Traité de l’île Saint-Joseph (nº 11) | l'Encyclopédie Canadienne

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Traité de l’île Saint-Joseph (nº 11)

Le Traité de l’île Saint-Joseph de 1798 (également connu sous le nom de Traité no 11 dans le système de numérotation du Haut-Canada) était un accord foncier précoce entre les peuples autochtones et les autorités britanniques du Haut-Canada (maintenant l’Ontario). Il faisait partie d’une série de cessions de terres du Haut-Canada. Le Traité de l’île Saint-Joseph englobait l’ensemble de l’île Saint-Joseph, connue sous le nom de « Payentanassin » en langue anishinaabemowin. Cette île de 370 km2 est située à l’extrémité nord du lac Huron, dans le chenal entre les lacs Huron et Supérieur. Les Britanniques avaient besoin d’un poste dans la région pour protéger leurs intérêts et maintenir le contact avec les peuples autochtones de la région. Ils savaient également qu’ils devraient évacuer leur poste de Michilimackinac en vertu du traité de Jay et cherchaient donc un autre emplacement.

Contexte historique

Le traité de Paris de 1783, qui met officiellement fin à la Révolution américaine, établit également la nouvelle frontière entre les États-Unis et les colonies restantes de la Grande-Bretagne en Amérique du Nord. Une partie de cette nouvelle frontière passe par le centre des lacs Ontario, Érié, Huron et Supérieur. La Grande-Bretagne ne consulte jamais les nombreux peuples autochtones de la région avant de signer ce traité, et ceux-ci ne participent pas aux négociations du traité. Selon les termes du traité, les Britanniques cèdent également aux États-Unis une grande partie des terres qu’ils avaient auparavant réservées à l’usage des Autochtones, comme le stipulaient la Proclamation royale de 1763 et les traités ultérieurs. Les fidèles alliés autochtones de la Grande-Bretagne sont stupéfaits par ce qu’ils considèrent comme une trahison manifeste de leurs intérêts.

Bien que la nouvelle frontière internationale passe par quatre des cinq Grands Lacs, les Britanniques maintiennent leurs postes frontaliers occidentaux du côté américain de la ligne pendant plusieurs années après le traité de Paris. Ces postes comprennent des endroits comme Oswego, Niagara, Detroit et Michilimackinac. La rétention de ces postes par les Britanniques met les Américains en colère, mais ils craignent une autre guerre avec la Grande-Bretagne. Les Américains décident donc d’orchestrer l’évacuation des Britanniques de ces postes par des moyens diplomatiques.

Le traité de Jay est le résultat de la diplomatie, plutôt que du conflit, pour résoudre plusieurs questions en suspens de la guerre. Selon les termes du traité, ratifié en 1795, la Grande-Bretagne accepte d’évacuer ses postes occidentaux avant le 1er juin 1796. Avant même la ratification du traité de Jay, il est évident dès l’automne 1794 que la Grande-Bretagne finira par céder ces postes aux Américains. En prévision, le gouvernement britannique conseille au gouverneur en chef lord Dorchester de préparer la construction de nouveaux postes en territoire britannique. Ces postes permettront de poursuivre le commerce des fourrures avec les peuples autochtones de la région.

Pendant ce temps, le premier lieutenant-gouverneur du Haut-Canada, John Graves Simcoe, veut obtenir des terres sur la baie Georgienne, à l’emplacement actuel de Penetanguishene, pour compenser la perte de Michilimackinac. John Graves Simcoe visite l’endroit en 1793 et le fait arpenter comme emplacement possible pour un chantier naval. Sur la base du rapport de l’arpenteur, il entame des négociations avec les Anichinabés de la région pour la cession du port de Penetanguishene.

Lord Dorchester voit toutefois la situation d’un autre œil et n’est pas d’accord pour maintenir des garnisons dans l’ouest. Il croit qu’il faut plutôt conserver les ressources limitées et garder tout poste plus près des centres importants du pays, soit Montréal et Québec. Par conséquent, il lui faut 18 mois pour autoriser la création d’un poste sur le lac Huron. En avril 1796, il ordonne au commandant de Michilimackinac, le major Doyle, d’envoyer une garnison à l’autre extrémité du lac Huron – l’île Saint-Joseph –, plutôt qu’à l’emplacement privilégié par John Graves Simcoe, soit Penetanguishene. Lord Dorchester a en effet décidé qu’une garnison de 12 hommes sur l’île servira de nouveau point de rendez-vous aux Anichinabés de la région pour remplacer Michilimackinac. La décision de lord Dorchester surprend la plupart des gens, car elle n’a pas été envisagée par les autres participants au processus. Elle contrarie également John Graves Simcoe, car elle réduit à néant ses efforts pour établir un poste à Penetanguishene.

Négociations et Suites

Au début de juin 1796, le lieutenant Andrew Foster conduit un petit groupe à l’île Saint-Joseph pour y établir un poste britannique. Bien que l’île se trouve en territoire anichinabé, elle est inoccupée. Une fois qu’Andrew Foster établit le poste, des représentants du ministère des Affaires indiennes s’y installent également. Peu de temps après, les Anichinabés locaux commencent à visiter le poste et à demander un paiement pour l’île. Ils sont toujours mécontents des Britanniques au sujet de l’évacuation de Michilimackinac et du traité de Jay. Pour eux, ce ne sont que de nouveaux exemples de l’abandon des Britanniques.

À l’époque, l’enseigne Leonard Brown est aux commandes. Lui et ses hommes sont vulnérables : la garnison est minuscule, un fort n’a pas encore été construit, ils sont loin de l’aide britannique et entourés de Premières Nations en colère. Pour les apaiser, à l’été 1796, Leonard Brown propose de tenir un conseil officiel cet automne-là, avec une cérémonie en bonne et due forme et la distribution de biens. La dissidence de lord Dorchester entre toutefois à nouveau en scène, cette fois pour gêner Leonard Brown. En décembre 1794, le gouverneur en chef décrète que toute proposition d’achat doit être approuvée par le gouverneur en chef et contenir un croquis de la zone à acheter. Les autorités décideront ensuite du montant à payer pour la terre.

Le surintendant général adjoint et inspecteur général adjoint des Affaires indiennes, le colonel Alexander McKee, arrive dans la région en 1797 et négocie avec les Anichinabés les termes du traité pour la vente de l’île. Il revient l’année suivante avec les biens nécessaires pour compléter la vente. Lors d’un conseil officiel, le 30 juin 1798, Alexander McKee et sept chefs principaux signent le traité. En échange de marchandises d’une valeur de 1200 livres, les Anichinabés renoncent à leur droit sur l’île Saint-Joseph. La marchandise comprend diverses sortes de tissus, ainsi que du fil et du ruban, 680 couvertures, 55 chapeaux, 24 douzaines de pipes, 21 douzaines de peignes, 15 douzaines de miroirs, 15 douzaines de ciseaux, 5 douzaines d’aciers à feu, 4000 silex, 15 fusils, 10 carabines, 400 livres de poudre à canon, 20 douzaines de balles et de plombs, 42 douzaines de couteaux, 300 livres de tabac et divers ustensiles de cuisine. Comme il est de coutume après la signature d’un traité, le Département de l’intendance fournit un bouvillon et 50 gallons de rhum pour le festin de célébration.