The Beachcombers | l'Encyclopédie Canadienne

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The Beachcombers

The Beachcombers est l’une des séries télévisées canadiennes les plus populaires de tous les temps. Cette série d’aventures familiale d’une demi-heure a joué à la télévision pendant un total de 387 épisodes s’étendant sur 18 saisons (1972-1990), et est la deuxième plus longue série télévisée scénarisée au Canada. Bien qu’elle ait été fortement écorchée par les critiques, elle était néanmoins l’une des séries préférées du public, et elle a été nommée l’une des meilleures séries télévisées canadiennes de tous les temps au Canada lors d’un sondage mené en 2017 par le Festival international du film de Toronto. Regardée par plus d’un million de téléspectateurs par épisode à son apogée, la série a joué un rôle déterminant dans le développement de la production cinématographique en Colombie-Britannique et elle a servi de premier modèle pour le contenu télévisuel exclusivement canadien.


Molly's Reach, le café présenté dans The Beachcombers, est depuis devenu une destination touristique populaire à Gibsons, en Colombie-Britannique.
(avec la permission de David Stanley, flickr)


Contexte

The Beachcombers naît de l’éphémère série de 1969, Adventures in Rainbow Country, une série d’aventures familiale du producteur indépendant William Davidson. Lois Maxwell (célèbre pour son rôle de Miss Moneypenny dans les films de James Bond des années 1960) y interprète Nancy Williams, une mère célibataire, aux côtés de Stephen Cottier, qui joue le rôle de son fils Billy, et de Buckley Petawabano, qui joue Pete, l’ami ojibwé  de Billy. La série relate leurs aventures dans le territoire sauvage situé au nord du Lac Huron . Toutefois, après qu’un changement dans la direction de la CBC  ait déclenché des conflits de nature créative avec la compagnie de production de William Davidson, Manitoulin Productions, le diffuseur retire son financement et applique une clause empêchant Manitoulin de s’associer à un autre réseau. Cependant, voyant que les premiers épisodes de The Adventures of Rainbow Country sont visionnés par quelques 4 millions de téléspectateurs, surpassés uniquement par Hockey Night in Canada, le diffuseur constate qu’il a raté l’occasion d’avoir un succès viable et prend il rapidement des mesures pour produire une série du même genre.

Développement

La CBC  aime le synopsis de Adventures in Rainbow Country et décide de produire une autre série d’aventures aux valeurs saines et familiales. Les dirigeants de la CBC jugent que la côte ouest du Canada offre un décor attrayant pour une série diffusée aux heures de grande écoute, et ils chargent le producteur Phil Keatley de superviser le développement de l’émission. Ils stipulent que la série doit être centrée sur une mère célibataire, une figure paternelle et trois enfants, dont l’un doit être d’origine autochtone .

Les partenaires de scénarisation de Phil Keatley, l’équipe d’époux Marc et Lynn Susan « L.S. » Strange, lui présente d’abord l’idée d’une émission intitulée Orphan’s Island, inspirée à la fois de Boys Town (1938) de Spencer Tracy, et d’une légende de la côte ouest selon laquelle un capitaine de navire accueillait des orphelins pendant la crise des années 1930 . La proposition plaît à Phil Keatley qui la présente à la CBC, mais le bureau de Toronto la rejette, estimant que personne ne regardera une émission sur la crise économique. (The Waltons, dont l’histoire se déroule pendant la crise des années 1930, est lancée l’année suivante sur CBS et devient une série à succès.) Phil Keatley donne alors deux semaines au couple Strange pour trouver une autre idée.


Le bateau Persephone, de la série télévisée Beachcombers de Radio-Canada, repose dans un petit parc à Gibsons, en Colombie-Britannique, près de Molly's Reach.
(avec la permission de David Stanley, flickr)


Synopsis

L’idée des Beachcombers vient au couple Strange alors qu’ils se promènent sur la plage et observent des ramasseurs d’épaves qui y ramassent des bûches dans le but de les vendre. Impressionnés par la simplicité et la liberté de ce travail, ils conçoivent une série qu’ils intitulent d’abord Molly’s Reach, qui est centrée sur un ramasseur d’épaves inspiré du personnage de Zorba le Grec, et une mère célibataire, Molly, qui est gérante d’un café. Phil Keatley aime la nouvelle idée, renomme la série The Beachcombers et la soumet à la CBC qui donne le feu vert à la production.

