Tribune de la presse parlementaire canadienne | l'Encyclopédie Canadienne

Article

Tribune de la presse parlementaire canadienne

La Tribune de la presse parlementaire canadienne (TPPC) est une entreprise autonome composée de journalistes accrédités qui couvrent le Parlement et les autres organisations et institutions gouvernementales à Ottawa. Les tribunes de presse, ou les associations équivalentes, sont des institutions démocratiques importantes qui servent le public (en l’informant des actualités politiques) et le gouvernement (en diffusant ses messages). Les agences de presse, dont les membres constituent la TPPC, jouent un rôle important pour la société en diffusant l’information, en fournissant des analyses, en posant des questions et en s’assurant que les fonctionnaires rendent compte de leurs actions. Chaque assemblée législative provinciale est dotée d’une tribune de presse.

Tribune de la presse
Session de la Tribune de la presse, 1880, Ottawa (avec la permission des Bibliothèque et Archives Canada/C-4515)
Tribune parlementaire (1880)


Création et histoire

Bien que la couverture médiatique des activités législatives existait bien avant la Confédération, la TPPC est fondée en 1867 en tant qu’organisation autonome, qui relève du Président de la Chambre des communes. Fait important : les seules archives des débats parlementaires des premières années de la Confédération sont celles que des journalistes de la TPPC avaient rapportées. Jusqu’en 1880 à la Chambre des communes et jusqu’en 1871 au Sénat, il n’y avait aucun compte-rendu officiel des procédures de la Chambre des communes (voir Hansard).

La TPPC voit le jour en tant que club restreint et exclusif de journalistes qui entretiennent des relations étroites avec les politiciens sur lesquels ils écrivent. Au XIXe siècle, les journaux étaient essentiellement des véhicules de propagande partisane, et les journalistes étaient généralement affiliés à un parti politique.

Depuis, beaucoup de choses ont changé à la TPPC. Tandis que ses premiers membres provenaient exclusivement de la presse écrite, elle devient plus inclusive et, par conséquent, moins homogène lorsqu’elle admet les diffuseurs en 1959, puis les techniciens de son et de caméra en 1982. Elle se distance également de la partisanerie flagrante à partir de la Première Guerre mondiale, lorsque les avancées technologiques et sociales créent la presse commerciale et que l’objectivité, plutôt que le favoritisme, devient la priorité des agences de presse.

Organisation

Aujourd’hui, la TPPC est une entreprise autonome qui est constituée de « journalistes, photographes, caméramans, preneurs de son et autres professionnels, dont la principale occupation est de couvrir, d’interpréter ou de produire les nouvelles du Parlement et du gouvernement fédéral ». Ses membres doivent être affectés à Ottawa, en plus de disposer de l’accès aux édifices du Parlement dans le cadre de leur travail. Ils couvrent non seulement les activités de la législature et des comités parlementaires, mais aussi celles du premier ministre, du Cabinet et de la fonction publique. Beaucoup de ses membres couvrent également les campagnes électorales. Les membres de la TPPC travaillent pour le compte d’agences médiatiques reconnues, mais peuvent aussi être des travailleurs autonomes si leur principale occupation est de couvrir les activités du gouvernement et les politiques fédérales.

La TPPC est soutenue par un secrétariat fourni par le Parlement. Ce personnel n’est affilié à aucune agence de presse, mais est considéré comme membre de la TPPC. Il s’agit d’employés du Parlement qui relèvent des greffiers de la Chambre des communes et du Sénat.

Le budget de fonctionnement de la TPPC provient principalement de la Chambre des communes et des cotisations de ses membres.

Membres

La TPPC est composée d’environ 350 journalistes qui travaillent à temps plein pour divers journaux, magazines, diffuseurs et sites Web. Ceux-ci observent et couvrent les débats législatifs, y compris la période de questions (voir Procédure parlementaire) et les réunions des comités parlementaires, ainsi que les cours de justice et la fonction publique. Ils interviewent également les politiciens dans les mêlées et les conférences de presse.

