Grippe au Canada | l'Encyclopédie Canadienne

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Grippe au Canada

La grippe est une maladie contagieuse commune des voies respiratoires. Il existe quatre types de virus responsables de la grippe : A, B, C et D. Les virus de la grippe A, B et C peuvent infecter les humains, tandis que celui de la grippe D affecterait principalement les animaux tels que les bovins et les porcs. Le virus de type C est rare comparé aux virus de type A et B, principaux responsables des « grippes saisonnières », qui circulent chaque hiver au Canada et dans d’autres pays. Le virus de type A est également la source des pandémies de grippe. Cinq pandémies de grippe ont été observées au Canada depuis la fin du 19e siècle, en 1890, 1918, 1957, 1968 et 2009. Au Canada, on estime que la grippe entraîne en moyenne 12 200 hospitalisations et 3 500 décès chaque année.
Illustration en trois dimensions du virus de la grippe.

Qu’est-ce que la grippe?

La grippe est une maladie respiratoire contagieuse commune, causée par des virus de la famille des orthomyxoviridés. Cette famille comporte six genres, ou types, dont quatre (A, B, C et D) peuvent engendrer la grippe. Les virus de la grippe de type A, B et C infectent les humains, mais le virus de type A peut aussi infecter un certain nombre d’animaux à sang chaud, notamment les chevaux, les chiens et les oiseaux. Les virus de types A, C et D peuvent par ailleurs infecter les porcs, mais celui de type D, découvert en 2011, préférerait les bovins. Les pandémies de grippe humaine, telles que la grippe espagnole de 1918, sont causées par des virus de type A.

Nomenclature et classification

Les virus de la grippe de type A sont classés en sous-types en fonction de deux protéines présentes à leur surface : l’hémagglutinine et la neuraminidase. Il existe 18 formes d’hémagglutinine et 11 formes de neuraminidase associées aux virus de type A et numérotées respectivement H1 à H18 et N1 à N11. Les virus sont baptisés en fonction des différentes formes de protéines qu’ils contiennent. La pandémie de 1918, par exemple, a été causée par un virus H1N1, tandis que les virus H3N8 et H3N2 infectent les chiens.

Les virus de la grippe de type B ne possèdent pas de sous-type mais sont divisés en lignées. On a répertorié deux lignées de virus présentement en circulation : Victoria et Yamagata. Ces lignées ont été baptisées en fonction de l’endroit où les virus ont été isolés pour la première fois : Victoria, en Australie, et Yamagata, au Japon.

Tous les types de virus de la grippe de types A, B, C et D peuvent être issus de différentes souches. Ces souches sont classées en fonction du type de grippe provoquée par le virus, de l’hôte sur lequel le virus a été trouvé (ou « isolé »), du lieu où cet isolement a été effectué, d’un « numéro d’isolement » (ou numéro de laboratoire), de l’année, et finalement, dans le cas d’un virus de type A, de son sous-type. Par exemple, le virus de la grippe A/chicken/Hong Kong/59/1997 (H5N1) a été isolé sur des poulets, à Hong Kong, en 1997 et appartient au sous-type H5N1, tandis que le virus D/bovine/France/2986/2012 a été trouvé chez des vaches, en France, en 2012. Lorsque l’isolement est effectué sur des humains, l’hôte n’est pas mentionné dans le nom, comme pour le virus C/Alberta/10161/2011.

Pour les virus de type B, la lignée (Victoria ou Yamagata) n’est pas mentionnée dans le nom. Par exemple, le virus B/Brisbane/60/2008 appartient à la lignée Victoria, mais son nom indique seulement qu’il a été isolé à Brisbane, en Australie, en 2008.

Quels sont les symptômes de la grippe?

