Trouver sa place, épisode 1 : Comment nous sommes arrivés ici | l'Encyclopédie Canadienne

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Trouver sa place, épisode 1 : Comment nous sommes arrivés ici

Écoutez Trouver sa place, un balado en cinq parties de Historica Canada.

Le Canada que nous connaissons aujourd’hui a été formé par des politiques qui encouragent l’immigration et accueillent des gens de tous les coins du monde. Mais ce cheminement vers un Canada multiculturel n’a pas été un droit chemin.

Dans cet épisode, Guy Freedman, Métis de Flin Flon et président du First Peoples Group, et l’historien docteur Jan Raska du Musée canadien de l’immigration du Quai 21, nous aident à comprendre comment nous en sommes arrivés là où nous nous trouvons aujourd’hui.

Guy Freedman : J’aimerais poser une question à tout le monde. Où êtes-vous né? D’où vos ancêtres proviennent-ils du côté de votre père et de votre mère? Et quel est votre endroit préféré au monde?

Narratrice : Voici Guy Freedman. Il est président du First Peoples Group, une firme autochtone de consultants qui offre de la formation, de la facilitation et des services de consolidation de relations. Il a aussi été conseiller-cadre auprès de la Commission de vérité et réconciliation.

GF : Je vais aussi me présenter en ojibwé : Kwingogwaági Pizhew. Je me suis présenté en ojibwé parce qu’on m’a donné ces noms lors d’une cérémonie, lorsque j’ai reçu un diagnostic de cancer de stade quatre il y a à peu près huit ans.

N : Son endroit préféré au monde?

GF : Je suis un Métis de cinquième génération. Je suis né et j’ai été élevé à Flin Flon, au Manitoba, il y a longtemps, et c’est encore mon endroit préféré au monde.

N : C’est maintenant votre tour. Prenez le temps de répondre aux questions de Guy : où êtes-vous né, d’où vos ancêtres viennent-ils, et quel est votre endroit préféré au monde? Pour plusieurs Canadiens, les réponses aux deux premières questions impliquent probablement un pays autre que ce qui est aujourd’hui le Canada. Le pays que nous connaissons aujourd’hui a été façonné par des politiques qui encouragent l’immigration et accueillent un large éventail de personnes venant de partout sur la planète. En effet, plus du quart de la population actuelle du Canada est née à l’étranger. Mais le chemin vers un Canada multiculturel n’a pas été un chemin sans embûches. Comme vous l’apprendrez au cours de cette série en cinq parties, plusieurs politiques gouvernementales des 19e et 20e siècles restreignaient ou bannissaient surtout les communautés non européennes à entrer au pays.

Même si elles réussissaient à s’installer ici, plusieurs personnes faisaient face à des difficultés dans une société qui, historiquement, voyait les immigrants, particulièrement ceux qui n’étaient pas blancs, comme « indésirables ». Apprendre ces aspects de l’histoire du Canada nous aide à comprendre comment nous sommes arrivés ici aujourd’hui.

Voici Trouver sa place : une histoire du multiculturalisme au Canada.

Comment en sommes-nous arrivés là?

JR : La frontière canadienne, si on veut, s’est manifestée à l’étranger.

N : Voici Jan Raska.

JR : Je suis historien au Musée canadien de l’immigration du Quai 21, à Halifax.

N : Le Quai 21 est situé à Mi’kma’ki, le territoire ancestral et non cédé du peuple Mi’kmaq. De 1928 à 1971, c’était le port d’entrée officiel pour plusieurs immigrants arrivant au Canada.

JR : Étant sur la côte est du Canada, et étant donné la popularité du voyage en navire pour venir au Canada, il accueillait, naturellement, les populations des centres européens. Les immigrants partaient donc souvent des ports de Liverpool, de Southampton, du Havre en France, ou de Hambourg en Allemagne, par exemple. Cela nous mène à penser, bien sûr, que la grande majorité de l’immigration au Canada passant par le Quai 21 était blanche et européenne.

