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Hochelaga

Historiquement, le terme « Hochelaga » désigne un village autochtone que l’explorateur français Jacques Cartier (1491-1557) a visité le dimanche 3 octobre 1535, lors de son deuxième voyage en ce qui est aujourd’hui le Québec (1535-1536). Hochelaga est un terme iroquoien qui serait soit une variante du mot osekare signifiant « sentier des castors », ou du mot osheaga qui veut dire « gros rapides ». Aujourd’hui, le mot désigne des îles au confluent de fleuve Saint-Laurent et de la rivière des Outaouais, ainsi que divers arrondissements et circonscriptions électorales.
Hochelaga
Dans cette \u0153uvre de Giovanni Battista Ramusio, on voit Jacques Cartier et ses hommes être accueillis à l'entrée du village d'Hochelaga
Hochelaga
Maquette historique du village d'Hochelaga, créé à partir de trouvailles et d'interprétations archéologiques.

Origine

Hochelaga est un terme iroquoien qui serait soit une variante du mot osekare signifiant « sentier des castors », ou du mot osheaga qui veut dire « gros rapides ». Les Européens utilisent le terme pour désigner le village autochtone que l’explorateur français Jacques Cartier (1491-1557) visite le dimanche 3 octobre 1535, lors de son deuxième voyage en ce qui est aujourd’hui le Québec (1535-1536). Ce jour-là, il accoste avec son équipage aux courants Sainte-Marie, aux alentours de l’emplacement actuel du port de Montréal. Selon le célèbre explorateur, le village d’Hochelaga se trouve à l’intérieur de l’île de Montréal à « envyron une lieue et demye » du point d’accostage (environ 8 kilomètres) et se situe au milieu de champs de maïs qui avoisinent le mont Royal. En plus d’employer le terme Hochelaga pour désigner le village autochtone, Cartier utilise également ce toponyme pour nommer le fleuve Saint-Laurent dans la deuxième relation (rivière Hochelaga) et la région de Montréal dans la troisième relation (pays d’Hochelaga).

LE SAVIEZ-VOUS?
Pendant son deuxième voyage en 1535, Jacques Cartier visite aussi Stadacona, un autre village iroquois situé là où l’on trouve aujourd’hui la ville de Québec.

Description historique

Selon Cartier, le village d’Hochelaga montre une forme arrondie et compte une cinquantaine de maisons. Ces habitations mesurent « envyron cinquante pas chacune et douze ou quinze pas de laize » (environ 15 m par 3,5 à 4,5 m) et sont construites en bois et recouvertes de grandes écorces cousues. Le village est entouré d’une palissade formée de trois rangées de pieux de bois fichés dans le sol, d’une hauteur de 33 pieds (environ 10 mètres) et entrelacées les unes dans les autres à l’aide de pans d’écorces et de grands arbres. Cartier constate aussi la présence de galeries au-dessus de l’entrée unique du village, mais également le long de l’ouvrage de fortification où l’on empile des cailloux et des roches qui permettent une défense active contre les envahisseurs. On retrouve aussi une place au centre du village où Cartier passe le plus clair de son temps lors de sa visite de quelques heures à Hochelaga.

Cartier décrit sommairement l’intérieur des maisons, mentionnant simplement la présence de nombreuses chambres qui divisent le plancher d’occupation et soulignant l’existence d’un espace central de socialisation où l’on peut allumer un feu. L’étage supérieur des maisons sert de grenier pour conserver la nourriture et l’on retrouve des récipients sur le sol pour entreposer le poisson fumé. Cette description et les recherches archéologiques sur les sites Mandeville et Lanoraie à Tracy et ceux de la région de Saint-Anicet, soit les sites Droulers, McDonald et Mailhot-Curran, nous laissent croire que le village d’Hochelaga est vraisemblablement relié à l’occupation de la région par les Iroquoiens du Saint-Laurent, un groupe d’horticulteurs sédentaires autochtones qui peuple la vallée du fleuve entre les années 1200 et 1600 de notre ère.

Lorsque Samuel de Champlain voyage dans la région en 1603, le village et les habitants d’Hochelaga ont disparu, possiblement en raison de maladies transmises par les Européens, de guerres de conquête initiées par d’autres groupes autochtones, ou du contrôle des routes de traite avec les Européens.

