Don Cherry | l'Encyclopédie Canadienne

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Don Cherry

Donald Stewart Cherry, surnommé « Grapes », commentateur du hockey à la télévision, entraîneur, joueur, propriétaire d’équipe (né le 5 février 1934 à Kingston, en Ontario). Don Cherry est surtout connu en tant qu’ancien analyste et commentateur du hockey, animateur de la séquence « Coach’s Corner » de l’émission Hockey Night in Canada. En tant que joueur de hockey, Cherry a gagné une Coupe Memorial, avec les Flyers de Barrie, en 1953, et a eu une longue carrière dans la Ligue américaine de hockey (LAH), remportant la Coupe Calder à quatre reprises. Il a été nommé entraîneur de l’année dans la LAH et dans la Ligue nationale de hockey (LNH) et a entraîné les Bruins de Boston, qu’il a conduit à deux finales de la Coupe Stanley, avant de prendre sa retraite d’entraîneur. Après avoir animé « Coach’s Corner » pendant 39 ans, il est devenu à la fois une icône canadienne et une personnalité sujette à caution. Surnommé « Grapes » (un jeu de mots sur son nom de famille et sur le terme « sour grapes » signifiant « dénigrement » ou « amertume »), ses opinions tranchantes et brutales en ont fait une source permanente de controverse. Tout au long de sa carrière à la télévision, il a dû faire face à des accusations de sectarisme et de racisme et a été licencié, en 2019, après avoir tenu des propos largement considérés comme racistes sur les immigrants. Cette même année, il a été intronisé au Temple de la renommée de la Ligue américaine de hockey.

Don Cherry

Jeunesse et famille

Don Cherry est l’aîné des deux enfants de Maude et de Delmar Cherry. Son jeune frère, Dick, joue également au hockey, principalement dans des ligues mineures, mais également trois saisons en LNH, une pour les Bruins de Boston (1956‑1957) et deux pour les Flyers de Philadelphie (1968‑1969 et 1969‑1970).

Le grand‑père paternel de Don Cherry, John, est l’un des premiers à intégrer la Police à cheval du Nord‑Ouest en 1874. Son grand‑père maternel, Richard Palamountain, un orphelin britannique, est envoyé au Québec à l’âge de 12 ans (voir aussi Petits immigrés britanniques); il travaille comme palefrenier au Collège militaire royal du Canada; à 31 ans, il retourne en Europe et combat pour le Canada, pendant la Première Guerre mondiale, à la bataille de la crête de Vimy.

Début de carrière dans le hockey

Dès l’âge de quatre ans, Don Cherry veut devenir joueur professionnel de hockey. Il se souvient que, pendant son enfance, il s’agenouillait tous les soirs pour prier, afin que son vœu se réalisât. Il est tellement déterminé à faire carrière dans le hockey que ses études passent largement au deuxième plan.

Ses parents lui apportent un soutien important. Don Cherry se souviendra, plus tard, d’une anecdote : alors qu’il jouait, à l’époque, au hockey junior, le propriétaire de l’équipe lui avait remis des gants troués; outrée, sa mère lui avait acheté des gants haut de gamme. Au cours de son éducation, ses parents lui transmettent deux messages clés : sa mère lui demande de toujours rester honnête et son père insiste sur le fait qu’il ne doit jamais abandonner.

Don Cherry joue au hockey junior au sein de l’Ontario Hockey Association, avec les Spitfires de Windsor (1951‑1952) et avec les Flyers de Barrie (1952‑1953 et 1953‑1954), remportant avec ces derniers une Coupe Memorial en 1953. En 92 matchs de hockey junior en carrière, il marque 5 buts et offre 9 aides, pour un total de 14 points.

Carrière en ligue mineure

Avant de devenir entraîneur, Don Cherry joue en ligue mineure comme défenseur pendant 16 saisons, à compter de 1954. En 1955, il est appelé par les Bruins de Boston pour jouer un match lors de la finale de la Coupe Stanley contre les Canadiens de Montréal. Cependant, il se blesse durant l’intersaison et n’est pas en mesure de jouer à nouveau en LNH la saison suivante. Sa carrière en ligue mineure est largement couronnée de succès. Son équipe remporte la Coupe Calder, le championnat de la LAH, en 1960, en 1965, en 1966 et en 1968.