N : Fermez vos yeux et prenez une grande respiration. Imaginez les odeurs et les sons du port alors que vous attendez en ligne pour embarquer sur un immense navire, un navire si grand qu’il vous faudrait plusieurs heures pour traverser tous ses corridors: l’air marin salé, le bavardage indéchiffrable des foules, une corne de navire au loin. Éventuellement, vous montez à bord et le bateau prend mer. 

Après quelques jours passés majoritairement sous le pont, vous quittez votre petite couchette et faites votre chemin dans le long corridor étroit, dépassant des enfants qui crient, des mères épuisées et des hommes qui jouent aux cartes. Eux, comme vous, attendent l’heure où le navire touchera la terre qui sera bientôt leur nouvelle patrie. Lorsque vous arrivez à l’extérieur, l’air est frais et aussi salé que lorsque vous êtes embarqué. Les cris stridents des mouettes au loin coupent au travers du bavardage des autres passagers. Vous vous étirez le cou pour voir au-delà de la balustrade, et vous apercevez pour la première fois votre nouveau pays : le Canada.

N : Si vous arriviez au Canada par bateau en passant par le Quai 21, une journée normale avait l’air de ceci : en débarquant du bateau, on vous amenait vers le hangar d’immigration du Quai 21.

JR : Et pendant qu’ils se dirigeaient vers la salle des assemblées, ils passaient auprès des agents canadiens de la santé et de l’immigration. Ceux-ci gardaient l’œil ouvert pour tout signe visible de maladie afin de voir si certains individus devaient immédiatement être détenus ou mis en quarantaine.

N : Normalement, cela se produisait si vous aviez quelque chose de contagieux comme l’influenza ou la rougeole.

JR : Ceux qui semblaient visuellement en santé étaient amenés dans la salle des assemblées…

Si vous aviez tous vos documents et si, par exemple, vous compreniez l’anglais ou le français, votre entrevue d’immigration ne durait généralement que quelques minutes. On examinait vos documents, on vous posait quelques questions comme, par exemple : « Où allez-vous? », « Quelle est votre destination finale? », « Avez-vous déjà un emploi? », « Avez-vous de la famille qui vit au Canada? ».

N : Si tout était en ordre, vous obteniez un tampon sur votre carte d’immigration vous octroyant le statut d’immigrant. Le prochain arrêt était la voie piétonnière, un long corridor ressemblant à un tunnel reliant le bâtiment de l’immigration à l’annexe de l'autre côté de la rue.

JR : Dans le tunnel se trouvaient des agents des douanes canadiennes qui inspectaient vos objets personnels, vos poches et vos sacs pour voir si vous aviez des objets taxables, comme des cigarettes et de l’alcool, pour lesquels vous n’aviez pas déjà payé de taxes. Ils vérifiaient aussi, bien sûr, si vous aviez des objets de contrebande ou des objets nuisibles à l’économie ou à l’agriculture canadiennes. Dans ce cas précis, il s’agissait de viandes, de plantes, de graines, de la terre étrangère, et ce genre de choses.

N : À ce moment, vous avez déraciné toute votre vie, et peut-être pas par choix. Ce n’est pas si facile de vous départir de petites choses qui proviennent de chez vous, même si ce ne sont que de petites choses, comme votre salami préféré ou une liqueur faite maison.

JR : Il y a des histoires de femmes âgées poussant des agents des douanes lorsqu’elles apprennent qu’elles devront abandonner certaines de ces choses qui leur tiennent à cœur, car elles ne sont pas permises au Canada.

N : Une fois passé les agents des douanes, vous entrez dans l’annexe. Ici, vous êtes accueillis par un grand groupe de personnes, dont plusieurs vous parlent dans des langues étrangères. Vous reconnaissez des bribes d’italien, d’allemand, de néerlandais. On vous dit qu’il s’agit de bénévoles d’organismes comme la Croix-Rouge, les Sœurs du service, le YMCA, le YWCA ou la Société d'aide à l'immigration juive.

JR : Ils essayaient de répondre à vos questions dans votre langue maternelle. Ils essayaient de rendre plus facile l’expérience d’arriver au Canada par cet important port d’entrée maritime.

N : Ils allaient peut-être surveiller vos enfants pendant que vous alliez faire une sieste ou vous montrer où vous pouviez acheter un repas.

