Alcan inc. | l'Encyclopédie Canadienne

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Alcan inc.

Alcan Incorporated a été l’une des plus importantes sociétés canadiennes d’extraction et de fabrication d’aluminium. Du début des années 1990 au début des années 2000, elle était la deuxième plus grande productrice d’aluminium au monde. La compagnie a été originellement fondée en 1902 en tant que Northern Alumium Company, et elle était située à Shawinigan, au Québec. Elle a été créée en tant que filiale canadienne de la Aluminum Company of America (Alcoa), dont l’un des fondateurs a inventé le processus d’extraction de l’aluminium à partir de la bauxite. La société a été renommée Aluminum Company of Canada en 1925 et, en 1928, s’est officiellement désaffiliée d’Alcoa. En 1966, elle a été nommée à nouveau, cette fois comme Alcan Aluminium (et est devenue Alcan Incorporated en 2001). En 2007, Alcan a été achetée par la multinationale anglo-australienne Rio Tinto pour la somme de 38 milliards de dollars. Aujourd’hui, Rio Tinto continue d’exploiter plusieurs fonderies dans la région du Saguenay-Lac‑Saint‑Jean au Québec, ainsi qu’à Kitimat, en Colombie-Britannique.

Aluminerie de Kitimat

Contexte : Comment produit‑on l’aluminium?

Bauxite

L’aluminium est, après le silicium, la substance métallique la plus abondante dans la croûte terrestre, représentant près de 8 % de sa masse. Toutefois, contrairement à d’autres métaux (tels que l’or et l’argent) que l’on retrouve souvent en formations géologiques hautement concentrées, l’aluminium est généralement mélangé à d’autres types de roches et minéraux. De plus, il est souvent fusionné à de l’oxygène, formant ainsi de l’oxyde d’aluminium. On appelle bauxite la roche ayant une forte concentration en aluminium.

En 1886, Charles Hall, inventeur résidant à Pittsburgh en Pennsylvanie, et Paul Héroult, inventeur français, mettent au point chacun de leur côté le procédé d’extraction de l’aluminium à partir de la bauxite qui est encore utilisé aujourd’hui. Ce procédé consiste à chauffer la bauxite pour en extraire l’oxyde d’aluminium, qui est ensuite plongé dans une solution chimique et traversé d’un courant électrique à haute tension. Pour la première fois de l’histoire, l’aluminium peut désormais être produit massivement et commercialisé.

Alcoa et Northern Aluminum Company

En 1888, Charles Hall et l’homme d’affaires Arthur Davis fondent la Pittsburgh Reduction Company qui deviendra plus tard l’Aluminum Compagny of America (ou Alcoa). L’aluminium, métal relativement léger et résistant à la corrosion, est d’une grande utilité dans la fabrication de plusieurs commodités, y compris des pièces de bicyclettes et d’automobiles, des plaques lithographiques et des ustensiles de cuisine. Comme l’aluminium pur est également un excellent conducteur d’électricité, on l’utilise pour fabriquer des câbles électriques depuis la fin des années 1800.

Bien que les applications et le marché de l’aluminium connaissent une forte croissance, Alcoa peine à trouver une source d’électricité abordable et suffisante pour alimenter le procédé d’extraction. Au cours des huit premières années d’existence de la compagnie, elle déménage de Pittsburgh à New Kensington, en Pennsylvanie, puis à Niagara Falls, New York.

Charles Hall et Arthur Davis décident d’étendre leurs activités de production au Canada, et en 1899, ils commencent la construction d’une fonderie d’aluminium et d’un générateur hydroélectrique à Shawinigan, au Québec.

Trois ans plus tard, Charles Hall et Arthur Davis créent la Northern Aluminum Company Limited à titre de filiale d’Alcoa. Les deux partenaires d’affaires sont officiellement les cadres dirigeants de la compagnie, tandis que Richard Mellon, le banquier de Pittsburgh, est nommé président.

En activité depuis peu, l’usine de Shawinigan produit déjà des milliers de livres d’aluminium par jour, exportant son produit sur les marchés européens et japonais.

Première Guerre mondiale

Pendant la Première Guerre mondiale, la demande en aluminium connaît une hausse substantielle en raison de l’augmentation de la production d’armes à feu, d’explosifs et d’avions. La Northern Aluminum Company intensifie ses activités à Shawinigan pour répondre à cette demande et, en 1919, ouvre une usine de coulage à Toronto.

Pendant l’entre‑deux‑guerres, la compagnie met au point une stratégie d’intégration de techniques de production en vue d’en réduire les coûts. Dans les années 1920, elle fait l’acquisition de la Saguenay Power Company, pour enfin s’assurer le contrôle de six centrales situées le long de la rivière Saguenay, ce qui représente à l’époque la plus importante infrastructure hydroélectrique privatisée au monde. La compagnie obtient également la gestion du réseau de transport dont elle dépend, notamment des ports et des chemins de fer dans la région du Saguenay.

À cette époque, Arthur Davis en vient à la conclusion qu’Alcoa devrait regrouper ses installations situées à l’extérieur des États‑Unis pour en faire une compagnie à part entière. C’est ainsi qu’en 1928, Northern Aluminum se détache officiellement de sa société mère. En 1929, les bureaux régionaux de la nouvelle compagnie canadienne déménagent de Toronto à Montréal, et en 1939, ces bureaux deviennent le siège social de l’entreprise. Deux ans plus tard, la compagnie installe également un bureau international à Genève, en Suisse.

Aluminum Limited demeure malgré tout liée de près à Alcoa au cours des décennies suivantes. Les parts des deux compagnies sont détenues par les mêmes personnes et, de 1928 à 1947, la compagnie canadienne est dirigée par le frère cadet d’Arthur Davis, Edward Davis.

