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Radio, théâtre de langue française à la

Au Québec, il y existe deux formes de théâtre radiophonique en français, les radioromans (séries ou feuilletons) et les radiothéâtres (pièces écrites ou adaptées pour la radio). Les séries radiophoniques s'inspirent du théâtre par la forme, et du roman par la structure et la longueur.

Radio, théâtre de langue française à la

Au Québec, il y existe deux formes de théâtre radiophonique en français, les radioromans (séries ou feuilletons) et les radiothéâtres (pièces écrites ou adaptées pour la radio). Les séries radiophoniques s'inspirent du théâtre par la forme, et du roman par la structure et la longueur. À l'apparition de la radio au Québec, le THÉÂTRE conserve un côté hérétique tandis que les romans passent pour frivoles, voire immoraux. En outre, les journaux francophones n'ont que rarement publié des romans feuilletons d'auteurs locaux. La première série radiodiffusée ayant connu un succès immédiat, « L'Auberge des chercheurs d'or » d'Alfred Rousseau (CKAC, janv. 1935 -- juin 1938), inspirera d'autres auteurs et donnera lieu à des commandes. En 1937, Édouard Baudry lance à CKAC le feuilleton « Rue principale », qui sera diffusé pendant 22 ans. À l'automne 1938, quatre séries radiophoniques voient le jour en même temps et marquent le début d'un âge d'or qui se prolongera durant plus de 20 ans, un phénomène proprement québécois à la fois socioculturel et littéraire.

De 1939 à 1960, de 10 à 15 séries radiophoniques sont diffusées quotidiennement au Québec, pour une moyenne de 3 heures par jour, sans compter les sketches comiques (plus d'une centaine) ainsi que les pièces présentées par épisodes (au nombre de 120) et les oeuvres historiques (au nombre de 90). Les 71 feuilletons radiophoniques répertoriés équivalent à 260 000 pages dactylographiées, soit plusieurs centaines de volumes, et à près de 13 000 heures d'émissions. Une trentaine d'auteurs québécois auront contribué à ce genre radiophonique entre 1935 et 1965, notamment Paul Gury, qui s'est occupé durant 15 ans de « Rue principale » et pendant 14 ans de « Vies de femmes »; Aliette Brisset-Thibaudet, qui a rédigé pendant 11 ans les textes de l'émission hebdomadaire de 30 minutes « Ceux qu'on aime » et Claude-Henri GRIGNON qui, 23 ans durant, a écrit les textes de l'émission vedette quotidienne de 30 minutes « Un Homme et son péché ». Il s'agit dans certains cas de traductions ou d'adaptations de feuilletons américains, mais plus de 75 p. cent des séries radiophoniques sont des oeuvres originales, la plupart rédigées par de jeunes auteurs. Dans certains cas, comme « La Famille Plouffe » de Roger LEMELIN ou « Un Homme et son péché » de Grignon, les émissions ont été précédées des romans qui ont servi de point de départ à de nouvelles situations.

Trois stations en particulier, CKAC, CBF et CKVL, diffusent des feuilletons radiophoniques à des heures de forte écoute et attirent des centaines de milliers d'auditeurs. Ces émissions quotidiennes, d'une durée moyenne de 15 minutes, deviennent un rituel. Le feuilleton a une portée limitée et reste stable au fil des ans, mêlant romans populaires et romans « à l'eau de rose ». Le ton est habituellement mélodramatique, parfois comique, à l'occasion léger. Les sujets puisent dans la veine réaliste et reflétant les moeurs familiales québécoises. Dénigré par les intellectuels, ce genre sera pourtant fortement exploité. Certaines séries radiophoniques méritent toutefois de figurer dans l'histoire de la littérature, en particulier les oeuvres de Robert CHOQUETTE (« Le Curé de village », « La Pension Velder », « Métropole ») et le feuilleton de Henri Deyglun (« Les Secrets du docteur Morhange »). Cependant, l'arrivée de la télévision sonne le glas pour les séries radiophoniques (voir TÉLÉVISION, DRAMATIQUES DE LANGUE FRANÇAISE À LA). Leur nombre commence à diminuer à la fin des années 50 pour disparaître progressivement des ondes. La station CKVL refait une tentative en 1974 et, en 1984, CHRC cherche à ressusciter le genre avec « La Minute de vérité », qui sera diffusée de septembre à décembre, sans qu'il y ait de suite.

