause de ses caractéristiques socialistes. Fidèle à sa tradition, l’Église, dans l’ensemble, est conservatrice, elle favorise le statu quo et se méfie des changements. La Deuxième Guerre mondiale déclenche une prise de conscience du monde extérieur parmi les catholiques au Canada, et fait en sorte que l’Église semble être, pour de nombreux catholiques, beaucoup trop autosuffisante et complaisante.

Pendant un siècle, de 1850 à 1950, le catholicisme devient très centralisé et très discipliné. Alors que la plupart des catholiques au Canada pratiquent leur religion de manière régulière, ils intègrent à leurs pratiques un nombre croissant de dévotions dans un cadre de piété intense et colorée. Le dévouement à la papauté s’intensifie après 1850, atteignant son point culminant en 1870 lors de la définition du dogme de l’infaillibilité pontificale, et les papes qui se succèdent encouragent des dévotions spéciales, notamment au Sacré-Cœur de Jésus, à la Vierge Marie et à Saint Joseph. L’Église catholique s’appuie sur des coutumes vieilles de plusieurs siècles qui favorisent diverses formes de piété comme le rosaire, le port du scapulaire, l’adoration du Saint-Sacrement et les quarante heures. Les pèlerinages deviennent populaires, tant vers des sanctuaires de l’Europe et de la Terre sainte que vers ceux du Canada. La plupart des familles canadiennes ornent leur maison d’un crucifix, on plante des croix de chemin et on construit des sanctuaires dans les régions où le catholicisme règne largement. Cette piété fervente ne s’affaiblit qu’après 1960.

Le catholicisme canadien émerge de la Deuxième Guerre mondiale comme une Église triomphante, comme l’indiquent l’opulence entourant le Congrès marial d’Ottawa en 1947, et les cérémonies d’installation de l’archevêque Paul-Émile Léger à Montréal, en 1950. Toutefois, les administrations conservatrices du pape Pie XII et du président américain Eisenhower se terminent à la fin des années 50, et un nouvel esprit libéral émerge dans le monde occidental, esprit qui commence à affecter l’Église anglophone du Canada.

Catholicisme et Révolution tranquille au Québec (au milieu de 20e siècle)

Au Québec, les changements sont plus extrêmes et plus perturbateurs que dans le reste du Canada. La Deuxième Guerre mondiale et l’après-guerre sont des périodes de profondes transformations pour le Québec entier. Les valeurs traditionnelles, même les valeurs religieuses, sont contestées par des gens qui veulent une expansion des valeurs missionnaires et communautaires, un rôle accru des laïcs dans l’Église et un meilleur accueil des valeurs positives du monde moderne. Certains groupes, comme la Faculté des sciences sociales de l’Université Laval et la Commission sacerdotale d’études sociales, proposent des solutions modernes aux problèmes sociaux. Ils sont au premier rang de l’opposition au gouvernement de Maurice Duplessis pendant la grève de l’amiante de 1949, et en 1950, ils inspirent une lettre pastorale collective qui exprime une nouvelle sympathie pour le mouvement ouvrier et pour les femmes.

Pour la première fois, l’Église se range du côté des ouvriers dans un conflit industriel. Ceci place le bureau de l’évêque en conflit direct avec Maurice Duplessis.

Dans un sermon prononcé à la Basilique Notre-Dame, l’archevêque de Montréal, Joseph Charbonneau, déclare à ses paroissiens : « La classe ouvrière est victime d’une conspiration visant à l’écraser, et lorsqu’il y a une conspiration visant à écraser la classe ouvrière, il est du devoir de l’Église d’intervenir. Nous accordons plus d’importance au peuple qu’au capital. »

