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Gordon Lightfoot

Gordon (Meredith) Lightfoot. Auteur-compositeur-interprète, guitariste (Orillia, Ont., 17 novembre 1938). LL.D. h.c. (Trent) 1979. Durant son enfance à Orillia, il chante comme soprano à la radio locale, dans des oratorios et des opérettes et aux festivals Kiwanis.
Gordon Lightfoot
Gordon Lightfoot au Massey Hall

Gordon (Meredith) Lightfoot. Auteur-compositeur-interprète, guitariste (Orillia, Ont., 17 novembre 1938). LL.D. h.c. (Trent) 1979. Durant son enfance à Orillia, il chante comme soprano à la radio locale, dans des oratorios et des opérettes et aux festivals Kiwanis. À l'âge de 13 ans, il se fait entendre à un concert des lauréats de ces festivals au Massey Hall, salle qui sera le théâtre de plusieurs de ses futurs triomphes. Adolescent, il chante dans un quatuor « barbershop », étudie le piano et apprend la batterie en autodidacte. Il étudie aussi l'orchestration de jazz au Westlake College of Modern Music à Los Angeles (1957-1958). De retour au Canada, il fait partie à Toronto (1958-1961) de groupes tels que les Swinging Eight (choristes et danseurs à l'émission de la télévision de la SRC « Country Hoedown ») et les Gino Silvi Singers. Puis il commence à chanter des chansons folkloriques et à jouer de la guitare; en compagnie de Terry Whalen, il forme le duo Two Tones qui se produit dans des cafés du sud de l'Ontario, enregistre le microsillon Two Tones Live at the Village Corner (1962, Chateau CLP-1012) et participe au Festival de folklore Mariposa en 1962. Son enregistrement de « Remember Me » (Chateau) est un succès local.

Après avoir séjourné en Europe, où il anime l'émission de télévision « Country and Western Show » à la BBC pendant l'été 1963, Lightfoot est attiré par le mouvement urbain de musique folk initié par Bob Dylan et d'autres. Il chante dans des cafés et des bars en Ontario, au Québec et dans l'est des États-Unis, et, en 1964, de nouveau au Festival de folklore Mariposa. Bien qu'il ait alors déjà chanté aux États-Unis, Lightfoot y est surtout connu comme auteur-compositeur. Ian and Sylvia (Tyson) sont les premiers à interpréter et à enregistrer ses chansons, tout d'abord « For Lovin' Me » et « Early Morning Rain ». La première de ces chansons connaît un grand succès avec Peter, Paul and Mary, en 1965. Elle est par la suite enregistrée par Chad and Jeremy, les Johnny Mann Singers et quelques autres. « I'm Not Saying », le premier grand succès sur disque de Lightfoot au Canada (1965, Compo), devient populaire aux États-Unis auprès des amateurs de musique country grâce à l'enregistrement de Leroy Van Dyke. Enregistrée par Marty Robbins, « Ribbon of Darkness » (1965) est aussi un succès country. Les disques de Harry Belafonte, Judy Collins, George Hamilton IV (qui enregistre par la suite un microsillon intitulé Lightfoot Country, RCA Cam. CAS-2379, consacré exclusivement aux chansons de Lightfoot), ceux de Richie Havens et du Kingston Trio font aussi connaître ses chansons à de nouveaux publics vers le milieu des années 1960.

Succès dans les marchés de la musique pop et country

Porté par le succès grandissant de ses chansons, Lightfoot chante en 1965 au Festival folklorique de Newport (Rhode Island) ainsi qu'au Town Hall de New York et effectue une tournée en Angleterre avec Ian and Sylvia l'année suivante. Même si le mouvement de musique folk contemporaine - dont il est une figure majeure - perd de sa vitalité pendant un certain temps, Lightfoot passe aisément aux musiques pop et country qui s'adressent à un public plus vaste. À la fin des années 1960 et au début des années 1970, il est le chanteur pop le plus important au Canada.

Le 31 mars 1967, il donne un concert au Massey Hall, où il retourne tous les ans jusqu'en 1984, puis tous les 18 mois par la suite jusqu'en 2001. En 1969, l'un des trois concerts qu'il y donne est enregistré et devient le microsillon Sunday Concert. En 1978, il accomplit l'exploit sans précédent de donner au Massey Hall neuf concerts en autant de soirs - tous à guichets fermés. Il donne jusqu'à quatre concerts lors des saisons subséquentes.

