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Science

La science, étude rationnelle de la nature, commence à occuper une place importante en Europe à la même époque que l'EXPLORATION par les Européens de ce qui est aujourd'hui le Canada. Dès le début, elle fait partie intégrante de ces explorations.

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La science, étude rationnelle de la nature, commence à occuper une place importante en Europe à la même époque que l'EXPLORATION par les Européens de ce qui est aujourd'hui le Canada. Dès le début, elle fait partie intégrante de ces explorations. Depuis l'époque de John CABOT, la navigation scientifique et la GÉOGRAPHIE sont considérées essentielles pour atteindre et explorer la colonie. Au XIXe siècle, et plus particulièrement au XXe siècle, la science, liée de plus en plus à la TECHNOLOGIE, joue un rôle de premier plan dans la vie et la culture canadiennes en constituant le fondement de la richesse et du bien-être du pays.

Au Canada, les applications pratiques de la science ont toujours tenu le haut du pavé. Depuis la découverte du pays, des observateurs scientifiques notent et répertorient ses RESSOURCES naturelles. Les missionnaires jésuites, premier groupe organisé ayant à la fois une formation scientifique et un intérêt pour la nature, expédient en Europe des rapports sur les nouveaux territoires (voir RELATIONS DES JÉSUITES). À partir du milieu du XVIIe siècle, ils enseignent la science générale au Québec et forment des navigateurs.

Pendant le siècle suivant, l'intérêt des jésuites pour la science est partagé par les autorités civiles et militaires. Les physiciens J.F. GAULTIER et Michel SARRAZIN, tout comme le marquis de la Galissonière et l'ingénieur Michel Chartier de Lotbinière font des incursions en BOTANIQUE et en GÉOLOGIE, mais leurs contributions restent mineures. Après 1759, seule l'éducation inspirée par les jésuites perdure. Des visiteurs étrangers tels Pehr KALM, André Michaux, le capitaine John PALLISER et J.J. Bigsby, étudient la géologie, la botanique et la ZOOLOGIE du Canada jusqu'au milieu du XIXe siècle. Le développement d'une science authentiquement canadienne ne voit le jour qu'au début du XIXe siècle avec la création des collèges, des organismes gouvernementaux et des expéditions financées localement.

Certains militaires britanniques comme Adam Henry Bayfield, le lieutenant Frederick Baddeley, le capitaine Richard Bonnycastle, le lieutenant Edward Ashe et le capitaine John Lefroy, grâce à leur goût pour la science contribuent à son avancée. Pendant la seconde moitié du siècle, lorsque la présence militaire britannique diminue au pays, des professionnels et des amateurs canadiens, nés et éduqués au pays, succèdent aux militaires et donnent à la science canadienne son identité propre. La science canadienne moderne prend forme pendant le dernier quart du siècle. Elle se développe plus lentement qu'aux États-Unis et, bien que les sciences des deux pays soient semblables à plusieurs égards, elles restent essentiellement distinctes. L'une des plus grandes différences, qui conserve aujourd'hui tout son effet, reste l'implication du gouvernement dans la science canadienne.

Participation du gouvernement

Le Canada étant peu peuplé et possédant peu d'universités et d'industries, le gouvernement appuie la science depuis longtemps. En 1842, la PROVINCE DU CANADA inaugure cette tradition en créant la COMMISSION GÉOLOGIQUE DU CANADA , dirigée par le Montréalais William (plus tard sir William) LOGAN. Modelée sur les commissions géologiques de la Grande-Bretagne et des États-Unis, elle est conçue comme une entreprise temporaire visant la découverte de MINÉRAUX à valeur commerciale. Cependant, grâce à l'immense étendue du Canada et à l'habileté de Logan, de ses collègues et de ses successeurs, la commission existe encore. Elle constitue la deuxième commission géologique nationale au monde au chapitre de l'ancienneté et l'une de celles qui se distinguent le plus.