Joseph Charbonneau

Cependant, jusqu’en 1959, le catholicisme québécois continue de se présenter comme une institution conservatrice. La Révolution tranquille des années 1960 force l’Église à reconnaître certaines de ses faiblesses. En quelques années, un vent de changement apporte à la fois la décléricalisation de la société (le bien-être, la santé et l’éducation passent du contrôle de l’Église à celui de l’État) et la sécularisation des institutions (par exemple, les syndicats catholiques rejettent leur étiquette confessionnelle pour devenir la Confédération des syndicats nationaux), et donc les associations, les clubs sociaux, les universités et l’État adoptent tous une position de neutralité religieuse. En même temps, une grande partie de la population cesse d’assister à la messe du dimanche, et une rupture se crée avec la morale traditionnelle, plus spécialement sur les questions sexuelles. On constate aussi un exode majeur chez les membres du clergé et des ordres religieux, et le nombre de vocations religieuses diminue très fortement. La hiérarchie et l’ensemble du clergé semblent dépassés et gardent un silence prudent.

Le renouveau du catholicisme après 1960 se manifeste également par une nouvelle ouverture de l’Église aux autres chrétiens et aux autres religions. Les catholiques, les anglicans, les luthériens, ainsi que d’autres protestants collaborent à certaines activités missionnaires, à des efforts de justice sociale et à des initiatives pastorales locales et régionales.

L’Église et Vatican II

En 1959, le pape Jean XXIII annonce la convocation d’un concile œcuménique, et la foi catholique du monde entier commence à chercher de nouvelles formes d’expression et de témoignage. Lors du concile Vatican II (1962-1965), le catholicisme international est aux prises avec un tourbillon de changements et de défis visant à revivifier tous les domaines qui intéressent les chrétiens, de la théologie à l’action politique, de la spiritualité à l’administration et de l’œcuménisme aux codes moraux. Un certain nombre de Canadiens (comme le cardinal Léger, le théologien Bernard Lonergan ainsi que Jean Vanier, connu pour son travail humanitaire) émergent comme chefs de file de l’aggiornamento (mouvement de modernisation) dans divers domaines d’activité.

Jean Vanier

L’Église canadienne ne peut plus compter sur la coutume et les contraintes sociales, comme elle l’a fait dans le passé, pour assurer une fréquentation des églises ou pour influencer les décisions des gouvernements. Ces effets se font particulièrement sentir au Québec, où la Révolution tranquille coïncide avec le renouveau international de l’Église. Le relâchement de ces liens avec la société mène à un peu plus d’une décennie de confusion généralisée pour de nombreux catholiques au Canada. Ceux qui allaient à la messe tous les dimanches par crainte de la souffrance du péché doivent désormais apprendre l’importance de leur responsabilité personnelle quant à leur participation au culte. Ceux qui considéraient le prêtre comme un « autre Christ » découvrent qu’il est humain lui aussi. Ceux qui étaient préoccupés par le péché sexuel comme étant le seul péché comprennent l’importance de l’amour de Dieu et de son prochain. Les hommes d’Église apprennent à déléguer une part de leur autorité, et les catholiques sont appelés à prendre des responsabilités.

Un des signes du renouveau catholique est l’adoucissement de l’enseignement sur le mariage. Avant 1960, une personne catholique devait obligatoirement obtenir une permission spéciale pour épouser une personne non catholique, laquelle devait alors consentir par écrit à ce que les enfants issus de ce couple soient éduqués dans la foi catholique. Après Vatican II, l’Église découvre la primauté de la conscience et le fait que beaucoup de non-catholiques ont une authentique foi chrétienne. En conséquence, les règles disciplinaires deviennent moins rigoureuses, car de nombreux prêtres catholiques reconnaissent désormais que les enfants nés de mariages mixtes ont avantage à être élevés dans l’Église du parent le plus engagé dans sa foi chrétienne. Le mouvement œcuménique est renforcé au cours de ce processus.

