Canadiens d'origine africaine | l'Encyclopédie Canadienne

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Canadiens d'origine africaine

Avant 1960, les immigrants africains noirs constituaient un groupe très restreint, dispersé et presque inconnu, de nouveaux arrivants au Canada, bien que les Africains d’origine européenne ou asiatique étaient clairement plus présents. Selon le recensement de 2021, 1 394 170 Canadiens ont déclaré être d’origine africaine. (Voir aussi Communautés noires au Canada.)


Aperçu

Le terme « Africain » englobe les peuples de l’Afrique de l’Ouest, de l’Est et de l’Afrique du Sud, les Afro-Asiatiques d’Éthiopie ainsi que les personnes d’autres origines ethnoculturelles qui considèrent l’Afrique comme leur patrie en raison du fait qu’elles y sont établies depuis plusieurs générations. Parmi ces dernières, on compte principalement des Européens d’origine ethnoculturelle britannique ou portugaise, des Afrikaners et des Juifs, des personnes de descendance mixte et des Indiens originaires d’Asie, de religion et de culture musulmanes, hindoues ou chrétiennes de Goa.

Schémas d’immigration au Canada

Historiquement, la politique d’immigration du Canada ne favorise pas l’immigration des Asiatiques et des Africains (voir Immigration au Canada). De 1946 à 1950, les Africains représentent seulement 0,3 % des nouveaux immigrants au Canada. Ce chiffre augmente de seulement 1 % à 2 % en moyenne au cours des 20 années suivantes. Avec le Livre blanc sur l’immigration de 1966 et la tentative d’introduire un processus de sélection non discriminatoire, la proportion d’immigrants africains augmente d’environ 2 % de 1968 à 1970.

Le nouveau système est plus objectif, mais il est également hautement sélectif. Il favorise certains pays, notamment le Nigeria et le Ghana, dont la population est de race noire. En 1972-1973, à la suite de l’offre du Canada d’accepter environ 7000 Asiatiques d’Ouganda, la proportion d’immigrants africains augmente à 6,8 % de l’immigration totale, et elle se maintient à une moyenne d’environ 5,2 % entre 1975 et 1978. Ceci correspond au mouvement des colons portugais et britanniques vers le Canada après l’indépendance de l’Angola et du Mozambique en 1975 et celle du Zimbabwe en 1980. De 1973 à 1983, quelque 16 000 Sud-Africains, dont la plupart ne sont pas d’origine ethnique noire, entrent au Canada. L’immigration régulière et relativement importante en provenance de la Tanzanie et du Kenya reflète également une migration indienne asiatique plutôt que noire.

En 1976, le Livre vert sur l’immigration a pour effet de restreindre l’arrivée de potentiels immigrants de la catégorie des « indépendants ». Cette réglementation freine le mouvement des personnes en provenance des pays d’Afrique de l’Ouest. Cette situation est aggravée par le fait qu’il n’y a que trois bureaux de Citoyenneté et Immigration Canada en Afrique à l’époque. Un des bureaux est situé à Yamoussoukro, la capitale de la Côte-d’Ivoire, qui dessert plus de 20 pays voisins très dispersés; un autre est à Nairobi, la capitale du Kenya, qui dessert 19 pays tout aussi dispersés dans le nord-est du continent. En revanche, le troisième bureau est situé à Pretoria, la capitale administrative de l’Afrique du Sud, et il ne dessert que cinq pays situés à la pointe sud de l’Afrique. La Loi sur l’immigration de 1976 crée également une nouvelle catégorie de « réfugiés » et, en 1984, le Canada accepte 684 réfugiés d’Éthiopie. La plupart d’entre eux sont parrainés par le gouvernement fédéral, mais quelques-uns sont parrainés au privé. (Voir Politique canadienne sur les réfugiés.)

La Loi sur l’immigration de 1978 a pour conséquence positive de permettre aux citoyens canadiens de parrainer des parents proches. Cette disposition est particulièrement bénéfique pour les immigrants admis en provenance de la République d’Afrique du Sud, de la Tanzanie, du Kenya, de l’Ouganda, de l’Angola et du Zimbabwe (anciennement République de Rhodésie) et, dans une moindre mesure, pour ceux du Nigeria et du Ghana. En 1984, 3552 personnes venues d’Afrique (environ 4 % de l’immigration totale au Canada cette année-là) immigrent au Canada. La plupart des immigrants de ce groupe de la catégorie « indépendants » arrivent de la République d’Afrique du Sud et de Madagascar (Première République).