Mythe ou réalité?

Jusqu’à ce jour, aucun vestige de l’ancien village d’Hochelaga n’a été retrouvé, et la seule source fiable qui documente son existence provient d’un document rédigé vraisemblablement par Jacques Cartier suite à son deuxième voyage (1535-1536). Présentée à François 1er, roi de France, la version imprimée en 1545 porte le titre de Brief recit & fuccincte narration, de la nauigation faicte es yiles de Canada, Hochelage & Saguenay & autres, auec particulieres meurs, langaige, & cerimonies des habitans d’icelles: fort delectable â veoir.

Il existe également un plan détaillé de l’ancien village dressé quelques années plus tard par Giacomo Gastaldi (1500-1566), qui figure dans l’ouvrage du Vénitien Battista Ramusio (1485-1557) intitulé Delle Navigationi et viaggi. Toutefois, selon les relations d’autres missionnaires et explorateurs et les résultats des fouilles archéologiques menées sur d’autres villages iroquoiens de la même période, ce plan, qui se base en partie sur la description de Cartier, est peu réaliste. En effet, plusieurs détails, tels que la présence d’une place centrale de forme carrée et surtout la régularité dans la disposition des habitations, sont biaisés et trahissent la vision européenne de l’urbanisme qui avait cours pendant la renaissance italienne.

Autre fait curieux, Cartier ne mentionne que la présence d’un seul feu dans une des pièces située au centre de la maisonnée, tandis que les maisons longues typiques de cette période recèlent plutôt un alignement de plusieurs feux qui s’étire le long d’un long corridor central. Pour rajouter au manque de clarté, à l’occasion de son troisième voyage (1541-1542) qui l’amène encore à visiter l’île de Montréal, Cartier ne mentionne d’aucune façon l’existence d’Hochelaga, mais fait plutôt référence à la présence d’un village appelé Tutonaguy. Ce dernier se trouve dans le même secteur que le village d’Hochelaga décrit antérieurement par Cartier, ce qui porte à croire que Tutonaguy pourrait correspondre au nom utilisé par les Autochtones pour désigner l’endroit. Le terme Hochelaga, quant à lui, désignerait plutôt la région de Montréal ou même le peuple qui habite cette même région. Toutefois, puisqu’une partie importante du manuscrit original de la troisième relation de Cartier manque, il reste difficile de bien démêler le tout.

Ainsi, dans la pratique, la description que nous livre Jacques Cartier du village d’Hochelaga demeure plus ou moins fidèle à la réalité ethnographique que nous connaissons des villages iroquoiens de cette période. Il faut toutefois se rappeler que Cartier est avant tout un marin qui voyage principalement pour des fins commerciales. Conséquemment, ses écrits s’attardent plutôt à relater les caractéristiques de la géographie physique et les mœurs des habitants pour être en mesure de documenter et d’anticiper les embûches qui pourraient survenir lors d’une exploitation des ressources locales par les Français.

Patrimoine

Bien que la localisation exacte du village d’Hochelaga demeure inconnue, celui-ci a été désigné lieu historique national en 1920 et une plaque commémorative a été érigée près de l’entrée principale de l’Université McGill, sur la rue Sherbrooke à Montréal.

Aujourd’hui, le terme Hochelaga désigne également un groupe de 234 îles, situées au confluent du fleuve Saint-Laurent et de la rivière des Outaouais (l’archipel d’Hochelaga), un arrondissement de la ville de Montréal (Hochelaga-Maisonneuve), des circonscriptions électorales provinciale (Hochelaga-Maisonneuve) et fédérale (Hochelaga) ainsi qu’une rue et un parc de la ville de Montréal.

En 2017, François Girard écrit et réalise Hochelaga, terre des âmes, un film de fiction historique qui lie l’histoire d’Hochelaga à celle du Québec contemporain. Projeté au Festival international du film de Toronto, Hochelaga, terre des âmes remporte quatre prix Écrans canadiens et représente le Canada dans la catégorie Meilleur film en langue étrangère aux Academy Awards.

Lecture supplémentaire

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