Les symptômes de la grippe comprennent la fièvre, la toux, les maux de tête, l’écoulement nasal, les douleurs musculaires et la fatigue. Ces symptômes surviennent brusquement et peuvent durer jusqu’à une semaine ou plus. Cette maladie affecte les personnes de tout âge, mais les plus vulnérables sont les enfants en bas âge, les personnes très âgées et les personnes atteintes de maladies préexistantes. Sous les climats tels que celui du Canada, les virus qui circulent chaque hiver engendrent ce qu’on appelle la « grippe saisonnière ». Les virus responsables de la grippe saisonnière sont principalement de type A ou B (la grippe due aux virus de type C est moins commune et est associée à des symptômes moins sévères).

Comment se propage la grippe?

La grippe se propage par contact avec des personnes infectées ou des objets contaminés. Lorsqu’une personne infectée éternue ou tousse, le virus est dispersé dans l’air et peut infecter une autre personne en pénétrant dans ses yeux, son nez ou sa bouche. Lorsqu’un objet tel qu’une poignée de porte, un téléphone ou une rampe est contaminé par le virus, un simple contact avec ces objets peut provoquer une infection.

La grippe peut-elle être transmise d’une espèce à l’autre?

Le virus de type A, qui circule chez différents types d’animaux, peut passer d’une espèce à l’autre. Ce transfert peut se faire par contact entre différentes espèces et peut parfois mettre en jeu un processus baptisé « réassortiment ». Le réassortiment intervient lorsque différents virus mélangent leurs gènes. Par exemple, si un porc est infecté à la fois par un virus de la grippe aviaire et un virus de souche humaine, les deux virus peuvent se mélanger et créer un nouveau virus. Ce type de modification abrupte et d’envergure chez le virus de type A est appelé une « cassure antigénique ». Dans de rares cas, une cassure antigénique peut engendrer une pandémie de grippe, le nouveau virus contenant des protéines de surface (hémagglutinine et neuraminidase) jusqu’alors absentes chez les virus humains. Les humains n’étant pas immunisés contre ce type de virus, il existe alors un risque de pandémie de grippe. La transmission de la grippe A des animaux aux humains – par contact ou réassortiment – est néanmoins rare.

Traitement

Dans de nombreux cas, la grippe peut être traitée en restant chez soi, en se reposant et en absorbant des liquides. Pour ceux qui font partie des groupes à risque élevé, comme les personnes âgées et les jeunes enfants, les médecins peuvent en plus prescrire des médicaments antiviraux. Ces médicaments permettent d’amoindrir les symptômes, de raccourcir la maladie et d’aider à prévenir les complications telles que la pneumonie.

Prévention et vaccin antigrippal

On peut prévenir la propagation de la grippe en se lavant souvent et minutieusement les mains, en évitant d’approcher les autres durant la maladie et en maintenant un style de vie sain (sommeil adéquat, alimentation nutritive, beaucoup de liquides, gestion du stress et exercices modérés).

La grippe peut aussi être évitée en se faisant vacciner. Chaque année, les chercheurs mettent au point un nouveau vaccin visant à immuniser contre les souches qui, selon eux, seront les plus communes durant la prochaine saison. Les vaccins antigrippaux n’immunisent que contre les souches des virus de types A et B, les virus de type C ne causant que des foyers de grippes moins virulentes et plus localisées. C’est ainsi que pour la saison 2015-2016, l’Organisation mondiale de la santé a recommandé un vaccin antigrippal contenant quatre souches : A/California/7/2009 (H1N1), A/Switzerland/9715293/2013 (H3N2), B/Phuket/3073/2013 et B/Brisbane/60/2008. Le vaccin quatre-souches de la saison suivante (2016-2017) était le même, sauf que la souche Switzerland a été remplacée par A/Hong Kong/4801/2014 (H3N2).

L’efficacité de la vaccination antigrippale dépend en partie de la similarité entre les souches de virus utilisées dans le vaccin et celles qui finissent par circuler dans la population. Lorsque les virus utilisés dans le vaccin se rapprochent suffisamment de ceux en circulation, l’efficacité se situe entre 50 et 60 % (c’est-à-dire que le risque d’attraper la grippe est diminué de 50 à 60 % au sein de la population générale); lorsqu’ils diffèrent trop, l’efficacité du vaccin peut être beaucoup plus faible. Lors de la saison 2013-2014, par exemple, les virus les plus communément observés étaient semblables au A/Texas/50/2012 (H3N2). Les chercheurs ont donc recommandé d’inclure ce type de virus dans le vaccin mis au point pour la saison suivante. Des souches différentes du virus H3N2 sont cependant apparues durant la saison 2014–2015 et le vaccin s’avéra d’une faible efficacité cette saison-là. Les virus mutant rapidement, il est difficile de prévoir quelles souches seront prévalentes durant la saison suivante.