À l’époque, la politique d’immigration du Canada favorise les entrepreneurs et les immigrants travailleurs autonomes qui disposent des fonds nécessaires pour créer des entreprises capables d’employer des citoyens canadiens. De tels entrepreneurs sont plus susceptibles d’émerger des groupes d’Africains d’origine européenne ou asiatique plus aisés que des groupes d’Africains noirs. Dans l’ensemble, la plupart des Africains appartenant à l’un ou l’autre groupe ethnoculturel proviennent des anciennes colonies africaines de langue anglaise, et un plus petit nombre sont issus des anciennes colonies de langue française, principalement du Mali, du Sénégal, de la République démocratique du Congo (anciennement le Zaïre), de Madagascar et de la Côte-d’Ivoire.

Selon le recensement de 1981, le Canada compte 45 215 personnes d’origine africaine, soit un mince 0,19 % de la population totale. Entre 1996 et 2001, le nombre de personnes d’origine africaine augmente de 32 % alors que la population dans son ensemble n’augmente que de 4 %. En 2001, environ 48 % des immigrants noirs venus au Canada dans les années 1990 sont nés en Afrique. Selon le recensement de 2006, 138 750 personnes se déclarent africaines; dans ce recensement, l’identification des personnes d’origine africaine sous le terme d’Africains, qui ne se sont pas déclarées comme des Africains du Sud, des Éthiopiens, des Ougandais, ou des Nigérians dans une autre section du recensement, entraine une sous-estimation de la population d’immigrants africains, surtout en ce qui concerne les personnes qui se sont identifiées comme étant Britanniques, Françaises ou d’une autre origine culturelle.

L’augmentation de la présence africaine au Canada reflète l’instabilité politique, les guerres de factions et la violence qui sévissent dans de nombreuses régions du continent africain, plus particulièrement dans les pays d’Éthiopie, du Kenya, de Somalie, de Tanzanie et de l’Ouganda, dans la corne orientale de l’Afrique. En Afrique du Sud, l’ancienne République d’Afrique du Sud, un pays en transition d’un régime blanc à un régime noir, connait également un exode. De larges communautés d’immigrants quittent aussi l’Égypte et le Maroc, dans le nord de l’Afrique.

De nombreuses personnes entrent au Canada dans la catégorie des « réfugiés », suivis ensuite de la catégorie « famille ». Un nombre important d’immigrants des catégories « indépendants » et « entrepreneurs » viennent d’Afrique du Nord et d’Afrique du Sud, les pôles géographiques du continent.


Établissement et intégration

Avant 1970, un très petit nombre de personnes des pays d’Afrique s’établissent au Canada. Ils viennent principalement d’Éthiopie, du Kenya, de l’Afrique du Sud, du Zimbabwe et de la Zambie. À cette époque, plusieurs pays d’Afrique détiennent leur indépendance : le Ghana (1957), le Nigeria (1960), l’Ouganda (1962), le Kenya (1963), la Zambie (1964) et la Tanzanie (1964). La Rhodésie blanche (du sud, aujourd’hui le Zimbabwe) déclare son indépendance de la Grande-Bretagne en 1965, et l’Afrique du Sud devient une république et se retire du Commonwealth en 1961. Compte tenu de ces changements, il est difficile d’évaluer le mélange ethnique qui entre au Canada à cette époque. Il est possible que de nombreux nouveaux arrivants aient été des colons européens quittant une Afrique changeante, mais il est certain que les Africains noirs commencent à s’établir au Canada dans les années 1960.

Les réfugiés éthiopiens admis au Canada durant les années 1980 et 1990 constituent un groupe culturel et linguistique distinct des autres Africains. Les réfugiés d’Érythrée, une ancienne province sécessionniste de la mer Rouge, sont en général bien instruits et qualifiés. Plusieurs d’entre eux parlent italien en raison de l’occupation italienne de l’Éthiopie durant la Deuxième Guerre mondiale. En 1991, l’Érythrée obtient son indépendance après la plus longue guerre de l’histoire récente africaine. Un petit mais intéressant sous-groupe éthiopien (de 10 000 à 12 000 personnes) sont les Falashas (Juifs éthiopiens), qui viennent des provinces du nord-ouest de l’Éthiopie. Ils pratiquent une forme ancienne de judaïsme, mais n’ont aucune connaissance de l’hébreu. Leurs prêtres utilisent le ge'ez, une écriture sémitique sabéenne datant du 4e siècle, comme langue liturgique. En 1984, et de nouveau en 1991, des milliers de Juifs éthiopiens sont secrètement évacués par avion vers Israël.

