Grève générale de Winnipeg, 1919 | l'Encyclopédie Canadienne

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Grève générale de Winnipeg, 1919

La grève générale de Winnipeg de 1919 a été la plus importante grève de l’histoire du Canada (voir Grèves et lock-out). Entre le 15 mai et le 25 juin 1919, plus de 30 000 travailleurs ont cessé le travail. Les usines, les ateliers, le transport en commun et les services de la Ville ont été paralysés. La grève a entraîné des arrestations, des blessures et la mort de deux manifestants. Elle n’a amené aucune amélioration immédiate du sort des ouvriers et des conditions de travail, mais elle a renforcé l’unité de la classe ouvrière canadienne (voir Syndicats ouvriers). Certains de ses participants ont contribué à créer ce qui constitue aujourd’hui le Nouveau Parti démocratique.

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Ce texte est l’article intégral sur l’histoire de la grève générale de Winnipeg. Si vous souhaitez lire un résumé en langage simple, veuillez consulter : Grève générale de Winnipeg, 1919 (résume en langage simple).

Contexte

Après la Première Guerre mondiale, beaucoup de travailleurs canadiens ont du mal à joindre les deux bouts, tandis que les employeurs prospèrent. Le taux de chômage est élevé, et il y a peu d’emplois pour les anciens combattants revenant du front. À cause de l’inflation, le logement et la nourriture coûtent très cher. Les immigrants de classe ouvrière de Winnipeg comptent parmi les plus durement touchés.

Dans le reste du monde, les travailleurs se battent pour obtenir de meilleures conditions. La victoire de la Révolution russe de 1917 a été précédée par des grèves. Un mouvement ouvrier international en pleine croissance, le syndicalisme, cherche à mettre fin au capitalisme. Cela amène les chefs ouvriers de l’Ouest canadien à se rencontrer à Calgary en mars 1919, afin de discuter de la création de la One Big Union.

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Grève générale de Winnipeg


À Winnipeg, au Manitoba, les ouvriers de l’industrie de la construction et de la métallurgie négocient avec leurs patrons pour améliorer leurs emplois. Ils réclament le droit à la négociation collective, de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail. Les ouvriers organisent plusieurs grèves au début de mai 1919. Le 15 mai, le Winnipeg Trades and Labor Council (WTLC) décrète une grève générale après la rupture des négociations (voir aussi Médiation en droit du travail).

En quelques heures, près de 30 000 hommes et femmes quittent leur travail. Les usines, ateliers et trains de la ville, de propriété privée, sont fermés. Les employés du secteur public se joignent à la grève par solidarité. Ceci comprend la police, les pompiers, les facteurs, les opérateurs de téléphone et de télégraphe et les travailleurs des services publics.

La grève est coordonnée par le comité central de grève. Ses membres ont été élus par chaque syndicat affilié au WTLC. Le comité de grève négocie avec les employeurs au nom des travailleurs. Il s’assure aussi que les services essentiels soient assurés à Winnipeg.

Le saviez-vous?
La militante syndicale Helen Armstrong, surnommée « Ma », n’est que l’une des deux femmes membres du comité de grève qui compte une cinquantaine d’hommes. Pendant cette longue grève, Helen Armstrong crée le Labor Café, qui fournit aux femmes grévistes trois repas gratuits par jour. Il s’agit là d’un service essentiel pour celles qui, grévistes, n’ont plus de salaire. L’établissement, où l’on aurait servi entre 1 200 et 1 500 repas par jour, accueille également des hommes, tout en les encourageant à payer ou à faire un don.


Opposition

Le Comité des 1000 citoyens est rapidement formé pour organiser l’opposition à la grève. Il regroupe les gens d’affaires et les politiciens les plus influents de Winnipeg. À aucun moment ce comité ne prend sérieusement en compte les demandes des grévistes. Il considère la grève comme un complot révolutionnaire organisé par un petit groupe de « racaille étrangère ». Les principaux journaux de Winnipeg présentent aussi les choses de cette manière. En réalité, il y a peu de preuves que la grève ait été organisée par des bolchéviques et des immigrants d’Europe de l’Est. Mais le Comité des 1000 citoyens utilise cette accusation infondée pour bloquer tout effort pour apaiser les ouvriers.

Réponse du gouvernement

Grève générale de Winnipeg

Des troupes à cheval au galop dans un virage au croisement de Main Street et Market Avenue durant le samedi sanglant, le 21 juin 1919.

Le gouvernement fédéral décide d’intervenir. Il craint que la grève éveille des conflits dans d’autres villes. Peu après le début de la grève, deux ministres du Cabinet se réunissent avec le Comité des 1000 citoyens à Winnipeg. Ces représentants sont le sénateur Gideon Robertson, ministre du Travail, et Arthur Meighen, ministre de l’Intérieur et ministre de la Justice par intérim. Robertson et Meighen refusent de rencontrer le Comité central de grève.

