Musique à Sherbrooke | l'Encyclopédie Canadienne

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Musique à Sherbrooke

Située au sud du Québec, à mi-chemin entre Québec et Montréal, et atteignant avec sa banlieue quelque 129 000 habitants (1990), la ville de Sherbrooke a été surnommée « Reine des Cantons de l'Est » ou de « l'Estrie », une appellation plus récente de cette région.

Sherbrooke

Située au sud du Québec, à mi-chemin entre Québec et Montréal, et atteignant avec sa banlieue quelque 129 000 habitants (1990), la ville de Sherbrooke a été surnommée « Reine des Cantons de l'Est » ou de « l'Estrie », une appellation plus récente de cette région. Reels et chansons devaient faire partie des habitudes des premiers Loyalistes qui vinrent des É.-U. après 1776 et peuplèrent ces vastes terres. Un hameau issu du regroupement des habitants autour du moulin, établi en 1796 par Gilbert Hyatt, reçut en 1818 le nom du gouverneur général de l'Amérique du Nord britannique, sir John Coape Sherbrooke.

Musique liturgique et chorale
Ce sont les lieux du culte qui furent (1820-70) les premiers témoins d'une vie musicale devenue plus intense après 1870. Les églises étaient nombreuses vu la diversité des allégeances religieuses. Des chanteurs comme George Armitage et Fred H. Bradley étaient attachés à l'église méthodiste Trinity, construite en 1856; d'autres, dirigés par A.F. Waterhouse, y donnèrent de grands concerts avec des solistes de réputation, dont Lynnwood Farnam, organiste, et Marie Hollinshead, soprano. On présenta des oeuvres comme Hymn of Praise de Mendelssohn, Gallia de Gounod et le Stabat Mater de Rossini.

Au début du siècle, les organistes William Reed, Mme Holland, Alfred Whitehead et, plus tard, Graham George étaient rattachés à l'église anglicane Saint Peter's datant de 1844. La présence des chanteurs Cecil Bowen et Arthur Dorey, qui créa des festivals (rassemblement de plusieurs chorales pour l'exécution d'oratorios), se fit remarquer dans le choeur de Saint Peter's. À l'église Plymouth, l'organiste Frank Stone composa un opéra, Sardianopolis, présenté par des artistes locaux. De fréquents concerts, dont un « mai musical » annuel, furent donnés et il semble que cette église ait été un centre populaire où se jouait la meilleure musique. Des chanteurs réputés furent invités pour les Burns Concerts à l'église presbytérienne Saint Andrew's. Bertha, Evelyn et Clifford Price de l'église adventiste jouèrent un rôle important dans l'organisation de groupes musicaux. Bertha, mezzo-soprano et pianiste, enseigna aux jeunes et forma avec eux un orchestre fort populaire (v. 1914-18); Evelyn, violoniste, et Clifford, violoncelliste, furent mêlés à divers groupements comme le premier Sherbrooke Symphony Orchestra (1923-27).

Du côté catholique, la cathédrale Saint-Michel fut le centre d'un mouvement musical intense. En 1874, on y installa un orgue Couillard à deux claviers inauguré par Rosa d'Erina qui était aussi chanteuse. H.-O. Doré, professeur au collège de Sherbrooke, y dirigea un choeur mixte. Le chant liturgique fut assuré par les étudiants du séminaire (1875-1910) sous la direction de l'abbé J.-H. Roy. Alors que le séminaire Saint-Charles organisait ses propres offices du culte (1910), le notaire Ernest Sylvestre fonda la chorale de la cathédrale de Sherbrooke. En plus de la musique religieuse, on présentait des opéras, oratorios et cantates. En 1918, la cathédrale acquit un Casavant à trois claviers, dont l'un des titulaires fut pendant de longues années Louis-Édouard Codère, chef d'une famille de musiciens qui eut une influence considérable. Sa femme, née Joséphine Doherty, pianiste et compositrice, vit son travail d'animation musicale reconnu par les Palmes académiques du gouvernement français (1929). Oscar Cartier, pianiste, organiste et compositeur, prit la relève du notaire Sylvestre et adapta pour son choeur de 50 voix d'hommes des messes de Gounod et Dubois, et même la Missa Papae Marcelli de Palestrina.

