James Wolfe | l'Encyclopédie Canadienne

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James Wolfe

James Wolfe, officier de l’armée britannique (né le 2 janvier 1727 à Westerham, dans le comté du Kent, en Angleterre; décédé le 13 septembre 1759 près de Québec). James Wolfe se bat lors de la guerre de la Succession d’Autriche, contre la rébellion jacobite et pendant la guerre de Sept Ans. Il est surtout connu pour le rôle qu’il a joué dans la bataille des plaines d’Abraham en 1759. Tout comme son adversaire, Louis-Joseph, Marquis de Montcalm, il meurt de blessures subies au combat. La victoire des Britanniques, un moment décisif de la guerre de Sept Ans, mène à la capitulation de Montréal en 1760 et à la prise du Canada par la Grande-Bretagne en 1763.

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Jeunesse

James Wolfe naît le 2 janvier 1727 à Westerham, dans le comté du Kent, en Angleterre. Fils d’Henrietta Thompson et d’Edward Wolfe, lieutenant-colonel de l’armée britannique, il a un frère nommé Edward, d’un an son cadet. La famille Wolfe cultive une longue tradition militaire : à l’instar de leur père et de leur arrière-grand-père paternel, James et son frère deviennent à leur tour officiers de l’armée britannique.

En 1738, les Wolfe déménagent à Greenwich, au nord-ouest du comté du Kent (aujourd’hui intégré à Londres), où James et son frère fréquentent une école pour les fils des officiers de l’armée et de la marine. Lorsque la Grande-Bretagne déclare la guerre à l’Espagne en 1739 (la guerre de l’oreille de Jenkins), le père des garçons devient colonel d’un nouveau régiment de la marine. L’année suivante, le jeune James Wolfe, alors âgé de 13 ans, intègre le régiment à titre de « volontaire ». Destiné à faire partie d’une expédition contre Cartagena (en Colombie), il tombe toutefois malade et ne quitte pas la Grande-Bretagne.

Guerre de la Succession d’Autriche

Même s’il ne fait jamais officiellement de service dans la marine, James Wolfe reçoit une commission du régiment de son père en novembre 1741. En mars de l’année suivante, il est transféré au 12e régiment de fantassins. À ce moment, la Grande-Bretagne est impliquée dans la guerre de la Succession d’Autriche (de 1740 à 1748). En mai 1742, l’enseigne de 15 ans arrive en Flandre avec son régiment. Son jeune frère Edward, aussi devenu enseigne, intègre le même régiment l’année suivante. En juin, les deux frères livrent leur première bataille à Dettingen, pendant laquelle le 12e régiment subit de lourdes pertes. Après la bataille, James Wolfe est promu au grade de lieutenant puis, en 1744, il est promu capitaine et est transféré au 4e régiment de fantassins. Son frère Edward décède en octobre.

Rébellion des jacobites

En 1745, le régiment de James Wolfe est rappelé en Grande-Bretagne en raison de la rébellion des jacobites, motivée par une tentative de Charles Edward Stuart de reconquérir le trône britannique pour son père exilé, James Stuart. En juillet, Stuart arrive en Écosse, où le soutien à la cause jacobite est plutôt élevé. En septembre de la même année, l’armée jacobite s’empare de la ville d’Édimbourg et détruit les forces armées britanniques lors de la bataille de Prestonpans. Pour contrer cette menace, l’armée britannique postée en Flandre est rappelée en Grande-Bretagne. James Wolfe participe donc à la bataille de Culloden en avril 1746, qui se solde par une victoire britannique et la fin de la cause de Stuart. Les jacobites sont alors massacrés et les survivants sont pourchassés partout au pays. Selon certains témoignages, James Wolfe aurait refusé de tirer sur un officier écossais blessé, mais les historiens n’ont pas pu le confirmer.

Le saviez-vous?
Après la bataille de Culloden, le gouvernement britannique est déterminé à éliminer l’opposition jacobite. Des lois sont donc adoptées pour rendre illégaux les vêtements des Highlands et évincer les gens de leur territoire, ce qui entraîne de la pauvreté et mène à un grand nombre de migrations. Par la suite, bon nombre d’Écossais des Highlands immigrent au Canada. (Voir Canadiens écossais.)

