Groupe de pression | l'Encyclopédie Canadienne

Article

Groupe de pression

Un groupe de pression, appelé aussi groupe d'intérêt, est une organisation formée de personnes animées des mêmes idées qui cherche à influencer les POLITIQUES GOUVERNEMENTALES en vue de promouvoir de l'intérêt.

Groupe de pression

Un groupe de pression, appelé aussi groupe d'intérêt, est une organisation formée de personnes animées des mêmes idées qui cherche à influencer les POLITIQUES GOUVERNEMENTALES en vue de promouvoir de l'intérêt. Les groupes de pression existent dans toutes les démocraties modernes pluralistes et surgissent de toutes parts. Certains défendent les intérêts des producteurs, tandis que d'autres font valoir les préoccupations des consommateurs ou font pression en faveur de politiques générales, par exemple, la protection de l'environnement. Le nombre et les effectifs de certains groupes de pression sont si importants et leur organisation si perfectionnée qu'ils constituent pratiquement un prolongement du gouvernement.

Au nombre des puissants groupes de pression, on compte le Conseil canadien des chefs d'entreprise, qui est financés par l'industrie, l'ASSOCIATION CANADIENNE D'ÉTUDES FISCALES, les banques, la Fédération canadienne de l'agriculture, l'ASSOCIATION MÉDICALE CANADIENNE, les industries de l'automobile, de l'acier, du caoutchouc, les industries chimiques et énergétiques, qui agissent isolément ou par l'entremise de leurs associations professionnelles, comme le Conseil canadien des chefs d'entreprise sur des questions d'intérêt national, la CHAMBRE DE COMMERCE et l'ASSOCIATION DES MANUFACTURIERS CANADIENS. Le Conseil canadien des chefs d'entreprise est une association de cadres supérieurs de grandes sociétés canadiennes formée en 1977 en vue de coordonner la participation du monde des affaires au processus d'élaboration de politiques. L'Institut des cadres d'associations, qui compte 318 membres dans la seule ville d'Ottawa, est à toutes fins utiles un groupe de pression servant les intérêts des groupes de pression. D'autres groupes de pression, comme Executive Consultants Ltd et Government Policy Consultants Inc., comprennent d'anciens politiciens et fonctionnaires et des experts en publicité et en relations publiques qui vendent leurs services en échange d'honoraires.

Leurs activités peuvent se traduire par des campagnes dans les médias ou par des annonces publicitaires qui s'opposent à certaines politiques ou les soutiennent, par de simples rencontres avec de hauts fonctionnaires ou par la présentation de mémoires à des commissions parlementaires. On a dit que le lobbying au Canada servait à « voir à ce que tout soit agréable, ennuyant et maîtrisé », et il se pratique habituellement au moyen de rencontres privées entre conseillers influents et membres du Cabinet. Les rapports étroits que ces groupes entretiennent avec les hommes politiques et les bureaucrates entraînent parfois des accusations de CONFLIT D'INTÉRÊTS.

Certains de ces groupes sont beaucoup plus puissants et réussissent beaucoup mieux que d'autres. Ils ont presque toujours des appuis financiers solides, sont unis et stables, et leurs dirigeants, dont bon nombre sont d'ex-députés, ont tendance à représenter des causes bien vues des hommes politiques et des fonctionnaires. En d'autres mots, ils facilitent le processus par lequel les dirigeants du parti au pouvoir et les hauts fonctionnaires élaborent leurs politiques avec des représentants du monde des affaires, des professions et d'autres groupes d'intérêts de la société. Ils ont en général des bureaux permanents à proximité de la capitale et leurs dirigeants fréquentent les associations et les clubs importants.

Les groupes qui réussissent moins disposent habituellement de fonds insuffisants, sont dirigés par des gens qui n'appartiennent pas à l'élite et, en général, défendent des causes qui n'ont pas la faveur des grands partis politiques. Ils sont souvent constitués pour défendre une seule question ou apparaissent soudainement sur la scène pour s'opposer à la proposition d'une politique particulière. D'autres s'acharnent pendant des années à défendre des causes mineures ou perdues d'avance. Les perdants manquent tout simplement de moyens pour réussir. Contrairement aux dirigeants faisant partie de l'élite, ils n'ont pas accès à volonté aux ministres du Cabinet et ne projettent pas un air de légitimité. Tandis que les groupes de pression bien financés établissent des contacts personnels au sein du gouvernement, rencontrent les journalistes en vue, mènent de luxueuses campagnes médiatiques ou soumettent même des arguments juridiques ayant trait à l'élaboration d'une loi, les groupes moins solvables, pour leur part, doivent recourir à des campagnes plus épisodiques, à des techniques plus tapageuses et excessives, de style guérilla, à des démonstrations avec slogans et affiches susceptibles de provoquer des « occasions médiatiques ».

Au Canada, la forte centralisation des décisions législatives et la discipline rigoureuse imposée aux partis politiques rendent difficile l'exploitation de rivalités entre législateurs. Toutefois, le monopole du pouvoir, qui permet au Cabinet de ne pas tenir compte des requêtes de groupes de pression, lui permet également d'y accéder. L'élaboration d'une loi se fait en général selon une certaine séquence. On perçoit d'abord le besoin de changer une politique, puis on élabore une proposition, souvent avec la collaboration de représentants de groupes de pression, et on la fait circuler à l'intérieur du gouvernement (CABINET DU PREMIER MINISTRE et ORGANISMES CENTRAUX). Il arrive parfois qu'on la fasse aussi parvenir aux médias, à des experts et aux gouvernement provinciaux avant de l'envoyer dans d'autres ministères. À ce stade, il arrive que la politique soit étudiée par des groupes de pression. Avant de soumettre au Parlement des amendements et de nouvelles lois, la proposition est étudiée par un COMITÉ PARLEMENTAIRE, dont l'avis est confirmé ou modifié par le Cabinet. Le ministère de la Justice rédige alors le projet de loi, qui est soumis à un autre comité du Cabinet, puis confirmé par le Cabinet et, enfin, ratifié par le premier ministre.

