Wilfrid Reid May | l'Encyclopédie Canadienne

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Wilfrid Reid May

Wilfrid Reid (Wop) May, O.B.E., DFC, aviateur, as de la Première Guerre mondiale (né le 20 mars 1896 à Carberry, au Manitoba; décédé le 21 juin 1952 près de Provo, en Utah, aux États‑Unis). Wop May est un aviateur qui a combattu comme pilote de chasse lors de la Première Guerre mondiale. Ayant 13 victoires à son actif, il a participé au terrible combat aérien où le tristement célèbre Baron rouge a été abattu, et il a terminé la guerre avec un statut d’as de l’aviation. Après la guerre, il est devenu une vedette de la voltige aérienne, exerçant également ses talents comme pilote de brousse au cours de missions audacieuses qui le conduisaient souvent, aux commandes de petits aéronefs, dans des régions éloignées du Nord canadien. Il a ainsi effectué plusieurs vols qui sont restés gravés dans les mémoires, transportant des médicaments et de l’aide vers des localités du Nord et assistant les forces de l’ordre lors de mémorables chasses à l’homme, notamment, en 1932, celle d’Albert Johnson, surnommé le « Mad Trapper of Rat River » (le trappeur fou de la rivière Rat).

Wilfrid May
Wilfrid May échappe une poursuite menée par la baron von Richthofen et devient l'un des pilotes de brousse les plus connus du Canada.

Jeunesse

Wilfrid May est le plus jeune fils d’Alexander May, un charron et marchand d’outils, et de son épouse Elizabeth. En 1903, la famille déménage à Edmonton, où grandit le jeune Wilfrid. Il est surnommé « Wop » depuis l’époque où l’un de ses jeunes cousins prononce son prénom ainsi sur un mode enfantin. Il gardera toute sa vie ce surnom. Le futur as de l’aviation Arthur « Roy » Brown est son camarade de classe à l’école secondaire d’Edmonton (aujourd’hui la Victoria School of the Arts).

Première Guerre mondiale – le Baron rouge

Le 8 février 1916, Wop May intègre le 202e Bataillon d’infanterie du Corps expéditionnaire canadien (Edmonton Sportsmen’s Battalion). Il devient instructeur de tir à la mitrailleuse et détient le grade de sergent au moment où son bataillon se rend en Europe en novembre 1916 (voir Première Guerre mondiale). Une fois arrivé sur place, il pose sa candidature comme pilote et est muté au Royal Flying Corps (bientôt rebaptisé Royal Air Force) en octobre 1917. Après sa formation, il obtient son diplôme de pilote le 28 février 1918 avec le grade de lieutenant. Le 9 avril, il est affecté au 209e Escadron de la Royal Air Force. Son commandant de bord est le capitaine Roy Brown, son ancien camarade de classe.

Le 21 avril, Wop May effectue son premier combat aérien au‑dessus du canal de la Somme, aux commandes d’un Sopwith Camel. Son escadron croise dans le ciel le « Flying Circus » (cirque volant) de Manfred von Richthofen, le légendaire Baron rouge, dont il subit personnellement les assauts. Les armes du pilote canadien se bloquent et il tente d’échapper au combat aérien. Volant au‑dessus de la scène, le capitaine Brown voit que son camarade est en danger et tire à la mitraillette sur l’appareil de Manfred von Richthofen. Quelques secondes plus tard, l’avion allemand s’écrase au sol. Le capitaine Arthur Roy Brown se voit attribuer cette victoire et l’honneur d’avoir abattu le célèbre Baron rouge. Cependant, la question de savoir si ce dernier a été abattu par les tirs du capitaine canadien aux commandes de son avion ou par des tirs alliés venus du sol est encore l’objet de controverses. Néanmoins, il est presque certain que c’est l’intervention d’Arthur Roy Brown qui a sauvé la vie de Wop May.

Avant la fin de la guerre, Wop May est promu capitaine et remporte 13 victoires dans les airs, ce qui lui confère le statut d’« as ». Pour son courage au combat lors de la bataille d’Amiens, en août 1918, au cours de laquelle il est blessé, il reçoit la Distinguished Flying Cross (Royaume-Uni). La Gazette de Londres du 3 décembre 1918 écrit : « Cet officier a effectué de nombreuses patrouilles offensives et de bombardements à faible altitude, se montrant, à chacune de ces occasions, un pilote rempli d’audace et de courage… Sa précision et son mépris du danger sont dignes des plus grands éloges. »

(Voir également La Grande Guerre dans les airs.)

Voltige aérienne

Après la guerre, Wop May revient au Canada. Il obtient un permis de pilote civil le 7 juillet 1919. Cette année‑là, il crée, avec son frère Elgin « Court » May, la première compagnie aérienne canadienne officiellement enregistrée, la May Airplanes Limited, basée à Edmonton. Aux commandes d’un Curtiss JN‑4 « Jenny », ils parcourent les provinces des Prairies, se produisant pour la foule dans des exercices de voltige, lors de démonstrations et de rodéos. Lorsque George Gorman s’associe à eux, l’entreprise devient la May‑Gorman Airplanes Ltd. Wop May décide d’inscrire son nom sur l’aile supérieure de son biplan afin que les spectateurs sachent qu’il est aux commandes lorsqu’il pilote sa machine à l’envers, la tête en bas.