Si les explorations de la commission se limitent officiellement au Haut-Canada et au Bas-Canada, l'adjoint de Logan, Alexander Murray, plus tard géologue provincial de Terre-Neuve, et ses correspondants dans les Maritimes, notamment Charles Hartt et G.F. Matthew, de Saint-Jean, ainsi que James Robb et Loring BAILEY, de Fredericton, jettent, avant la Confédération, les bases d'une étude systématique de la géologie du Canada. Après 1867, la Commission est chargée de l'exploration de presque tous les territoires composant désormais le pays. Plusieurs directeurs visionnaires, comme A.R.C. SELWYN.

George M. DAWSON, Albert P. LOW et Reginald Brock, entretiennent la croissance de la Commission, qui devient un important organisme aux intérêts divers. Les collections de la Commission, tout d'abord exposées dans la maison de Logan, augmentent pour constituer le Musée national (aujourd'hui MUSÉE CANADIEN DE LA NATURE) vers la fin du XIXe siècle. Les aspects économiques de la géologie entraînent la création de divers organismes tels le ministère fédéral des Mines (1907). Certaines provinces passent plus tôt à l'action. Ainsi, la Nouvelle-Écosse nomme un commissaire aux Mines avant la Confédération, et l'Ontario institué un bureau des Mines en 1891. Au tournant du siècle, la plupart des provinces conservent les bureaux gouvernementaux consacrés à l'EXPLOITATION MINIÈRE.

L'une des seules initiatives du gouvernement de l'Empire britannique en matière scientifique est la création du Toronto Magnetic Observatory (1840), qui constitue l'un des maillons d'une chaîne d'institutions consacrées à l'étude du géomagnétisme dans le monde. Lorsque le support britannique est retiré, en 1853, le gouvernement provincial prend la relève. Le petit OBSERVATOIRE astronomique du Québec est conçu en 1850 et construit en 1854 afin de fournir aux navigateurs l'HEURE exacte. Dans les années 1870, les petits observatoires de Saint-Jean, de Montréal et de Kingston sont fusionnés à celui de Toronto par le ministère fédéral de la Marine et des Pêcheries pour former le Service météorologique du Canada, devenu le Service de l'environnement atmosphérique (voir CLIMATOLOGIE). Dans les années 1880, le ministère de l'Intérieur pratique l'ASTRONOMIE dans le cadre des relevés effectués en vue de la construction d'un chemin de fer transcontinental. La nécessité d'un observatoire permanent, où seraient effectués des travaux de géographie et le calcul de l'heure, mène à l'ouverture de l'Observatoire fédéral d'Ottawa (1905). En plus de constituer un important centre d'astronomie, cet observatoire est le berceau de l'astrophysique canadienne grâce à J.S. PLASKETT et à ses collaborateurs. En 1918, les efforts de Plaskett mènent à la fondation de l'Observatoire fédéral d'astrophysique, qui détient pour quelque temps le plus grand télescope au monde. Il demeure l'un des centres d'astrophysique les plus importants au monde.

Le plus souvent, les programmes scientifiques du gouvernement fédéral découlent de considérations pratiques et économiques. L'AGRICULTURE, capitale dans le contexte économique du XIXe siècle, est encouragée en 1886 par la fondation à Ottawa de la Ferme expérimentale centrale, mise sous la direction de William SAUNDERS (voir AGRICULTURE, STATIONS DE RECHERCHE EN). Son personnel, qui comprend notamment le céréaliste, l'entomologiste et le chimiste du dominion, est à l'origine de nouvelles variétés de CULTURES et de nouveaux moyens de lutte contre les animaux nuisibles. La ferme expérimentale inaugure peu après des succursales aux quatre coins du pays. Depuis le début du siècle, le personnel de recherche du ministère de l'Agriculture perpétue les traditions établies par des pionniers de la recherche comme John MACOUN, William et Charles SAUNDERS, C.J.S. BETHUNE et Frank Shutt.