JR : Ils étaient vraiment là pour assurer le bien-être et répondre aux besoins spirituels des immigrants qui arrivaient.

N : Lorsque vous ramassez vos bagages à la consigne de bagages…

JR : Vous deviez ensuite attendre pour le train vers Montréal. Souvent, ou dans la plupart des cas, les immigrants prenaient le train de Halifax à Montréal, puis vers d’autres destinations plus à l’ouest comme Toronto, Winnipeg ou Vancouver. Il y avait une minorité de gens qui restaient à Halifax ou qui s’établissaient de façon permanente au Cap Breton, dans la vallée d’Annapolis ou dans d’autres endroits du Canada atlantique.

N : Après quelques heures, le train arrive finalement. Vous embarquez, prêt à commencer votre nouvelle vie au Canada.

JR : Il y a une perception qui veut que le Canada soit un pays de Cocagne… où les gens pouvaient venir et réaliser de grandes choses, pour eux et leurs familles.

N : Mais avant 1967, les immigrants venaient pratiquement tous d’une certaine région du globe. 

JR : Et à cette époque, notre notion de multiculturalisme, je crois, était certainement un peu différente du type de multiculturalisme que nous retrouvons au Canada aujourd’hui. 

N : C’est parce que pendant plus d’un siècle, le gouvernement canadien a découragé ou même banni l’entrée de certains immigrants au pays. Cette liste comprenait les personnes venues d’Asie, les Noirs, les Roms et les juifs, parmi d’autres. Nous parlerons de certaines de ces communautés au fil de cette série.  Mais les politiques gouvernementales ne visaient pas seulement à interdire l’entrée à certains immigrants : plusieurs d’entre elles affectaient les peuples autochtones qui étaient ici depuis des millénaires. L’un des pires exemples a été le système des pensionnats indiens…

GF : … Qui a existé des années 1800 jusqu’à ce que le dernier pensionnat ferme ses portes en 1996, l’année où notre plus jeune fille est née.

N : Il y a aussi eu des délocalisations de communautés et la Rafle des années 60, toutes mises en œuvre avec l’intention de régler le soi-disant « problème des Indiens » au Canada. Aujourd’hui, ces efforts sont reconnus comme un génocide culturel.

GF : Je n’essaie pas de blâmer ou de couvrir de honte les gens qui n’ont pas compris leur histoire, mais tout est expliqué en ligne, à la portée de tous. Vous pouvez trouver tout ce que vous voulez au sujet de ce pays, de ce point de vue. Associé au pardon, on trouve la culpabilité. Il existe une excellente citation de l’auteur Mi’km’ak, Daniel Paul, qui dit que tant que le Canada ne fera pas face au péché de son passé, il ne pourra avoir l’âme en paix.  

Nous serons de retour après une courte pause.

RSA PROMO

Riley Burns: Je ne voulais pas être un Indien. Je ne savais pas qui je voulais être. Je n’étais pas accepté par l’homme blanc et je n’étais pas accepté par mon propre peuple dans ma réserve...

Larry Langille: Je ne sais pas ce que j’aurais été si je n’avais pas passé par ce système. Je sais que j’aurais eu une certaine éducation. Je n’ai aucune éducation. Je ne peux ni lire ni écrire, ils s’en fichaient…

Piita Irniq : L’année 1958, que je sache ou non quoi que ce soit à ce sujet à l’époque, a marqué le début de la fin de ma propre culture et de ma propre langue, et de ma propre spiritualité inuite... 

Louis Bellrose : Ils nous appelaient les sauvages.

Eve Ringuette : Pendant plus d’un siècle, les enfants autochtones à travers le Canada ont été forcés de fréquenter les pensionnats indiens. Plus de 150 000 enfants métis, inuits et des Premières Nations ont été placés en institution. Des milliers sont morts, soit au pensionnat, soit en conséquence de leurs expériences vécues dans le système.

RB : Près du mur, j’écoutais les petites filles pleurer, je les entendais pleurer leurs mères. Durant le premier mois après leur arrivée, c’est tout ce qu’on entendait, des pleurs des petites filles. 