La rénovation grégorienne de la fin des années 1930 ainsi que la fondation de l'Institut grégorien par Mgr Maurice O'Bready (dont la salle du Centre culturel de l'Université porte aujourd'hui le nom) avec le concours des Bénédictins de Saint-Benoît-du-Lac entraînèrent le départ de la plupart des membres de cette chorale. C'est ainsi que les chorales de Saint-Jean-Baptiste, Saint Patrick et Sainte-Thérèse-d'Avila ont hérité de chantres qui continuèrent le style pratiqué par le choeur de la cathédrale entre 1910 et 1940. Ce choeur se conforma à la réforme grégorienne de Solesmes avec Paul-Émile Letendre, organiste et dir. J.-B. Marcoux y dirigea (1950-67) une manécanterie qu'il avait fondée. Au début des années 1960, le Choeur Pie X assuma la tâche de stimulation du milieu musical entreprise par le choeur de la cathédrale, surtout en assurant les parties chorales pour l'Orchestre symphonique de Sherbrooke. La Chorale Saint-Jean-Baptiste fondée par Eugène Caron, organiste et compositeur, fut prise en charge par le notaire Georges Sylvestre en 1925 et demeura pendant plus de 25 ans le centre de la vie musicale dans l'est de la ville. Des groupes de musique légère se sont aussi formés et les Minstrel Shows firent connaître Allan McIver et Germaine Janelle comme accompagnateurs. Les Chanteclers, un choeur a cappella, fut fondé par H. Saint-Pierre (1935). En 1971 naissait Héritage, chorale de 60 voix dirigée par Marc Bernier et consacrée à la diffusion de la chanson québécoise. En septembre 1980, Brian Ellard fonda le Choeur symphonique de l'Université de Sherbrooke, qui a assuré les parties chorales à l'OS de Sherbrooke en plus de donner ses propres concerts. Le choeur Pie X, dont les membres furent invités à se joindre à la nouvelle formation, fut dissout à cette occasion. Regroupant une centaine de voix, le Choeur symphonique a été dirigé par Ellard (1980-83), Thérèse Lupien (1983-85, 1987-89), Andréï Bedros (1985-87) et Marc Bernier (1989 -). L'Ensemble vocal de Sherbrooke, dirigé par Jean-François Sénart (1984-90), a gravé deux disques chez SNE.

Associations musicales

Vers la vin du XIXe siècle, Mme Henry Odell fonda avec une centaine de dames le Ladies' Musical Club qui organisa des concerts avec des artistes comme Emma Albani et J.-B. Dubois. L'Union musicale de sherbrooke, importante société à but culturel qui avait été active de 1892 à 1896, fut réorganisée en 1921. Le Schubert Music Club (1926-v. 1950), qui regroupait une trentaine de musiciens locaux, invita notamment Gordon T. Brand, baryton, Audrey Cook, violoniste, Alfred O'Shea, ténor, Paul De Marky, pianiste, et Richard Crooks, ténor du Metropolitan Opera. Deux associations, le Jeudi musical (1936) et l'Art intime (1943), ont contribué jusque vers 1960 à stimuler la vie musicale en obligeant leurs membres à se produire en public et en aidant financièrement de jeunes musiciens comme le violoncelliste Émile Préfontaine et le compositeur Serge Garant. La Société des concerts de Sherbrooke, affiliée à Community Concerts de New York, a fait entendre (1938-74) au théâtre Granada des artistes internationaux, dont Mischa Elman, Bidú Sayão et Rudolf Serkin. Le Festival des Cantons, qui se déroulait chaque été à Sherbrooke à partir de 1974, donnait lieu à des réjouissances populaires où la musique traditionnelle faisait l'objet de nombreux spectacles, concours d'amateurs, etc. C'est aussi à Sherbrooke que fut présenté le tout premier concert des JMC, par Noël Brunet et Suzette Pratte, le 19 janvier 1950.