Au milieu du XIXe siècle, les études de Pierre FORTIN sur la pêche dans le golfe du Saint-Laurent marquent le début de la participation du gouvernement à la recherche zoologique. La station de biologie marine de St. Andrew's (Nouveau-Brunswick), dirigée par E.E. PRINCE, fonctionne déjà en 1899. De nombreuses autres stations marines sont ensuite fondées (voir OCÉANOGRAPHIE). L'Office de biologie du Canada, constitué en 1912, s'intéresse de près à ces recherches. En 1937, il devient l'Office des recherches sur les pêcheries. La COMMISSION DE LA CONSERVATION, instituée en 1909 et dissoute en 1921, examine plus globalement le patrimoine naturel canadien. De nos jours, les organismes gouvernementaux s'intéressant aux sciences naturelles, regroupés pour la plupart au sein des ministères de l'Environnement et de l'Agriculture, absorbent la plus grande partie du budget scientifique fédéral.

L'initiative la plus importante que le gouvernement fédéral ait prise dans le domaine de la science est la création, en 1916, du Conseil consultatif honoraire des recherches scientifiques et industrielles, semblable au conseil consultatif britannique sur la science en temps de guerre. Il devient bientôt le CONSEIL NATIONAL DE RECHERCHES DU CANADA (CNRC). En 1932, ayant acquis ses propres laboratoires de recherche industrielle, le CNRC, dirigé par des hommes comme H.M. TORY, C.J. MACKENZIE et E.W.R. STEACIE, se développe rapidement et devient l'un des organismes de recherche gouvernementaux les plus diversifiés et les plus féconds du monde. Avant la Deuxième Guerre mondiale, il se consacre surtout à la RECHERCHE ET AU DÉVELOPPEMENT INDUSTRIELS, mais après la guerre, son effectif ayant été multiplié par 10, le CNRC se lance dans de nombreux nouveaux domaines comme la technologie RADAR, l'ÉNERGIE NUCLÉAIRE, l'aéronautique et la radioastronomie (voir DÉFENSE, RECHERCHES POUR LA DÉFENSE). Les recherches en sciences pures y occupent toujours une place majeure et complètent les recherches appliquées sur les TRANSPORTS, les milieux nordiques, l'ÉNERGIE, les techniques du bâtiment, la science des matériaux et la CHIMIE.

Outre ses travaux expérimentaux, le CNRC reste l'un des principaux organismes d'aide à la recherche universitaire par ses subventions et ses bourses d'étude et de recherche. Totalisant modestement 13 000 $ en 1918, ses subventions représentent près de 70 millions de dollars par année au début des années 70. Depuis quelques années, les subventions pour la recherche et l'éducation en sciences sont accordées par le CONSEIL DE RECHERCHES EN SCIENCES NATURELLES ET EN GÉNIE du Canada et par le CONSEIL DE RECHERCHES MÉDICALES.

Depuis 1945, d'autres organismes gouvernementaux, comme le Conseil de recherches pour la défense et les ministères de la Défense nationale, des Communications et des Transports, jouent un rôle de plus en plus important dans la science canadienne. L'un des établissements du CNRC en temps de guerre, le centre de recherches nucléaires de CHALK RIVER (Ontario), devient ÉNERGIE ATOMIQUE DU CANADA LIMITÉE (1952), société de la Couronne qui, en collaboration avec HYDRO ONTARIO, l'un des chefs de file en technologie électrique depuis le début du siècle, met au point le réacteur CANDU . Ce réacteur fonctionne à l'aide d'eau lourde et d'uranium canadiens. Une autre société de la Couronne, la Société Polymer Limitée, joue un rôle de premier plan dans l'INDUSTRIE PÉTROCHIMIQUE. Les provinces contribuent également à la science. Depuis la fondation de l'ALBERTA RESEARCH COUNCIL (1919) et de la FONDATION DE RECHERCHES DE L'ONTARIO (1928), presque toutes créent des organismes semblables au CNRC, quoiqu'avec des moyens plus modestes (voir RECHERCHE, ORGANISMES PROVINCIAUX DE).