En 1969, Don Cherry prend, une première fois, sa retraite de hockeyeur, après avoir passé six saisons avec les Americans de Rochester en LAH. En 1971, il réintègre toutefois l’équipe, d’abord en tant que joueur, puis, en janvier 1972, au poste d’entraîneur‑chef. En 1974, il reçoit le trophée commémoratif Louis‑A.R.‑Pieri récompensant le meilleur entraîneur de l’année en LAH.

Carrière d’entraîneur en LNH

Après sa troisième et dernière saison en tant qu’entraîneur des Americans de Rochester, Don Cherry est recruté par les Bruins de Boston, en 1974. Au cours des quatre saisons de 1975‑1976 à 1978‑1979, l’équipe termine, sous sa houlette, en tête de sa division. En 1976, il remporte le trophée Jack‑Adams récompensant le meilleur entraîneur de la LNH. Cependant, lors d’un septième match décisif en série finale de la Coupe Stanley contre les Canadiens en 1979, il écope d’une pénalité, à un moment crucial de la partie, son équipe ayant un trop grand nombre de joueurs sur la patinoire. Les Bruins perdent la série et, alors qu’il est déjà en conflit avec le directeur général Harry Sinden, il doit quitter l’équipe.

Don Cherry entraîne une saison de plus en LNH, à la tête de la plus mauvaise équipe de la ligue, les Rockies du Colorado; toutefois, il est congédié au printemps 1980. Il prend sa retraite d’entraîneur en LNH avec une fiche de 250‑153‑17 en saison régulière et de 31‑24, pour les 55 matchs de séries éliminatoires qu’il a dirigés.

« Coach’s Corner »

Malgré sa brillante carrière d’entraîneur en LNH, Don Cherry est surtout connu comme animateur de la très populaire séquence « Coach’s Corner », diffusée à la pause de l’émission Hockey Night in Canada (HNIC). Lors de cette séquence, il commente non seulement le match diffusé ce soir‑là, mais également la LNH en général.

« Coach’s Corner » fait ses débuts à HNIC à l’occasion des séries éliminatoires 1980 de la Coupe Stanley. Au départ, la séquence que Don Cherry anime seul est diffusée à l’occasion de la deuxième pause. Il y illustre ses observations en s’appuyant sur des extraits vidéo. Toutefois, il est rapidement rejoint par Dave Hodge, l’animateur de l’émission. En 1987, Ron MacLean, auparavant présentateur sportif en Alberta, reprend ce rôle. Cette année‑là, « Coach’s Corner » est déplacée pour être diffusée lors de la première pause. On estime que, parfois, la séquence rassemble plus de téléspectateurs que les matchs diffusés eux‑mêmes. En 2015, « Coach’s Corner » est intronisée dans l’Allée des célébrités canadiennes.

Au fil des ans, Don Cherry manifeste son patriotisme vis‑à‑vis du Canada par un soutien et une admiration sans faille de la police et de l’armée canadiennes. Il utilise régulièrement « Coach’s Corner » comme tribune pour rendre hommage à ceux qui ont perdu la vie dans l’exercice de leurs fonctions.

Autres activités

Tirant parti de son immense popularité d’homme de télévision, Don Cherry bâtit une véritable activité économique prospère autour de sa personnalité et de son image de marque de hockeyeur à l’ancienne, dur et solide. De 1984 à 2019, il co‑anime l’émission radiophonique Don Cherry’s Grapevine avec Brian Williams et anime l’émission télévisée Don Cherry’s This Week in Hockey. On peut le voir dans de nombreuses publicités pour des produits de toutes sortes, allant des sandwiches aux assurances pour animaux de compagnie, en passant par des prêts hypothécaires. Sa série de vidéos présentant, chaque année, les moments les plus marquants de la saison de LNH, Don Cherry’s Rock’em Sock’em Hockey, atteint 30 numéros. Selon son fils, Tim, il s’en est vendu plus de 2,3 millions d’exemplaires, ce qui en fait la série sur DVD, hors production télévisée ou cinématographique, la plus plébiscitée au Canada. Don Cherry est également au générique, comme acteur, d’un certain nombre de séries télévisées, notamment Goosebumps (1997), Power Play (1998–2000) et Zeroman (2004). Il prête aussi sa voix à un certain nombre de personnages d’animation dans des films comme The Wild (2006), The Great Polar Bear Adventure (2006) et The Magic Hockey Skates (2012).