En 1991, la plupart des Africains s’installent en Ontario, suivi du Québec; d’autres s’établissent en Colombie-Britannique et en Alberta après 1984. L’Ontario compte la plus grande proportion de personnes originaires de l’Afrique de l’Est. En 2006, 77 960 Africains francophones choisissent de s’installer dans la province de Québec. Plusieurs d’entre eux sont des réfugiés des massacres et des génocides perpétrés dans des pays comme le Rwanda et le Burundi. De nombreux Africains parlent une langue africaine à la maison, mais en général, les Africains qui immigrent au Canada ont une bonne connaissance pratique de l’anglais ou du français.

Le Canadian African Newcomer Aid Centre de Toronto, fondé en 1984 et desservant la population africaine de l’Ontario, rapporte que les immigrants africains gardent un profil bas alors qu’ils tentent de s’intégrer et de surmonter le « choc culturel ». Le changement des valeurs, comme le respect des personnes âgées et des dirigeants de la communauté, l’importance de la modestie, de l’obéissance et de l’humilité, le passage de la pensée du « nous » collectiviste au « je » individualiste qui prévaut en Amérique du Nord, le manque de systèmes de soutien traditionnel de la communauté, et le changement dans les relations de pouvoir entre conjoints font des ravages, et un grand nombre d’entre eux ont besoin de services de soutien. Les périodes prolongées de séparation des conjoints, les difficultés d’adaptations aux rigueurs des hivers canadiens, la nécessité d’apprendre à demander de l’aide, et le manque d’accréditation pour les qualifications acquises dans les pays africains ajoutent davantage à la complexité de la vie. Les immigrants instruits et qualifiés sont souvent sous-employés compte tenu de leurs compétences, de leur éducation et de leur expérience. Toutefois, des organismes africains leur offrent une base pour le réseautage et le soutien émotionnel et psychologique.

Comme c’est le cas partout pour les immigrants, les nouveaux arrivants africains au Canada s’installent dans les grandes villes canadiennes dans le but d’y trouver un emploi, des logements à prix abordable et des écoles pour leurs enfants.

En tant que groupe, les Africains noirs partagent généralement une expérience commune : le racisme, les préjugés et la discrimination dans leur pays d’adoption. (Voir aussi Racisme anti-Noirs au Canada.) Le chômage et le sous-emploi au Canada demeurent des problèmes sérieux pour de nombreux nouveaux arrivants. Selon Statistique Canada, les immigrants nés en Afrique éprouvent des difficultés sur le marché du travail, quel que soit le moment ou la date à laquelle ils ont immigré au Canada.

Ougandais et autres Asiatiques

En 1972, lors du processus de soi-disant « africanisation » de l’Ouganda, près de 50 000 Ougandais asiatiques sont expulsés du pays. Environ 7000 d’entre eux sont invités à s’établir au Canada. Toutefois, seul un nombre limité accepte l’offre. Le recensement de 2021 déclare 8280 personnes d’origine ougandaise au Canada. Compte tenu de la diversité des compétences et des expériences professionnelles qu’ils ont apportées avec eux, en plus de leur sens de l’initiative et de leur esprit d’entreprise, la plupart des Ougandais font des progrès socioéconomiques constants au Canada.

Le plus important groupe d’Ougandais asiatiques au Canada est celui des Ismalliyah (ismaéliens), une secte issue de la branche chiite de l’islam. Il existe également une autre secte islamique plus petite au Canada, les Ithna-Ashariyah. Les ismaéliens, et dans une moindre mesure les Ithna-Ashariyah, forment des groupes ethnoculturels et religieux forts qui contribuent à leur intégrité sociale et psychologique et à leur progrès économique. Le prince Karim Aga Khan, établi à Genève, est le chef spirituel des ismaéliens. Selon Rahim Mohamed, la communauté ismaélienne compte environ 80 000 membres au Canada en 2017.

Hindous gujaratis

Les hindous gujaratis, traditionnellement une caste d’hommes d’affaires de l’Inde et de l’Afrique orientale, réussissent dans les affaires et les professions libérales au Canada. Ils sont plutôt conservateurs et pratiquent les enseignements de l’hindouisme et du mahatma Gandhi, notamment l’ahimsa (la non-violence), l’ascétisme et le respect de toute forme de vie. Les hindous gujaratis sont généralement végétariens, et leurs mariages sont endogames, c’est-à-dire qu’ils se font à l’intérieur de castes semblables et sont souvent arrangés par les parents.