Épidémies et pandémies de grippe

Une pandémie survient lorsqu’une maladie se propage dans le monde entier, tandis qu’une épidémie désigne la propagation d’une maladie au sein d’une région ou d’une communauté particulière. Au Canada, la grippe s’est manifestée plusieurs fois dans des proportions épidémiques avant le début du 20e siècle, en particulier chez les communautés autochtones qui n’étaient pas immunisées contre la maladie. Les épidémies de grippe survenaient souvent durant les épidémies d’autres maladies. Ce fut notamment le cas durant l’épidémie de typhus à Montréal en 1847 et durant l’épidémie de rougeole en Alaska qui s’est répandue jusqu’au Yukon en 1900.Pour ce qui est des pandémies de grippe, les experts pensent qu’il y en a eu environ 14 depuis 1500, dont quelques-unes ont touché l’Amérique du Nord. Depuis la Confédération, cinq pandémies ont été recensées au Canada : la grippe russe de 1890, la grippe espagnole de 1918, la grippe asiatique de 1957, la grippe de Hong Kong de 1968 et la pandémie du H1N1 en 2009.

1890 : grippe russe ou asiatique au Canada

La grippe russe ou asiatique (probablement causée par un virus de type H3Nx) est partie des steppes eurasiennes puis s’est propagée en Russie et en Europe avant d’arriver dans le nord-est de l’Amérique du Nord en décembre 1889. En 1890, la pandémie atteint le Canada, notamment les villes de Montréal, Toronto, Hamilton, Ottawa, London, Winnipeg et Vancouver. Certains experts pensent que cette grippe, bien que moins létale que la grippe espagnole de 1918, a rendu les malades plus susceptibles de développer des symptômes graves, voire de succomber à la maladie, durant la pandémie de 1918.Cette théorie s’appuie sur le concept de « péché originel antigénique », selon lequel notre corps répond à un virus en produisant les anticorps qu’il a fabriqués lorsqu’il a été confronté à une souche antérieure du même virus, ce qui se traduit par une réponse immunitaire inefficace lorsque le virus en question mute très vite.

1918 : grippe espagnole au Canada

Grippe
Infirmi\u00e8res portant des masques pour emp\u00eacher la propagation de la grippe espagnole, \u00e0 High River, en Alberta, octobre 1919.

L’épidémie de grippe la plus grave jamais enregistrée au Canada et dans le monde entier est celle qui apparaît durant la Première Guerre mondiale. Entre 1918 et 1919, la grippe espagnole tue en effet entre 20 et 100 millions de personnes, dont 30 000 à 50 000 Canadiens. Contrairement à la plupart des grippes, qui sont dangereuses pour les personnes dont l’immunité est réduite (les personnes âgées, les très jeunes et ceux qui souffrent d’une maladie préexistante), la grippe espagnole de 1918 tue préférentiellement les jeunes gens en bonne santé. La pneumonie, qui atteint les malades affaiblis par la grippe, est la première cause de décès, plutôt que la grippe elle-même. L’apparition d’un syndrome parkinsonien, caractérisé par un tremblement marqué, est vue comme une des conséquences à long terme de la grippe chez certaines victimes de cette épidémie.

La grippe espagnole est introduite au Canada par les troupes qui reviennent du front; elle atteint même les communautés les plus éloignées. Des villages entiers sont décimés par la maladie. Le Labrador et le Québec sont durement touchés. Dans certaines régions, on a recours à la quarantaine, mais sans succès. Les installations médicales et le personnel soignant ne suffisent plus. Des volontaires mettent sur pied des infirmeries dans des écoles et des hôtels.