Les membres de la TPPC occupent des sièges réservés aux médias dans les salles de comités, ainsi qu’à la Chambre des communes et au Sénat. (Les reporters qui ne sont pas des membres à temps plein peuvent également assister à ces rencontres lorsqu’ils reçoivent des accréditations temporaires de la TPPC.) De plus, les membres de la TPPC ont accès à la salle de lecture du Parlement, disposent du privilège d’emprunt à la bibliothèque du Parlement, et peuvent accéder aux installations à l’intention des médias à la Cour suprême du Canada, à la Banque du Canada, à Statistique Canada et aux salles d’information du quartier général de la Défense nationale.

Même si le nombre de membres accrédités à la TPPC est demeuré relativement stable depuis les années 1980, les organisations pour lesquelles ils travaillent ont changé considérablement. Les médias régionaux et provinciaux ont presque complètement disparu de la TPPC, et les journaux comme le Hamilton Spectator, le Regina Leader Post et le Western Producer n’ont plus de bureaux à Ottawa. Par conséquent, la TPPC est dorénavant composée de journalistes affiliés à des organisations nationales. Christopher Waddell, professeur agrégé de l’Université Carleton et à la chaire Carty en journalisme économique et financier, est d’avis que la couverture médiatique de la politique canadienne se fait aujourd’hui d’un point de vue exclusivement national en raison de ce changement. Cela signifie que les actualités portent sur des enjeux d’intérêt national plutôt que sur les préoccupations provinciales ou régionales, et que les députés indépendants reçoivent une attention minime. Puisque le régionalisme est une caractéristique majeure de la politique canadienne, l’affaiblissement des voix provinciales et régionales a une incidence sur la qualité du journalisme politique. L’exception à la règle est la province de Québec, qui continue d’avoir une présence marquée à la TPPC. De plus, le Toronto Star, le plus important journal quotidien au pays qui demeure un journal régional, conserve ses bureaux à Ottawa.

Les médias régionaux, dont la présence a diminué considérablement à la TPPC, ont donc été remplacés par d’autres agences de presse. L’invention d’Internet a permis l’arrivée de nouveaux acteurs dans le monde de la presse. Les agences médiatiques en ligne telles que iPolitics et Rabble.ca ont aujourd’hui des bureaux à Ottawa, et des journalistes des sites comme BuzzFeed Canada et The Tyee ont des accréditations de la TPPC qui leur donnent accès aux édifices du Parlement.

En raison de la nature multiculturelle du Canada, la TPPC comprend également un certain nombre d’agences de presse représentant différentes cultures. Ainsi, la couverture médiatique du Parlement est effectuée dans une multitude de langues et s’intéresse aux préoccupations de divers groupes culturels du Canada.

Installations

La TPPC est installée dans une pièce de l’édifice du Centre (voir Édifices du Parlement), connue sous le nom de « salle des dépêches ». Dans les années 1960, la capacité de la salle des dépêches ne suffisait pas pour accueillir tous les journalistes accrédités. Pour résoudre ce problème, le gouvernement a prêté en 1967 un édifice situé de l’autre côté de la rue, en face de l’édifice de l’Ouest de la Colline du Parlement, le renommant « Édifice national de la presse ». La TPPC est aujourd’hui située dans ce bâtiment, où de nombreuses agences de presse ont des bureaux. Au début des années 2000, les grands médias se sont installés à divers endroits au centre-ville d’Ottawa. L’Édifice national de la presse accueille également l’Amphithéâtre national de la presse, où des conférences de presse ont lieu.

Controverses

Les relations entre les politiciens et la TPPC ont beaucoup changé depuis les liens intimes entre ceux-ci au XIXe siècle. Le professeur en communications Daniel Paré et la journaliste Susan Delacourt disent que les relations entre la presse et les politiciens au Canada fluctuent entre la rivalité saine et l’hostilité manifeste. La presse utilise les politiciens comme source d’information tout en gardant la maîtrise du contenu et de la structure des actualités qu’elle publie, tandis que les politiciens veulent que les médias livrent leurs messages au public en version intégrale et incontestée.

