Répartition géographique de la culture Dorset | l'Encyclopédie Canadienne

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Répartition géographique de la culture Dorset

Vers l’an 800 avant notre ère (il y a environ 2 800 ans), les groupes paléo-inuits vivant dans l’est de l’Arctique nord-américain commencent à évoluer radicalement. Les nouveaux peuples ainsi formés, appelés « Dorset » par les archéologues, sont très différents de leurs ancêtres pré-Dorset. Les peuples Dorset évoluent dans l’Arctique jusqu’à il y a environ 600 ou 700 ans (vers 1300-1400 de notre ère). Ils semblent s’être éteints depuis ce moment. La disparition du peuple survient à peine quelques siècles après l’arrivée des premiers groupes inuits (Thulé), très différents des Dorset par leur génétique et leur culture.

Les archéologues séparent l’existence des Dorset, étalée sur environ 2 000 ans, en trois périodes, ou traditions : le Dorsétien ancien (environ de l’an 800 avant notre ère à l’an 1 de notre ère), le Dorsétien moyen (environ de l’an 1 à l’an 500 de notre ère) et le Dorsétien récent (environ de l’an 500 à l’an 1400 de notre ère). Le débat reste ouvert quant aux différences et aux ressemblances entre ces périodes. Il est cependant convenu que ces périodes ont connu une évolution en matière de technologie, d’architecture résidentielle, de mobilité et de répartition géographique (voir aussi Culture Dorset).

Figure 1 : Histoire de la culture de l’est de l’Arctique nord-américain. Un terme inuit pour « Dorset » est Tuniit.

Chronologie et répartition géographique

Le moment et la nature de la transition entre les ères pré-dorsétienne et dorsétienne sont encore source de débat. Les premières théories des archéologues décrivent un processus graduel, notamment en raison de la découverte de lieux représentant une période « de transition », où ont été trouvés des éléments culturels pré-dorsétiens et dorsétiens. Les recherches modernes indiquent toutefois que la transition aurait pu être plus rapide. Bon nombre de ces lieux « de transition » auraient plutôt été utilisés à deux moments très distincts : tout d’abord par les pré-Dorset, puis par les Dorset, quelques siècles plus tard.

Les premiers lieux occupés par les Dorset se seraient formés entre l’an 800 et l’an 500 avant notre ère, marquant ainsi le début du Dorsétien ancien. Les groupes du Dorsétien ancien ont peuplé l’est de l’Arctique nord-américain, de l’île Victoria à l’ouest, jusqu’au Labrador dans l’est, et jusqu’à l’île d’Ellesmere au nord. Certains groupes Dorset ont aussi vécu le long de la côte du Groenland. Ces groupes sont d’ailleurs souvent distingués par les archéologues par le nom Dorset groenlandais, afin de souligner leurs caractéristiques uniques. Les archéologues ont également démontré l’existence d’un groupe parent, les Paléo-Inuits de Groswater, qui a des ressemblances à la fois avec les groupes pré-Dorset et Dorset. Ce peuple habite cependant seulement au Labrador, à Terre-Neuve et dans certaines parties du Nunavik.

Image 2 : Carte approximative de la répartition géographique pendant le Dorsétien ancien.

Vers le début de notre ère (l’an 1 de notre ère), les Dorset commencent à changer de territoire et abandonnent le Groenland et l’Extrême-Arctique. C’est ce que les archéologues appellent le Dorsétien moyen. Certains archéologues considèrent que la culture matérielle des périodes ancienne et moyenne se ressemble. Le Dorsétien moyen est toutefois marqué par des réseaux d’échange surtout régionaux, qui ne s’étendent plus aussi loin que par le passé. Malgré cette réduction du territoire habité, certains groupes Dorset s’installent dans de nouvelles régions, comme Terre-Neuve. Ce déplacement, dont les motivations sont encore débattues parmi les archéologues, pourrait entre autres être dû à un refroidissement du climat.

Image 3 : Carte approximative de la répartition géographique pendant le Dorsétien moyen.

Vers l’an 500 de notre ère, les Dorset vivent une transition importante. Ils commencent à étendre leurs réseaux d’échange et à troquer des matériaux, des connaissances et des idées dans tout l’est de l’Arctique nord-américain. Cette période prospère marquée par l’interconnectivité se nomme le Dorsétien récent. De nombreux artéfacts de cette époque indiquent de fortes interactions entre les différents groupes Dorset. De plus, les groupes du Dorsétien récent réintègrent des parties de l’Extrême-Arctique et du nord du Groenland à partir de l’an 700. Malgré l’expansion de leur territoire, les Dorset quittent complètement Terre-Neuve et la plus grande partie du centre et du sud du Labrador.

Image 4 : Carte approximative de la répartition géographique pendant le Dorsétien récent.

Vers l’an 1000 de notre ère, les Dorset commencent à abandonner certaines parties de l’Arctique et disparaissent entièrement entre les années 1300 et 1400. La raison de cette disparition plutôt soudaine est encore inconnue des archéologues. Il n’existe aucun descendant génétique connu des peuples Dorset, ce qui rend le phénomène encore plus difficile à comprendre. De plus, les recherches indiquent qu’il y aurait eu peu de conflits entre les Dorset et les autres groupes vivant dans le nord, comme les Inuits et les Dénés. Leur disparition en est d’autant plus déconcertante. Dans certaines parties de l’Arctique, il existe toutefois un chevauchement entre les derniers Dorset et les premiers Inuits. Dans les récits oraux, des interactions entre les Inuits et les Tuniits, un peuple ressemblant de près à ceux du Dorsétien, suggèrent un certain niveau de contact entre les deux groupes. On ignore toutefois si ces interactions ont un lien avec le sort des Dorset.