Éducation

À ses débuts, l'ÉDUCATION canadienne est entre les mains de l'Église ou des particuliers et, si tous les programmes font une place aux MATHÉMATIQUES élémentaires, les cours de sciences restent rares. À partir de 1840, les écoles subventionnées par les provinces n'inculquent que peu de notions scientifiques à leurs élèves. Vers la fin du XIXe siècle, on pense que seule l'histoire naturelle doit être enseignée aux enfants, considérés inaptes à saisir toute la complexité des sciences physiques. Également répandue en Grande-Bretagne et aux États-Unis, cette opinion a presque survécu jusqu'à nos jours. Les études en biologie, complétées par des études de l'environnement, demeurent au coeur de la science élémentaire. Les écoles secondaires de l'Ontario (voir ENSEIGNEMENT SECONDAIRE) ouvrent la marche en offrant des cours de sciences préparant aux examens d'admission à l'université.

Les collèges classiques du Québec, dirigés par le clergé, suivent la pratique française de l'époque en n'enseignant les sciences qu'à un nombre restreint d'étudiants et seulement pendant leurs deux dernières années d'études. À partir du milieu du XIXe siècle, la formation scientifique de l'étudiant francophone équivaut à celle d'un étudiant anglophone d'un programme collégial de trois ou quatre ans. Cependant, les cours du Québec n'ont pas évolué et l'écart entre l'enseignement des sciences aux francophones et celui aux anglophones n'a cessé de croître. L'insatisfaction ressentie dans les universités subventionnées par l'État et le conservatisme des collèges dirigés par le clergé suscitent un grand débat à la fin des années 20 et au début des années 30, mené, du côté scientifique, par le frère MARIE-VICTORIN, biologiste à l'U. de Montréal, et par le chimiste Adrien Pouliot, de l'U. Laval. Les progrès sont lents; la science n'est pleinement admise au secondaire au Québec que dans les années 60.

Dans les universités canadiennes, l'enseignement des sciences est un mélange d'éléments empruntés pour la plupart aux Écossais et aux Américains. À partir de leur fondation jusqu'au début du XXe siècle, la plupart des petits collèges d'arts libéraux offrent des cours de sciences dans le cadre de leur formation générale. Pendant la majeure partie du siècle, on invoque deux raisons pour justifier l'enseignement des sciences : la science familiarise l'étudiant avec le raisonnement logique et elle lui dévoile les merveilles de la Création. On songe peu à la formation de scientifiques, et les Canadiens qui le deviennent étudient pour la plupart à l'étranger (habituellement en Allemagne ou aux États-Unis) ou encore entreprennent une formation autodidacte avec l'aide de professeurs compréhensifs. Cependant, l'état de la science est tel que les travaux pratiques en géologie, en botanique ou en zoologie exigent beaucoup moins de formation qu'un siècle plus tard. Habituellement, deux professeurs, l'un d'histoire naturelle et de géologie, l'autre de PHYSIQUE, de chimie et peut-être d'astronomie, embrassent toute la science. Les travaux en laboratoire ne voient le jour qu'au début du siècle.

Au XIXe siècle, les quelques universités qui offrent des cours de sciences approfondis sont celles dotées d'une faculté de GÉNIE ou de médecine. L'U. McGill, l'U. de Toronto et, dans une certaine mesure, l'U. Dalhousie, l'U. du Nouveau-Brunswick et l'U. Queen's forment des scientifiques et engagent les plus réputés. Vers la fin de ce siècle, l'U. McGill, sous la direction du paléontologue sir William Dawson, et l'U. de Toronto, sous la direction du physicien James LOUDON, abandonnent la tradition de la formation générale pour mettre l'accent sur une éducation à vocation plus professionnelle.