En 1998, Don Cherry revient au hockey junior en lançant, avec trois autres investisseurs, la franchise des IceDogs de Mississauga dans la Ligue de hockey de l’Ontario. Il est copropriétaire de l’équipe jusqu’en 2002. Cette année‑là, il endosse également, une dernière fois, le costume d’entraîneur à la tête de son équipe. Il possède par ailleurs une franchise de restaurants à l’enseigne Don Cherry’s Sports Grill.

En 2004, les téléspectateurs de l’émission de la CBC The Greatest Canadian le classent à la 7e place du palmarès des plus grands Canadiens. En 2010, la CBC diffuse la minisérie télévisée biographique, Keep Your Head Up, Kid : The Don Cherry Story, écrite par son fils Tim, dans laquelle l’acteur Jared Keeso (19‑2, Letterkenny) incarne son rôle, un personnage qu’il reprendra dans une suite intitulée Wrath of Grapes : The Don Cherry Story II, sortie en 2012.

Controverses

En 1980, après à peine un mois de présence dans l’émission Hockey Night in Canada, la CBC envisage de se séparer de Don Cherry « pour protéger les enfants anglophones du Canada ». Il est, en effet, largement critiqué pour son langage haché et extrêmement informel. À cette époque, le producteur exécutif de la CBC, Ralph Mellanby, le défend, estimant que son style permet à de nombreux cols bleus au Canada de se reconnaître en lui. Lorsqu’un producteur principal de la CBC indique à l’animateur de « Coach’s Corner » qu’il doit employer un anglais correct, faute de quoi il sera licencié, Ralph Mellanby le rassure en lui expliquant de ne pas s’inquiéter et, qu’après tout, « il ne s’agit que de hockey » et que tout un chacun, dans un bar, sait bien de quoi il parle (voir aussi Anglais canadien).

Toutefois, le problème est que Don Cherry a bien du mal à se contenter de parler de hockey et que ses incursions en dehors du sport, souvent à l’emporte‑pièce, déclenchent régulièrement des controverses. Tout au long de sa présence dans « Coach’s Corner », il doit faire face à des accusations de sectarisme et de racisme, en raison des préjugés dont il fait preuve et de ses déclarations concernant des joueurs nés à l’étranger, en particulier les Suédois, les Finlandais et les Russes, mais également à l’encontre des Canadiens francophones. Il est notamment l’auteur d’un certain nombre de commentaires méprisants sur les Autochtones, comme en 2015, lorsqu’il traite les Inuits de « sauvages » et de « barbares » parce qu’ils mangent du phoque.

À compter de 1991, les politiciens québécois s’en prennent à Don Cherry pour avoir défendu la décision d’Eric Lindros de ne pas jouer pour les Nordiques de Québec. À cette occasion, Don Cherry déclare : « Ils (les Québécois) ne veulent pas de notre affichage (en anglais) et ne veulent pas de notre langue (l’anglais)… » En 1998, après que Cherry a traité les Québécois de « pleurnichards » et décrit le médaillé d’or olympique Jean‑Luc Brassard comme un « illustre inconnu francophone », Bell Canada décide de retirer les publicités pour « Coach’s Corner » de son réseau télévisé au Québec. En 2004, il fait l’objet d’une enquête de la commissaire aux langues officielles pour avoir critiqué le port de la visière protectrice au hockey, faisant valoir que seuls les Européens et les francophones la portent et que ce sont donc des peureux. À la suite de ses nombreuses déclarations controversées, la CBC décide de mettre en place un délai de 7 secondes, entre la captation et la diffusion de ses propos, afin de pouvoir censurer tout commentaire problématique.

Un certain nombre des interventions de Don Cherry dans « Coach’s Corner » ont une couleur nettement politique. Alors qu’il est analyste du hockey, il critique les « médias de gauche », remet en cause le changement climatique et se fait le défenseur d’idéologies conservatrices de droite. En 2010, il est pris dans la tourmente pour ses commentaires, alors qu’il était invité à une réunion du conseil municipal de Toronto. Il avait alors prédit que Rob Ford serait le meilleur maire dans l’histoire de Toronto et avait conclu sa sortie en déclarant : « Il faudra vous y faire, idiots de gauchos. » En 2017, le New York Times compare son nationalisme à celui de Donald Trump.