La CBC  envoie Suzanne Finlay, la chef scénariste, à Vancouver  pour qu’elle supervise l’écriture de la série, et finalement elle remplace les Strange qui se retirent assez tôt de la production (bien qu’ils reviendront quelques saisons plus tard). La série ne se base pas sur une situation ou un procédé en particulier, mais Suzanne Finlay parvient rapidement à une formule éclairée axée sur l’empathie envers les marginaux et le respect de l’environnement. L’émission suit généralement les aventures de Nick Adonidas (Bruno Gerussi ) qui passe les plages au peigne fin à bord de son bateau, le Persephone.Nick interagit avec la famille de Molly (Rae Brown) à son café, tout en tenant tête à son rival, Relic (Robert Clothier), un ramasseur d’épaves antipathique qui fait concurrence à Nick et qui lui vole fréquemment ses bûches. Les histoires et les intrigues de la série sont généralement comiques, les touristes et les gens provenant du continent étant la source principale des ennuis de Nick et Molly.

Le saviez-vous ?
L’acteur Robert Clothier, qui jouait le rôle de « Relic » dans la série, était l’un de nombreux jeunes canadiens qui ont servi dans le Bomber Command de l’Aviation royale canadienne durant la Deuxième Guerre mondiale. Il a reçu la Croix du service distingué dans l’Aviation le 5 décembre 1944 et a été louangé pour son « courage, son sang-froid et son assurance. » Plus tard ce même mois, il a été grièvement blessé dans un écrasement. Pendant les deux années suivantes, il est resté paralysé de la moitié inférieure de son corps. Après la guerre, Robert Clothier est devenu un acteur de théâtre et de télévision accompli.

Distribution

L’acteur italo-canadien Bruno Gerussi , qui connaissait du succès au théâtre et comme animateur de l’émission de radio avant-gardiste Gerussi : Words and Music for the Middle of the Morning, est choisi pour interpréter Nick Adonidas, ramasseur d’épaves canadien d’origine grecque  et figure paternelle de la série. Consciente de l’impact qu’aurait la moindre tension sexuelle entre Nick et Molly sur la nature familiale de l’émission, la CBC  renonce à l’idée de faire de Molly une mère célibataire, préférant qu’elle soit une grand-mère. C’est donc Rae Brown qui obtient le rôle, au grand dam de Bruno Gerussi qui affirme avoir signé son contrat pour pouvoir jouer aux côtés d’une jeune blonde.

Bob Park et Nancy Chapple jouent Hugh et Margaret, les petits-enfants de Molly, et ils sont choisis malgré leur inexpérience en tant qu’acteurs. Juliet Randall remplace Nancy Chapple dans le rôle de Margaret lorsque cette dernière devient trop âgée pour le rôle après la première saison, et Bob Park quitte la série en 1978 lorsque les producteurs refusent de lui donner un rôle plus important. Pat John, l’un des derniers enfants de la Première Nation Sechelt à avoir été placé dans un pensionnat indien, décroche le rôle de Jesse Jim, l’ami de Hugh. Grâce au personnage de Pat John, la série est reconnue pour sa distribution d’acteurs autochtones dans des rôles qui transcendent les stéréotypes et les caricatures.

Les acteurs principaux demeurent les mêmes tout au long de la série, Bruno Gerussi et Pat Smith sont de la distribution des Beachcombers jusqu’à la fin. Parmi les autres acteurs réguliers de la série figurent Jackson Davies dans le rôle du gendarme de la GRC , John Constable, un officier amical qui arrive dans la série avec un petit rôle en 1974, mais devient un personnage régulier en 1979. Charlene Aleck se joint à la distribution en 1976 dans le rôle de Sara Jim, la sœur cadette de Jesse Jim. Marianne Jones arrive en 1982, dans le rôle de l’épouse de Jesse Jim, Laurel Jim (malgré un rôle antérieur en tant qu’Alice, la cousine de Jesse). Reg Romero est, dès ses débuts, un favori du public dans le rôle de McClosky, complice de Relic, mais il meurt tragiquement d’une crise cardiaque en plein tournage, en 1980.

La série comporte également son lot de vedettes invitées, parmi lesquelles David Suzuki , le chef Dan George Bruce Greenwood , Ryan Stiles et Gordon Pinsent , ce dernier dans le rôle du magicien maléfique, The Hexman.

Production

La production des huit premiers épisodes débute en 1971 à Gibsons, un petit village de la Colombie-Britannique qui borde la Sunshine Coast à environ 25 km de Vancouver. Un magasin d’alcool inoccupé situé près de la gare maritime du village sert de décor pour le café Molly’s Reach. L’équipe de production filme les scènes de Nick sur le Persephone en pleine mer, à l’aide d’une barge fabriquée sur mesure qui contient une génératrice ainsi que de l’espace pour un vestiaire et du rangement pour les accessoires et les costumes. Cette barge permet de filmer de longs plans et elle facilite les prises de vue en extérieur et une variété d’angles qui ajoutent à l’émission une valeur supérieure aux séries canadiennes moyennes.