Wop May

Wop May debout devant un avion lors d’une démonstration à Calgary, en 1919.

(avec la permission de Provincial Archives of Alberta/A11661)

Première chasse à l’homme policière

En septembre 1919, Wop May participe à la première poursuite policière assistée par avion au Canada. John Larson, un condamné depuis peu libéré sous caution, est le principal suspect du meurtre de l’agent de police d’Edmonton William Nixon. Le chef de la police d’Edmonton, George Hill, recrute le pilote pour transporter l’enquêteur James Campbell à Edson, en Alberta, une localité vers laquelle John Larson semble se diriger. En l’absence de champs appropriés pour atterrir dans les environs, l’ancien as de la Grande Guerre pose son biplan dans une rue de la ville. Peu après, James Campbell et un autre policier appréhendent l’homme qu’ils poursuivent, qui est ramené jusqu’à Edmonton par le train. Ce premier vol au service de la police est reconstitué en 2009; le biplan Curtiss du pilote canadien, restauré pour l’occasion, est exposé au Royal Alberta Museum d’Edmonton.

Pilote de brousse

Wop May

Wilfrid Reid « Wop » May devant l’aéronef « Pacemaker » Bellanca de la Commercial Airways Ltd. en service aéropostal le long du fleuve Mackenzie, dans les Territoires du Nord‑Ouest, 1930.

(avec la permission de Bibliothèques et Archives Canada/PA-059984)

Le 7 mai 1920, Wop May obtient, sous le no 7, son certificat de pilote d’avion commercial. Peu après, les frères May créent, sur une ferme à proximité d’Edmonton, le May Field, le premier aérodrome au Canada. La mort prématurée de Court en 1922 affecte profondément son frère. Cependant, il continue sa carrière de voltigeur jusqu’à son mariage, en 1924, avec Violet « Vi » Bode. Il travaille ensuite pour la National Cash Register Company à Dayton, en Ohio aux États‑Unis, où un accident à l’entraînement le laisse partiellement aveugle d’un œil.

En 1927, Wop May fonde le premier aéroclub agréé au Canada, l’Edmonton and Northern Alberta Aero Club, dont il devient premier président et instructeur en chef. Le club est basé au Blatchford Field, un lieu qui fait désormais partie d’un projet de réaménagement au centre-ville d’Edmonton. C’est à partir de ce terrain que le pilote vétéran de 14‑18 s’embarque, avec son copilote Vic Horner, pour un vol qui va défrayer les manchettes de la presse internationale.

Le froid extrême qui règne alors dans les régions subarctiques canadiennes rend les vols particulièrement dangereux. Les pionniers de l’aviation comme Wop May et George Gorman, qui se rendent aux commandes de leurs appareils jusqu’aux territoires reculés du Nord, sont appelés des « pilotes de brousse » (voir Aviation de brousse). Le premier janvier 1929, la nouvelle qu’une épidémie de diphtérie s’est déclarée dans le hameau éloigné de Peace River parvient jusqu’à Edmonton par voie télégraphique. À l’époque, transporter du sérum sur place par traîneau à chiens peut prendre jusqu’à deux mois, et le temps est un facteur essentiel pour prévenir la propagation d’une épidémie.

À la demande du docteur Malcolm Bow, sous‑ministre de la Santé, Wop May et Vic Horner se portent volontaires pour transporter les médicaments requis jusqu’à Fort Vermilion, un trajet d’environ 965 km au‑dessus d’un terrain qu’ils ne connaissent pas. Ils décollent le matin du 2 janvier aux commandes d’un biplan Avro « Avian » doté d’un poste de pilotage ouvert. La cargaison de médicaments est enveloppée dans des couvertures de laine et rangée dans le compartiment à marchandises, à côté d’une chaufferette au charbon allumée pour l’empêcher de geler.

Wop May et Vic Horner

Wop May et Vic Horner arrivent à Fort Vermilion avec du sérum contre la diphtérie, le 3 janvier 1929.

(avec la permission de Provincial Archives of Alberta/A11802)

Les deux hommes doivent progresser au milieu de bourrasques de neige, dans le froid glacial et l’obscurité de l’hiver subarctique. Le poêle à charbon prend feu, les obligeant à atterrir pour s’en débarrasser et mettre le sérum à l’abri sous leurs vêtements afin de le garder au chaud. Lorsqu’ils atteignent enfin Fort Vermilion dans l’après‑midi du 3 janvier, ils souffrent de graves engelures (voir Blessures dues au froid). De là, un traîneau à chiens rapide transporte les médicaments sur les 80 km restants jusqu’à Little Red River. Cette « course contre la mort », ainsi que l’on a surnommé le vol héroïque de Wop May et son copilote, attire l’attention internationale sur le travail vital des pilotes de brousse canadiens. Au début des années 1930, Wop May mènera, aux commandes de son avion, de nombreuses autres missions de sauvetage dans des conditions extrêmement défavorables.

