Politique en Alberta | l'Encyclopédie Canadienne

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Politique en Alberta

La province de l’Alberta est gouvernée par le Parti conservateur uni de l’Alberta, qui est majoritaire et qui a été formé le 29 mai 2023. La première ministre provinciale est Danielle Smith et la lieutenante-gouverneure, Salma Lakhani. Le premier premier ministre de la province, Alexander C. Rutherford, a été élu en 1905, soit après que la province ait rejoint la Confédération. Historiquement, la politique provinciale s’est caractérisée par la montée au pouvoir de partis politiques possédant de confortables majorités à la Chambre et demeurant longtemps au pouvoir avant de subir une défaite décisive par une nouvelle force politique montante.

Structure du gouvernement provincial

En Alberta, l’autorité législative relève d’une assemblée législative unicamérale élue regroupant 87 députés ainsi que du lieutenant-gouverneur, un représentant de la Couronne nommé par le gouverneur général à la recommandation du premier ministre. Toutefois, les pouvoirs traditionnels du lieutenant-gouverneur sont, dans les faits, tombés en désuétude et le lieutenant-gouverneur remplit maintenant essentiellement des fonctions protocolaires. Le pouvoir exécutif revient à un cabinet de ministres choisis par le premier ministre provincial, chef du parti politique majoritaire à l’Assemblée législative. Chaque ministre dirige un ou plusieurs ministères au sein du gouvernement. (Voir aussi Premiers ministres de l’Alberta; Lieutenants-gouverneurs de l’Alberta.)

Début du 20e siècle : les libéraux et la United Farmers of Alberta

Le modèle politique albertain, caractérisé par des partis politiques élus par de confortables majorités, est établi par les libéraux du premier premier ministre albertain, Alexander C. Rutherford (1905-1910), qui obtient 22 des 25 sièges et 58 % du vote populaire à l’issue de la première élection provinciale en 1905. Les gouvernements libéraux de Rutherford et de ses successeurs, Arthur L. Sifton (1910-1917) et Charles Stewart (1917-1921), remportent des victoires similaires (en 1909, en 1913 et en 1917). Le parti United Farmers of Alberta (UFA), dirigé par Herbert Greenfield (1921-1925), est porté au pouvoir aux élections provinciales de 1921, remportant 38 (tous ruraux) des 61 sièges, bien qu’il n’obtienne que 29 % des suffrages. Il se retrouve au pouvoir en raison des troubles agraires et de la montée du progressisme et du populisme qui ont suivi la Première Guerre mondiale. Sous les successeurs de Herbert Greenfield, John Brownlee (1925-1934) et Richard Reid (1934-1935), le parti UFA conserve son pouvoir législatif grâce à de grandes majorités aux élections de 1926 et de 1930. Cependant, aux élections de 1935, en raison de la campagne charismatique campagne menée par William Aberhart, chef du nouveau Crédit social, et des problèmes économiques qui affligent la province lors de la crise des années 1930, le Crédit social remporte 56 des 63 sièges avec 54 % des suffrages.

Le premier ministre Pierre Elliott Trudeau, le premier ministre albertain Peter Lougheed et le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles de l’Alberta Merv Leitch lors d’une conférence de presse

De la crise économique des années 1930 à la fin des années 1980 : le Crédit social et les progressistes-conservateurs

Sous les gouvernements de William Aberhart (1935-1943) et de ses successeurs, Ernest Manning (1943-1968) et Harry Strom (1968-1971), le Crédit social reste au pouvoir pendant 36 ans. Toutefois, il est écarté par la victoire de Peter Lougheed (1971-1985) et des progressistes-conservateurs qui, en 1971, gagnent 49 sièges sur 75 et 46 % du vote populaire. Aux élections de 1975, de 1979 et de 1982, Peter Lougheed et les progressistes-conservateurs l’emportent haut la main. En 1986, avec la résurgence de l’opposition de gauche, dirigée par le Nouveau Parti démocratique et, à un degré moindre, le Parti libéral, les progressistes-conservateurs au pouvoir font face à leur premier grand défi. Aux élections de 1986, sous le chef du Parti conservateur Don Getty (1985-1992), l’appui aux conservateurs n’en est plus qu’à 51 % et le Parti progressiste-conservateur détient seulement 61 des 83 sièges. En 1989, les progressistes-conservateurs de Don Getty remportent une autre majorité des sièges malgré une diminution constante dans les suffrages.