De fait, Vatican II et les documents pontificaux de l’après-concile constituent une étape marquante de l’histoire de l’Église catholique. De nouveaux avant-postes sont établis sur les rives d’un monde postmoderne dont les relations avec l’Église chrétienne s’étaient détériorées depuis le 17e siècle. La crainte du monde, si répandue dans l’ancienne spiritualité, se transforme en un mouvement ouvert à l’humanité contemporaine. On met davantage l’accent sur l’Église en tant que peuple de Dieu et moins sur une hiérarchie dominante; la laïcité fait quelques progrès (quoique, au début des années 1980, les Canadiennes exercent des pressions afin d’être admises dans la hiérarchie par l’ordination des femmes); les protestants, que l’Église catholique traitait comme des hérétiques, sont promus au rang de « frères séparés »; les pays en voie de développement sont considérés comme un sujet de grande préoccupation pour l’Église; le socialisme, considéré auparavant comme un épouvantail, devient une idéologie acceptable dans certaines circonstances; et la manière de traiter les minorités linguistiques, culturelles et politiques est considérée comme un moyen fiable de juger de la qualité des gouvernements.

Les pratiques du culte changent également après Vatican II, et bon nombre de ces changements sont centrés sur l’importance renouvelée qu’on accorde au peuple en tant qu’élément principal de l’Église. Bien que la communion demeure le centre de la messe, elle n’est plus liée aussi étroitement à la confession individuelle comme avant. Les prêtres célèbrent maintenant la messe face au peuple, et le rite tridentin (la messe en latin utilisée jusqu’à l’introduction de la messe actuelle par le concile Vatican II) cède la place aux langues vernaculaires. La pratique de la prédication et de l’interprétation des Écritures connaît un renouveau, et les laïcs de la congrégation participent plus pleinement aux divers aspects des célébrations liturgiques. On constate également une résurgence du chant en congrégation et des hymnes religieux. Dans un même temps, certaines pratiques de la piété populaire (par exemple, les bénédictions et les chemins de croix) ont pratiquement disparu (voir aussi Renouveau charismatique).

À la suite de Vatican II, l’Église catholique canadienne réévalue son attitude envers les « autres » groupes linguistiques et culturels. Par exemple, à leurs débuts en Ontario et au Canada anglais, la direction des diverses Églises catholiques est surtout française ou canadienne-française (les Maritimes n’ont eu aucun évêque francophone avant 1912). À mesure qu’une hiérarchie anglophone (en grande partie irlandaise) se forme dans ces régions, la polarisation ethnolinguistique se développe simultanément dans les rangs de la hiérarchie et au Canada en général. Il en résulte une Église catholique canadienne qui prétend être unie, alors qu’en réalité, elle est séparée par le trait anglais-français. Pendant que Rome prêche le bilinguisme pour l’Église canadienne, les évêques du Canada se livrent à leur propre forme de guerre ethnoculturelle.

Le nouvel esprit qui prévaut après 1960 conduit l’Église catholique canadienne à réévaluer son attitude. Lors du centenaire de la Confédération en 1967, ainsi qu’à plusieurs occasions allant de l’adoption de la Charte de la langue française au Québec (1977) au débat constitutionnel du Canada en 1982, les évêques du Canada, du Québec et de l’Ontario publient une série de déclarations sur la question des droits linguistiques des minorités et sur le statut du français et de l’anglais au Canada. Pour la première fois depuis un siècle, les chefs de l’Église catholique canadienne abordent de façon constructive un problème qui les divise depuis longtemps. Avant la Confédération, l’Église pratiquait le bilinguisme, une politique qui l’avait beaucoup aidé dans son évangélisation d’une grande partie du Canada, et elle revient maintenant à cette politique. Compte tenu du nombre de paroisses de l’Église catholique et de la répartition géographique de celles-ci, la politique linguistique contribue immensément à la compréhension du français et de l’anglais au Canada.

