Les Anichinabés (aussi écrit, entre autres, anichinabée, anicinabe, anicinape, anishinaabe, anishnâbé et anishnape; le pluriel peut être marqué par l’ajout d’un g ou d’un k) sont un groupe de Premières Nations apparentées culturellement et linguistiquement, vivant au Canada et aux États-Unis et concentrées autour des Grand Lacs. Leur territoire s’étend de la vallée de l’Outaouais, du nord de l’Ontario et des plaines du sud de la Saskatchewan jusqu’à l’extrémité nord-est du Dakota du Nord et au nord du Minnesota et du Michigan, ainsi que sur les rives nord des lacs Ontario et Érié. Les Ojibwés, les Chippewas, les Odawas, les Potawatomis, les Algonquins, les Saulteaux, les Nipissings et les Mississaugas sont des Anichinabés. Certaines Premières Nations oji-cries et métisses font également partie de ce groupe culturel et linguistique. (Voir aussi Peuples autochtones au Canada.)
Signification du mot Anichinabé
Anichinabé est le mot utilisé pour désigner une personne ou un groupe de personnes appartenant à une Première Nation rattachée à cette famille culturelle et linguistique. Les personnes utilisent le mot Anichinabé (ou la forme plurielle Anishinabeg) pour indiquer leur appartenance à ce groupe.
Les noms de nationalités (par ex. Ojibwés) ou de Premières Nations (par ex. Nation Niisaachewan Anishinaabe) sont d’autres identifiants que les Anichinabés peuvent utiliser pour se désigner eux-mêmes. Parfois, certains utilisent des combinaisons de ces termes (par ex. Ojibwés-Anichinabés).
Si le terme Anichinabé désigne le plus souvent les Ojibwés, il peut aussi désigner d’autres Premières Nations qui s’identifient comme Anichinabés. C’est le cas, par exemple, des Chippewas, des Odawas, des Potawatomos, des Algonquins, des Saulteaux, des Nipissings et des Mississaugas, ainsi que de certains Oji-Cris et Métis. Il importe de se rappeler qu’Anichinabé n’est pas un synonyme d’Ojibwé.
L’épellation utilisée par les Ojibwés est Anishinabé. Certaines Premières Nations écrivent le terme autrement. Par exemple, les Odawas tendent à écrire Nishnaabe, tandis que les Potawatomis écrivent Neshnabé.
Le mot Anichinabé possède aussi des significations culturelles plus profondes, souvent liées à des récits des origines. L’aîné et linguiste Basil H. Johnston affirme que le mot Anichinabé se traduit par « êtres nés de rien » ou « êtres spontanés ». Selon certaines traditions orales, le terme Anichinabé provient d’anishinaa, le premier mot prononcé par les Anichinabés au moment de la création. Sur l’île Manitoulin, Anichinabé signifie « deuxième homme », en référence à l’histoire de Nanabozo et du grand déluge. Selon un ancien de la Première Nation de Garden River, en Ontario, Anichinabé peut aussi signifier « Les hommes ou les personnes vivant sur Terre dans la Bonne Voie ». Le plus souvent, Anichinabé est traduit par « l’homme original » ou « les bons humains ». (Voir aussi Histoires orales et sources primaires autochtones.)
Territoires anichinabés
Selon certaines traditions orales, les Anichinabés seraient originaires de la côte nord-ouest du Canada et des États-Unis actuels, et auraient migré vers la côte ouest du lac Supérieur. Ceci est parfois appelé la Grande Migration. Plusieurs communautés anichinabées existent encore là où certains d’entre eux se sont installés pendant la migration. D’autres mouvements de population se sont produits ensuite, après les contacts avec les Européens. Ceux-ci ont conduit les Anichinabés plus loin vers le sud, dans la vallée de l’Ohio, et vers l’ouest, dans les Plaines.
Langue des Anichinabés
La langue des Anichinabés est l’anishinaabemowin. Elle est parlée dans des régions qui s’étendent du Manitoba au Québec, avec une forte concentration autour des Grands Lacs. Lors du recensement de 2016, Statistique Canada a dénombré au Canada 35 870 personnes considérant les langues Ojibwées-Potawatomi (faisant partie de la famille des langues Anishinaabemowin) comme leur langue maternelle. (Voir aussi Langues autochtones au Canada.)
Relations avec les colonisateurs
Durant l’ère des contacts, les Anichinabés deviennent des partenaires commerciaux des Européens et participent à la traite des fourrures. Les Anichinabés participent aussi aux principaux conflits en tant qu’alliés des Français, des Anglais ou des Américains. Ceci comprend les Guerres iroquoises de 1640, la guerre de Sept Ans (1756-1763), la guerre de Pontiac (1763-1766) (voir aussi Pontiac), la Guerre de 1812, la guerre du Dakota de 1862, de même que les conflits internationaux de la période contemporaine, comme la Première Guerre mondiale, la Deuxième Guerre mondiale et la guerre de Corée. (Voir aussi Relations entre les Autochtones et les Français et Relations entre les Autochtones et les Britanniques avant la Confédération.)