Il se lance brièvement dans une carrière d'acteur en jouant dans le film Harry Tracy en 1983.

Tournées

Lightfoot effectue sa première tournée transcanadienne en 1967 et se produit tous les ans aux États-Unis (avec des séries de concerts à New York et à Los Angeles) ainsi qu'en Angleterre durant les années 1970. Il fait aussi deux tournées en Australie. Il suspend temporairement ses activités de tournées au début de 1972 en raison d'une paralysie faciale partielle de Bell. Au cours des années 1980, il donne une moyenne de 40 à 50 concerts par an, y compris une tournée européenne en 1981, des apparitions tous les deux ans environ dans des grandes salles aux États-Unis et au Canada (comme le Centre national des arts, le Carnegie Hall de New York ou le Symphony Hall de Boston) et des festivals de musique d'été (Ravinia, Wolf Trap, etc.). Ces dernières années, il se produit aussi souvent pour soutenir des causes sociales ou environnementales.

Au cours des années 1990, Lightfoot fait plus de tournées que d'enregistrements; il donne 60 à 70 concerts par année partout en Amérique du Nord jusqu'en 1993, et ce nombre passe à 50 en 1998. En 2002, il se lance dans une tournée de 60 villes, mais le 8 septembre 2002, il souffre d'une hémorragie abdominale grave. Son hospitalisation et sa guérison sont longues; il ne se présente pas sur scène avant le Festival folk Mariposa, où il fait une brève apparition en juillet 2004. En avril 2005, Lightfoot amorce sa première tournée depuis sa maladie, donnant 37 représentations au Canada et aux États-Unis, y compris un retour réussi au Massey Hall.

Autres musiciens

Lightfoot est d'abord accompagné par un autre guitariste (David Rea), puis par un guitariste (Laurice Milton « Red » Shea, 1966-1971, puis Terry Clements) et un guitariste basse (John Stockfish, 1966-1969, puis Rick Haynes) et finalement par un petit ensemble (avec l'arrivée du batteur Barry Keane et de Pee Wee Charles à la guitare à cordes d'acier en 1975). En 2001, il est accompagné par Clements, Haynes, Keane et le claviériste Michael Heffernan. Lightfoot est lui-même un guitariste folk accompli, jouant aussi de la guitare à 12 cordes. La Martin Guitar Company nomme une guitare en son nom en 2001, un privilège dont peuvent se vanter peu de Canadiens.

Enregistrements par Lightfoot et d'autres

Plusieurs de ses disques connaissent un immense succès au Canada : « Spin Spin » (1965), « Bitter Green » (1968), « Summer Side of Life » (1971), « Same Old Obsession » et « You Are What I Am » (1972) ainsi que « Anything for Love » (1986). D'autres connaissent un succès international variable : « If You Could Read My Mind » (1970, repris par Lisa Minnelli, Stars on 54 et Barbra Streisand, entre autres), « Sundown » et « Carefree Highway » vendu à un million d'exemplaires (1974), « Rainy Day People » (1975), « The Wreck of the Edmund Fitzgerald » (1976, ballade inspirée par le naufrage de l'Edmund Fitzgerald dans le lac Supérieur, un navire qui transportait du minerai de fer) et « The Circle is Small » (1978). Lightfoot enregistre aussi « Just Like Tom Thumb's Blues » de Dylan et « Me and Bobby McGee » de Kris Kristofferson, qui ont été populaires au Canada. Au moins trois de ses albums se vendent à plus de 1 million d'exemplaires chacun aux États-Unis : Sundown, Gord's Gold et Summertime Dream. Plusieurs de ses albums sont certifiés platine ou double platine au Canada. Le nombre total d'albums vendus est estimé à plus de 10 millions.