La turbulence des années 60 et des années 70 affecte radicalement l’institution ecclésiastique : le réseau des paroissiens et des paroisses demeure à peu près intact; l’organisation des communautés religieuses masculines et féminines redéfinit ses objectifs; des écoles confessionnelles et quelques collèges privés prennent de l’expansion; un nouveau plan d’action paroissial et une plus grande participation des laïcs aux activités religieuses se développent. L’épiscopat se joint plus fréquemment à l’action sociale œcuménique et prend position sur des questions telles que le contrôle des naissances et l’ avortement (1977 et 1981), ou encore la crise économique (1982). Toutefois, c’est peut-être au niveau de la religion populaire que la continuité et les espoirs sont les plus visibles, en raison, entre autres choses, d’un nouvel intérêt pour les Écritures, de la popularité constante des pèlerinages et de l’essor de la religion charismatique, de la multiplication de petits groupes de vie spirituelle et de la croissance d’intérêts catholiques. Pendant plus de cent ans, les protestants ont surpassé les catholiques au Canada en nombre; cependant, en 1971, pour la première fois depuis la confédération, les catholiques sont plus nombreux que les protestants.

L’Église catholique en évolution rapide vit un moment culminant en septembre 1984 lorsque le pape Jean-Paul II visite le Canada. Ce pontife, qui a été vu par plus de gens que tous les autres papes rassemblés, est le premier pape régnant à fouler le sol canadien. Il visite de nombreuses régions, prêchant un évangile de paix, de réconciliation et de foi disciplinée. Pour tenir une promesse faite aux gens de Fort Simpson dans les Territoires du Nord-Ouest, où son avion n’a pas pu atterrir à cause du brouillard, il y retourne en septembre 1987.

Enfants autochtones et pensionnats indiens

Dans les années 1990, les peuples autochtones réclament l’autonomie gouvernementale, de meilleures conditions de vie et un traitement plus équitable de la part du gouvernement canadien, ainsi que des excuses publiques et une compensation financière de la part des institutions qui les ont violentés par le passé. Une des cibles principales de leurs réclamations sont les pensionnats indiens, des institutions qui ont été mises en place par le gouvernement du Canada et qui étaient dirigées par les principales Églises chrétiennes canadiennes.

On estime qu’un tiers des enfants autochtones du Canada fréquentent un pensionnat indien entre 1880 et 1960, période au cours de laquelle ces institutions sont la seule avenue possible pour que ces enfants autochtones puissent obtenir une éducation. Les deux tiers des pensionnats sont administrés par l’Église catholique et confiés aux Pères oblats. De nombreux résidents sont victimes d’abus physiques, émotionnels et/ou sexuels de la part du personnel du pensionnat (voir Chanie Wenjack; Commission de vérité et réconciliation du Canada; Convention de règlement relative aux pensionnats indiens).

Baisse d’adhésion

Dans les années 1990, l’Église catholique renouvelée fait face à des défis. Une baisse de la fréquentation de l’église, une remise en question des enseignements moraux catholiques, une pénurie de nouvelles vocations au sacerdoce et à la vie religieuse, et le déclin de l’influence de l’Église dans la vie publique conduisent les fidèles à réfléchir sérieusement à leur foi. La croissance chaotique et simultanée de nouveaux mouvements religieux, de la philosophie du Nouvel Âge, des valeurs laïques et des nouveaux fondamentalismes, mouvements qui contestent ou rejettent fréquemment le monde ordonné du catholicisme traditionnel, incite à des changements d’attitude. Pourtant, certains se souviennent que la société catholique triomphante dans laquelle ils ont grandi n’était qu’une étape dans l’histoire chrétienne. (Voir Mouvements évangélique et fondamentaliste.)

En 2004, la Conférence des évêques catholiques du Canada dénombre 80 cardinaux, archevêques et évêques actifs et 59 retraités dans 5681 paroisses et missions au Canada.

Églises catholiques de rite oriental

Un petit, mais important segment de la population chrétienne du Canada adhère aux Églises catholiques orientales ou de rite oriental, dont les traditions théologiques, canoniques et spirituelles remontent à la culture chrétienne antique du monde méditerranéen oriental. En tant qu’entités ecclésiales distinctives, les Églises catholiques orientales n’émergent qu’après que la rupture de l’unité chrétienne ait succombé à un processus d’aliénation de plusieurs siècles aboutissant à la défaite de Constantinople par les croisés occidentaux (1204), et l’établissement d’un patriarcat latin, avec l’appui tacite du pape Innocent III. À l’exception de l’Église catholique maronite et de l’Église catholique italo-albanaise, qui affirment avoir toujours été en communion avec l’évêque de Rome, toutes les Églises catholiques orientales sont issues des efforts des missionnaires occidentaux pour ramener les chrétiens de l’Orient sous l’autorité immédiate de la papauté, et dans le cas de l’Église catholique byzantine bulgare, d’un désir spontané d’union avec Rome.

