Cet article provient de notre série « Toronto Feature ». Les articles provenant des séries précédentes ne sont pas mis à jour.
Ce contenu fait partie d'une série créée en collaboration avec les services au musée de la Ville de Toronto et Heritage Toronto. Nous remercions le ministère du Tourisme, de la Culture et du Sport de l'Ontario et le ministère du Patrimoine canadien pour leur financement.
« Des émeutes anti-Grecs chamboulent la ville »
Au cours d’une fin de semaine d’été vers la fin de la Première Guerre mondiale, la petite communauté grecque de Toronto commence à être victime de colère et de ressentiment de la part des vétérans qui ont l’impression d’avoir été expatriés. Plusieurs d’entre eux en veulent aux hommes qu’ils voient comme des fainéants puisqu’ils n’ont pas servi au front. Poussés par une méfiance latente à l’endroit des immigrants, ils expriment leur colère pendant toute une fin de semaine d’émeutes.
Le 1er août 1918, le soldat Claude Cludernay, handicapé pendant la guerre, dîne au White City Café, situé au 433, rue Yonge et dont les propriétaires sont grecs. Bien qu’amical d’ordinaire, il est saoul et d’humeur bagarreuse ce jour-là; il finit par frapper l’un des serveurs, qui l’escorte hors de l’endroit et appelle la police.
Cet événement mineur provoque l’indignation générale : du 2 au 5 août, des groupes de vétérans et de civils, totalisant près de 50 000 personnes, manifestent dans les rues de Toronto, pillant et vandalisant des commerces tenus par des Grecs. Lorsque la paix est rétablie, le 5 août, plus de 150 émeutiers sont blessés ou hospitalisés et 25 d’entre eux sont arrêtés; 16 policiers subissent des blessures, dont 10 cas sévères, et les dommages aux propriétés grecques totalisent plus de 100 000 $ (soit environ 1,25 million de dollars aujourd’hui).
Si la Grèce demeure neutre pendant la plus grande partie de la guerre, le Canada décide de ne pas recruter de Canadiens d’origine grecque, de peur qu’ils ne se rangent du côté des Allemands. Les soldats en viennent donc à mépriser ceux qui n’ont pas servi dans l’armée; toutefois, les émeutes de Toronto ont autant de causes locales que de causes politiques. Plusieurs vétérans habitent dans la région bordée par les rues Jarvis, Yonge, Carleton et Dundas, là où la majorité de la communauté grecque réside et tient commerce : elle constitue donc une cible bien visible.
Les émeutes coïncident en outre avec un autre événement, soit un congrès de l’Association des vétérans de la Grande Guerre prévu le 2 août. Des dizaines de milliers de vétérans se réunissent donc à Toronto, pleins d’indignation et à la recherche de boucs émissaires.