Conseillé par le Comité des 1000 citoyens, le gouvernement fédéral soutient rapidement les employeurs. Il menace de congédier les employés fédéraux qui ne retournent pas au travail sur le champ. Le Parlement modifie la Loi sur l’immigration afin que les immigrants nés en Angleterre puissent être déportés. Il élargit également la définition de la sédition dans le Code criminel (voir Code criminel, chapitre 98).

Le 17 juin, le gouvernement arrête dix dirigeants du Comité central de grève et deux membres de la One Big Union. Quatre jours plus tard, les grévistes organisent une parade silencieuse pour soutenir les dirigeants emprisonnés. À l’hôtel de ville, la foule commence à vandaliser un tramway. La Police à cheval du Nord-Ouest charge les manifestants, frappant à coup de matraque et tirant des coups de feu. Les violences font une trentaine de blessés et deux morts. La journée, immortalisée sous le nom de Bloody Saturday (samedi sanglant), se termine par l’occupation des rues de la ville par les troupes fédérales.


La police relâche six des chefs ouvriers. Cependant, elle arrête Fred Dixon et J.S. Woodsworth, les éditeurs du quotidien Strike Bulletin.

La grève est brisée par le pouvoir combiné du gouvernement et des employeurs. Le 25 juin, le comité de grève annonce le retour au travail et met officiellement fin à la grève le matin suivant.

Sept dirigeants de la grève sont ensuite accusés d’avoir comploté pour renverser le gouvernement. Ils sont condamnés à des peines de prison allant de six mois à deux ans. Les accusations contre J.S. Woodsworth sont abandonnées.

Importance

À court terme, la grève générale de Winnipeg n’apporte aucun gain pour les ouvriers. Elle laisse beaucoup de rancœur et de controverse au sein des syndicats ouvriers de tout le Canada. Mais en unissant les ouvriers autour d’un but commun, elle contribue aussi à atténuer leurs divisions. À Winnipeg, par exemple, les travailleurs canadiens d’origine sortent dans la rue avec les immigrants britanniques et d’Europe continentale.

Le saviez-vous?
Après la Première Guerre mondiale, les immigrants de l’Europe centrale, du Sud et de l’Est sont souvent vus avec méfiance. Au début des années 1920, le gouvernement canadien les qualifie de « catégorie non-préférentielle ». (Voir aussi Préjugés et discrimination au Canada; Politique d’immigration canadienne.)


La grève générale stimule le militantisme et le syndicalisme. Les travailleurs d’Amherst, en Nouvelle-Écosse, jusqu’à Victoria, en Colombie-Britannique, marchent pour soutenir les grévistes de Winnipeg. Certains dirigeants de la grève, dont J.S. Woodsworth, seront ensuite élus au gouvernement. J.S. Woodsworth ainsi que d’autres anciens grévistes contribuent à fonder la Co-operative Commonwealth Federation. Ce parti ouvrier socialiste deviendra plus tard le Nouveau Parti démocratique.

Il faudra attendre trois décennies après la grève générale de Winnipeg avant que les employeurs reconnaissent les syndicats ouvriers canadiens, et accordent le droit à la négociation collective.

Mots clés : Grève générale de Winnipeg

Bolchévique

Bolchévique signifie originalement un membre radical du parti socialiste russe, qui a pris le pouvoir au cours de la Révolution russe de 1917. Toutefois, le mot a fini par désigner tout socialiste révolutionnaire.

Capitalisme

Un système économique dans lequel la propriété privée (plutôt que l’État) contrôle l’industrie et récolte les profits.

Grève générale

Un mouvement de protestation où les travailleurs de toutes les industries ou presque cessent le travail.

Inflation

Une augmentation générale des prix, et une diminution de la valeur de l’argent.

Mouvement ouvrier

Dans cet article, le mouvement ouvrier désigne les travailleurs en tant que classe ou force politique.

Négociation

La négociation des salaires et autres conditions de travail par un syndicat au nom d’un groupe d’employés.

Sédition

Le fait d’agir ou de parler de manière à amener les gens à se soulever contre un gouvernement.

Syndicat

Une association de travailleurs créée pour protéger les droits de ses membres et obtenir un meilleur salaire, des avantages et conditions.

Syndicalisme

Une tentative internationale d’organiser tous les travailleurs dans des syndicats et des conseils de travailleurs. Le but du syndicalisme est d’amener la fin du capitalisme et de donner aux travailleurs les moyens de production. Pour y arriver, on soutient des actions comme les grèves générales. Le mouvement est actif durant la première moitié du 20e siècle.

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