Cette modernisation comporte la création de diplômes spécialisés (Baccalauréat ès sciences, B.Sc.) et de laboratoires de recherche en chimie, en physique, en biologie et en génie, l'augmentation du personnel et l'adoption du doctorat (Ph.D.). Le doctorat ès sciences, inventé plus tôt par les Allemands, exige de la part de l'étudiant des recherches innovatrices plutôt que la préparation d'examens. Les établissements américains adoptent les programmes de doctorat dès 1876, mais Toronto ne décerne son premier qu'en 1900, à J.C. MCLENNAN. L'U. McGill suit bientôt, rapidement imitée par d'autres universités comme l'U. Queen's, qui offre des cours de génie depuis les années 1890. Dans la plupart des cas, le coût élevé de cette modernisation est financé par les gouvernements provinciaux, impatients de récolter les bénéfices économiques de la formation scientifique. L'U. McGill, qui bénéficie de la générosité de Peter Redpath et de sir William C. MACDONALD, est en mesure de mettre en place d'excellents laboratoires et, dès lors, d'attirer une nouvelle génération de scientifiques. Parmi eux, Ernest RUTHERFORD, Frederick Soddy et Otto Hann deviendront de véritables vedettes internationales après leurs études au Canada.

Malgré le manque de financement, de manuels, de laboratoires et d'étudiants chercheurs et le manque de compréhension de la part des comités collégiaux et des législatures provinciales, plusieurs professeurs se distinguent par leurs recherches. Parmi eux, on trouve, à l'U. du Nouveau-Brunswick, James Robb, spécialiste en histoire naturelle, L.W. Bailey, biologiste et géologue et W.B. JACK, astronome; à l'U. McGill, William Dawson et Frank ADAMS, géologues, ainsi que J.F. Whiteaves, biologiste; à l'U. Queen's, Nathan Dupuis, mathématicien et George LAWSON, botaniste (qui s'installe plus tard à l'U. Dalhousie); et, à l'U. de Toronto, le chimiste Henry Croft. Pour la plupart autodidactes, ces scientifiques sont suivis d'une génération mieux formée, laquelle élabore les fondements du système actuel d'enseignement des sciences.

Dans les collèges et les universités du pays, la science connaît une lente évolution, passant de la formation générale à un système orienté vers la recherche. H.M. Tory, mathématicien et physicien à l'U. McGill et plus tard président du CNRC, exerce une forte influence dans l'Ouest. Il est non seulement un grand bâtisseur d'institutions de l'entre-deux-guerres, mais aussi un homme convaincu de l'importance de la science dans les universités. Les établissements de l'Ouest attirent ainsi du personnel de premier ordre tel le physicien Gordon Shrum (collaborateur de sir John McLennan, à Toronto), à l'U. de la Colombie-Britannique, le chimiste John SPINKS et l'astrophysicien Gerhard HERZBERG , à l'U. de la Saskatchewan ainsi que le physicien R.W. BOYLE, à l'U. de l'Alberta.

La fin de la Deuxième Guerre mondiale apporte une forte augmentation du nombre d'étudiants en raison de la disponibilité de nombreux jeunes scientifiques ayant participé à l'effort de guerre et d'une hausse des subventions gouvernementales. La science universitaire entre dans une nouvelle ère, où l'on voit l'agrandissement des facultés, la création de nouvelles spécialités et la construction de nouvelles installations. À partir des années 60, on porte une grande attention à l'importance de la science dans la société. Les plus anciennes institutions deviennent des centres d'excellence : l'U. Western Ontario se distingue par ses recherches biomédicales, la SPECTROSCOPIE et l'astronomie; l'U. McMaster par le nucléaire et le génie; l'U. du Manitoba par les sciences de l'agriculture et la biologie. Parallèlement, dans les années 60 et 70, l'augmentation en flèche du nombre d'étudiants et un intérêt accru pour les études supérieures suscitent la fondation de nouvelles universités se distinguant dès le départ par leur spécialisation scientifique (p. ex. l'U. York en biologie et en recherche spatiale, l'U. de Waterloo en INFORMATIQUE et en génie, et l'U. de Victoria en physique).