Toutefois, pour être efficace, une loi doit être appliquée, et les fonctionnaires jouissent en ce domaine d'un fort pouvoir discrétionnaire. De plus, l'impact d'une loi est souvent déterminé par l'interprétation des tribunaux. Du fait que le processus législatif, particulièrement l'initiative de politique, est en réalité contrôlé par la BUREAUCRATIE, les groupes de pression expriment souvent leurs opinions ou fournissent des renseignements à des fonctionnaires tout comme au Cabinet. Mais les groupes de pression peuvent également exercer leur influence sur les commissions parlementaires, dont les suggestions relatives aux modifications devant être apportées à un projet de loi sont souvent entérinées par le Cabinet; sur le Sénat, dont l'influence peut se faire sentir par l'entremise du puissant Comité sénatorial permanent des banques et du commerce; et sur des députés d'arrière-banc, susceptibles d'accéder un jour au Cabinet. Mais on reconnaît habituellement que, une fois le projet de loi parvenu au Parlement, il est plus difficile d'influencer les intentions du gouvernement.

En dépit des conclusions de la COMMISSION ROYALE D'ENQUÊTE SUR LES GROUPEMENTS DE SOCIÉTÉS selon lesquelles les groupes de pression qui représentent les intérêts des agriculteurs, des syndicats et d'autres secteurs réussissent à influencer la politique gouvernementale, bon nombre de ces groupes se voient écartés par des intérêts puissants et reconnus et par des bureaucrates qui peuvent freiner l'action des groupes dont les positions ne sont pas conformes aux leurs. Les représentants de groupes qui ne jouissent pas de rapports intimes et confidentiels avec de hauts fonctionnaires et des membres du Cabinet ont recours à des tactiques différentes pour attirer l'attention du gouvernement, mais les tactiques telles que les manifestations de protestation ne font que souligner leur marginalité. Aux yeux des groupes expérimentés, de telles tactiques sont illégitimes, bien qu'elles deviennent plus courantes. Les groupes qui défendent les consommateurs, l'environnement et les travailleurs réussissent également moins bien, non seulement parce qu'ils sont socialement et idéologiquement plus éloignés du gouvernement, mais aussi parce qu'ils tentent de faciliter le changement et non de l'empêcher. Pour un gouvernement, il est toujours plus facile de prévenir le changement que de le réaliser.

Les groupes de pression prennent de plus en plus d'importance au Canada pour plusieurs raisons. À mesure que la Chambre des communes et les assemblées législatives perdent de leur influence en raison de l'affaiblissement des partis politiques, le pouvoir tend à se déplacer vers les groupes d'intérêts. Les campagnes électorales devenant de plus en plus coûteuses, les partis comptent de plus en plus sur les contributions de ces groupes. L'américanisation croissante du Canada a mené au perfectionnement des techniques de pression et de relations publiques, surtout dans les grandes entreprises multinationales. Certains grands groupes de pression ont exploité les conflits grandissants entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Ainsi, les groupes qui défendent des intérêts régionaux considérables, par exemple, l'industrie pétrolière et gazière de l'Ouest, rallient à leur cause leur gouvernement provincial, qui les appuie contre le gouvernement fédéral et les autres régions du Canada.

C'est lorsque les groupes de pression poursuivent des buts différents qu'ont lieu les grandes batailles. La question des prix du pétrole, au cours des années 70 et au début des années 80, a opposé l'industrie pétrolière et les gouvernements des provinces productrices aux industries manufacturières du centre du Canada et au gouvernement de l'Ontario (voir POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE NATIONALE). En général, les grandes entreprises réussissent quand elles sont unies. C'est ainsi qu'elles ont réussi à empêcher le renforcement de la Loi des enquêtes sur les coalitions, que Trudeau avait juré de refondre, une fois au pouvoir. Elles ont aussi empêché la réforme de l'IMPOSITION, en dépit des recommandations de la Commission Carter. En réussissant à persuader le gouvernement Mulroney de mettre fin à l'octroi obligatoire de licences dans le domaine des produits pharmaceutiques en 1987, l'industrie pharmaceutique multinationale s'est assurée de jouir pendant 10 ans du monopole de ses nouveaux médicaments. Cette mesure, susceptible de provoquer d'importantes hausses des prix, vise avant tout à attirer des investissements au Canada et est conforme aux obligations découlant de la participation du Canada à l'ALENA et à l'Organisation mondiale du commerce.

En raison de la visibilité croissante de l'industrie du lobbying et des controverses qui en découlent, le gouvernement Mulroney a adopté une loi forçant les groupes de pression à s'enregistrer auprès d'une agence gouvernementale afin que leurs activités soient plus transparentes. Les groupes de pression travaillant pour des clients (p. ex. les lobbyistes professionnels) sont tenus de déclarer les intérêts qu'ils défendent et de décrire la nature de leurs représentations. Ces gens se sont d'abord opposés à cette loi, alléguant qu'elle empiétait sur leurs droits de citoyens. Cependant, ils en sont arrivés à percevoir cet enregistrement comme un statut officiellement reconnu qui leur confère une certaine légitimité.

Si, au Canada, les groupes de pression ont en général renforcé le statu quo, c'est que la plupart d'entre eux incarnent ce statu quo.

Voir aussi LOBBYING.