Elsie Knott | l'Encyclopédie Canadienne

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Elsie Knott

Elsie Marie Knott (née Taylor), chef ojibwée, dirigeante communautaire, entrepreneuse (née le 20 septembre 1922 sur la réserve de Mud Lake [aujourd’hui la Première Nation de Curve Lake], en Ontario; décédée au même endroit le 3 décembre 1995). Elsie Knott a été la première femme à être élue chef d’une Première Nation au Canada, après qu’une modification de la Loi sur les Indiens a donné le droit de vote aux femmes autochtones, ainsi que le droit de participer au gouvernement des bandes, en 1951. Elle a été chef de sa Première Nation pendant 14 ans, de 1954 à 1962 et de 1970 à 1976, et s’est dévouée à la préservation de la langue ojibwée. Elle est connue pour son action communautaire et son appui à l’éducation.

Première Nation de Curve Lake
(avec la permission de Wikimedia CC-BY-SA-3.0)

Enfance et jeunesse

Elsie Marie Taylor naît dans la réserve de Mud Lake, dans le sud-est de l’Ontario, la fille d’Esther Mae et de George Henry Taylor. Son père est concierge au bureau du conseil de bande. Elsie l’y accompagne souvent pour assister aux rencontres communautaires. Pendant son enfance, Elsie discute souvent avec son père de la vie politique de la bande, des conditions sociales et des problèmes dans la communauté. Ces conversations guideront plus tard son travail comme chef de sa Première Nation.

Elsie passe son enfance dans la réserve, parlant uniquement la langue ojibwée jusqu’à l’âge de neuf ans, car en raison d’une maladie qui l’empêche de marcher, elle commence à fréquenter l’école trois ans en retard. Elle se joint alors aux autres enfants de la réserve pour fréquenter l’école locale, administrée par le ministère des Affaires indiennes. Le programme d’enseignement offert par cette école s’étend seulement de la première à la huitième année. C’est donc en huitième année que la scolarisation d’Elsie arrive à son terme. À l’école de la réserve, il est interdit d’utiliser la langue ojibwée. Cette pratique sème l’idée dans l’esprit d’Elsie de s’engager à préserver sa langue maternelle, ce qu’elle fera plus tard dans la vie.

Lorsqu’elle a 15 ans, ses parents arrangent son mariage avec Cecil Knott, son aîné de 12 ans. Ce dernier souffre de la tuberculose, ce qui l’empêche d’occuper un emploi stable. Le couple aura trois enfants. Pour subvenir aux besoins de sa famille, Elsie Knott occupe divers emplois. Entre autres, elle cueille des baies, coud des pyjamas pour les enfants autochtones dans les hôpitaux fédéraux (au prix de 0,35 $ le morceau) et coud des édredons qu’elle vend aux touristes. (Voir aussi Hôpitaux indiens au Canada.)

Carrière politique

En septembre 1951, la Loi sur les Indiens est modifiée pour permettre aux femmes autochtones de voter et d’être élues aux gouvernements des bandes. Elsie Knott décide de se présenter comme candidate aux prochaines élections de la bande, car elle est mécontente du pouvoir qu’exerce le gouvernement canadien sur les peuples autochtones. Elle veut plus d’autonomie pour sa communauté, pour laquelle elle cherche l’autodétermination, et elle est préoccupée par les problèmes sociaux dont elle est témoin dans sa réserve, notamment le manque d’accès à l’éducation et la perte de la culture. (Voir aussi Autonomie gouvernementale des Autochtones.)

En 1954, Elsie Knott est élue chef de la bande des Mississaugas de Mud Lake (aujourd’hui la Première Nation de Curve Lake). À 33 ans, elle devient la première femme à être élue chef d’une Première Nation au Canada. Elle remplit sept mandats en tout, étant chef de 1954 à 1962 et de 1970 à 1976. Lors des élections de 1976, elle est défaite par 12 voix, dans ce qui est largement considéré comme un renversement.

Lorsqu’elle devient chef, Elsie Knott doit surmonter un manque de confiance à parler en public, surtout en anglais. Même si elle soulignera un jour que son genre n’a pas été un obstacle durant la campagne électorale, ses amis et ses collègues font remarquer que certaines personnes ne croyaient pas que les femmes devaient être chefs. Néanmoins, le bilan de cette première chef féminine montre de nombreuses réalisations remarquables. Entre autres, elle obtient des fonds fédéraux pour améliorer les services offerts dans la réserve. Cela permet, entre autres, de construire 45 nouvelles maisons, de creuser des puits et d’améliorer les routes. De plus, la réserve bénéficie de la construction d’une garderie, d’un centre communautaire et d’un foyer pour personnes âgées.

Elsie Knott appuie fermement l’éducation et la culture, et contribue à la mise sur pied d’un programme linguistique à l’école de la Première Nation Curve Lake, dans le cadre duquel elle donne des cours hebdomadaires de langue ojibwée. (Voir aussi Langues autochtones au Canada.) Elle se rend également dans des prisons pour y enseigner l’ojibwé aux détenus. Au début des années 1960, elle fonde le service d’autobus Knott, une initiative visant à améliorer l’accès des Autochtones à l’éducation. Le service voit le jour lorsque cinq enfants de la réserve d’Elsie Knott manifestent leur intérêt de poursuivre leurs études au-delà de la huitième année. Un chauffeur est donc embauché pour conduire les enfants jusqu’à l’autoroute principale – où ils sont ramassés par l’autobus scolaire du comté – et pour les ramener dans la réserve à la fin de la journée. Un jour, le chauffeur est absent et on demande à Elsie Knott de conduire les enfants. Elle finira par lancer le service d’autobus Knott, qui aura deux autobus scolaires de 78 places. Elle conduira l’autobus pendant les 31 prochaines années, y compris pendant son mandat de chef de la Première Nation de Curve Lake.

Elsie Knott organise divers événements communautaires, et elle entreprend de sensibiliser les gens à la culture autochtone, à la fois dans la réserve et dans les régions avoisinantes. Elle rétablit le pow-wow, auquel elle admet aussi les étrangers, et utilise le prix d’entrée pour acheter des paniers de Noël. En 1977, elle participe à l’organisation d’un tournoi de hockey autochtone, auquel participent 60 réserves différentes. Enfin, elle réussit à interdire la vente et la consommation de l’alcool, après avoir organisé un référendum sur la question.

Elsie Knott est aussi engagée dans la vie politique des Autochtones à l’extérieur de sa réserve. Elle participe à titre d’aînée à l’Union des Indiens de l’Ontario, et siège sur le conseil d’administration de la Fraternité des Indiens du Canada (aujourd’hui l’Assemblée des Premières Nations). Elle dénonce haut et fort le Livre blanc de 1969 sur la politique indienne, notamment en brûlant le papier et en dansant sur les cendres.

Prix et héritage

Elsie Knott est reconnue comme l’une des 25 Ontariennes qui se sont distinguées en 1975, l’Année internationale de la femme. Trois ans plus tard, elle reçoit un prix de Hugh Faulkner, alors ministre des Affaires indiennes, pour avoir conduit l’autobus scolaire pendant 25 ans sans accident.

Après sa mort, en 1995, on rend hommage à sa mémoire dans le cadre de la conférence en hommage des femmes de la Nation Anishinabek, en 1998. De plus, en 1999, l’Union des Indiens de l’Ontario lui décerne, à titre posthume, un prix d’excellence pour l’ensemble de ses réalisations, en reconnaissance de son travail communautaire et de son leadership.

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