Larry Towell | l'Encyclopédie Canadienne

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Larry Towell

​Larry Towell est photographe (né en 1953 à Chatham-Kent, en Ontario).

Larry Towell est photographe (né en 1953 à Chatham-Kent, en Ontario). Lauréat du prestigieux prix international de la Fondation Hasselblad pour la photographie, et premier et seul Canadien membre de Magnum Photos (agence internationale de premier plan représentant les photographes documentaires), Larry Towell compte parmi les plus grands photographes de sa génération. Auteur de 13 livres, ses photographies et ses reportages photo ont régulièrement été publiés dans les pages du New York Times, des magazines Life, Rolling Stone et The Walrus, ainsi que de nombreuses autres publications.

Éducation et début de carrière

Larry Towell grandit dans une famille nombreuse dans le comté rural de Lambton, en Ontario, où il vit toujours. Il étudie les arts visuels à l’Université York au début des années 1970. Il passe toutefois rapidement à la poésie et à la musique. Il a publié plusieurs recueils de poésie, et interprète encore ses chansons folk uniques et politiquement chargées en s’accompagnant au banjo.

Son intérêt pour la richesse, la pauvreté et les démunis a été en partie inspiré par le travail bénévole qu’il accomplit à Calcutta, en Inde, en 1976. Au début des années 1980, après avoir vécu hors réseau alors qu’il enseigne la guitare et qu’il jardine, il se rend pour la première fois en Amérique centrale. Alors qu’il voyage avec un groupe de défense des droits de la personne, il prend des photos pour illustrer les témoignages de Nicaraguayens qui s’étaient insurgés contre la dictature d’Anastasio Somoza Debayle, ce qui a finalement mené à la Révolution nicaraguayenne de 1979.

Amérique centrale et Mexique

La carrière de photographe documentaire de Larry Towell commence essentiellement avec sa couverture de la guerre civile au El Salvador, au sujet de laquelle il publie le livre El Salvador en 1997. Photographiées sur pellicule noire et blanche traditionnelle (il refuse de se convertir au numérique), ces photos se distinguent par leur intimité. Larry Towell se concentre sur l’aspect humain de la guerre, et non sur les scènes chaotiques de combat. Par exemple, dans San Salvador, 1989, on voit les longues ombres de civils fuyant le long d’un versant rocheux et les corps de guérillas assassinées par les soldats du gouvernement. Mother at Grave of Son Killed by Death Squads, 1991, est une Pietà présentant une mère dans les bras de sa fille. Elles sont flanquées de simples croix blanches dans un paysage vallonné. En plus de son travail en zone de conflit au Nicaragua, au El Salvador et au Guatemala, Larry Towell photographie des communautés mennonites en exil au Mexique et en Amérique du Sud, et en tire son livre The Mennonites (2000).

11 septembre 2001

Le matin du 11 septembre 2001, Magnum Photos tient une réunion du conseil au centre de Manhattan. Lorsqu’il devient manifeste que les tours du World Trade Center sont la proie d’un acte terroriste, Larry Towell et les autres photographes de Magnum Photos présents se rendent au centre-ville avec leurs caméras. Ainsi, Larry Towell prend l’une des photos les plus marquantes de cette journée tragique. Dans la lignée de son œuvre, New York, September 11, 2001 n’est pas une image dramatique d’un avion qui explose dans l’édifice, de corps tombant des tours en feu ou de l’effondrement de l’une des tours. On y voit plutôt un homme d’affaires lisant calmement une feuille de papier au milieu d’une rue encombrée par les débris dans la partie sud de Manhattan alors que la poussière n’est pas entièrement retombée.

Palestine

Larry Towell passe plusieurs années à documenter les différentes phases du conflit entre Israël et les Palestiniens de la Cisjordanie et de Gaza. Nombre de photographies qu’il en tire sont recueillies dans Then Palestine (1999) et No Man’s Land (2005). Par exemple, dans Shati, Gaza, 1993, des adolescents sont accroupis dans une ruelle, roches à la main, et attendent le passage de la patrouille de soldats israéliens. Gaza City, February 12, 2003 présente quant à elle une image panoramique d’hommes masqués transportant le corps d’un militant du Hamas tué en essayant d’entrer en Israël.