Indiens de Goa

Les Indiens de Goa sont originaires de la province de Goa, qui est dominée par les Portugais et située sur la côte de Malabar, à 402 km au sud de Mumbai (anciennement Bombay), en Inde. De nombreux Goans contemporains sont d’origine portugaise, ont des noms portugais, sont généralement catholiques, et parlent anglais. Lorsqu’ils sont chassés de l’Ouganda par Idi Amin Dada en 1972, plusieurs immigrent au Canada, s’établissant principalement à Toronto. Les Indiens de Goa ont leurs propres organisations, à l’exception des immigrants venus directement de Goa et des grandes communautés portugaises comme celle de Toronto. (Voir Canadiens d’origine portugaise.)

Les sous-groupes d’Indiens asiatiques ont davantage de liens de parenté avec les habitants de l’Inde et du Pakistan et avec les religions et les cultures de ces pays qu’avec les Africains noirs.

Portugais de l’Angola et du Mozambique

En 1976-1977, 2100 « rapatriés » (Portugais blancs et de couleur) en provenance des nouveaux territoires indépendants de l’Angola et du Mozambique sont admis au Canada, bien qu’ils ne remplissent pas les conditions requises pour être considérés comme de véritables réfugiés, étant donné qu’ils possèdent un passeport portugais. Les colons portugais établis en Afrique sont demeurés des citoyens portugais. Deux facteurs contribuent à ce geste « humanitaire » du Canada : les pressions de la communauté portugaise canadienne et les demandes de l’ambassadeur du Portugal au Canada d’aider à alléger le fardeau des colons blancs qui retournent au pays. La plupart de ces rapatriés entrent au Canada en 1978-1979 sous contrat en tant que travailleurs qualifiés pour des entreprises canadiennes. Ces personnes prospèrent et n’ont pas besoin du soutien des sociétés d’entraide portugaises. Elles s’intègrent bien dans la société canadienne plus vaste, possiblement parce qu’elles parlent couramment l’anglais.

Sud-Africains et Zimbabwéens

Durant près d’un demi-siècle, l’Afrique du Sud connait un climat politique tendu et incertain. Les immigrants qui entrent au Canada et sont originaires de l’ancienne République d’Afrique du Sud sont de loin le groupe le plus important de tous les groupes d’immigrants venus de la région subsaharienne. Selon le recensement de 2021, 49 835 personnes déclarent avoir des origines d’Afrique du Sud.

Les Sud-Africains incluent un grand nombre d’anglophones britanniques et juifs, de petits groupes d’Afrikaners (huguenots franco-hollandais), des métis aux origines mixtes, des Indiens asiatiques et des Africains noirs. On trouve des professionnels de tous les types (professeurs d’université, médecins, enseignants, écrivains, artistes et quelques artisans qualifiés) dans chacun de ces groupes. En 2016, 8090 personnes déclarent avoir des origines zimbabwéennes.

Arts et culture

Les artistes canadiens d’origine africaine, se sentant marginalisés de la communauté artistique dominante, créent leur propre musique unique, leur écriture, leur poésie et leur propre peinture. Plusieurs d’entre eux puisent dans leurs racines africaines pour y trouver leur inspiration, leur vision et leur identité. Toronto est l’un des plus grands centres de musique africaine en Amérique du Nord, chaque région d’Afrique apportant sa propre tradition musicale, riche et distincte.

En 1990, Thaddy Ulzen, un médecin né au Ghana, devient le cofondateur et la force motrice de la création d’Afrofest, le festival annuel de musique africaine. Le Canadian Artists Network : Black Artists In Action Festival (CAN:BAIA) est fondé en 1995 pour célébrer l’identité africaine et permettre aux artistes africains de sortir de leur isolement pour échanger des idées et promouvoir leurs talents. L’organisme Celebrating African Identity (CELAFI) est créé pour favoriser les liens entre les artistes noirs internationaux et leurs homologues canadiens par l’entremise de conférences et de spectacles d’arts visuels, de musique, de danse, de cinéma et d’ateliers de littérature. Les thèmes africains et les traditions esthétiques sont célébrés au Canada par David Kibuuka, d’origine ougandaise, par Macaulay Eteli, d’origine nigérienne et par le danseur et chorégraphe Len Gibson, qui remettent en question notre conception de « l’art canadien ».

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