ER : Je suis Eve Ringuette, animatrice de la série Pensionnats indiens, une nouvelle série de baladodiffusion en trois parties de Historica Canada. Joignez-vous à nous alors que nous explorons l’histoire des pensionnats indiens, ainsi que leurs effets sur les survivants et leur impact durable.

Niigaan Sinclair : Il est temps que les Canadiens se tiennent également debout. C’est leur défi à eux aussi.

ER : Abonnez-vous à la série Pensionnats indiens sur Apple Podcasts, Spotify, ou partout où vous écoutez vos balados.

[PAUSE]

N : Entre 1900 et 1914, avant la Première Guerre mondiale, le Canada accueillait approximativement 200 000 immigrants par année. Les restrictions imposées à l’immigration à partir de 1931 ont fait passer ce nombre à 16 000.

JR :  Durant la crise économique des années 30, lorsque les portes du Canada se sont essentiellement fermées, vers 1931, les seules personnes qui pouvaient entrer au pays, selon les règles de l’immigration, étaient les sujets britanniques provenant de l’État libre de l’Irlande, de Terre-Neuve, de l’Afrique du Sud, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande. Ce qui n’est pas dit est qu’ils devaient être majoritairement blancs. Donc des sujets britanniques blancs. Les Indiens, par exemple, étaient des sujets britanniques, mais ils n’étaient pas automatiquement les bienvenus au Canada.

N :  L’immigration n’a pas recommencé vraiment jusqu’à après la Deuxième Guerre mondiale, lorsque des milliers d’épouses de guerre, des femmes étrangères qui avaient marié des soldats canadiens déployés à l’étranger, ont commencé à arriver au Quai 21 avec leurs enfants. Jan affirme qu’elles étaient vues comme des immigrantes « désirables » parce que plusieurs d’entre elles venaient du nord-ouest de l’Europe et…

JR : Beaucoup d’entre elles arrivaient avec une connaissance préalable de l’anglais ou du français. 

N : Mais l’économie grandissante du Canada avait toujours besoin d’ouvriers. Il s’adonnait alors que l’Angleterre tentait de réinstaller quelques milliers d’anciens combattants polonais qui ne désiraient pas retourner dans leur pays natal après la guerre.

JR :  À l’origine, le Canada n’avait pas l’intention d’accueillir les anciens combattants polonais…

N : Mais le gouvernement britannique a été persuasif.

JR :  Plusieurs de ces individus provenaient de la classe ouvrière ou de la classe moyenne, avaient des valeurs ou des idéaux démocratiques et ne désiraient pas retourner dans leur pays, qui était désormais sous un régime communiste.

N :  Ils se sont vu offrir des contrats de travail et ont pu entrer au pays.

JR : C’était donc une sorte d’expérimentation afin de voir si nous pouvions faire venir au Canada des anciens combattants européens et peut-être plus tard des personnes déplacées européennes qui n’étaient peut-être pas perçues comme désirables par la majeure partie de la population canadienne. Pourrions-nous expérimenter avec les anciens combattants polonais et voir si cela fonctionnait? Et bien sûr, ça a fonctionné. Ça a même plutôt bien fonctionné.

N : Cela a démontré au gouvernement canadien qu’il y avait des avantages à admettre des réfugiés et des immigrants normalement considérés comme « indésirables ». Selon Jan, le succès de la réinstallation des anciens combattants polonais est devenu l’impulsion derrière le mouvement des personnes déplacées au Canada après la guerre.

Le terme « personne déplacée » signifie une personne ayant été forcée de quitter sa maison, particulièrement en raison d’un conflit. Elles forment le plus grand groupe de réfugiés à être venus au Canada au 20e siècle : plus de 157 000 d’entre eux sont arrivés au Canada entre 1945 et 1951.

JR : Dans les années ‘60, on pouvait vraiment voir ce type de débat national opposant les personnes en faveur d’un biculturalisme visant à garder le Canada anglais et le Canada français, et qui voient le Canada comme un endroit culturellement et linguistiquement britannique et français, et ceux qui font la promotion du multiculturalisme et dont plusieurs, bien sûr, représentaient les communautés ethnoculturelles non britanniques et non françaises au Canada. Ils avançaient que l’identité canadienne n’était pas simplement binationale, mais plutôt culturellement pluraliste ou multiculturelle, si vous voulez. 

