André Laurendeau | l'Encyclopédie Canadienne

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André Laurendeau

Joseph-Edmond-André Laurendeau, journaliste canadien-français, homme politique, auteur de pièces de théâtre et codirecteur de la Commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme (né le 21 mars 1912 à Montréal, au Québec; décédé le 1er juin 1968 à Ottawa, au Québec). Nationaliste canadien-français de longue date, André Laurendeau a aidé à ouvrir la voie à la Révolution tranquille en redéfinissant les aspirations nationalistes propres à une société urbaine et industrielle.

Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le   biculturalism

André Laurendeau (gauche) and Davidson Dunton (droit), coprésidents de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme.

Contexte et débuts militants

André Laurendeau naît à Montréal de l’union entre le professeur de musique Arthur Laureandeau et de la pianiste Blanche Hardy. Après avoir terminé son cours classique au Collège Saint-Marie de Montréal, il s’inscrit comme stagiaire en littérature et en histoire à l’Université de Montréal. C’est là que l’abbé Lionel Groulx, éminent intellectuel, le prend sous son aile.

Au début des années 1930, André Laurendeau s’associe brièvement à un groupe de jeunes intellectuels nationalistes, Jeune-Canada. Le groupe, toutefois, promeut ouvertement des propos antisémites tout en niant la persécution des juifs en Allemagne nazie. Ce n’est qu’en 1962 qu’André Laurendeau avoue publiquement, dans un article du Devoir, son rôle dans Jeune-Canada et qu’il renonce à ses opinions antisémites.

En 1935, André Laurendeau entame un séjour de deux ans en France, où il fréquente la Sorbonne, le Collège de France et l’Institut catholique. Ses fréquentations européennes l’amènent à adhérer au catholicisme social et au personnalisme d’Emmanuel Mounier, de Jacques Maritain et d’Étienne Gilson.

De retour au Canada, André Laurendeau remet en question le concept d’indépendance politique pour le peuple canadien-français. Il est en effet déterminé à réorienter le nationalisme canadien-français vers des enjeux socio-économiques.

De 1934 à 1942, il est contributeur, puis rédacteur en chef de l’Action nationale, dans lequel il milite pour le nationalisme canadien-français.

Carrière politique

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, André Laurendeau s’associe à d’autres nationalistes pour fonder la Ligue pour la défense du Canada. La Ligue milite contre la conscription lors du référendum d’avril 1942 du premier ministre Mackenzie King. La Ligue remporte son pari  : plus de 80 % des Canadiens français votent « non ». 

Le succès de la Ligue donne lieu, à l’automne 1942, à la création d’un troisième parti politique nationaliste, le Bloc populaire. Le Bloc s’oppose à la conscription et exige une plus grande égalité pour les francophones dans le régime fédéral. André Laurendeau en obtient la direction provinciale en février 1944. Il est l’un des quatre candidats de ce parti élus à l’Assemblée nationale la même année. Il dénonce les politiques centralisatrices fédérales en matière d’économie et d’affaires sociales. Il somme donc le gouvernement de l’Union nationale de Maurice Duplessis de mettre en œuvre les réformes socio-économiques qui s’imposent depuis trop longtemps pour permettre au Québec d’assumer son autonomie.

Carrière d’éditeur

En septembre 1947, André Laurendeau quitte le poste de chef du Bloc populaire et, à l’invitation de son ami Gérard Filion, rédacteur en chef du journal Le Devoir, se joint au service de la rédaction de ce quotidien. Il en devient à son tour le rédacteur en chef en 1958, poste qu’il occupera jusqu’à sa mort subite en 1968. Entre 1948 et 1954, il reprend aussi les rênes de L’Action nationale, publication à laquelle il donne une nouvelle orientation qui lui vaut d’intéresser une nouvelle génération de lecteurs et de collaborateurs.

Fort de l’appui de ses collègues nationalistes Gérard Filion, Jean-Marc Léger et Pierre Laporte, il se bat contre le régime Duplessis, aux valeurs politiques et sociales rétrogrades. Le groupe fait du Devoir un véhicule de critique efficace. André Laurendeau inspire ainsi une nouvelle définition du nationalisme canadien-français qui reflète les problèmes et les aspirations d’une société devenue extrêmement urbaine et industrialisée. Cette forme de néonationalisme est reprise par le Parti libéral du Québec de Jean Lesage lors des élections provinciales de 1960 qui chassent l’Union nationale du pouvoir.

En plus de ses autres accomplissements, André Laurendeau est une personnalité de la radio et de la télévision. Il rédige des articles, des séries dramatiques pour la télévision, la pièce de théâtre Deux femmes terribles (1961) et un roman, Une vie d’enfer (1965).

Commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme

Craignant les conséquences sociales et politiques de la montée du séparatisme au Québec au début des années 1960, André Laurendeau demande aux gouvernements Diefenbaker et Pearson de mener une enquête au sujet des différends qui opposent Québec et Ottawa. Le premier ministre Pearson répond à sa demande en formant la Commission B. B. en 1963, coprésidée par Laurendeau et Davidson Dunton. André Laurendeau poursuit inexorablement la lutte jusqu’en 1968, mais finit par céder au désespoir, convaincu qu’il ne parviendra jamais à faire modifier la Constitution de manière à assurer la reconnaissance des droits de la majorité canadienne-française du Québec et des minorités francophones des autres provinces.

Les autres commissaires, qui reflètent les appréhensions qui déchirent le Canada tout entier, ne réussissent pas à composer avec les conséquences éventuelles d’une politique officielle de bilinguisme et de multiculturalisme. Conséquemment, la parution du dernier volume du rapport de la Commission est annulée. Ces événements font toutefois prendre conscience de la problématique et amènent le gouvernement fédéral à adopter la Loi sur les langues officielles en 1969, laquelle confère des droits linguistiques aux Canadiens français. Cependant, André Laurendeau ne vit pas assez longtemps pour voir la mise en place du bilinguisme officiel au Canada; il meurt à Ottawa en 1968, à l’âge de 56 ans. (Voir aussi Biculturalisme.)

Honneurs

  • Membre, Société royale du Canada
  • Membre, Académie canadienne-française

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