Industrie de la distillation | l'Encyclopédie Canadienne

article

Industrie de la distillation

Relevant de l'industrie des aliments et des boissons, la distillerie gère la clarification, l'aromatisation, le coupage et le vieillissement de l'alcool entrant dans la fabrication de spiritueux (eaux-de-vie, alcools de grain, rhums) ainsi que les usines de fabrication d'alcool éthylique, qu'il soit employé ou non dans les spiritueux.

Industrie de la distillation

Relevant de l'industrie des aliments et des boissons, la distillerie gère la clarification, l'aromatisation, le coupage et le vieillissement de l'alcool entrant dans la fabrication de spiritueux (eaux-de-vie, alcools de grain, rhums) ainsi que les usines de fabrication d'alcool éthylique, qu'il soit employé ou non dans les spiritueux. Les fabricants d'alcool méthylique, butylique ou isopropylique appartiennent à l'industrie chimique et de produits chimiques. L'industrie canadienne de la distillerie est une industrie de niveau international. De fait, la qualité et la concentration des spiritueux distillés au Canada leur ont valu une renommée internationale.

En 1995, les distilleries canadiennes emploient 13 700 personnes directement ou indirectement. Au Canada, cette industrie est aussi l'un des plus grands exportateurs de produits finis, avec une valeur annuelle de plus de 600 millions de dollars.

Son activité économique représente une tranche de 2,6 milliards de dollars du produit intérieur brut pour l'année financière 1993-1994. En plus des produits finis, une partie de la vinasse ou des résidus de grain des distilleries est transformée en sous-produits utiles, comme des suppléments alimentaires pour l'industrie bovine, avicole et porcine.

En 1995, les Canadiens consomment environ 118,8 millions de litres de boissons distillées au Canada et importées. Cette quantité est largement inférieure aux 198 millions de litres consommés en 1980, une baisse attribuable à un changement de mode de vie et à la hausse des taxes sur les boissons alcooliques. En raison d'une grande différence du taux de taxation entre le Canada (83 p. 100) et les États-Unis (42 p. 100), la contrebande menace sérieusement les revenus de l'industrie et du gouvernement. Au moins 4 millions de caisses (12 bouteilles de 750 ml) de produits américains et étrangers sont vendues illégalement au Canada chaque année, aboutissant à une perte de revenus de un milliard de dollars pour les gouvernements provinciaux et fédéral.

Historique

Les premiers colons de la Nouvelle-France importent de France leurs boissons alcooliques, normalement des eaux-de-vie et des liqueurs de haute qualité (à cause du coût élevé de transport). La première distillerie du Canada est probablement établie par l'intendant Jean Talon. Il est prouvé que la brasserie qu'il ordonne de construire en 1668 contient un alambic. Le rhum des Antilles étant disponible à un coût relativement bas, les colons ne sont guère intéressés à établir chez eux une industrie de distillerie. La situation demeure inchangée jusque dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, lorsque l'on impose sur ce rhum des tarifs douaniers prohibitifs. Ainsi, la première distillerie voit le jour dans la ville de Québec en 1769 et produit du rhum à partir de mélasse importée.

Après l'arrivée des Loyalistes, on commence à produire du whisky de grain dans les régions de grandes cultures céréalières. À cette époque, le meunier reçoit en paiement le dixième du grain moulu. Certains en profitent pour transformer leurs surplus en un whisky habituellement facile à vendre dans le voisinage et qui, en plus, a l'avantage d'être moins cher à transporter que le grain ou la farine. Dès 1861, les spiritueux canadiens sont en demande aux États-Unis. Certains meuniers abandonnent l'industrie de la minoterie de sorte que, vers 1840, plus de 200 distilleries sont en activité dans le Haut et le Bas-Canada. C'est à cette époque que naissent certaines des grandes distilleries canadiennes, dont celle d'Hiram Walker, qui établit son entreprise en 1858.