Au Canada français, l'indifférence relative manifestée à l'égard de la science en tant que profession retarde le passage à une science moderne axée sur les travaux en laboratoire. En 1910, Laval fonde une école de FORESTERIE et, 10 ans plus tard, l'École supérieure de chimie. À la même époque, l'U. de Montréal devient indépendante de Laval et inaugure sa faculté des sciences. L'École polytechnique de Montréal, fondée avec peu de moyens en 1873 par U.E. Archambault, s'associe à la nouvelle université en tant que faculté de génie. Ce n'est que dans les années 60 que se produit un réel développement en ce qui a trait aux installations, aux facultés et au nombre d'étudiants. Toutefois, même à la fin des années 60, l'U. McGill décerne près de deux fois plus de doctorats et de baccalauréats en sciences que l'U. Laval et l'U. de Montréal réunies.

Organisations scientifiques

La multiplication des associations, des institutions et des publications scientifiques se fait de façon unique à cause de la nature du gouvernement, de l'éducation, de l'hétérogénéité de la population et de sa répartition ainsi que des structures économiques du pays. Les associations professionnelles mettent du temps à apparaître, car les organismes qui les précèdent s'adressent surtout aux amateurs et à ceux pour qui la science représente un divertissement culturel ou un passe-temps. La première de ces associations, la SOCIÉTÉ LITTÉRAIRE ET HISTORIQUE DE QUÉBEC (1824) se compose d'amateurs et de quelques militaires de la garnison de Québec ayant un penchant pour la géologie ou l'exploration. La Natural History Society of Montreal (1827), dominée jusqu'au milieu du siècle par des amateurs, voit son niveau de professionnalisme s'élever grâce à William Dawson et à ses collègues scientifiques de l'U. McGill, Elkanah BILLINGS, paléontologiste à la Commission géologique, fonde en 1856 la première revue scientifique canadienne, Canadian Naturalist and Geologist, devenue l'organe officiel de la Commission. Jusqu'à la fin du siècle, la revue reste le principal débouché pour les travaux de géologie, de botanique et de zoologie. Si l'abbé Léon Provancher publie la revue Naturaliste canadien dès 1868, aucune association scientifique francophone ne voit le jour avant le XXe siècle.

Dans les Maritimes, Charles Hartt et G.F. Matthew, géologues à Saint-Jean, fondent la Natural History Society of New Brunswick (1863) et publient des travaux. Un groupe de l'U. Dalhousie dirige le Nova Scotian Institute of Science (fondé en 1862) et publie aussi des travaux. En Ontario, des ingénieurs et des scientifiques universitaires créent en 1849 le Canadian Institute pour ensuite lancer, en 1852, le Canadian Journal, principal périodique scientifique torontois jusqu'à la fin du siècle. De plus petites associations, les unes se consacrant à l'histoire naturelle, les autres à des domaines scientifiques et culturels plus généraux, voient le jour à Fredericton, à Kingston, à Ottawa, à Belleville, à Hamilton, à London et à Winnipeg.

À l'époque de la Confédération, le Toronto Astronomical Club (1868), devenu la SOCIÉTÉ ROYALE D'ASTRONOMIE DU CANADA, et l'Entomological Society of Ontario sont les premières associations qui se consacrent à une seule science. Aucune d'entre elles ne regroupe des professionnels, encore trop peu nombreux, et bon nombre disparaissent progressivement au début du XXe siècle. Le marquis de LORNE joue un rôle décisif dans la fondation, en 1882, de la SOCIÉTÉ ROYALE DU CANADA (SRC), première association de scientifiques réputés.