Retour en Europe continentale

En janvier 1747, James Wolfe retourne en Europe continentale, où la guerre de la Succession d’Autriche fait encore rage. En juillet, il est blessé lors de la bataille de Lauffeldt, la plus importante de la guerre, à laquelle prennent part plus de 200 000 soldats. James Wolfe se trouve alors réellement au cœur de la bataille : son cheval est abattu alors qu’il est en selle. Lorsque la guerre de la Succession d’Autriche se termine finalement en 1748 avec le traité d’Aix-la-Chapelle, James Wolfe rentre en Grande-Bretagne, encore âgé de seulement 21 ans.

Commandant de régiment
En 1748, James Wolfe devient major et commandant du 20e régiment de fantassins, posté en Écosse. Deux ans plus tard, il est promu lieutenant-colonel du régiment. Pendant son séjour en Écosse, James Wolfe se met à l’étude du latin et des mathématiques. Il passe également ses congés en Irlande pour visiter sa famille, ainsi qu’en France. De 1753 à 1757, James Wolfe et le 20e régiment de fantassins sont postés dans le sud de l’Angleterre.

Guerre de Sept Ans

En 1756, les puissances européennes se déclarent la guerre une fois de plus. La guerre de Sept Ans, qui se déroule en Europe, dans les Amériques, en Inde et en mer, est généralement considérée comme la première guerre d’envergure mondiale. Au départ, James Wolfe et son régiment (le 20e régiment de fantassins) sont postés dans le sud de l’Angleterre pour se protéger de la menace d’invasion française.

En 1757, le régiment participe à une expédition contre Rochefort, un port maritime sur la côte atlantique française. En plus d’exercer ses responsabilités du régiment, James Wolfe agit à titre de quartier-maître général de l’expédition. Après la conquête de l’une des îles périphériques, le commandant militaire de l’expédition, sir John Mordaunt, met fin au raid. James Wolfe met alors pied à terre, part en éclaireur et encourage vivement une attaque, mais ne réussit pas à convaincre son commandant. Même si l’expédition se solde par un échec, James Wolfe impressionne ses supérieurs et le premier ministre britannique de l’époque, William Pitt, ce qui lui vaut une promotion au titre de colonel du 67e régiment de fantassins.

Louisbourg 1758

En 1758, James Wolfe participe à une expédition britannique visant Louisbourg, une forteresse française située sur l’île Royale (île du Cap-Breton), près de l’embouchure du fleuve Saint-Laurent. Pour les forces armées britanniques attaquant le Canada à partir de l’est, prendre le contrôle de la forteresse est alors primordial. Pour cette expédition, James Wolfe est l’un des trois commandants de brigade dans les troupes du major général Jeffery Amherst. Les troupes se rendent en Amérique du Nord avec une flotte britannique dirigée par l’amiral Edward Boscawen.

Le 2 juin, la flotte anglaise arrive dans la baie Gabarus, près de Louisbourg. Le 8 juin, James Wolfe et des soldats d’élite (principalement de l’infanterie légère et des grenadiers) accostent et sont accueillis par le feu des défenseurs français. Les Britanniques entreprennent donc le siège de la forteresse, qui capitule le 26 juillet 1758. Pendant la campagne, James Wolfe se démarque. En effet, il fait preuve de bravoure lors du premier accostage et réussit à faire avancer sa batterie de siège vers la forteresse, ce qui cause bien des dégâts et contribue à la capitulation.

En septembre, James Wolfe conduit un groupe de soldats britanniques à la destruction de colonies de pêche dans le golfe du Saint-Laurent. (Voir aussi  Histoire de l’Acadie.) Bien que le plan des Britanniques ait d’abord été de progresser sur le fleuve Saint-Laurent et d’attaquer Québec, la campagne est reportée en raison de l’hiver qui approche. James Wolfe rentre donc en Angleterre.

Québec et la bataille des plaines d’Abraham (1759)

En janvier 1759, James Wolfe est nommé major général et commandant des forces terrestres britanniques pour l’expédition contre Québec. Les troupes quittent Louisbourg début juin et accostent l’île d’Orléans le 27 juin. À la mi-juillet 1759, James Wolfe et ses hommes occupent différents postes sur l’île d’Orléans, Pointe-Lévis (en face de Québec) et la rive nord du fleuve Saint-Laurent, non loin d’un campement militaire français à Beauport. Toutefois, les Français s’avèrent difficiles à déloger, notamment en raison des canons de Québec et des forts courants du fleuve Saint-Laurent. Le 31 juillet, les Britanniques attaquent le campement français de Beauport, mais sont forcés de battre en retraite.