Ralph Klein et Don Getty

De la fin des années 1990 au début des années 2000 : Ralph Klein

À l’occasion de l’élection provinciale de 1993, on assiste à une épreuve de force entre les deux maires, fort populaires, des deux principales villes : l’ancien maire de Calgary, Ralph Klein, successeur de Don Getty à la direction du Parti conservateur, et Laurence Decore, ancien maire d’Edmonton et chef nouvellement élu d’un Parti libéral connaissant un nouvel essor, qui mène une campagne axée sur la responsabilité financière et la réduction du déficit. Victorieux, les conservateurs de Ralph Klein (1992-2006) voient néanmoins leur majorité fondre de 51 à 32 sièges en raison de la polarisation du vote entre les zones rurales conservatrices au sud et les régions urbaines libérales au nord. Les progressistes-conservateurs retrouvent des majorités supérieures et une augmentation de leur part du vote populaire aux élections de 1997 et de 2001.

La renaissance des conservateurs est facilitée par la popularité et les politiques fiscales de Raplh Klein. Celui-ci entreprend résolument de diminuer l’importance du rôle accordé au gouvernement. Il privatise la vente de spiritueux ainsi que les services d’immatriculation des véhicules automobiles et d’enregistrement des naissances, des décès et des mariages. Sa politique relative à la réduction du déficit, qui vise à éliminer la dette provinciale en imposant des coupures draconiennes dans les services publics, lui permet de maintenir sa popularité auprès d’une majorité de l’électorat. Les divergences d’opinions qui opposent Ralph Klein et les libéraux fédéraux sur les enjeux liés aux soins de santé en plus des désaccords plus traditionnels, c’est-à-dire relatifs à l’imposition, aux ressources naturelles et à la Confédération, pérennisent la tradition albertaine du sentiment d’aliénation de l’Ouest remontant aux UFA de 1920.

De 2006 à 2014 : Ed Stelmach, Alison Redford et le Parti Wildrose Alliance

En 2006, Ralph Klein quitte la vie politique et Ed Stelmach (2006-2011) le remplace. Aux élections de 2008, Ed Stelmach, qui connaît une faible popularité en tant que chef du Parti conservateur, obtient pour le parti une majorité stupéfiante avec 72 des 83 sièges. Pendant son mandat, il poursuit certaines réductions des dépenses qui avaient valu à Ralph Klein sa popularité. Cependant, le leadership d’Ed Stelmach fait face à des défis au sein de son cabinet et en raison de la montée du Parti Wildrose Alliance, plus conservateur et dirigé par Danielle Smith. En 2011, Ed Stelmach démissionne de son rôle de premier ministre et chef des progressistes-conservateurs.

Il est remplacé par Alison Redford, sa ministre de la Justice. Alison Redford devient la première femme première ministre de l’Alberta et, à la suite des élections de 2012, la première femme élue première ministre pour la province. Cependant, la popularité du Parti Wildrose Alliance augmente de nouveau aux élections de 2012 : les progressistes-conservateurs perdent 5 sièges et obtiennent seulement 44 % du vote populaire tandis que le Parti Wildrose Alliance fait un gain de 17 sièges et augmente ses suffrages à 34 %.

Durant les années suivant les élections de 2012, Alison Redford et le Parti progressiste-conservateur subissent une nouvelle baisse dans les sondages. Plusieurs scandales de dépenses, dont un voyage de 45 000 $ en Afrique du Sud pour les funérailles de Nelson Mandela et l’utilisation des avions du gouvernement pour des voyages en famille, en incitent plusieurs à remettre en question l’éthique de la première ministre. Avec peu d’appui de la part de son caucus et la menace d’un vote de censure, Alison Redford démissionne le 19 mars 2014. Elle quitte la politique avec une cote de confiance de seulement 18 % et 19 % de l’appui de son parti. L’appui pour le Parti Wildrose Alliance, lui, est de 46 %.