Au Québec, les radiothéâtres n'obtiennent pas autant de succès que les radioromans, mais ils jouent un rôle important dans la vie culturelle québécoise. Chronologiquement, les pièces précèdent les feuilletons radiophoniques, puisque CKAC diffuse une première émission, « Le Théâtre de J.O. Lambert », dès novembre 1933. Le radiothéâtre remplace le théâtre, durement frappé par la Crise des années 30. En 35 ans, les stations AM québécoises diffusent 80 séries de pièces choisies qui font vivre de nombreux auteurs et acteurs. Ce genre se démarque de plus en plus du théâtre traditionnel alors qu'on tire parti des multiples possibilités offertes par le microphone. Au début, les auteurs se contentent d'adapter des romans, des nouvelles et des oeuvres tirés du théâtre de répertoire (« Le Thé L'Atelier »), habitude qui persistera tout au long de l'histoire du radiothéâtre, surtout à CBF. La station de radio publique diffuse ainsi 26 séries de pièces étrangères, dont « Radio Théâtre » (1939-1940), « Le Théâtre classique français » (1940), « Théâtre » par Radio-Collège (1941-1950), « Sur toutes les scènes du monde » (1953-1970), « Théâtre populaire » (1950) et « Petit Théâtre » (1966-1967). En outre, 10 émissions, notamment « Le Radio théâtre de Radio-Canada », présentent à la fois des adaptations et des oeuvres originales québécoises. Des producteurs talentueux mettent en scène de nombreuses pièces importantes du répertoire international, depuis les classiques jusqu'à l'avant-garde. Ces adaptations marquent les débuts de jeunes auteurs comme Marcel DUBÉ, Louis Pelland, Hubert AQUIN et Yves THÉRIAULT.

Bien qu'ils ne représentent qu'une part minime des émissions diffusées à la radio, les radiothéâtres d'auteurs québécois jouent un rôle primordial sur le plan culturel. Ils servent de banc d'essai à plusieurs jeunes dramaturges canadiens-français et favorisent l'émergence d'un corpus de pièces québécoises. La liste comprend plus de 1500 radiothéâtres écrits par plus de 200 auteurs. Chaque semaine durant 20 ans, la radio diffuse au moins une pièce originale québécoise. Au cours des années 50, jusqu'à quatre nouvelles oeuvres passent en ondes chaque semaine. Entre 1930 et 1970, les stations AM de la province présentent 44 séries québécoises. Dans la première série diffusée par CKAC, de 1938 à 1947, intitulée « Le Théâtre de chez nous », Henri Letondal occupe une place majeure. Robert Choquette est le premier auteur important dont plusieurs oeuvres sont radiodiffusées (CRCM, 1934). La station CBF commence à diffuser des séries québécoises en 1944 avec « Entrée des artistes », émission qui sera suivie par, entre autres, « L'Équipe aux quatre vents », « Les Voix du pays » et « Le Théâtre des nouveautés ». L'émission la plus marquante en raison de son caractère expérimental, « Les Nouveautés dramatiques », produite par Guy BEAULNE et diffusée de 1950 à 1962, servira de rampe de lancement à plusieurs auteurs. Parmi les 58 collaborateurs de cette émission, mentionnons Yves Thériault, Marcel Dubé, Louis-Georges Carrier, Marcel Cabay, François Moreau, Jacques GODBOUT, Jacques LANGUIRAND, Félix LECLERC et Robert Gadouas. Plus de 320 pièces seront présentées dans le cadre de cette série.

La radio diffuse des pièces québécoises variées, qui vont du drame psychologique au théâtre de rue, en passant par les comédies de genre, la satire sociale, le mélodrame et les oeuvres surréalistes. Selon l'époque et la station, la priorité est donnée à certains genres, mais ce sont dans presque tous les cas des pièces d'auteurs locaux qui soulèvent des problèmes propres au Québec, destinées à un public québécois et écrites dans sa langue. Il s'agit sans contredit d'un théâtre populaire, comme en témoignent les titres de plusieurs de ces émissions.

Durant les années 60, les séries et les radiothéâtres disparaissent des ondes AM. Depuis, les pièces sont présentées presque exclusivement à la télévision. Le dernier bastion du téléthéâtre est le réseau FM de Radio-Canada, avec l'émission « Théâtre du lundi ».

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