L’épidémie répand la mort, mais provoque aussi des perturbations sociales et économiques. Les orphelins se multiplient et de nombreuses familles perdent la personne qui gagnait le revenu principal du foyer. De part et d’autre, les armées sont temporairement affaiblies. Les commerces voient baisser leur chiffre d’affaires à défaut d’une demande suffisante pour leurs produits ou parce qu’ils ne peuvent répondre à la demande en raison d’une main-d’œuvre réduite. Les administrations municipales tentent de contenir la maladie en fermant tous les services publics, à l’exception des services essentiels. Les gouvernements provinciaux adoptent de leur côté des lois concernant la mise en place de la quarantaine et rendent obligatoire le port du masque en public. Si la population canadienne accepte ces restrictions, quoiqu’à contrecœur, elle défie cependant la demande du gouvernement fédéral de reporter au 1er décembre les commémorations de la victoire de la Première Guerre mondiale. La création, en 1919, du ministère fédéral de la Santé est une conséquence directe de l’épidémie.

La souche virale de la grippe espagnole, bien que de moins en moins virulente, demeure active au Canada jusqu’au milieu des années 1920. Elle a depuis été identifiée comme étant un virus H1N1.

1957 : grippe asiatique au Canada

En 1957, un foyer de virus H2N2 apparaît dans le sud de la Chine et se propage rapidement dans le monde entier. Le virus porte une hémagglutinine et une neuraminidase qui n’ont jamais été observées chez les virus humains. L’épidémie de 1957 est associée à la première préparation d’un vaccin pour lutter contre une pandémie. La grippe asiatique entraînera la mort de 1 à 2 millions de personnes dans le monde entier, dont 7 000 au Canada.

1968 : grippe de Hong Kong au Canada

La pandémie de la grippe de Hong Kong débute en 1968, en Asie du Sud-Est. On la baptise alors la « grippe de Hong Kong », car c’est là que la maladie attire pour la première fois l’attention des médias occidentaux. Le virus mis en cause, de sous-type H3N2, possède la même neuraminidase que le virus responsable de la pandémie de 1957, mais il porte une hémagglutinine différente. L’impact du virus varie donc en fonction des régions, certaines personnes étant immunisées contre au moins une partie du virus.La grippe de Hong Kong entraînera la mort de 1 à 4 millions de personnes au niveau mondial, dont environ 4 000 personnes au Canada.

2009 : H1N1 au Canada

Le virus de la grippe H1N1 est signalé pour la première fois au Mexique en février 2009. Le virus responsable de cette grippe, au début baptisée « grippe porcine », n’a jamais été observé auparavant chez les animaux ou les humains. On pense qu’il se rapproche le plus des virus de la grippe trouvés chez les porcs de l’Amérique du Nord et de l’Eurasie. Les chercheurs constatent plus tard qu’en plus des similitudes avec les virus nord-américains et eurasiens responsables de la grippe porcine, le virus présente également des particularités communes avec les virus de la grippe aviaire et de la grippe humaine observés en Amérique du Nord.

Le 26 avril 2009, l’Agence de santé publique du Canada signale le premier cas de H1N1. Le 11 juin 2009, avec déjà 74 pays qui ont confirmé grâce à des analyses de laboratoire des cas d’infection par ce virus, l’Organisation mondiale de la santé annonce une pandémie. Contrairement à la grippe saisonnière qui survient durant l’hiver, le virus H1N1 infecte les Canadiens durant la période estivale. Une seconde vague du même virus déferle au cours de l’hiver 2009, mais en janvier 2010, l’Agence de santé publique a déjà réduit son niveau de réponse à la pandémie. En juillet 2010, plus de 200 pays ou territoires ont déjà signalé la présence du virus. Les autorités annoncent un bilan officiel de 18 000 personnes tuées par le H1N1 à l’échelle mondiale, dont 428 Canadiens. Des modèles statistiques ont néanmoins permis d’estimer le nombre total de morts sur l’ensemble de la planète à plusieurs centaines de milliers.

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