Guerre du Viêt Nam | l'Encyclopédie Canadienne

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Guerre du Viêt Nam

La guerre du Viêt Nam était un conflit pendant la Guerre froide qui a opposé les forces communistes du Viêt Nam du Nord aux forces du Sud soutenues par les États-Unis. De manière officielle, le Canada a joué le rôle de pacificateur neutre, mais a secrètement soutenu l’effort américain au Viêt Nam.

Colonialisme français c. nationalisme

La guerre du Viêt Nam plonge ses racines dans la conquête coloniale de l’Indochine par la France au milieu du XIXe siècle et les mouvements nationalistes qui s’élèvent pour la combattre. À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le 2 septembre 1945, la République démocratique du Viêt Nam est proclamée pays indépendant par le chef nationaliste Ho Chi Minh qui fait de la ville du Nord, Hanoï, sa capitale. La tentative française de reconquérir le Viêt Nam aboutit, le 2 mai 1954, au désastre dans la vallée de Diên Biên Phu.

Les Accords de Genève conclus en juillet prévoient un cessez-le-feu et une ligne de démarcation militaire temporaire établie au 17e parallèle, en attendant la tenue d’élections nationales sur la réunification prévues en juillet 1956. La France se retire. Les efforts déployés par l’Occident pour diviser le pays en permanence en créant une république vietnamienne à Saigon, et le refus des États-Unis de tenir les élections promises mènent à la rébellion dans le sud du pays, à une intervention militaire massive des États-Unis et, pour finir, à la guerre civile. Alors que les États-Unis et leurs alliés soutiennent le Sud afin de prévenir la propagation du communisme au sud-ouest de l’Asie, la Chine et ses alliés appuient le communisme au Nord.

Le coût de la guerre s’accroît pour les États-Unis

Les États-Unis triplent leur présence militaire dans le pays en 1961 et en 1962, mais ne réussissent pas à prendre le dessus sur le nord qui considère les États-Unis comme un agresseur colonial à l’image de la France.

L’échec de la politique des États-Unis devient manifeste en février 1968, quand 525 000 soldats américains n’arrivent pas à stopper l’Offensive du Têt menée par les rebelles; cela prendra deux assauts de plus, le troisième durant six semaines, avant que les forces américaines et sud-vietnamiennes puissent arrêter l’offensive et reprendre le territoire perdu.

Les Accords de Paix de Paris, signés en janvier 1973, maintiennent l’unité et l’intégrité territoriale du Viêt Nam et prévoient aussi le retrait méthodique des troupes américaines, la libération de 200 000 détenus civils et prisonniers de guerre et l’organisation d’élections libres et démocratiques dans le Viêt Nam du Sud. Le refus de mettre en œuvre ces dernières conditions provoque une insurrection armée, et Saigon, la capitale du Sud, tombe le 30 avril 1975 aux mains des forces du Nord. La ville devient Ho Chi Minh Ville et les États-Unis se retirent du Viêt Nam.

Le bilan de la guerre est stupéfiant : 1,7 million de morts, trois millions de blessés et de mutilés et 13 millions de réfugiés. Les États-Unis larguent 7 millions de tonnes de bombes et 75 millions de litres d’herbicide de défoliation de la jungle, et perdent 10 000 hélicoptères et avions militaires. Quelque 56 000 soldats américains sont tués, et 303 000 blessés. Le coût direct de la guerre s’élève à 140 milliards de dollars et les coûts indirects sont évalués à 900 milliards.

Rôle de soutien du Canada

Au cours de la période allant de 1954 à 1975, le Canada siège à deux commissions internationales de trêve et offre des fournitures médicales et une assistance technique. Des diplomates canadiens participent aux négociations entre Washington et Hanoï, et plusieurs gouvernements canadiens, libéraux comme conservateurs, soutiennent à tour de rôle que le Canada est un gardien de la paix impartial et objectif, un spectateur innocent et secourable qui participe aux efforts de négociation de la paix et apporte son aide aux victimes de la guerre. Toutefois, les documents du Cabinet, le procès-verbal sténographié des commissions de trêve et certains câblogrammes ultra-secrets du gouvernement américain révèlent que le Canada est l’allié empressé des mesures anti-insurrectionnelles préconisées par les États-Unis.

