Laurent-Olivier David | l'Encyclopédie Canadienne

Article

Laurent-Olivier David

Laurent-Olivier David, avocat, journaliste, propriétaire de journaux, écrivain, homme politique (né le 24 mars 1840 à Sault-au-Récollet (Montréal), au Québec; décédé le 24 août 1926 à Outremont). Il est à l’origine de la fondation du Monument-National et l’auteur de nombreuses biographies de personnalités canadiennes.
Laurent-Olivier David

Famille, formation et début de carrière

Laurent-Olivier David est le fils de Stanislas David, major de milice et cultivateur, et d’Élizabeth Tremblay. En 1869, il épouse en première noce Albina Chenet (décédée en 1887). Il contracte un deuxième mariage en 1892 avec Ludivine Garceau (décédée en 1915). De son premier mariage, il a un fils (Athanase David qui sera ministre dans les gouvernements de Lomer Gouin et de Louis-Alexandre Taschereau) et neuf filles. Il est le grand-père du sénateur Paul David et l’arrière-grand-père de l’ancienne co-porte-parole de Québec solidaire, Françoise David, et de la ministre libérale Hélène David.

Françoise David
Françoise David, co-porte-parole de Québec solidaire lors de l'élection générale québécoise de 2012
Athanase David

Laurent-Olivier David fait ses études classiques au Petit Séminaire de Sainte-Thérèse. Il s’inscrit ensuite à l’École de droit de François-Maximilien Bibaud, établie au Collège Sainte-Marie de Montréal, puis est admis au Barreau du Bas-Canada en 1864. Il exerce la profession d’avocat jusqu’en 1872, notamment avec Joseph-Alfred Mousseau qui sera premier ministre du Québec de 1882 à 1884 sous la bannière du Parti conservateur du Québec.

Journalisme et politique

De 1862 à 1884, le journalisme occupe une part importante de la vie de Laurent-Olivier David. Il est copropriétaire du journal Le Colonisateur (1862-1863) et rédacteur du journal antifédéraliste L’Union nationale (1864-1867). Il lance également deux journaux en collaboration avec des journalistes et des personnalités politiques du temps. Ainsi, en 1870, il fonde L’Opinion publique, un hebdomadaire illustré, avec Joseph-Alfred Mousseau et l’imprimeur George-Édouard Desbarats. Il en est l’éditeur en chef jusqu’en 1873. En 1874, il fonde avec Cléophas Beausoleil le journal Le Bien public qui devient l’organe officiel du Parti national. Laurent-Olivier David en est le copropriétaire et rédacteur en chef jusqu’en 1876. Au même moment, il est propriétaire, éditeur et rédacteur du quotidien Le Courrier de Montréal (1874-1876). Il est ensuite propriétaire et rédacteur de La Tribune (1880-1884) et collaborateur au journal Le Temps.

Desbarats, Georges
Georges Desbarats a inventé la similigravure, méthode de reproduction des images pour les journaux (oeuvres d'Irma Coucill).
Mackenzie, Alexander (premier ministre)
(avec la permission des Bibliothèque et Archives Canada/C-20052).

Sous le gouvernement d’Alexander Mackenzie, Laurent-Olivier David occupe les fonctions de traducteur et de greffier adjoint du scrutin et des débats à la Chambre des communes (1876-1878). Il est candidat libéral malheureux dans Hochelaga à l’Assemblée législative de la province de Québec en 1867 et 1875, ainsi qu’à la Chambre des communes en 1878. Cependant, il remporte la circonscription de Montréal-Est aux élections provinciales de 1886 et fait son entrée à l’Assemblée législative à titre de député libéral. Il ne se représente pas en 1890, mais brigue plutôt les suffrages aux élections fédérales de 1891 dans Montréal-Est où il est défait. Il tente une dernière fois, mais sans succès, de se faire élire dans Napierville aux élections provinciales de 1892. De 1892 à 1918, il est greffier du conseil municipal de Montréal et à partir de juin 1903, il cumule cette fonction et celle de sénateur de la division des Mille-Isles, poste qu’il occupe jusqu’à son décès en 1926. On lui offre également le poste de lieutenant-gouverneur des Territoires du Nord-Ouest, mais il le refuse.