Tout au long de leur histoire, les catholiques orientaux ont de la difficulté à maintenir leurs propres traditions contre la latinisation, ou contre leur absorption par l’Église latine (c’est-à-dire occidentale ou romaine) et ils subissent parfois l’hostilité de la part de leur Église orthodoxe de l’Est et des autres Églises orthodoxes orientales. Les effets néfastes de la latinisation sont plus évidents dans l’effondrement des formes orientales traditionnelles de la vie monastique, qui sont supplantées par les ordres religieux et la liturgie de style occidental. Pour les chrétiens orientaux du Canada (et des États-Unis), l’interdiction du mariage au sein du clergé paroissial, interdiction qui remonte au 19e siècle, est peut-être l’aspect le plus pénible de la latinisation.

Bien qu’elles soient unies à Rome, les Églises catholiques orientales demeurent distinctes, en particulier en ce qui a trait à la liturgie et aux pratiques de dévotion. Les catholiques orientaux célèbrent leur foi selon l’un des cinq rites liturgiques : copte, antiochienne, chaldéenne, arménienne ou byzantine. Les circonstances historiques, en particulier la persécution et l’élimination des chrétiens orientaux dans l’Empire ottoman, l’Empire russe et l’ancienne Union soviétique, forgent un lien indissoluble entre la religion et l’ethnicité qui aident les chrétiens orientaux à survivre, mais qui constitue maintenant un obstacle à leur développement hors de leur patrie d’origine. Conformément à la compréhension théologique de l’Église qui prédomine au moment de leur établissement, les Églises catholiques orientales sont souvent réduites à une simple variante du rite de la grande Église catholique romaine. Le concile Vatican II et des déclarations papales ont corrigé cette conception par la suite, de sorte qu’aujourd’hui, les Églises catholiques orientales sont considérées comme des Églises sœurs de l’Église catholique.

En 1990, le Code des Canons des Églises orientales est promulgué par le pape Jean-Paul II. Selon ce document, les Églises catholiques orientales peuvent se classer en quatre catégories :

  1. patriarcales,
  2. archiépiscopales majeures,
  3. métropolitaines,
  4. diverses.

Un patriarche est élu durant les assemblées périodiques du synode des évêques d’une Église donnée. Après son élection et son intronisation, il demande la communion du pape. Un archevêque principal est élu de la même manière qu’un patriarche, mais, avant qu’il soit intronisé, son élection doit être confirmée par le pape. Celui-ci nomme les métropolites (un évêque ayant autorité sur d’autres évêques) après avoir consulté une liste de candidats présentée par les évêques de l’Église concernée.

On trace l’origine de l’Église catholique maronite jusqu’aux disciples du moine Saint-Maron du Liban, qui vit au 4e siècle. Au 8e siècle, cette communauté essentiellement monastique élit un évêque à titre de chef. Au courant du 12e siècle, les maronites entrent en contact avec la chrétienté latine grâce aux croisés et, en 1182, ils confirment officiellement leurs relations avec Rome. La plupart des catholiques maronites vivent encore au Liban. Au Canada, l’évêque de l’Éparchie de Saint-Maron de Montréal dirige environ 80 000 fidèles dans 14 paroisses. L’Église catholique italo-albanaise, qui existe depuis le 15e siècle, compte deux diocèses dans le Sud de l’Italie et le monastère de Santa Maria di Grottaferrata, au sud de Rome.