Le Canada adopte au sein des commissions de trêve une position partisane qui repose sur la présomption de la culpabilité de Hanoï et de l’innocence de Saigon. Cette position vise à discréditer le Viêt Nam du Nord tout en déchargeant le Sud de son obligation d’observer les Accords de Genève. Les délégués canadiens font de l’espionnage pour le compte de la Central Intelligence Agency et contribuent à l’introduction clandestine d’armes et de personnel américains dans le Viêt Nam du Sud, tout en faisant du repérage pour les bombardiers américains qui survolent le Nord. Les membres canadiens des commissions cachent à l’enquête publique le programme de défoliation chimique entrepris par les États-Unis, répercutent les menaces américaines d’étendre la guerre jusqu’à Hanoï et rédigent des rapports justifiant la violation des Accords de Genève et les attaques aériennes menées par les États-Unis au Viêt Nam du Nord. Ottawa soutiendra par la suite que ces actions étaient un contrepoids nécessaire aux activités des pays du bloc de l’Est, également membres des commissions de trêve.

Aide du Canada au sud

Pendant la guerre, l’aide canadienne est destinée uniquement au Viêt Nam du Sud. De 1950 à 1975, cette aide s’élève à 29 millions de dollars ainsi acheminés par l’intermédiaire du Plan de Colombo et de la Croix-Rouge canadienne. Malgré son apparence humanitaire, l’aide canadienne fait partie intégrante du Free World Assistance Program coordonné par le US Department of State de concert avec l’International Security Office du Pentagone, qui sert de point de contact. Sur le terrain, l’aide financière canadienne est régie par le US-RVN Health Defense Agreement et administrée par la International Military Assistance Force Office de Saigon. À plusieurs reprises, Ottawa fait obstacle à l’envoi d’aide médicale aux victimes civiles de la guerre au Viêt Nam du Nord.

Boum de la guerre au Canada

Chez nous, 500 sociétés canadiennes vendent au Pentagone du matériel de guerre (munitions, napalm, moteurs d’avion et explosifs) d’une valeur de 2,5 milliards de dollars sans compter les 10 milliards de dollars d’exportations d’aliments, de boissons, de bérets et de bottes pour les troupes américaines, et de nickel, de cuivre, de plomb, de laiton et de pétrole destinés aux douilles, au câblage, au blindage et au transport militaire.

Au Canada, le chômage atteint un minimum record de 3,9 %, le produit intérieur brut s’accroît de 6 % par année et les dépenses en immobilisations dans les secteurs de la fabrication et de l’exploitation minière connaissent une croissance exponentielle, car les entreprises américaines investissent plus de 3 milliards de dollars au Canada pour compenser la diminution de la capacité nationale de production par suite de la guerre.

L’agent Orange et les conscrits réfractaires

Avant d’être utilisé au Viêt Nam, le produit herbicide « agent Orange » est testé à la Base des Forces canadiennes à Gagetown, au Nouveau-Brunswick. Les pilotes de bombardiers américains s’entraînent aussi au bombardement en tapis dans le ciel de Suffield, en Alberta, et de North Battleford, en Saskatchewan, avant de se rendre en Asie du Sud-Est. Les résultats de la seule initiative de paix couronnée de succès à Hanoï, celle du diplomate canadien chester ronning, sont tenus secrets pour ne pas nuire aux relations officielles entre les États-Unis et le Canada. Durant la guerre, 10 000 jeunes Canadiens combattent au sein des forces armées américaines. Cependant, 20 000 conscrits réfractaires et 12 000 déserteurs de l’armée américaine se réfugient au Canada après leur service militaire au Viêt Nam.

Réfugiés

La fin de la guerre déclenche un mouvement massif de réfugiés fuyant le sud du Viêt Nam. Le Canada accueille plus de 5 600 Vietnamiens en 1975 et en 1976, dont la majorité a de la famille résidant déjà au Canada. À partir de 1979, le Canada accueille également environ 60 000 réfugiés provenant de la seconde vague de migrants appelés « gens du bateau ». Ceux-ci fuyaient leur pays en effectuant des traversées en mer dangereuses afin de se rendre à Hong Kong ou ailleurs.

Voir aussi Exposition : Les réfugiés de l’Asie du Sud-Est; Américains; Sherwood Lett; James B. Seaborn.

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