Groupes instrumentaux

L'Harmonie de Sherbrooke ou Sherbrooke Band fut fondée en 1882 comme corps de musique municipal et dirigée successivement par François Héraly, J.-J. Goulet, Charles Delvenne, Georges Sylvestre, Sylvio Lacharité et Marcel Marcotte. Les corps instrumentaux des écoles polyvalentes ont pris partiellement la relève de l'Harmonie qui a cessé son activité en 1968. La Victoria Band (1876) liée au 53e régiment était dirigée par deux musiciens venus d'Angleterre, J. Whiteley et J. Eave. La fanfare d'Uldéric Brien fondée après la Première Guerre mondiale portait les couleurs du 54e régiment. En 1923, Irwin Sawdon, licencié du RCM, fonda le Sherbrooke Symphony Orchestra qui regroupait 50 instrumentistes locaux. Alfred-Sévère Bourgeault en fut le violon solo. Quand Sawdon retourna en Angleterre, le groupe se dispersa en 1927. Le violoniste Paul-Émile Fortier fonda la Symphonette (1932) composée d'instrumentistes jouant pour leur plaisir. L'OS de Sherbrooke fut fondé par Sylvio Lacharité en 1939. En 1974, l'Ensemble classique optimiste de Sherbrooke fut établi. Rebaptisé OS des jeunes de Sherbrooke, il comptait 75 jeunes instrumentistes en 1990. Chantal Juillet fut violon solo de cette formation qui a eu Czeslaw Gladyszewski et Jacques Clément comme chefs d'orchestre. En 1990, son chef Marc David était aussi dir. mus. de l'OS de Sherbrooke et de l'Orchestre de chambre de l'Estrie, fondé par David et Mary OKeefe en 1989. L'Ensemble à vents de Sherbrooke, fondé en 1982-83 par Brian Ellard et repris par René Béchard, a cherché à combler le vide créé par la disparition de l'Harmonie de Sherbrooke, tout en s'adaptant aux besoins plus actuels, surtout dans le domaine du jazz. Il comprend 40 musiciens dont plusieurs proviennent des rangs de l'OS de Sherbrooke.

Formation musicale

Une ancienne élève du Cons. de Paris, Mme Holland, enseignait l'orgue, le piano et le chant à la fin du XIXe siècle. Ida Campbell (Mme François Héraly), premier professeur de Wilfrid Pelletier, fut son élève. Eugénie Caron (Mme Charles O'Shea) se consacra à l'enseignement de l'orgue et du piano dès 1900. Subséquemment, les violonistes A.-S. Bourgeault, Horace Boux et Laurent Champigny enseignèrent les instruments à cordes alors que Paul-Marcel Robidoux et Réjane Marcotte, une élève de Léo-Pol Morin, étaient parmi les nombreux professeurs de piano. Le Mont Notre-Dame et le couvent Jésus-Marie ont formé surtout des pianistes. Le séminaire Saint-Charles possédait son harmonie et son orchestre. Les Filles de la Charité du Sacré-Coeur ont institué un cours de musique (1958) qui s'est développé en une École de musique affiliée à l'Université de Montréal (1964-67) pour l'octroi du B.Mus. Les écoles Sacré-Coeur et Mitchell, premières écoles publiques au Canada à offrir la musique comme matière principale, de même que plusieurs écoles polyvalentes apportent un soin particulier à l'enseignement musical. Le cégep de Sherbrooke possède son dépt de musique depuis 1970. L'Université de Sherbrooke, à laquelle fut affiliée l'École Vincent-d'Indy (1970-78), tenta d'établir sa propre école de musique en 1979 avec Brian Ellard comme dir., mais le projet ne fut pas réalisé. L'Université Bishop's de Lennoxville, dans la banlieue immédiate de Sherbrooke, possède son dépt de musique depuis 1967 et présente des concerts à son Centennial Theatre. La proximité du Centre d'arts Orford à Magog permet également à la population de Sherbrooke d'assister à des concerts de qualité. En 1990, Thérèse Lupien mit sur pied le Festival-concours de musique de Sherbrooke et de la région de l'Estrie, reconnu par la FCMF, et en a assuré la coordination.

On remarque parmi les musiciens nés à Sherbrooke ou dans la région : Eugène Caron, Gabriel Charpentier, Clémence Desrochers, Claude Gingras, Ralph Gustafson, Sylvio Lacharité, Denis Langelier, Jacques et Robert Langevin, Édouard LeBel, Marcel Marcotte, Allan McIver, François, Hélène et Isabelle Panneton, Émile Préfontaine, Ti-Blanc et Michèle Richard, Renald Saint-Pierre et William-Arthur Wayland. La Société d'histoire de Sherbrooke possède plusieurs fonds d'archives relatifs à la vie musicale de la ville.

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