À mesure que la colonisation s’étend dans le continent, les Anichinabés signent plusieurs traités avec les nouveaux arrivants. Ces traités couvrent des millions d’acres de terres au Canada et aux États-Unis. Par exemple, en 1764, les Anichinabés jouent un rôle clé dans la signature du Traité de Niagara qui établit une relation de nation à nation avec l’Angleterre. Les traités de cession de terres signés par les Anichinabés au Canada comprennent tous les traités pré-confédération du sud de l’Ontario, les Traités Robinson de 1850, les traités de l’île Manitoulin, les Traités numérotés nº 1, 2, 3, 4, 5, et 9 de même que les Traités Williams de 1923. (Voir aussi Les cessions de terres du Haut-Canada.) Des traités sont aussi signés aux États-Unis. Ces différents traités conduisent à la création de réserves dans lesquelles beaucoup d’Anichinabés résident encore aujourd’hui. (Voir aussi Traités autochtones au Canada.)
Les Anichinabés, comme bien d’autres Peuples autochtones au Canada, ont subi des politiques coloniales assimilatrices telles que la Loi sur les Indiens et les pensionnats indiens. En 1895, la Loi sur les Indiens interdit un nombre de cérémonies et événements autochtones. Les pensionnats indiens prohibent la langue des Anichinabés, l’anishinaabemowin, ainsi que leur culture. Bien que la culture anichinabée soit toujours vivante, ces lois et ces pratiques ont eu des effets politiques et socio-économiques profonds et durables pour les Anichinabés et d’autres peuples autochtones au Canada. (Voir aussi Traumatisme intergénérationnel et les pensionnats indiens.)
Culture anichinabée
Les Anichinabés possèdent une culture dynamique. L’art anichinabé comprend des paniers et des boîtes d’écorce de bouleau et de frêne, comportant traditionnellement des motifs réalisés à l’aide de piquants de porc-épic. (Voir aussi Piquants de porc-épic ornementaux.) Après les contacts, les Anichinabés intègrent rapidement les perles, tissus et autres produits européens qu’ils échangent dans leurs créations artistiques traditionnelles. Les meilleurs exemples sont les motifs floraux créés par plusieurs Premières Nations des Grands Lacs sur les mocassins, les vêtements et les sacs à bandoulière.
L’artiste anichinabé Norval Morrisseau est le créateur du style d’art autochtone Woodland, devenu aujourd’hui emblématique. Son influence se retrouve dans les travaux de Jackson Beardy, Benjamin Chee Chee, Kelly Church, Eddy Cobiness, Blake Debassige et Daphne Odjig. Parmi les autres artistes anichinabés, on retrouve Frank Shebageget, Robert Houle, Bonnie Devine et Katheryn Wabegijig.
Les communautés anichinabées possèdent une longue tradition musicale. À l’origine, les flûtes étaient fabriquées par les jeunes hommes et utilisées pour faire la cour. Le tambour (incluant le tambour à main et le tambour de pow-wow) est utilisé pour la guérison et pour la fête, et joue un rôle clé dans les cérémonies. Le chant, qu’il soit traditionnel, contemporain ou religieux, est très important pour la communauté.
Plusieurs musiciens anichinabés sont connus nationalement et internationalement, comme Leonard Sumner, Crystal Shawanda, Lawrence « Teddy Boy » Houle (mort le 4 juin 2020) ainsi que le groupe de tambour de pow-wow Bear Creek Singers. (Voir aussi Musique de pow-wow et Chanteurs de pow-wow.)
Plusieurs écrivains anichinabés sont bien connus, comme Drew Hayden Taylor, Richard Wagamese, George Copway, Peter Jones, Leanne Betasamosake Simpson, Waubgeshig Rice, Basil H. Johnston, Niigaanwewidam James Sinclair et Heidi Kiiwetinepinesiik Stark.
Les Anichinabés excellent dans plusieurs sports. Parmi les exemples notables, on compte les joueurs de hockey Ted, Jordan et Brandon Nolan, Arron Asham et Melanie Roach, la boxeuse Mary Spencer, le rameur Marisha Roman, le lanceur de balle rapide Darren Zack et le sauteur à skis olympique Steve Collins.
Parmi les personnalités notables d’origine anichinabée, on retrouve le diplomate et auteur James Bartleman, l’acteur Adam Beach, l’écrivaine et militante politique Catharine Sutton, le politicien Phil Fontaine, les soldats Tommy Prince et Francis Pegahmagabow et le juge et sénateur Murray Sinclair.
Grâce à la création de programmes d’études autochtones, les étudiants, enseignants et enseignements traditionnels anichinabés sont de plus en plus présents en classe. Certains établissements postsecondaires créent des programmes culturellement et linguistiquement spécifiques. Par exemple, l’Algoma University, en collaboration avec l’établissement Shingwauk Kinoomaage Gamig, situé à Sault Ste Marie, en Ontario, offre un diplôme en études anichinabées. D’autres programmes semblables offrent des cours culturellement pertinents, avec une vision anichinabée.