Ne regroupant que peu de spécialistes de chaque domaine, la SRC ne peut s'imposer comme principale institution représentant les scientifiques professionnels. De fait, elle ne se trouve jamais de rôle bien précis et sa revue, Délibérations et mémoires, d'importance secondaire au XIXe siècle, n'a que peu de valeur pour la communauté scientifique du XXe siècle. Le XXe siècle voit l'essor des associations professionnelles dotées de pouvoirs disciplinaires et la fin de la plupart de celles s'adressant aux amateurs ou visant divers domaines. La discipline la plus importante, la chimie, est représentée à partir du milieu du XIXe siècle par une succession d'associations. En 1920, on crée le Canadian Institute of Chemistry, qui devient en 1945 l'Institut de Chimie du Canada (ICC), qui lancera quatre ans plus tard la revue Chemistry in Canada.

Avec plus de 10 000 membres et des sections spécialisées et régionales, l'ICC représente le domaine scientifique le plus intimement lié à l'économie canadienne. D'autres disciplines importantes voient leurs intérêts représentés par une association : l'Association géologique du Canada (1947), l'Association canadienne des physiciens (1946), qui publie depuis 1949 la revue La physique au Canada ainsi que plusieurs autres groupes plus modestes, s'intéressant aux sciences de la vie, qui constituent en 1957 la Fédération canadienne des sociétés de biologie. Surtout depuis la fin des années 50, plusieurs nouvelles spécialités suscitent la création d'associations et de revues. La première revue canadienne à caractère véritablement international, le Canadian Journal of Research, lancée en 1929 par le CNRC, est successivement divisée en plusieurs revues spécialisées dirigées par le CNRC devant la croissance du nombre de communications portant sur de nouvelles disciplines.

Au XXe siècle, le style et les objectifs des associations scientifiques du Canada français diffèrent. À la fin du XIXe siècle, on tente en vain de créer des associations scientifiques francophones, mais, vers 1920-1930, plusieurs groupes de professionnels voient enfin le jour, notamment l'Association canadienne française pour l'avancement des sciences (ACFAS), à laquelle s'unissent des associations locales et spécialisées. L'ACFAS, comme ses équivalents britannique, français et américain, regroupe avec succès des scientifiques de toutes les disciplines tout en déployant de grands efforts pour populariser la science au Québec. Ces deux objectifs ne sont poursuivis sérieusement par aucune association anglophone. De ce fait, la revue de vulgarisation de l'Association, Québec Science, n'a pas d'équivalent en anglais. Science Forum, aujourd'hui disparue, s'intéressait surtout à des questions de POLITIQUE SCIENTIFIQUE. La nécessité d'un organe commun dans les milieux gouvernementaux mène à la formation, en 1970, par des associations canadiennes de science et de génie, de l'Association des scientifiques, ingénieurs et technologistes du Canada qui, à titre d' « association d'associations » plutôt que de regroupement d'individus, se contente à toutes fins utiles de faire des sollicitations.

Avant les années 60, l'intérêt populaire pour la science n'est satisfait que par l'exposition de collections scientifiques dans les musées fédéraux ou provinciaux. Comme aux États-Unis, l'exploration spatiale vient alors stimuler l'intérêt du public pour la science. La plupart des grandes villes possèdent des planétariums ou des musées scientifiques comme le Musée national des sciences et de la technologie d'Ottawa, le CENTRE DES SCIENCES DE L'ONTARIO, à Toronto, et le Musée manitobain de l'homme et de la nature, à Winnipeg, qui reçoivent chaque année des millions de visiteurs (voir SCIENCE, MUSÉES DE LA). Les médias canadiens font preuve d'une plus grande réserve dans le domaine de la vulgarisation scientifique (voir SCIENCE ET SOCIÉTÉ). Dans tout le pays, des associations et des clubs d'amateurs se consacrent à la géologie et à l'histoire naturelle. L'astronomie, sans doute la science la plus populaire auprès des amateurs, est quant à elle représentée par la SOCIÉTÉ ROYALE DASTRONOMIE DU CANADA, qui regroupe 3000 membres.