Parmi les autres chansons connues de Lightfoot figurent « Alberta Bound », « Did She Mention My Name? », « Home from the Forest » (enregistrée par Ronnie Hawkins), « I'm Not Supposed to Care », « Last Time I Saw Her », « Minstrel of the Dawn », « Song for a Winter's Night », « Steel Rail Blues » (pour laquelle il reçoit un prix de l'ASCAP en 1966) et « The Way I Feel ». « Canadian Railroad Trilogy », une chanson favorite de son répertoire, raconte la construction du chemin de fer du CP d'un océan à l'autre pendant les années 1880. Commandée par la SRC pour une émission du Centenaire de la Confédération, « 100 Years Young », diffusée le 1er janvier 1967, « Canadian Railroad Trilogy » est un récit chanté en trois parties qui est interprété par le compositeur accompagné par l'orchestre de Ron Collier. Lightfoot en fait figurer des interprétations sur les microsillons The Way I Feel et Sunday Concert. John Arpin et Neil Chotem enregistrent d'autres chansons de Lightfoot dans des arrangements pour orchestre.

Dans les années 1990 et au début des années 2000, Lightfoot enregistre l'album autobiographique Waiting for You (1993), puis A Painter Passing Through (1998) et Harmony (2004), son 20e album original solo. Songbook, un jeu de quatre CD (Rhino Records, 1999), rassemble ses meilleures chansons, auxquelles s'ajoutent quelques pièces inédites. Un spécial télévisé, Gordon Lightfoot: Live in Reno (2000) est présenté aux États-Unis.

Ses chansons sont publiées par M. Witmark, New York, ou par sa propre maison, Early Morning Productions, fondée à Toronto en 1969. Des recueils de paroles et des anthologies sont publiés en même temps que la majorité de ses albums (sauf les rééditions Gord's Gold et Gord's Gold II) par Warner Brothers.

Style et influence de Lightfoot

Le style vocal de Lightfoot est décrit comme « presque celui d'un "crooner" - un style qui atténue et rend acceptables la rhétorique et la sentimentalité inhérentes à la chanson conventionnelle » (Stephen Holden, Rolling Stone, 14 mars 1974). Dans sa recension du microsillon Sundown (Village Voice, 14 février 1974), Geoffrey Stokes note son extraordinaire sensibilité à la souffrance - la sienne et celle des autres - et à la joie... Vulnérable et ouvert, ce qu'il se refusait dans ses premiers textes, Lightfoot parle comme un romantique. Alors que ses premiers enregistrements mettent en valeur sa voix de baryton robuste et attrayante, tout au long des années 1990, sa voix s'estompe peu à peu et se transforme en une voix passablement nasale en raison de l'âge et de l'expérience, valable également dans un contexte folk.

Dans un article paru dans Maclean's, Tom Hopkins observe : « Il réussit indirectement à remplir le rôle le plus honorable du chanteur folk, celui de chroniqueur. Beaucoup des secrets qu'il emmagasine sont ceux de la nation. Des chansons telles que « The Wreck of the Edmund Fitzgerald » et « Canadian Railroad Trilogy » captent l'odeur du pays, en saisissent les textures, de sorte qu'il est devenu, aux yeux de plusieurs, une sorte de Pierre Berton de l'oreille, un codificateur, un scribe et, dans un pays de factions renfrognées et de distances infinies, un lien entre les clans. »

Parmi les Canadiens qui ont enregistré des chansons de Lightfoot, citons Irish Rovers, Sarah McLachlan, John McDermott, Anne Murray, les Rheostatics et Ian Tamblyn. Un album hommage, Beautiful, est lancé en 2003 et, en 2010, le peintre canadien Ian Wallace publie un livre de dessins au pastel illustrant le « Canadian Railroad Trilogy » de Lightfoot.

Reconnaissance

Lightfoot reçoit 15 prix Juno (1965-1978) : à titre de meilleur chanteur folk en 1965, 1966, 1968, 1969, 1974, 1976 et 1977; de meilleur chanteur en 1967, 1970, 1971, 1972 et 1975; en qualité de compositeur de l'année en 1972 et 1976; pour le disque folk de l'année (Old Dan's Records) en 1973. Il est admis au Juno Hall of Fame en 1986. Il est aussi en nomination pour quatre Grammy : meilleure prestation rock (« Did She Mention My Name? ») en 1968; meilleur chanteur pop, rock ou folk (« If You Could Read My Mind ») en 1971; chanson de l'année et meilleur chanteur pop, rock ou folk (« The Wreck of the Edmund Fitzgerald ») en 1976.