Aluminum Limited prend alors possession de la plupart des exploitations minières et manufacturières internationales d’Alcoa et obtient des participations de contrôle dans plusieurs autres au cours des années suivantes. En 1934, la compagnie s’est étendue au point de posséder ou de contrôler plusieurs sites d’exploitation à travers le monde, notamment une mine de bauxite en Guyane britannique, une usine en Angleterre et plusieurs secteurs d’activité en Inde, en Italie et en Norvège.

De la Deuxième Guerre mondiale jusqu’à l’achat par Rio Tinto en 2007

Lorsque la Deuxième Guerre mondiale éclate, les activités canadiennes de Aluminum Limited possèdent environ les trois quarts de la capacité de production d’aluminium de l’Empire britannique. La société croît rapidement à mesure que la demande des Alliés pour ce métal augmente. Selon Isaiah Litvak et Christopher Maule, auteurs d’un rapport fédéral sur Alcan datant de 1977, la « compagnie a connu une croissance fulgurante entre 1937 et 1944 : ses actifs se sont multipliés par cinq, ses ventes se sont multipliées par cinq; quant à son revenu net, il s’est multiplié par six ».

Cette croissance rapide est soutenue en grande partie par les gouvernements britannique, canadien, américain et australien, qui lui octroient des prêts bon marché et reportent la plupart de ses impôts.

En 1946, les ventes de Aluminum Limited baissent de moitié par rapport à 1944, et ses infrastructures de production surpassent la demande. Un nouveau défi s’impose à la compagnie qui doit s’assurer de maintenir en place son réseau intégré tout en variant son offre de produits finis et semi‑finis.

Toutefois, les ventes remontent au cours des années suivantes, alors que l’aluminium est de plus en plus utilisé par des compagnies de construction, par des sociétés d’électricité et par d’autres fabricants.

La compagnie Aluminum Limited investit dans l’expansion de ses infrastructures au cours des années 1950, ouvrant trois nouvelles centrales au Saguenay ainsi qu’une fonderie d’envergure à Kitimat, en Colombie-Britannique. En même temps, Aluminum Limited se met également à investir pour développer l’extraction de la bauxite en Jamaïque, qui possède de riches réserves d’aluminium intouchées.

L’industrie de l’aluminium devient également un peu plus compétitive pendant cette période. Un jugement du tribunal rendu en juin 1950 décrète qu’Alcoa et Aluminum Limited sont en fait des monopoleurs et ordonne aux actionnaires des deux compagnies, en vertu de la loi antitrust américaine, de vendre leurs parts soit dans Aluminum Limited, soit dans Alcan. Au cours de la décennie suivante, les compagnies américaines Kaiser et Reynolds obtiennent également une plus grande part du marché.

Malgré ces développements, la position privilégiée de Aluminum Limited (connue sous le nom d’Alcan à partir de 1966) sur le marché de l’aluminium se trouve à peine ébranlée au cours des décennies suivantes. Comme elle possède pratiquement tous les composants du processus de production, la compagnie peut produire du métal à moindre coût et à plus grande échelle que n’importe lequel de ses concurrents.

En 2007, la compagnie minière anglo‑australienne Rio Tinto fait l’acquisition d’Alcan. La filiale est connue sous le nom de Rio Tinto Alcan jusqu’en 2015, lorsque Rio Tinto décide de retirer « Alcan » du nom de la compagnie.

Problèmes liés à la main‑d’œuvre

Les activités de production d’aluminium de Rio Tinto connaissent un certain nombre de difficultés depuis 2007. L’émergence de l’aluminium produit en Chine commence à faire baisser le coût du métal quelques mois seulement après l’achat d’Alcan, et Rio Tinto tente donc de réduire au minimum ses coûts liés à la main‑d’œuvre.

Les mises à pied ainsi générées causent d’importantes tensions, particulièrement au Québec. En décembre 2011, la compagnie met en lock-out les 780 travailleurs de sa fonderie d’Alma. À l’époque, elle tente de négocier une nouvelle convention collective avec le syndicat qui lui permettrait de faire affaire avec des sous‑traitants bon marché pour remplacer des ouvriers près de la retraite, ce à quoi le syndicat s’oppose. Le lock‑out prend fin en juin 2012 lorsque les deux partis concluent un accord qui limite la possibilité pour la compagnie d’externaliser le travail.

En réponse à la pression grandissante du marché et aux nouvelles normes environnementales, Rio Tinto ferme définitivement les portes de ses alumineries à Beauharnois et à Shawinigan, au Québec, respectivement en 2009 et en 2013. Combinés à un nombre important de mises à pied dans les bureaux à Montréal en 2015, ces mouvements de personnel font perdre leur emploi à plus de 800 Québécois.

Normes environnementales

La modernisation de la fonderie Rio Tinto à Kitimat, en Colombie-Britannique, annoncée pour la première fois en 2007, est critiquée par les environnementalistes. Bien que les nouvelles installations réduisent l’émission de gaz à effet de serre de la fonderie de Kitimat d’environ 50 %, elles entraînent également une augmentation importante de ses émissions de dioxyde de soufre, un gaz à l’origine de problèmes respiratoires, de maladies cardiovasculaires et de dommages causés à la flore.

En avril 2013, le ministre de l’Environnement de la Colombie‑Britannique délivre un permis qui accorde à la fonderie le droit d’augmenter ses émissions de dioxyde de soufre, passant de 27 à 42 tonnes par jour. Des habitants de la région contestent ce permis en cour, exigeant de la compagnie qu’elle installe des filtres qui réduiraient les émissions, ce qui coûterait à Rio Tinto entre 100 et 200 millions de dollars. En décembre 2015, le Commission d’appel de l’environnement de la Colombie‑Britannique maintient le permis d’origine.

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