De 2014 à 2015 : la montée du Nouveau Parti démocratique

Le vice-premier ministre David Hancock devient alors premier ministre intérimaire. Par la suite, Jim Prentice, un ancien ministre du cabinet fédéral, est élu chef par les membres du Parti progressiste-conservateur. Il est assermenté à titre de premier ministre le 15 septembre 2014. Jim Prentice, comme les deux personnes qu’il a nommées aux ministères de la Santé et de l’Éducation, ne siège pas comme député à l’Assemblée lors de son assermentation. Le 27 octobre 2014, à l’issue d’une élection partielle, Jim Prentice et son cabinet sont officiellement élus.

Jim Prentice déclenche des élections au printemps 2015, soit un an avant la date prévue par la loi provinciale. Il cherche ainsi à obtenir le soutien de l’électorat pour le budget progressiste-conservateur présenté au même moment. Élaboré dans un contexte de chute des cours du pétrole, ce budget laisse entrevoir un déficit de plusieurs milliards de dollars et propose l’augmentation de certaines taxes provinciales.

Le 5 mai 2015, les électeurs albertains, qui depuis 1971 appuient majoritairement un gouvernement progressiste-conservateur, votent plutôt pour Rachel Notley, chef du NPD. Après 44 ans, ils mettent ainsi fin au règne progressiste-conservateur dans leur province. Changement de cap étonnant dans cette province de forte tradition conservatrice, le NPD parvient à former un gouvernement majoritaire, remportant 53 sièges et environ 41 % du vote populaire. Le Parti progressiste-conservateur est relégué au rang de troisième parti avec seulement 10 sièges tandis que le Parti Wildrose devient l’opposition officielle avec 21 sièges. Avant ces élections, le Parti progressiste-conservateur détenait 70 sièges et le NPD, 4.

Danielle Smith

De 2017 à aujourd’hui : Jason Kenney et le Parti conservateur uni

En 2017, le Parti progressiste-conservateur fusionne avec le Parti Wildrose pour former le Parti conservateur uni, qui devient l’opposition officielle. Jason Kenney, un ancien ministre fédéral du cabinet sous Stephen Harper, est élu chef du Parti conservateur uni.

Lors de l’élection générale de la province suivante, qui a lieu le 16 avril 2019, les Albertains élisent un gouvernement conservateur uni majoritaire. Le NDP, devenu quatre ans auparavant le parti au pouvoir de l’Alberta pour la première fois, entre de nouveau dans l’histoire comme étant le seul gouvernement de la province à n’avoir eu qu’un mandat. Le NDP, qui avait 52 sièges, n’en a plus que 24, et il remporte 33 % du vote populaire alors que le Parti conservateur uni en remporte 55 % et 63 sièges. Le taux de participation au scrutin est de 71 %, le chiffre le plus élevé que l’Alberta ait connu depuis 1971. La campagne est axée principalement sur l’économie en déclin de la province, caractérisée par les bas prix du pétrole et la hausse du chômage. Le Parti conservateur uni fait campagne sur une plate-forme promettant, entre autres, d’éliminer la taxe carbone provinciale et le plan d’action contre le changement climatique, de geler le salaire minimum et de privatiser davantage les soins de santé.

Pendant la pandémie de COVID-19, la popularité de Jason Kenney diminue grandement. En mai 2022, le Parti conservateur uni tient une révision du leadership, au cours de laquelle Jason Kenney reçoit le soutien de 51,4 % des membres du parti. Jugeant cette majorité trop faible pour continuer, Jason Kenney démissionne de son poste de chef du parti. Le 6 octobre, les membres du parti élisent Danielle Smith, une ancienne chef du Parti Wildrose, à la tête du Parti conservateur uni et comme première ministre de la province.

Le 29 mai 2023, l’Alberta tient une élection générale. Bien que les résultats soient les plus serrés de toute l’histoire de la province, le Parti conservateur uni conserve son statut majoritaire. Sous la direction de Danielle Smith, le Parti conservateur uni remporte 49 sièges avec 52,6 % du vote populaire, alors que le NDP, sous la direction de Rachel Notley, remporte 38 sièges avec 44 % du vote populaire. Bien que le Parti conservateur uni ait remporté 49 sièges, seuls 48 députés de l’Assemblée législative se joignent au caucus du parti. Danielle Smith demande à Jennifer Johnson, dont les commentaires transphobes ont fait surface durant la campagne, de siéger en tant qu’indépendante.