Depuis le gouvernement de Pierre Elliott Trudeau, les premiers ministres ont souhaité une distance accrue entre les politiciens et les médias. Le livre Scrum Wars, de l’auteur et journaliste Allan Levine, qui analyse les rapports entre les premiers ministres canadiens et la presse, avance que l’indifférence de Pierre Trudeau à l’égard des médias a mené à des relations tendues entre son gouvernement et la TPPC.

Récemment, les relations entre la TPPC et le Cabinet du premier ministre se sont envenimées peu après l’arrivée au pouvoir du Parti conservateur, en 2006. Le Cabinet du premier ministre avait réduit les mêlées de presse en excluant les reporters du hall à l’extérieur du Cabinet et en arrêtant de diffuser les heures des rencontres du Cabinet et du caucus (les réunions hebdomadaires des députés et des sénateurs). Le Parti conservateur avait aussi commencé à choisir les journalistes qui pouvaient poser des questions aux conférences de presse en fonction d’une liste de noms établie à l’avance.

À partir du 7 avril 2006, la TPPC a boycotté la liste pendant trois mois, affirmant que ses journalistes poseraient des questions comme bon leur semble et qu’ils n’accepteraient pas les directives du Cabinet du premier ministre ni de personne qui n’est pas membre de la TPPC. En guise de réponse, les conservateurs ont commencé à utiliser d’autres voies de communication, comme les médias locaux, les médias sociaux et les blogueurs, pour contourner la TPPC. Le boycottage s’est poursuivi, mais la persistance a commencé à s’effriter au sein de la TPPC, et un nouveau dirigeant a tenté de négocier un compromis avec le Cabinet du premier ministre. En octobre 2006, certains journalistes, en raison de la pression exercée par leur employeur, se sont pliés aux conditions du Cabinet du premier ministre.

Jusqu’à l’été 2015, après neuf ans au pouvoir, le premier ministre n’a tenu que quelques conférences de presse à Ottawa, limitant ses interactions avec la presse à quelques séances de photos où les questions n’étaient pas permises.

Souper de la TPPC

Le souper de la TPPC est un gala qui se tient annuellement à Ottawa lors duquel les journalistes invitent les représentants du gouvernement, les diplomates et les députésà passer la soirée en leur compagnie. Le gala, qui remonte à la Confédération, est caractérisé par un humour bon enfant et des discours amusants de la part des politiciens. L’événement était traditionnellement privé et secret jusqu’à ce qu’il soit annulé de 1992 à 1996. Le souper a été réinstauré en 1997, mais sous forme officielle et publique, en réponse aux médias qui avaient soulevé le problème éthique que représentait la confidentialité entre journalistes et politiciens.

Le gala de presse n’est pas diffusé, mais il est couvert par les journalistes. Il représente maintenant l’occasion pour les politiciens de présenter leur côté humoristique et leur personnalité au public. De nos jours, les discours que tiennent les politiciens pendant la soirée peuvent être des sources de commérages pendant plusieurs jours, comme ça a été le cas avec le discours de la chef du Parti vert, Elizabeth May, au souper de 2015 pendant lequel elle a déclaré qu’Omar Khadr avait « plus de classe que tout le f—ing Cabinet », en lien avec la libération sous caution de celui-ci et de la réponse du gouvernement à cet égard. Le discours d’Elizabeth May avait été considéré comme empreint de politique partisane, qui est historiquement exclue au gala de presse. Certains analystes ont toutefois affirmé que la politicienne avait été injustement ciblée pour ses commentaires, qui ont néanmoins créé la controverse.

Importance

Les médias représentent la première source d’information en matière de politique pour les citoyens canadiens; sans eux, ces derniers ne peuvent prendre de décisions politiques éclairées. Les médias sont également les surveillants du système politique. Ils examinent attentivement les actes du gouvernement, des partis politiques et des politiciens, et obligent ceux-ci à rendre compte de leurs décisions. L’importance des médias pour la démocratie est ancrée dans l’article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantit la liberté d’expression et de presse. La TPPC est importante par son savoir et sa portée; ses membres sont capables de faire le pont entre les enjeux politiques complexes et les événements de façon concise et accessible à un public vaste.

En savoir plus

Lecture supplémentaire

Liens externes