N : En 1963, le gouvernement canadien était de plus en plus inquiet de l'agitation croissante des Canadiens français au Québec, qui voulaient protéger leur culture et leur langue. Ils voulaient aussi la chance de participer entièrement au processus décisionnel politique et économique. Cette agitation est la raison principale pour laquelle le gouvernement fédéral a mis sur pied la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, communément appelée la Commission Bi-bi ou la commission Laurendeau-Dunton.

JR : De 1963 à 1969, la Commission Bi-bi a donc examiné l’étendue du bilinguisme au sein du gouvernement fédéral, comment les organismes gouvernementaux et non gouvernementaux faisaient la promotion des relations culturelles, les niveaux d’opportunités entre les Canadiens pour qu’ils deviennent bilingues en anglais et en français, et les espoirs d’instaurer une plus grande égalité entre le Canada anglais et le Canada français, une fois de plus donc, pris dans ce moule d’un Canada biculturel et bilingue.

N : Les membres de la Commission Bi-bi ont effectué une tournée à travers le pays pour entendre les témoignages de divers groupes. Parmi les personnes qui leur ont parlé se trouvait Ethel Brandt Monteur du Conseil national des Indiens, l'organe représentatif des membres des Premières Nations et des Métis inscrits et non inscrits de l’époque. Elle a dit à la commission:

« Nous soutenons respectueusement que le Canada est un pays triculturel… Notre empreinte est indélébile sur cette terre. Nous ne devrions pas avoir besoin de demander une représentation. Nous n'avons aucune intention d'être un peuple oublié dans notre patrie. »

JR : La présence autochtone au Canada, bien sûr, précède l’arrivée des colons de partout au monde. Et malgré ce, les premières conceptions canadiennes de la mosaïque culturelle du multiculturalisme, si vous voulez, excluent largement les peuples autochtones et leurs contributions.

N : Bien que les droits autochtones soient désormais protégés grâce à la Loi constitutionnelle et non grâce à des politiques multiculturelles, Guy affirme qu’il est important de savoir que les autochtones ne forment pas un groupe homogène.

Par exemple, il existe une grande diversité au sein des cultures des Premières Nations…  

GF : …des Mi’kmaqs de la côte est aux Premières Nations de la côte de la Colombie-Britannique, dont les langues sont si différentes qu’ils ne peuvent comprendre un seul mot les uns des autres. Il y a plus de 630 Premières Nations. Puis il y a la population inuite de toute la région circumpolaire.

N : Et Jan affirme que les peuples autochtones n’étaient pas les seuls à s’opposer à la Commission Bi-bi:

JR : Il y a des descendants de plusieurs communautés ethnoculturelles qui disent « Oh! Attendez un instant. Cette idée, ce récit de deux peuples fondateurs est faux. Où est notre place au Canada? »

N : Les politiques canadiennes d’immigration ont commencé à s’assouplir dans les années 1960. En 1962, les règles déterminant qui pouvait entrer au Canada ont changé. Plutôt que de prioriser la race ou le pays d’origine, les immigrants potentiels allaient désormais être jugés selon leurs compétences.

En 1967, cela a été poussé un pas plus loin avec l’introduction du système de points. Les immigrants potentiels se voyaient assigner des points dans des catégories précises, comme le niveau d’éducation, les compétences professionnelles, et la maîtrise du français ou de l’anglais, entre autres. Une personne obtenant 50 points ou plus sur 100 obtenait le droit d’entrée au Canada, peu importe la race, l’ethnie ou l’origine nationale.

Alors que l’immigration au Canada a augmenté, diverses communautés ont commencé à se battre pour être reconnues à leur tour.

JR : … Menées, par exemple, par les Canadiens ukrainiens, qui ont exprimé leur inquiétude, et peut-être même leur indignation, puisque, si vous voyez le Canada comme un pays binational, biculturel et bilingue, vous omettez, ignorez ou négligez leurs contributions culturelles. 

