L'affaire du Chesapeake, 1807 | l'Encyclopédie Canadienne

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L'affaire du Chesapeake, 1807

Les guerres ont bien souvent de nombreuses causes. Certaines symbolisent des litiges qui durent depuis longtemps entre des nations, d'autres sont des étincelles qui enflamment les esprits et entraînent les pays à appeler aux armes.

L'affaire du Chesapeake, 1807

Les guerres ont bien souvent de nombreuses causes. Certaines symbolisent des litiges qui durent depuis longtemps entre des nations, d'autres sont des étincelles qui enflamment les esprits et entraînent les pays à appeler aux armes. L'affaire du Chesapeake (appelée aussi Affaire Chesapeake-Leopard) entre dans ces deux catégories. Ce fut d'une part le symbole de relations qui se dégradaient entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, et d'autre part, une étincelle qui se consuma très lentement jusqu'au déclenchement des hostilités qui donna lieu à la GUERRE DE 1812.

Pendant les GUERRES NAPOLÉONIENNES (1802-1815), la Grande-Bretagne s'était engagée dans une vase campagne navale contre la France. Les États-Unis, pour leur part, considéraient que la France était un vieil allié et partenaire commercial dans leur économie en pleine croissance. Pendant que l'Angleterre était en guerre contre la France, le commerce américain ne faisait que croître, notamment sa flotte marchande, ce qui bien sûr préoccupait les intérêts économiques britanniques. Et puisque les États-Unis n'étaient pas en guerre contre la France, le commerce entre ces deux pays continuait de prospérer.

Prélude à l'affaire du Chesapeake

En 1807, la France et la Grande-Bretagne étaient en pleine guerre économique; chaque adversaire voulait miner l'ennemi et lui retirer ses atouts matériels. La France avait mis en place le « système continental » pour empêcher que la Grande-Bretagne ne puisse faire du commerce avec le reste de l'Europe occupée et ne puisse ainsi obtenir des ressources. De son côté, la Grande-Bretagne avait émis des décrets en conseil (1807), décrets qui interdisaient à ses colonies, à ses alliés ou aux pays neutres de faire du commerce avec la France. Ce fut le début du blocus de la France, une stratégie controversée mais néanmoins fructueuse. La Grande-Bretagne joignit le geste à la parole, envoyant des navires de guerre vers les ports clés dans le but d'appliquer ses décrets. Elle maintint également le droit d'inspecter tout navire neutre à la recherche de déserteurs. Les États-Unis protestèrent contre ces décrets, avançant qu'ils étaient injustes et illégaux. Les tensions entre le nouveau pays et son ancienne puissance coloniale ne firent qu'augmenter.

Au début de 1807, les Britanniques envoyèrent des navires de guerre chargés de faire appliquer le blocus se mesurer à deux vaisseaux français qui tentaient de maintenir des relations commerciales avec les États-Unis dans la baie de Chesapeake. À l'époque, la vie à bord des navires britanniques était pénible, rude et bien souvent, elle avait été imposée : de nombreux marins s'étaient retrouvés sur des navires contre leur gré, engagés de force par les Britanniques qui voulaient grossir leur main d'œuvre pour soutenir le blocus. Pis encore, certains navires britanniques avaient commencé à embrigader des marins des navires américains qu'ils inspectaient. Conséquemment, la désertion était un problème épineux et pour les hommes de la Marine royale stationnés en Amérique, la situation n'était pas tellement différente. Les possibilités de se soustraire à la discipline de fer et au fouet étaient vastes. À l'été 1807, une poignée d'hommes désertèrent les vaisseaux britanniques pour aller rejoindre la frégate américaine, l'USS Chesapeake, au large des côtes de Virginie. Le Chesapeake était dirigé par le commodore James Barron, un marin qui avait pris part à la RÉVOLUTION AMÉRICAINE, à la Quasi War (quasi-guerre) contre la France et à la Première guerre barbaresque (guerre tripolitaine).

Le conflit entre l'USS Chesapeake et le HMS Leopard

Le vice-amiral britannique Sir George Berkeley ordonna au HMS Leopard d'aller chercher les déserteurs. Le commandant du navire, Salisbury Pryce Humphreys, émit un ordre de fouilles. Barron refusa et fit remarquer que tous ses hommes avaient été forcés à s'engager dans la marine britannique. À ce geste de défi, les Britanniques répliquèrent par une salve de canons, qui blessa Barron et 17 autres hommes et qui tua 3 marins américains. Le Chesapeake était une frégate solide et Barron un commandant compétent, mais le navire nécessitait de grandes réparations depuis sa dernière expédition et n'était pas prêt à s'engager dans une lutte décisive. Malgré cela, Barron parvint à lancer une salve avant d'accepter l'inévitable. Il appela ses hommes à se rendre, mais Humphreys fit la sourde oreille à cette reddition et envoya une troupe d'hommes à bord du Chesapeake pour saisir les déserteurs. Chaque déserteur fut repéré, mais la situation s'aggrava quand il fut clair que seul un déserteur était sujet britannique. Les autres étaient nés en Amérique, mais s'étaient engagés dans la Marine royale, avançant qu'on les avait engagés de force.

Les conséquences de l'affaire du Chesapeake

Le Chesapeake fut tiré jusqu'à Halifax et tous les déserteurs subirent un procès. Le sujet britannique fut condamné à être pendu. Les marins nés en Amérique durent se soumettre à 500 coups de fouet. Leur peine fut cependant commuée puisque la Grande-Bretagne essaya de redresser la situation en envoyant tous ces hommes vers les États-Unis, les obligeant à payer des réparations. De tels gestes ne furent qu'une piètre consolation pour la population et le gouvernement américains qui s'unirent pour protester contre les mauvais traitements infligés à leurs ressortissants. L'affaire du Chesapeake fut l'un des problèmes qui couvèrent longtemps entre les deux nations et qui connurent leur dénouement lors du déclenchement de la guerre de 1812.

Rares sont les navires qui symbolisèrent la guerre de 1812 comme le fit l'USS Chesapeake, catalyseur et victime des enchevêtrements politiques et militaires qui minaient la Grande-Bretagne et les États-Unis.