En février 1929, il cofonde, avec Vic Horner, la Commercial Airways. Cette nouvelle compagnie offre, entre autres, le premier service aéropostal dans l’Arctique. En 1929, Wop May reçoit le trophée Trans‑Canada et, en 1931, Canadian Airways absorbe Commercial Airways.

Courrier transféré d’un avion à un attelage de chiens à Aklavik, Territoires du Nord‑Ouest. Photo montrant, de gauche à droite, un homme non identifié, Glynn Roberts, Bishop Geddes, R.W. Hale et Wop May. On voit Bishop Geddes, le maître de poste à Aklavik, tenant une caisse de Canada Dry Ginger Ale qui a été transportée en toute sécurité depuis Edmonton.

(avec la permission de Bibliothèques et Archives Canada)

Chasse au « Mad Trapper »

En février 1932, la GRC sollicite l’aide de Wop May pour poursuivre un homme qui se fait appeler Albert Johnson, que la presse a surnommé « The Mad Trapper of Rat River » (le trappeur fou de la rivière Rat) : après avoir tiré sur deux policiers, tuant l’un d’entre eux, l’homme réussit à prendre la fuite. Des semaines durant, en homme des bois plein de ressources, le fugitif réussit à échapper à ses poursuivants en utilisant des tactiques comme la marche arrière sur les pistes et le camouflage de ses propres traces dans des pistes de caribous. La participation du pilote canadien as de la voltige marque la première utilisation par la GRC d’un avion lors d’une chasse à l’homme.

À bord d’un monoplace Bellanca, Wop May transporte des hommes et des fournitures vers des emplacements stratégiques. Il patrouille, le long de la frontière entre le Yukon et les Territoires du Nord‑Ouest, à la recherche de la piste du fugitif, signalant ses découvertes à la police sur le terrain. Les renseignements ainsi transmis aident les forces de l’ordre à se rapprocher de ce fugitif qui semble insaisissable.

Le 17 février, Wop May assiste à la fusillade, sur la rivière Eagle gelée, au cours de laquelle la police tue Albert Johnson. Évoquant cet épisode, le pilote raconte : « J’étais dans les airs la tête en bas, lorsque j’ai vu Alex Eames [l’inspecteur de la GRC] se rapprocher d’un méandre de la rivière… Il [Johnson] a alors tenté de remonter sur la rive pour s’éloigner à toute vitesse. Mais, comme il n’avait pas ses raquettes, il n’a pu mettre son plan à exécution et a dû revenir au centre de la rivière et se cacher dans la neige; là, le combat a commencé. Nous [Wop May et le mécanicien de bord, Jack Bowen] étions juste au‑dessus de l’action, effectuant des cercles, observant le combat et prenant des photos. »

Après cet épisode, au cours duquel Albert Johnson est tué, Wop May ramène, dans son avion, un policier blessé jusqu’à Aklavik et retourne ensuite récupérer le corps du fugitif.

Fin de carrière et décès

En 1935, Wop May est nommé officier de l’ordre de l’Empire britannique (O.B.E.). Pendant la Deuxième Guerre mondiale, il se porte volontaire pour le Programme d’entraînement aérien du Commonwealth britannique (PEACB) et occupe les fonctions de directeur général de l’école d’observation aérienne (EOA) no 2 à Edmonton. Il supervise également toutes les écoles d’observateurs aériens de l’Ouest canadien. Au cours de cette période, de nombreux avions sont acheminés des États‑Unis vers l’Alaska et la Russie en passant par Edmonton, le long de la ligne d’étapes du Nord‑Ouest. Les pilotes en panne (principalement américains, mais aussi russes et canadiens) sont souvent bloqués dans la brousse, et parfois l’aide arrive trop tard. Dans ce contexte, l’école de Wop May est souvent sollicitée pour participer à des missions de recherche et de sauvetage, tout en contribuant à la sécurité des avions américains à destination de l’Alaska.

Wop May a alors l’idée de former une équipe spéciale de sauveteurs‑parachutistes spécialisés dans le sauvetage des aviateurs perdus dans la brousse. Sa première équipe de sauvetage, formée en 1943, est composée de civils venant de la Canadian Airways Training Limited. Ce concept est rapidement adopté par l’ARC et mis en pratique après la guerre. L’aide apportée aux États‑Unis vaut à Wop May l’attribution de la Médaille de la Liberté avec palme de bronze en 1947 pour « services méritoires rendus aux forces aériennes de l’armée américaine de janvier 1942 à janvier 1946 ».

Après la guerre, il est embauché par la Canadian Pacific Airlines (CPA) en tant que directeur du développement du Nord. En 1951, il devient directeur du dépôt de réparation de la CPA à Calgary. L’année suivante, il décède d’une crise cardiaque lors d’une randonnée dans l’Utah aux États‑Unis. Il est intronisé au Panthéon de l’aviation du Canada en 1974.

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