Militantisme

Laurent-Olivier David est membre de différents organismes, notamment le Club canadien, la Ligue antialcoolique et la Société de protection des femmes et des enfants. Il valorise la tempérance et juge que seuls le vin et la bière devraient être en vente au Québec. À titre de député, il tente d’ailleurs de faire adopter un projet de loi en ce sens, mais celui-ci n’aboutit pas, car le comité chargé d’étudier le projet n’a jamais déposé son rapport. L’endettement de la classe ouvrière est un autre enjeu auquel il consacre une grande énergie (voir Histoire des travailleurs du Québec). À cette époque, un ouvrier peut se faire saisir ses meubles et jusqu’aux trois quarts de son salaire ou de ses gages pour dettes. Aussi, Laurent-Olivier David fait-il adopter plusieurs projets de loi pour restreindre ces pratiques créancières prohibitives.

En économie, il privilégie une approche protectionniste. Il milite dans LOpinion publique et lors d’assemblées populaires afin que le gouvernement protège l’industrie nationale et finit par obtenir gain de cause. Pendant quatre décennies, il défend également la colonisation et plus précisément la lutte à la pauvreté des colons. Il juge que les premiers défrichements, la construction d’une habitation, l’achat d’animaux de ferme et d’instruments aratoires devraient faire l’objet d’octrois gouvernementaux. À la suite de la rébellion des Métis de la rivière Rouge, il met sur pied un comité des amis de Riel qu’il copréside avec le conservateur George Duhamel. Le groupe multiplie les efforts pour éviter à Louis Riel la pendaison, notamment en organisant des assemblées et en envoyant lettres et pétitions.

Louis Riel
Louis Riel
Ce portrait a été vendu par La Presse après l'exécution de Louis Riel, le 16 novembre 1885. Dans son numéro du 21 novembre 1885, La Presse affirmait en avoir vendu plus de 50 000 copies à 10 cents chacune.
Monument à Louis Riel
Monument en l'honneur de Louis Riel, héro canadien et fondateur de la province du Manitoba, Canada.

Héritage

De 1887 à 1893, Laurent-Olivier David est président de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal. En 1888, il est délégué à la Convention nationale des Canadiens-français des États-Unis qui a lieu à Nashua, au New Hampshire. Il avait activement participé en 1874, 1880 et 1884, à l’organisation de ces grandes conventions réunissant des représentants des collectivités canadiennes-françaises, acadiennes et franco-américaines. En 1888, afin de donner à l’Association Saint-Jean-Baptiste les moyens pratiques de s’engager dans des œuvres sociales, il propose une idée qu’il a à l’esprit depuis des années : la construction du Monument-National. Malgré des difficultés financières, le projet se concrétise en 1890, alors que Laurent-Oliver David est député de Montréal-Est et qu’il a l’appui du premier ministre Honoré Mercier. Le Monument-National est achevé en 1894 et servira tour à tour d’école, de bureau, de théâtre et de music-hall. Laurent-Olivier David y fait jouer une de ses pièces de théâtre, Le drapeau de Carillon, un drame historique en trois actes, publié en 1902.Son souci pour la promotion du fait français en Amérique du Nord est une de ses constantes intellectuelles. Il fait ériger en France un monument dédié au général Montcalm et ses écrits riches et détaillés sur les patriotes de 1837-1838 présentent ces derniers comme des héros nationaux et des figures politiques méritoires qui ont saisi l’opportunité de la révolte, mais également la nécessité d’évoluer, y compris vers le conservatisme politique.

Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal
Arbre généaolgique des Présidents de la Société St. Jean Baptiste de Montréal depuis sa fondation en 1834
Souvenir of the St-Jean-Baptiste Day, Québec City (1880)
Monument-National
Monument national, Montréal. Conçu par Perrault, Mesnard et Venne, et construit en 1891-1893, cet immeuble abrite aujourd'hui l'École nationale de théâtre

Conservateur lui-même au début de sa vie publique, Laurent-Olivier David s’oppose au projet d’une confédération canadienne qu’il juge nuisible pour le Canada-Est. Il devient progressivement un libéral modéré et se lie d’amitié avec Wilfrid Laurier qu’il appuie dans ses politiques, notamment sur la question des écoles du Manitoba (voir Le Soleil). Idéologue non officiel des libéraux de Laurier, il s’efforce de réunir le plus harmonieusement possible un catholicisme de bon ton et un souci progressiste en matière d’éducation publique et de doctrine sociale. Ainsi, il est d’avis que les programmes d’éducation ne sont plus adaptés aux besoins du pays, qu’ils favorisent trop les professions libérales et les vocations religieuses. Les Canadiens-français devraient recevoir une formation pratique qui leur permette, comme à la population anglophone, d’accéder aux emplois lucratifs du monde du commerce et de l’industrie À cette fin, d’ailleurs, il préconise l’apprentissage de la langue anglaise.Dans son ouvrage Le clergé canadien, sa mission, son œuvre (1896), qui lui vaudra bien des déboires, il dénonce la vision de l’Église et notamment son ingérence dans les élections. Il se montre par la suite plus subtil dans la mise en circulation de ses idées. Ainsi, pour promouvoir le modèle social qu’il cherche à mettre de l’avant, il recourt largement au texte biographique. En effet, les nombreuses biographies de personnalités historiques canadiennes qu’il publie sont autant de touches apportées à la figure élitaire qu’il valorise (voir aussi Biographie de langue française).

Wilfrid Laurier
Une version modifiée de cette image de sir Wilfrid Laurier a paru dans Vanity Fair London, le 19 août 1897.
Wilfrid Laurier, M.P. (Drummond-Arthabaska), février 1875.
Honoré Mercier
Avocat, journaliste et politicien, Mercier fut premier ministre du Québec du 27 janvier 1887 au 21 décembre 1891.

Tout au long de sa vie, Laurent-Oliver David ne cesse d’écrire dans les journaux sur un vaste ensemble de sujets : la politique, le commerce, l’économie, la colonisation, l’industrialisation, les relations avec les États-Unis, le statut constitutionnel de la province de Québec au sein du Canada, les grèves ouvrières et le droit de vote des femmes. Son œuvre écrite est abondante. Exprimée dans une prose sobre et élégante, elle documente fort bien la vision sociopolitique des élites francophones de son temps. En 1922, Athanase David crée, en l’honneur de son père, les prix David (aujourd’hui les prix du Québec) qui récompensent les travaux des écrivains et des scientifiques du Québec. La rue L.-O.-David, à Montréal est nommée à sa mémoire.

Publications (liste partielle)

Biographies et portraits (1876)

Le héros de Châteauguay (1883)

Les patriotes de 1837-1838 (1884)

Mes contemporains (1894)

Les deux Papineau (1896)

Le clergé canadien, sa mission, son œuvre (1896)

L’union des deux Canadas, 1841-1867 (1898)

Le drapeau de Carillon (1902)

Laurier et son temps (1905)

Histoire du Canada depuis la Confédération (1909)

Souvenirs et biographies, 1870-1910 (1911)

Mélanges historiques et littéraires (1917)

Laurier, sa vie, ses œuvres (1919)

Gerbes canadiennes (1921)

Au soir de la vie (1924)

Prix et distinctions

Membre de la Société Royale du Canada (1890)

Président de la section française, Société Royale du Canada (1904 et 1905)

Chevalier de la Légion d’honneur, République française (1911)