Lors de la Première Guerre mondiale, les distillateurs jouent un rôle de premier plan, l'alcool étant un produit nécessaire à la fabrication de divers matériaux de guerre. Chaque distillateur contribue à l'effort de guerre et une usine entière est convertie en manufacture d'acétone, une composante de la cordite explosive fumivore. En temps de guerre, le besoin d'alcool conduit à la prohibition dans toutes les provinces, sauf au Québec (qui, en 1919, interdit la vente au détail de spiritueux distillés pour une courte durée). La prohibition est abolie à différentes dates dans les autres provinces entre 1921 et 1930. L'Île-du-Prince-Édouard fait exception et maintient la prohibition jusqu'en 1948.

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, le rationnement des spiritueux est courant dans beaucoup de régions, surtout parce que l'alcool est à nouveau nécessaire à l'effort de guerre. En 1942, toutes les distilleries canadiennes commencent la production d'alcool à usage militaire et, de 1943 à 1945, la production annuelle d'alcool de première qualité est de 68 millions de litres.

Des règlements édictés par le gouvernement régissent l'industrie de la distillerie avant même qu'elle ne devienne autonome. Ainsi, John Graves Simcoe, le premier lieutenant-gouverneur du Haut-Canada, émet 51 permis de distillerie pendant sa première année en fonction. Peu après le début du XIXe siècle, le gouvernement désigne les premiers inspecteurs de distilleries et adopte, en 1846, une loi sévère pour réglementer la production. La Loi Constitutionnelle de 1867 donne au gouvernement fédéral le pouvoir de voter des lois concernant l'importation ou la fabrication de spiritueux au Canada. Cette loi remet aussi aux provinces la surveillance de la vente au détail.

En 1874, le gouvernement canadien adopte sa première législation contre la « falsification des produits alimentaires » à cause de la trop grande circulation d'alcool frelaté. Sel, tabac, opium, chanvre indien, sulfate de cuivre et sels de plomb ou de zinc sont des additifs courants. La Loi sur les aliments et drogues, votée en 1954 et aujourd'hui sous la responsabilité de Santé et Bien-être social Canada, définit avec force détails les normes acceptables pour tous les spiritueux et fait certaines recommandations pour l'emballage et l'étiquetage.

Une équipe d'inspecteurs assure continuellement le respect des règlements ( voir Législation sur les aliments; Processus réglementaire). De plus, la division des taxes et accises de Revenu Canada forme spécialement des officiers chargés de faire respecter les règles strictes régissant les distilleries et la production à chacune des phases de la distillation, de l'embouteillage et du conditionnement. Leurs bureaux et leurs équipements sont fournis par les distillateurs et situés sur les lieux de production. Ainsi, une étiquette portant l'inscription « distillé », « mélangé », « embouteillé en entrepôt », « sous la supervision du gouvernement canadien » garantit que les règlements ont bien été respectés.

Dès les premiers temps de la colonie, on prélève des taxes sur les boissons alcooliques importées. Toutefois, la première taxe (un shilling et trois pennies par gallon) sur les spiritueux canadiens n'est imposée qu'en 1794. Aujourd'hui, la taxe d'accise s'élève à 11,066 $ par litre d'alcool pur. À cela s'ajoutent des taxes de vente de 15 p. 100 sur la valeur à l'acquitté des marchandises. Les gouvernements provinciaux imposent aussi une taxe d'environ 59,5 p. 100 sur les spiritueux distillés. Après avoir aboli la prohibition, chaque province met sur pied des points de vente gérés par le gouvernement.

De nos jours, les distillateurs n'ont le droit de vendre qu'aux sociétés des alcools provinciales et territoriales (sauf en Alberta) qui, à leur tour, revendent les spiritueux dans des magasins de vente au détail gérés par l'État. Le gouvernement albertain a complètement privatisé le réseau de vente au détail de l'alcool de bouche en septembre 1993. L'entreposage et la distribution sont en cours de privatisation. Le gouvernement fédéral perçoit 680 millions de dollars des ventes légales de spiritueux, alors que les gouvernements provinciaux recueillent plus de 1,8 milliard de dollars.