N : Lorsque la Commission a soumis son rapport final en 1969, elle soulignait que…

JR : …vous savez, bien que le Canada pouvait devenir bilingue, il était culturellement pluraliste ou multiculturel en matière de société.

N : En se basant sur les recommandations de la Commission, le premier ministre Pierre Elliott Trudeau a adopté la Loi sur les langues officielles en 1969. Cela a donné au français et à l’anglais un statut égal au sein du gouvernement fédéral. Puis en 1971, le Canada est devenu le premier pays du monde à mettre en œuvre une politique de multiculturalisme. Lorsque Trudeau a annoncé la politique, il a dit :

« Bien qu’il y ait deux langues officielles, il n'y a pas de culture officielle, et aucun groupe ethnique n’a préséance sur un autre. Aucun citoyen ou groupe de citoyens n’est autre que canadien, et tous doivent être traités de façon équitable. Mais Guy note que bien qu’il n’y ait pas de soi-disant culture officielle, il y a toujours eu une culture dans ce qui est aujourd’hui le Canada. En effet, il y a toujours eu plusieurs cultures. »

GF : Vous savez, il y avait plusieurs langues autochtones au Canada, dont une parlée par les Métis, qui s’appelait le michif. Je m’oppose à dire qu’il n’y a pas de culture. Ce serait bien si les Canadiens pouvaient comprendre qu’il existe une grande diversité, ou du multiculturalisme au sein de la culture autochtone. N : Guy explique aussi que les racines du multiculturalisme canadien d’aujourd’hui remontent à bien avant la colonisation.

Non seulement les gens qui viennent d’ailleurs peuvent-ils garder leur identité et leur culture, mais en fait, ils les mettent en avant-plan. Ils ont adopté une présence canadienne qui n’est pas différente de la personnalité de la plupart des membres des Premières Nations, des Métis, et des Inuits, lorsque vous apprenez à nous connaitre.  

N : Bien que cette politique ait été officielle pendant plusieurs années, les critiques du politique du multiculturalisme affirmaient que le gouvernement était plus soucieux de promouvoir l'identité que d’assurer que les Canadiens non blancs soient traités équitablement. Après une étude plus approfondie, un nouvel ensemble de lois a été adopté dans la Loi sur le multiculturalisme canadien de 1988. 

JR : La Loi de 1988 a permis de protéger le patrimoine culturel des Canadiens dans une loi, plutôt que sous simple forme de politique ou de plan de la part du gouvernement.

N : La loi cherchait à réduire la discrimination et à encourager la mise en œuvre de divers programmes et activités multiculturels au sein des institutions gouvernementales et non gouvernementales.

GF : Qu’il s’agisse d’une loi ou d’une politique d’immigration officielle, nos enseignements nous disent que nous avons tous deux jambes, et que tous les chemins nous mènent à une forme de connexion spirituelle, à un récit ancestral, ou à une histoire de la création. Et nous sommes, dans l’ensemble, tous pareils.

N : Au cours des quatre prochains épisodes, vous découvrirez quatre différentes communautés se battant toutes pour la même chose : trouver sa place. Lors du prochain épisode de Trouver sa place, nous explorons le combat vieux de plusieurs siècles pour les droits des francophones en Ontario, et la bataille historique qui l’a marqué.

Soukaina Boutiyeb : La police est venue, elle est venue justement pour essayer de renforcer ce règlement-là qui a été mis en place par le gouvernement. Donc il y a eu une bataille qui s'est créée. Les sœurs Desloges étaient en avant justement pour combattre, pour résister, pour continuer à enseigner le français.

N : Inscrivez-vous à Trouver sa place sur Apple Podcasts, Spotify, ou là où vous trouvez vos baladodiffusions. 

CRÉDITS

N : Cet épisode de Trouver sa place a été écrit et produit par Historica Canada. Le soutien à la production a été fourni par Michael Fiore et Edit Audio. Postproduction par Edit Audio. Merci à Dr Jan Raska et Guy Freedman, qui ont aussi été consultants pour cet épisode. Vérification des faits par Nicole Schmidt. Ce projet a été rendu possible en partie grâce au gouvernement du Canada.

Merci de nous avoir écoutés.