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Le Gesù

Le Gesù. L'une des plus vieilles institutions culturelles montréalaises, le Gesù a joué un rôle de premier plan aux débuts de notre théâtre, avant même la professionnalisation de celui-ci.

L'une des plus vieilles institutions culturelles montréalaises, le Gesù a joué un rôle de premier plan aux débuts de notre théâtre, avant même la professionnalisation de celui-ci. Ayant connu des transformations physiques et des changements de mandat au fil des ans, le Gesù a su renouveler sa raison d'être et se maintenir comme lieu de créativité en plein centre-ville de Montréal.

Appartenant au Collège Sainte-Marie, institution d'enseignement pour garçons fondés par les Jésuites en 1848, la salle du Gesù fut inaugurée le 10 juillet 1865 par un débat de l'Académie française sur le patriotisme. Le théâtre était situé sous l'église du Gesù, elle-même ouverte au culte le 3 décembre 1865. Il faudra cependant attendre la rénovation de 1923 pour y voir présenter des spectacles. Le père Joseph Paré y dirigera la troupe des Anciens du Gesù, dont certains comédiens marqueront notre jeune histoire théâtrale, tels Hector Charland et Paul Langlais.

Des travaux de rénovation majeurs, en 1945, permettent de doter le théâtre d'équipements modernes (régie, système d'éclairages, plateau tournant) et d'aménager la salle de façon modulable pour y accueillir entre 875 et 1000 spectateurs. Dès cette année-là, les Compagnons de saint Laurent, dirigés par le père Émile Legault, s'y produisent. En 1946, l'Équipe, fondée par Pierre Dagenais, réussit l'exploit de présenter dans ce lieu sanctifié la pièce Huis clos de l'athée Jean-Paul Sartre, en présence de l'auteur Gratien Gélinas y reprend Tit-Coq, premier jalon d'une véritable dramaturgie nationale, en 1948, pour soixante-et-une représentations. Le Théâtre du Rideau Vert et le Théâtre d'essai s'y produisent en 1949, puis le Théâtre du Nouveau Monde, après le succès de sa première production, L'Avare de Molière, en 1951, y élit domicile jusqu'en 1957; il y joue à nouveau Molière (Le Tartuffe, en 1953) et d'autres auteurs, mais se butte à la censure de la direction du Collège Sainte-Marie, qui exige d'approuver le choix des pièces.

Parmi les pièces créées au Gesù, retenons De l'autre côté du mur, qui marque les débuts de l'auteur Marcel Dubé en 1952, puis, l'année suivante, Zone, qui sera bientôt adaptée pour la télévision de Radio-Canada. Suivront Les Insolites de Jacques Languirand en 1956, Le Veau dort de Claude Jasmin en 1963 et Le Pendu de Robert Gurik en 1967. Enfin, dès sa fondation en 1964, la Nouvelle Compagnie Théâtrale, dont le mandat est de faire connaître le théâtre de répertoire au public étudiant, obtient le soutien financier des Jésuites pour leur première production, Iphigénie de Racine. Ce sera le début d'une grande aventure, qui s'achèvera en 1975 lorsque la NCT déménagera ses pénates dans l'est de Montréal, dans l'ancien cinéma Granada qui deviendra le Théâtre Denise-Pelletier. Notons aussi que la première Nuit de la poésie, en 1970, eut lieu au Gesù.

Classé monument historique et bien culturel par le ministère des Affaires culturelles du Québec en 1975, le Gesù change peu à peu de vocation. Avec la démolition du Collège qui jouxtait l'église, d'autres rénovations transforment la salle en deux amphithéâtres de 425 et 83 sièges chacun, auxquels s'ajoutent deux salles d'exposition, une salle de conférence et un grand hall. Consacré lieu de création et de diffusion ouvert à la relève en 1992, après une vaste consultation nationale, le Gesù change sa dénomination sociale pour les Salles du Gesù, qui sera modifiée à nouveau en 2003 pour le Gesù - Centre de créativité. On y présente des spectacles de musique et de chanson, du théâtre et de la danse, ainsi que des activités liées aux arts visuels et à la littérature.