En plus de son œuvre photographique, Larry Towell a aussi documenté la vie en Cisjordanie et à Gaza au moyen d’enregistrements audio et vidéo. Indecisive Moments (2001) est un journal vidéo du photographe naviguant les décombres et les points de contrôle de la Cisjordanie en état de siège. Le titre, qui s’inspire de l’idée du photographe français Henri Cartier-Bresson selon laquelle les photographes sont à la recherche du « moment décisif » pour prendre une photographie, indique que Larry Towell considère la vidéo comme étant complètement distincte de la photographie.

Caméras panoramiques et contrecoups de l’ouragan Katrina

En plus de photographier à l’aide de caméras traditionnelles, Larry Towell travaille aussi avec des caméras panoramiques, qui permettent un balayage horizontal bien adapté aux paysages. Bon nombre des photographies publiées dans son livre In the Wake of Katrina (2005), qui saisit la destruction provoquée par l’ouragan Katrina le long de la côte du Mississippi et de la Louisiane, ont été prises avec une caméra panoramique. Par exemple, dans une photographie prise à Waveland, au Mississippi, on voit à l’avant-plan une statue abimée de la Vierge Marie, derrière laquelle se trouve un piédestal jonché de débris. Dans une autre photo, celle-ci prise à Pass Christian, au Mississippi, on voit une éclaircie envahie de détritus là où on trouvait auparavant des maisons et un Walmart.

Afghanistan

De 2008 à 2011, Larry Towell se rend en Afghanistan à cinq reprises, tirant de ses voyages le livre Afghanistan (2014). Dans ses photographies et les vidéos qui les accompagnent, Larry Towell documente la vie de gens ordinaires pris au piège dans une zone de conflit. Par exemple, dans une image prise à Kaboul en 2009, on voit des hommes et des femmes marchandant le prix du coton dans une rue poussiéreuse. Une autre image prise la même année montre des héroïnomanes accroupis dans les ruines de la vieille ville détruite pendant la guerre civile qui a suivi le départ des Soviétiques. Tout comme dans ses photographies de la guerre civile au El Salvador, Larry Towell ne photographie jamais directement la violence, mais plutôt son coût humain.

Kiev

En février 2014, Larry Towell se rend à Kiev, en Ukraine, où il photographie les affrontements entre les manifestants et la police sur la place Maidan Nezalezhnosti pendant lesquels 98 personnes perdent la vie et qui mènent au départ du président Viktor Yanukovych. Larry Towell est alors au centre de l’action. Dans l’une de ses photographies, une jeune femme aux longs cheveux touche aux boucliers en métal de la police antiémeute. Dans une autre, un manifestant, debout sur une barricade, tient un cocktail Molotov allumé dans un nuage orangé de fumée.

The World from My Front Porch

En plus de son œuvre internationale chargée au plan politique, Larry Towell photographie aussi de façon plus intime sa famille et ses amis à sa ferme, située dans le comté de Lambton, en Ontario, et dans les environs. Il a publié nombre de ces photos dans le livre The World from My Front Porch (2008). Dans une photo prise en 1995, on voit de dos la femme de Larry Towell tenant leur jeune fils alors que leur fils aîné regarde par la fenêtre d’une vieille porte en chêne. Sur le perron se trouve un immense crâne de buffle d’Inde que Larry Towell a acheté lors d’un voyage au Vietnam en 1990. Dans une autre, la jeune fille de Larry Towell se balance au-dessus d’une rivière sur une corde attachée à une branche d’arbre en présence d’autres enfants.

Honneurs

Larry Towell a fait l’objet de nombreuses expositions majeures de musées, notamment au Musée canadien de la photographie contemporaine, à Ottawa (1994 et 2001), au Scottish National Portrait Gallery, à Édimbourg, en Écosse (2001), à la Fondation Henri Cartier-Bresson, à Paris (2005), et à la George Eastman House, à Rochester, dans l’État de New York (2008). Il a entre autres été lauréat du prix W. Eugene Smith (1991), du prix de la meilleure photo de l’année décerné par World Press Photo (1994), du prix Alfred Eisenstadt (1998) et du prix de la Fondation Hasselblad (1999).