James Wolfe tente d’attirer Montcalm, le commandant français, hors des fortifications pour déclencher une bataille. Ciblant d’abord des commerces et des navires français, il commence ensuite à détruire des bâtiments et des campagnes autour de la ville. Montcalm refuse toutefois d’attaquer. À la fin août, bon nombre de navires britanniques réussissent à dépasser la ville et à établir leur présence en amont, dans le but de couper l’accès entre Québec et Montréal et de forcer les Français à se battre.

James Wolfe décide d’accoster l’Anse-au-Foulon, soit environ 3 km en amont de Québec, à la base d’une falaise. La force d’avant-garde accoste tout juste après 4 heures du matin le 13 septembre 1759. À l’aube, James Wolfe et la première division se déploient sur le plateau. À 8 heures, toutes les forces britanniques sont réunies sur les plaines d’Abraham. Montcalm n’hésite pas à attaquer, mais les Français sont vite repoussés.

James Wolfe est touché par trois balles au cours des premières minutes du combat et meurt peu de temps après. Après avoir appris que les forces françaises battaient en retraite, il aurait dit « Maintenant, Dieu soit loué, je mourrai en paix ». Montcalm, blessé pendant le repli des Français, rend lui aussi l’âme le lendemain matin, à Québec. La majorité de l’armée française se retire ensuite vers Montréal. Les Britanniques entreprennent le siège de Québec, qui capitule le 18 septembre. Montréal, quant à elle, tombe en 1760. En 1763, la France cède le Canada aux Britanniques en vertu du traité de Paris.


La mort du général Wolfe


Héritage

La nouvelle du décès de James Wolfe parvient rapidement en Grande-Bretagne, où il est perçu comme un héros militaire et un martyre incarnant le courage, le leadership et le patriotisme. Dans la biographie écrite par Stephen Brumwell, Paths of Glory: The Life and Death of General James Wolfe (2006), on peut lire « [Wolfe] est la première vraie célébrité transatlantique ». Des deux côtés de l’Atlantique, des auteurs vantent ses talents en poésie et en prose, et le clergé le louange. Des ballades comme « The Death of General Wolfe » (La mort du général Wolfe) ont été chantées partout en Grande-Bretagne et dans les colonies de l’Amérique du Nord.

La peinture de Benjamin West intitulée La mort du général Wolfe (1770) fait fureur. Lors de sa première présentation, à Londres, on fait la queue devant les portes de l’Académie royale. Des gravures de la peinture sont distribuées partout en Grande-Bretagne et dans les colonies de l’Amérique du Nord. L’image est même reproduite sur des céramiques et des tissus. Le premier ministre britannique de l’époque, William Pitt, commande également un monument commémoratif national, érigé à l’abbaye de Westminster en 1772. La célébrité de James Wolfe est principalement due à son rôle de bâtisseur d’empire : après tout, c’est à lui qu’on attribue l’annexion du Canada à l’Empire britannique.

Pendant plus de 150 ans, James Wolfe est célébré comme héros de l’Empire au Canada et en Grande-Bretagne. Toutefois, la perception de la population change au 20e siècle. Depuis les années 1930, les historiens remettent en doute la réputation et le tempérament de James Wolfe. Avec l’effondrement de l’Empire britannique, James Wolfe voit sa réputation se ternir et est décrit par certains comme incompétent, impitoyable et vaniteux. Le 200e anniversaire de la mort de James Wolfe, en 1959, contribue à la réévaluation de son caractère et de ses habiletés en tant que chef militaire.

La « conquête » britannique a longtemps été un sujet de discorde au Québec. Comme le souligne Stephen Brumwell, James Wolfe est un symbole d’oppression plutôt que d’héroïsme pour bien des francophones. Le monument à l’effigie de James Wolfe sur les plaines d’Abraham, où sont gravés les mots « Here Died Wolfe Victorious » (ici est mort Wolfe victorieux), est considéré comme un affront pour les Canadiens français. En 1963, des nationalistes québécois renversent le monument. Deux ans plus tard, la base du monument est défigurée par des émeutiers. Lorsque le monument est érigé à nouveau en 1965, le texte indique seulement « Here died Wolfe » (ici est mort Wolfe).

Lecture supplémentaire