Les rapports entre Bruno Gerussi et Robert Clothier sur le plateau sont conflictuels pendant toute la durée des Beachcombers, mais les deux acteurs demeurent professionnels dans leur compétitivité, et leur rivalité imprègne la série d’une véritable tension. Il règne également de l’hostilité entre Suzanne Finlay et Bruno Gerussi, qui estime que les intrigues de Suzanne Finlay ne sont jamais à la hauteur du potentiel de la série.

Première

La première des Beachcombers est diffusée le dimanche 1er octobre 1972, à 19 heures. Les cotes d’écoute sont initialement faibles, Nick se révélant polarisant en tant que personnage principal non conventionnel. La série se trouve malgré tout un public grâce à ses aventures familiales et à sa plage horaire située entre l’heure du souper et l’heure de grande écoute. Dix-neuf nouveaux épisodes sont filmés en 1972, et les réunions de famille devant la télévision deviennent rapidement une tradition hebdomadaire.

Changements et nouveau titre

Les Strange retournent à l’écriture des scénarios de la série en 1978 (ils écrivent plus de 70 épisodes) avec l’épisode « Bandits », le premier de plusieurs épisodes réalisés par Bruno Gerussi. Certains changements s’effectuent au sein des Beachcombers lorsque Rae Brown prend sa retraite en 1985. Le café The Reach change donc de propriétaire en 1988 et Janet-Laine Green fait son entrée dans le rôle de Dana, une mère célibataire originaire de Toronto qui achète le café et y emménage avec son fils Sam. Ce nouveau personnage donne à la série un certain côté de séduction. La série est également rebaptisée avec un titre plus court, Beachcombers.

Cependant, cette nouvelle image ne suffit pas à sauver la série en difficulté. En 1989, les directeurs de la programmation de la CBC  font discrètement passer Beachcombers de son créneau familial du dimanche soir à celui du mercredi soir, et le nombre des téléspectateurs chute. Beachcombers prend fin le 12 décembre 1990 avec une finale intitulée « Sunset ». Bruno Gerussi a le dernier mot en reconnaissant le succès inattendu de la série dans le tout dernier plan, avec la réplique : « We gave ‘em a run for their money, didn’t we? » (« On leur en a donné pour leur argent, n’est-ce pas ? »)

Motifs

Bien que Bruno Gerussi soit le personnage principal des Beachcombers, c’est le Canada lui-même qui est la véritable vedette de l’émission. The Beachcombers est la première série canadienne qui ne tente pas de reproduire un modèle américain, et la puissance et le caractère du paysage naturel sont soulignés pour offrir une saveur régionale distincte, quoiqu’idéalisée. La représentation respectueuse du travail des cols bleus est également une partie importante de son attrait.

La série s’inspire souvent des tensions entre les communautés autochtones  et les communautés coloniales de la Colombie-Britannique pour explorer la manière dont les cultures coexistent. Après un certain temps, les éléments autochtones sont atténués par respect pour les membres autochtones de la distribution et par souci d’exactitude, les producteurs exécutifs commençant à être mal à l’aise de trop utiliser ces aspects. En plus de la représentation autochtone, The Beachcombers propose une distribution multiculturelle  (malgré le fait que Bruno Gerussi, un Italo-Canadien, joue un personnage grec).

Accueil

Malgré la popularité constante des Beachcombers, l’émission est rarement considérée comme de l’art de haut niveau. Les critiques décrivent souvent le jeu des acteurs comme étant « exagéré » ou « guindé » et remarquent que la série manque de personnages féminins forts. En outre, les scénaristes réutilisent souvent des scénarios en raison de la longévité de la série. Tout en l’appelant « la meilleure émission de l’histoire de la télévision canadienne », Grant Lawrence, musicien et personnalité de la radio de CBC , la décrit également de façon désobligeante : « Un Grec et son copain des Premières Nations  se baladent dans leur bateau de m.. rde pour ramasser des bûches. Chaque semaine. Pendant 20 ans… C’était comme Dukes of Hazzard  (v.f. Shérif, fais-moi peur) sur l’eau, et 100 % canadien. »