Don Cherry fait également l’objet de nombreuses critiques pour ses propos controversés sur la violence au hockey, en particulier, au cours de ses dernières années de carrière, alors que l’on en sait beaucoup plus sur les répercussions des lésions cérébrales. Sa série Rock'em Sock'em de vidéos présentant les faits saillants de la saison de LNH est également régulièrement critiquée pour son apologie de la violence dans le sport. En 2007, il se prononce, à la télévision américaine (NBC), en faveur de la poursuite des bagarres dans la LNH. Il est alors critiqué par le spécialiste de l’éducation Warren Nightingale, qui s’inquiète du message qu’une telle déclaration envoie aux enfants. En 2011, Don Cherry doit s’excuser après avoir traité Chris Nilan, Stu Grimson et Jim Thomson « de déchets, de renégats et d’hypocrites », après que ces anciens hommes forts de la LNH se sont prononcés contre les combats au hockey. Les joueurs menacent le commentateur de poursuites judiciaires s’il ne s’excuse pas en public, ce qu’il fera finalement.

En 2013, Don Cherry prend position contre la présence des femmes dans les vestiaires au hockey, évoquant la première fois où il a entendu la voix d’une journaliste dans ces circonstances : « Je me souviens de la première fois où ça m’est arrivé… Les gars se promenaient nus et j’ai entendu la voix d’une femme. Je me suis retourné et elle m’a posé une question... Je lui ai alors proposé de sortir et elle m’a dit qu’elle n’était pas embarrassée. Je lui ai alors répondu que, moi, je l’étais. » Cette position lui vaut une volée de bois vert de l’Association for Women in Sports Media.

Licenciement

Le 9 novembre 2019, Don Cherry s’est dit déçu du fait que de nombreux Canadiens qui n’arborent pas de coquelicot le jour du Souvenir. Ses commentaires offensent une large part de la population canadienne, lorsqu’il déclare, dans « Coach’s Corner » : « Vous autres, vous aimez notre mode de vie, vous aimez notre lait et notre miel, vous pourriez au moins payer deux dollars pour un coquelicot ou quelque chose du genre… Ces gars [les militaires canadiens] ont payé pour ce mode de vie que vous aimez tant au Canada, ils ont payé le tribut le plus lourd! »

En utilisant le terme « vous autres », Don Cherry blesse de nombreux Canadiens appartenant à des minorités ethniques. Farhan Lalji, de TSN, explique, par exemple, avoir perçu les commentaires de Don Cherry comme une attaque contre les personnes nées à l’étranger, ajoutant qu’il avait dépassé les bornes.

Après cette séquence controversée, Rogers Sportsnet annonce, le 11 novembre 2019, que Don Cherry se voit « immédiatement démis de ses fonctions dans l’émission Hockey Night in Canada ». Dans une entrevue avec Joe Warmington, du Toronto Sun, le 11 novembre 2019, le commentateur déclare qu’il a bien été congédié. Il insiste sur le fait qu’il n’avait pas l’intention de se montrer raciste ou sectaire, mais bien de faire preuve de patriotisme et de soutenir les troupes canadiennes. Dans une entrevue sur CTV News du 12 novembre 2019, il explique regretter avoir employé l’expression « vous autres » pour tenter de faire passer son message, et qu’il aurait plutôt dû utiliser « tout le monde ».

Le licenciement de Don Cherry partage la population canadienne. Des fidèles de Hockey Night in Canada restent favorables au commentateur et critiquent la décision de Rogers Sportsnet. En revanche, de nombreuses voix s’élèvent, au sein de la population, pour estimer que cette décision est justifiée et qu’elle aurait dû être prise beaucoup plus tôt.

Vie personnelle

Don Cherry et sa première épouse, Rose (née Martini), ont été mariés de 1957 à la mort de cette dernière d’un cancer du foie, en 1997. Le couple a eu deux enfants : Cindy et Tim. Tim Cherry a travaillé comme dépisteur pour la Ligue de hockey de l’Ontario. Don a épousé sa deuxième femme, Luba, en 1999.

Distinctions

  • Trophée commémoratif Louis‑A‑R‑Pieri, American Hockey League (1974)
  • Trophée Jack‑Adams, Ligue nationale de hockey (1976)
  • Médaillon des Forces canadiennes pour services distingués (2011)
  • Membre du Temple de la renommée de la Ligue américaine de hockey (2019)

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