Lightfoot est nommé officier de l'Ordre du Canada en 1970 et compagnon de l'Ordre en 2003; il devient membre de l'Ordre de l'Ontario en 1988. Il est cité, avec Anne Murray, comme artiste des années 1970 par l'Association de l'industrie canadienne de l'enregistrement en 1980 et reçoit le trophée William Harold Moon de la SOCAN en 1990. On compte parmi les autres distinctions attribuées à Lightfoot le Prix du gouverneur général pour les arts du spectacle (1997), l'intronisation à l'Ordre du mérite de la radiotélévision canadienne et au Panthéon canadien de musique country (les deux en 2001), un prix Masterworks de l'Audio-Visual Preservation Trust et un Toronto Arts Award pour l'œuvre de toute une vie (2001). Il est intronisé au Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens en 2003.

Discographie

Lightfoot : 1964 (1966); U Artists UAS-6487.

The Way I Feel : 1967; U Artists UAS-6587.

Did She Mention My Name? : 1967; U Artists UAS-6649.

Back Here on Earth : 1968; U Artists UAS-6672.

Sunday Concert : 1969; U Artists UAS-6714.

Best of Gordon Lightfoot : U Artists UAS-6754.

Sit Down Young Stranger : (1970); Rep RS-6392.

Summer Side of Life : 1970-1971; Rep MS-2037.

Classic Lightfoot : (1971); U Artists UAS-5510.

Don Quixote : 1971; Rep MS-2056.

Old Dan's Records : 1972; Rep MS-2116.

Sundown : 1973; Rep MS-2177.

Cold on the Shoulder : 1974; Rep MS-2206.

Summertime Dream : (1976); Rep MS-2246.

Endless Wire : 1976; Warner KBS-3149.

Dream Street Rose : (1980); Warner XHS-3426.

Shadows : (1982); Warner XBS-3633.

Salute : (1983); Warner 92-39014

East of Midnight : 1984-1986; Warner 92-54821.

Harmony : 2004; Linus Entertainment 801442 2.

Aussi les anthologies Gord's Gold (1975, 2-Rep 2RS-2237) et Gord's Gold Volume II (1988, Warner 92-57841), qui reprennent la plupart des grands succès de Lightfoot.

Bibliographie

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Marjorie HARRIS, « Gordon Lightfoot », Maclean's (sept. 1968).

Robert MARKLE, « Early morning afterthoughts », ibid. (déc. 1971).

Penelope ROSS, « Le Chansonnier anglophone le mieux connu du Canada parle de sa musique », Compositeurs canadiens, 99 (mars 1975).

Robert MARKLE, « Knowing Lightfoot », The Canadian (16 avril 1977).

Larry LeBLANC, « Lightfoot on the record », The City du Toronto Star (2 avril 1978).

Tom HOPKINS, « Gordon's song », Maclean's (1er mai 1978).

Alfrieda GABIOU, Gordon Lightfoot (Toronto 1979).

Liam LACEY, « For Gordon Lightfoot, top 40 radio is the brass ring », Globe and Mail (Toronto, 12 mars 1983).

« Gordon Lightfoot : vingt-cinq ans déjà »(interview accordée à Murray McLAUGHLAN), Compositeurs canadiens, 214 (oct. 1986).

Brian D. JOHNSON, « A troubadour's tracks into the heartland », Maclean's (16 mars 1987).

Maynard COLLINS, Lightfoot: If You Could Read His Mind (Toronto 1988).

Adria MARCO, « The Myth of Gordon Lightfoot », Music of our Times(Toronto 1990).

Douglas FETHERLING, Someday Soon: Essays on Canadian Songwriters (Toronto 1991).

John P. MCLAUGHLIN, « Pitching Lightfoot in Music City », Country (mai 1998).

Nick KREWEN, « The genius of Lightfoot on new Rhino anthology », The Record (5 juillet 1999).

« Gordon Lightfoot's Country songs », Country Music News (septembre 2001).

« Lightfoot undergoes emergency surgery », Ottawa Citizen (9 sept. 2002).

Bernard HEYDORN, « The comeback from death's door », Toronto Star (19 avril 2003).

Guy DIXON, « Recovering Lightfoot celebrated at gala induction », Globe and Mail (4 déc. 2003).

Richard FLOHIL, « Linus Entertainment: A growing indie label signs the legendary Gordon Lightfoot », Applaud! Canadian Music on the World Stage (avril 2004).

Music of
Gordon Lightfoot