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Spectroscopie

La spectroscopie est le champ d'études qui consiste à observer, mesurer et interpréter les spectres électromagnétiques produits par une substance qui émet ou absorbe une énergie rayonnante. Les méthodes spectroscopiques sont importantes pour l’analyse chimique de substances et sont utilisées en astronomie.

Raymond Lemieux

Contexte historique

La spectroscopie voit le jour en 1666 quand Isaac Newton fait passer les rayons de lumière du soleil à travers un prisme en verre et observe les couleurs du spectre visible. (Voir aussi Arc-en-ciel.) La lumière est composée d’ondes électromagnétiques, chaque couleur correspondant à une longueur d’onde différente. La spectroscopie optique repose sur la séparation de la lumière en longueurs d’ondes individuelles au moyen d’un dispositif tel qu’un prisme ou un réseau de diffraction. Cependant, le segment visible ne comprend qu’une petite partie de tout le spectre électromagnétique. La région ultraviolette va des longueurs d’ondes plus courtes que le violet jusqu’au domaine des rayons X. La partie infrarouge va des longueurs d’ondes plus longues que le rouge jusqu’aux domaines des micro-ondes et des ondes radio. On caractérise le plus souvent un rayonnement dans ces régions par sa fréquence plutôt que par sa longueur d’onde, mais ces deux grandeurs sont liées puisque leur produit est égal à la vitesse de la lumière (299 792 458 m/s).

Toutes les substances émettent ou absorbent des radiations à leur propre fréquence ou longueur d’onde caractéristique. Par conséquent, le spectre d’une substance constitue une « empreinte digitale » qui permet de l’identifier. La séparation de la lumière d’une étoile en différentes couleurs révèle de nombreux petits détails appelés raies spectrales. L’étude de la fréquence et de l’intensité de ces raies fournit des renseignements sur la quantité des diverses substances présentes et sur la température, la pression et le rayonnement baignant le gaz émetteur.

Un des premiers exemples d’un tel type d’étude est l’observation par Joseph von Fraunhofer de raies d’absorption sombres dans le spectre visible du soleil. Ces raies sont causées par la présence de sodium, de calcium et d’autres éléments dans l’atmosphère solaire. L’hélium a été découvert dans le spectre solaire avant qu’il le soit sur Terre.

La théorie des quanta, avancée par Max Planck en 1900, permet de comprendre en détail le spectre des atomes et des molécules. Cette théorie affirme que l’énergie est émise ou absorbée en unités discrètes appelées quanta. En 1913, Niels Bohr parvient à expliquer en détail le spectre de l’atome d’hydrogène en postulant que l’énergie de ce dernier ne peut prendre qu’une série de valeurs discrètes (niveaux d’énergie discrets) et que l’émission ou l’absorption de rayonnement ne survient qu’en cas de passage d’un niveau d’énergie à un autre.

L’introduction de la mécanique quantique par Werner Heisenberg et Erwin Schrödinger en 1925 et 1926 constitue un autre développement important. Les spectres associés à une variation des nombres quantiques de rotation d’une molécule sont habituellement observés dans le domaine micro-ondes et les régions adjacentes du spectre électromagnétique. Ceux qui sont associés à une variation des nombres quantiques de vibration surviennent dans le domaine infrarouge. Les spectres électroniques sont généralement étudiés dans les domaines visible et ultraviolet.

En 1925, S.A. Goudsmit et G.E. Uhlenbeck postulent que l’électron possède un moment angulaire intrinsèque (ou spin) auquel est associé un moment magnétique. Ils présentent cette idée pour expliquer la présence de quelques groupes de raies dans le spectre des métaux alcalins et alcalino-terreux. Une multiplicité de raies analogue apparaît dans le spectre des molécules contenant au moins un électron non apparié (dont le spin n’est pas compensé). De telles espèces chimiques sont souvent appelées radicaux libres. De nombreux noyaux atomiques peuvent, de manière similaire, présenté un moment magnétique. L’interaction de ce moment magnétique nucléaire avec un champ magnétique extérieur confère au noyau une énergie qui dépend de l’orientation relative du moment magnétique et du champ magnétique.

À quoi sert la spectroscopie?

L’étude de la spectroscopie par résonance magnétique nucléaire (RMN) a permis d’obtenir des renseignements précieux sur la structure des molécules. De nombreuses autres formes de spectroscopie sont apparues depuis l’avènement des lasers en 1960. Lorsque la fréquence du laser n’est pas accordable, il est possible d’atteindre la « résonance » en décalant la fréquence caractéristique de la molécule ou du radical étudié. L’application d’un champ électrique ou magnétique extérieur peut être utilisée à cet effet. Les lasers accordables ont permis de développer de nombreux types de spectroscopie à haute résolution. Toutes ces techniques permettent de mesurer avec une grande précision les propriétés des atomes et des molécules.

Les lasers étendent aussi la spectroscopie Raman. Cette technique consiste à exciter des molécules à l’aide d’un fort rayonnement monochromatique et à analyser le rayonnement diffusé qui contient des fréquences supplémentaires propres à la molécule excitée. La spectroscopie a de nombreuses applications. Les spectroscopies d’émission et d’absorption atomiques permettent d’identifier les éléments présents dans les minéraux ou de mesurer des concentrations d’impuretés de l’ordre d’une partie par million ou même d’une partie par milliard.

Les chimistes utilisent couramment la spectroscopie par résonance magnétique nucléaire et la spectroscopie infrarouge pour identifier des matériaux et suivre l’évolution de réactions. On utilise diverses formes de spectroscopie pour mesurer la concentration de polluants dans l’atmosphère. La spectroscopie optique a permis d’identifier de nombreuses molécules dans l’atmosphère des étoiles et des planètes, et la spectroscopie micro-ondes a permis d’identifier plus de 80 espèces moléculaires dans le milieu interstellaire.

Au Canada, le Conseil national de recherches (CNRC), ainsi que les départements universitaires de chimie, de physique et d'astronomie, et les observatoires de tout le pays effectuent des recherches en spectroscopie. Les travaux de Gerhard Herzberg et de ses nombreux collègues dans les laboratoires de spectroscopie du CNRC et de le Centre de recherche Herzberg en astronomie et en astrophysique sont reconnus mondialement. Harry Lambert Welsh de l'Université de Toronto a fait un travail remarquable sur les spectres Raman des molécules. Parmi les premiers chercheurs de l'Observatoire fédéral d'astrophysique, on compte les physiciens John Stanley Plaskett , Joseph Algernon Pearce, Andrew McKellar et Carlyle Smith Beals.

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