Dans son livre Turn Up the Contrast, l’érudite Mary Jane Miller écrit : « Il est bien vu parmi les critiques, et même au sein de la CBC, d’ignorer ou de dénigrer la série », tandis que le Toronto Star  décrit The Beachcombers comme « une série canadienne typiquement abrutissante sur des ramasseurs d’épaves, qui a inexplicablement duré pendant près de deux décennies. » The Beachcombers est fréquemment menacée d’annulation entre chaque saison, ce qui, selon le créateur Marc Strange, contribue à l’incohérence de la série parce que les scénaristes n’ont que peu de temps ou de préparation lorsqu’ils entament l’écriture de chaque saison. Bruno Gerussi reconnaît fréquemment la médiocrité de la série tout en luttant simultanément avec la CBC pour sa survie. Même Marc Strange avoue, dans son livre Bruno and the Beach, que « parfois ce n’était pas vraiment très bon. »

Séries dérivées et suites

The Beachcombers inspire quelques séries dérivées ainsi que des téléfilms et des tentatives de redémarrage, mais aucun d’entre eux n’obtient une fraction du succès de l’original. En 1985, la brève série dérivée Constable Constable, mettant en vedette le populaire personnage interprété par Jackson Davies, ne dure que quatre épisodes. Jackson Davies propose ensuite à la CBC  une reprise intitulée The New Beachcombers, avec pour acteur principal Dave Thomas , de SCTV . La CBC manifeste de l’intérêt, mais choisit de commencer par des téléfilms afin d’évaluer la viabilité de cette nouvelle série. Téléfilm Canada refuse d’abord de subventionner le film, et ce n’est qu’après des protestations de la part du public que le projet continue. The New Beachcombers, un téléfilm d’une durée de deux heures, est diffusé en 2002 et met en vedette Jackson Davies, Dave Thomas et Graham Greene , ainsi qu’une distribution nettement plus jeune et plus séduisante que celle de la série originale. The New Beachcombers ne donne pas naissance à une série, mais est de retour en 2004, dans un second téléfilm, The Beachcombers Christmas, réalisé par Anne Wheeler . En 2003, The Beachcombers fait également l’objet d’un documentaire télévisé dans lequel on peut voir les coulisses des tournages, il est intitulé Back to Molly’s Reach et réalisé par Brad Quenville et coécrit et produit par Jackson Davies.

Impact et influence

L’influence des Beachcombers en tant que série favorite se manifeste dans son impact continu sur la culture canadienne-anglaise, particulièrement dans l’ouest du Canada. Le groupe de power pop originaire d’Edmonton, Molly’s Reach, est nommé en l’honneur de l’un des lieux principaux de la série. « J’ai vu tous les épisodes de Beachcombers », affirme le chanteur principal Sean Rivalin en 1996, « et à nos débuts, on jouait une très mauvaise chanson sur Bruno Gerussi. » Le lieu de tournage de Molly’s Reach est maintenant un café du même nom qui demeure populaire depuis 1995, et il est sans aucun doute devenu l’attraction touristique emblématique de la Sunshine Coast.

Le succès de The Beachcombers ouvre la voie à d’autres séries télévisées canadiennes à saveur régionale telles que North of 60, Corner Gas et Republic of Doyle. Il permet également à la CBC d’étendre sa programmation et sa production dans des régions à l’extérieur de Toronto, et s’avère essentiel pour l’infrastructure de la production en Colombie-Britannique. La série a débuté à l’époque où il n’existait pas encore d’industrie du film en Colombie-Britannique et les techniciens étaient donc majoritairement autodidactes et ont appris à travailler en équipe et avec ingéniosité. Comme l’a déjà fait remarquer Marc Strange, « la plus contribution la plus durable de The Beachcombers à la télévision canadienne, c’est la formation de toute une génération de cinéastes. »

Legs

The Beachcombers est diffusé dans plus de 50 pays et a détenu le titre de la série canadienne ayant duré le plus longtemps jusqu’à ce que Degrassi la surpasse en 2012. Malgré ses 18 saisons et le fait qu’elle attire plus d’un million de téléspectateurs par épisode à son apogée, The Beachcombers ne s’est jamais vraiment mérité de prestige, à l’exception d’un prix Gemini  pour le rôle de soutien de Robert Clothier, en 1986. La série demeure malgré tout l’une des préférées du public et arrive en tête de liste du sondage du TV Guide en tant que série de la CBC la plus populaire de tous les temps en 1998, en plus d’être votée série familiale canadienne la plus populaire de tous les temps en 1999. En 2017, un sondage tenu par le Festival international du film de Toronto désigne The Beachcombers comme étant l’une des meilleures séries de l’histoire de la télévision canadienne.

 

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