À la suite du concile de Florence en 1439, des groupes de chrétiens arméniens, coptes et syriens concluent des unions de courte durée avec l’Église catholique. Ces Églises sont rétablies au 18e siècle : l’Église arménienne catholique en 1742, l’Église copte catholique en 1741 et l’Église syrienne catholique en 1782. Un petit exarchat apostolique de catholiques arméniens existe au Canada, et on compte huit paroisses coptes catholiques à travers le pays. Les catholiques syriens, concentrés au Liban, en Syrie et en Iraq, n’ont aucune présence officielle au Canada actuellement. Les autres Églises catholiques orientales incluent les catholiques Chaldéens (1553), les Syro-malabars (1599), les Éthiopiens (1626), les Melkites (1744), les Ukrainiens (1595-1596), les Ruthènes (1646), les Roumains (1700), les catholiques byzantins de Krizevci, dans l’ancienne Yougoslavie (1777), les Bulgares (1861), les Syro-malankars (1930), les Hongrois (1912), les Grecs (1911) et les Slovaques (1968).

L’Église catholique grecque melkite se trouve sous la gouverne de l’évêque de l’Éparchie de Saint-Sauveur de Montréal (créée en 1984) et compte environ 43 000 fidèles à travers le Canada. Les catholiques slovaques sont dotés de leur propre diocèse en 1980 lorsque le pape Jean-Paul II crée l’Éparchie des saints Cyrille et Méthode, à Toronto, dirigée initialement par Monseigneur Michael Rusnak.

L’Église catholique ukrainienne est l’Église catholique de rite oriental la plus importante du Canada. Introduite par des immigrants ukrainiens à la fin du 19e siècle, elle reçoit son premier évêque en 1912 lorsque le pape Pie X nomme Nicétas Budka à l’épiscopat. La direction du synode des évêques catholiques ukrainiens siège à Winnipeg et supervise la province métropolitaine canadienne composée de cinq diocèses (éparchies) : le siège métropolitain de Winnipeg et les éparchies d’Edmonton, de Toronto, de Saskatoon et de New Westminster. Les ordres religieux contribuent de façon importante à la vie spirituelle des catholiques ukrainiens, ceux-ci incluent : l’Ordre de Saint-Basile le Grand ou les Pères Basiliens, les Pères rédemptoristes, les Studites, les Sœurs Basiliennes, les Sœurs Missionnaires de la Charité chrétienne, les Sœurs Servantes de Marie-Immaculée et les Sœurs de Saint-Joseph.

La formation théologique du clergé et des laïcs est dispensée par l’Église elle-même au Holy Spirit Seminary d’Ottawa. Le Metropolitan Andrey Sheptyts-ky Institute of Eastern Christian Studies est établi en 1992, et est une unité de la Faculté de théologie de l’Université Saint-Paul d’Ottawa. Elle offre des études spécialisées en histoire et théologie de l’Église orientale. Un journal érudit, le Logos, assure aux catholiques ukrainiens et aux autres catholiques orientaux une forte présence dans le monde universitaire.

Église ukrainienne en bois

Jours saints

Depuis les premiers siècles du christianisme, Pâques, qui commémore la résurrection du Christ, est la fête centrale du calendrier liturgique. Le dimanche de Pâques survient après la première pleine lune suivant l’équinoxe du printemps. La semaine sainte débute avec le dimanche des Rameaux, une semaine avant le dimanche de Pâques, et célèbre l’anniversaire de l’arrivée de Jésus-Christ à Jérusalem. Le jeudi précédant le dimanche de Pâques, les catholiques célèbrent la Dernière Cène, suivi du Vendredi saint, le jour de la crucifixion. Avec le temps, d’autres fêtes saisonnières et thématiques se sont ajoutées; dans le catholicisme contemporain, on trouve Noël (fête de la naissance de Jésus), et l’Épiphanie (fête des premières manifestations de la divinité du Christ), ces fêtes sont reconnues, avec Pâques, comme les célébrations centrales de l’année. La fête de l’Épiphanie est célébrée le premier dimanche après Noël (voir Fêtes religieuses).

Lecture supplémentaire

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