La plus étonnante caractéristique de la science canadienne du XXe siècle est la spécialisation. Tout au long du siècle, les contributions canadiennes dans des domaines autres que les sciences de la terre se sont faites rares, mais une maturité scientifique s'illustre avec l'apparition de nouveaux champs de recherche suivis d'un flot continu de découvertes. Parmi les chercheurs internationaux de premier plan, le nombre de chercheurs canadiens est restreint et la communauté scientifique ne compte que quelques milliers de travailleurs. Dès lors, l'excellence n'est possible que dans quelques domaines.

Les sciences de la terre continuent de s'imposer, non seulement sur le plan pratique, mais également dans les travaux théoriques comme ceux de J.T. WILSON sur la TECTONIQUE DES PLAQUES. La demande en minerai et en énergie valorise la recherche appliquée. La chimie, outre la recherche fondamentale dont elle fait l'objet dans les universités et au CNRC, conserve aussi une orientation fortement pratique en raison de l'économie du pays, essentiellement fondée sur l'exploitation des ressources naturelles. Les centres de recherche forestière de l'U. Laval et de l'U. de Toronto et l'Institut canadien de recherches sur les pâtes et papiers à l'U. McGill sont reconnus dans le monde entier. En MÉTALLURGIE, les recherches menées par International Nickel (INCO Ltée), Falconbridge, Dominion Foundries and Steel Ltd (DOFASCO) et STELCO sont essentielles au maintien de prix compétitifs sur le marché des métaux. L'INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE de Montréal et la recherche biomédicale et GÉNÉTIQUE à Toronto, à Montréal, à London et à Saskatoon placent le pays au premier rang de la recherche sur les sciences de la vie.

La RECHERCHE ET LE DÉVELOPPEMENT AGRICOLES ont une longue et illustre histoire qui remonte à la production de BLÉ MARQUIS par Saunders. Les recherches sur de nouvelles céréales telles le TRITICALE, sur de nouveaux usages pour des plantes communes comme le CANOLA, sur la lutte contre les animaux nuisibles, et les nombreux travaux sur la phytogénétique et l'ÉLEVAGE DES ANIMAUX dans les laboratoires gouvernementaux, les conseils de recherches et les universités, en particulier celles de la Saskatchewan, de Guelph et du Manitoba constituent une véritable banque d'experts et de produits utilisés dans le monde entier.

En raison des groupes restreints de chercheurs et des ressources financières limitées, les travaux dans les domaines scientifiques contemporains prestigieux comme l'astrophysique, la radioastronomie, la recherche sur les particules nucléaires, la physique des solides, la recherche sur l'ADN recombinant ainsi que les travaux théoriques en général sont menés à une bien plus petite échelle au Canada qu'aux États-Unis, en ex-URSS ou en Grande-Bretagne. Les spécialistes canadiens de ces disciplines s'associent à des collègues d'autres pays anglophones et francophones pour utiliser leurs installations, inexistantes au Canada. Ainsi, les scientifiques canadiens ne se limiteront pas aux recherches à vocation économique; un petit nombre d'entre eux pourront faire l'expérience du dynamisme de la recherche de pointe.

Les concepts et les méthodes scientifiques sont partout les mêmes, mais les rapports avec la société, les politiques et les structures de la science diffèrent dans chaque pays. Dans un pays aussi vaste que le Canada, ces aspects de la science comportent également un élément régional. La science canadienne ressemble beaucoup à la science américaine, mais possède ses caractéristiques propres : le rôle crucial des laboratoires et de l'aide financière du CNRC, le financement et l'élaboration des politiques scientifiques entre les provinces et le gouvernement fédéral, et la spécialisation des efforts scientifiques dans les domaines liés de près à l'économie. Le Canada ne bénéficie pas de grandes équipes de chercheurs, de ressources financières énormes et d'importantes installations comme aux États-Unis. L'industrie ne se consacre à aucun travail de recherche d'importance et le faible développement du secteur militaire ne nécessite pas de grandes entreprises technologiques. Néanmoins, les scientifiques canadiens ont contribué de façon importante à la science et, au XXe siècle, ils font partie intégrale de la communauté scientifique internationale.

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