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Transport urbain

Si les tramways tirés par des chevaux constituent une amélioration notable, ils n'ont rien du moyen de transport idéal : on ne peut pas transporter de lourdes charges, les chevaux sont coûteux et demandent de fréquentes périodes de repos. Ils souillent également les rues.

Transport urbain

 Avec le développement de l'industrialisation et l'expansion des villes, il est devenu impossible à beaucoup de citadins d'habiter à distance de marche de leur travail, d'où l'importance qu'a prise le transport urbain. Déjà au XIXe siècle, plusieurs pays mettent à l'essai des solutions aux difficultés du transport dans les villes. En 1819, par exemple, Paris bénéficie d'un système de diligences tirées par des chevaux. Au cours de la décennie suivante, des omnibus sont mis en service à New York et à Londres. L'avènement du transport de passagers par rail dans les années 1820 et 1830 est immédiatement suivi par son adaptation au milieu urbain. Comme les locomotives à vapeur ne peuvent circuler dans les villes parce qu'elles effraient les chevaux et polluent l'air ambiant, ce sont des chevaux ou des mulets qui tirent les premiers tramways. Toronto possède dès 1845 des tramways à traction animale, et Montréal adopte ce mode de transport dans les années 1860. D'autres villes canadiennes ne tardent pas à leur emboîter le pas.

Si les tramways tirés par des chevaux constituent une amélioration notable, ils n'ont rien du moyen de transport idéal : on ne peut pas transporter de lourdes charges, les chevaux sont coûteux et demandent de fréquentes périodes de repos. Ils souillent également les rues. De nombreuses tentatives sont faites pour remplacer la traction animale par la traction mécanique. En Allemagne, E.W. von Siemens invente en 1879 le premier chemin de fer électrique efficace qui va causer une véritable révolution dans le monde du transport. Des inventeurs allemands, anglais et américains s'emploient dès lors à perfectionner le tramway électrique. À l'occasion de l'exposition industrielle de Toronto, en 1885, on construit grandeur nature l'un des premiers prototypes de cette nouvelle technologie. Cette courte ligne comporte une autre innovation d'importance, le trolley, une perche mobile qui assure une alimentation électrique efficace et sans danger à partir de fils aériens. L'exploitation commerciale débute immédiatement et le Canada est l'un des premiers pays à tirer profit de ces progrès technologiques. La première ligne de tramway électrique au Canada est construite sur 1,5 mille (2,4 km) de voies à Windsor (Ontario) et inaugurée le 28 mai 1886. Un autre réseau de tramways électriques prend forme l'année suivante à St. Catharines (Ontario), et plusieurs autres vont suivre en l'espace de quelques années, si bien que la plupart des villes canadiennes et leurs banlieues, dans toutes les provinces excepté l'Île-du-Prince-Édouard, disposent alors de TRAMWAYS.

 Quoique le tramway fournisse un service efficace, en l'absence de solutions de rechange, son règne sera de courte durée. L'avènement de l'AUTOMOBILE procure bientôt à la plupart des Canadiens un moyen de TRANSPORT pratique et peu coûteux. Les véhicules motorisés révolutionnent aussi le transport public lorsque l'emploi des AUTOBUS se généralise dans les années 20. Même s'ils sont plus lents et moins confortables que les tramways, les autobus permettent aux compagnies de tramways de faire face à la concurrence croissante de l'automobile.

Le trolleybus, qui roule sur des pneus et s'alimente à des fils aériens, conjugue les avantages de l'autobus et du tramway. Windsor est la première ville canadienne à bénéficier de ce nouveau mode de transport, dont elle inaugure un parcours le 5 mai 1922, le Lincoln Road. Toronto s'y essaie à son tour en ouvrant une ligne un mois plus tard. En 1926, on abandonne déjà ce système de transport, mais les trolleybus remplaceront de nombreux tramways après la Deuxième Guerre mondiale.

L'automobile continue de gruger le monopole du tramway tout au long des années 20. Avec la crise économique des années 30, le nombre des usagers décline rapidement et de nombreuses lignes de tramways sont abandonnées en raison de la détérioration du matériel roulant. À court de capitaux, les manufacturiers d'autobus vont persuader certains services de tramways d'opter pour ce type de transport motorisé. Les réseaux de transport en commun des grandes villes, notamment Toronto, Montréal et Vancouver, achètent de nouveaux tramways et modernisent leurs équipements.

La Deuxième Guerre mondiale entraîne une remontée spectaculaire de tous les modes de transport en commun, car l'approvisionnement en essence, en pneus et en pièces de rechange et même en automobiles neuves est strictement rationné. En 1945, la plupart des réseaux de transport en commun au Canada sont désuets et requièrent d'importants investissements. Le retour de la paix permet l'achat de nombreuses automobiles, et la demande pour le transport en commun connaît une baisse significative. La plupart des villes décident alors de renoncer aux tramways pour les remplacer par des autobus et des trolleybus modernes. Après l'abandon, en 1959, des réseaux de Montréal et d'Ottawa, seule Toronto possède encore des tramways.

L'inauguration du métro de la rue Yonge à Toronto en 1954 constitue une innovation majeure pour le transport urbain canadien. Les MÉTROS peuvent transporter de nombreux passagers et leurs trains roulent sur des voies protégées, soustraites aux entraves de la circulation.

Le transport privé connaît également d'importantes améliorations grâce à la construction de voies rapides dans les années 50. L'augmentation spectaculaire du nombre d'automobiles dans l'après-guerre met à rude épreuve les réseaux urbains de circulation et a pour effet d'allonger le temps moyen d'un trajet, que ce soit par automobile ou par transport en commun. Les voies rapides vont détourner les véhicules motorisés des petites rues en leur faisant emprunter des voies prioritaires séparées de la circulation locale. Comme dans le cas du métro, la circulation sur ces voies se fait à grande vitesse, d'où un débit plus élevé. Mais le métro et les voies rapides comportent de sérieux désavantages et ne peuvent constituer des solutions universelles aux problèmes de la circulation. L'un de ces désavantages est le coût extrêmement élevé de leur construction. Les deux modes de transport requièrent de grandes étendues de terrain dans des endroits très convoités, bien que dans le cas du métro on puisse bâtir au-dessus une fois la construction terminée.

Les problèmes d'engorgement dans les villes canadiennes ne font que s'accentuer au cours des années 60 et 70, malgré le nombre de voies rapides dont elles disposent. La flambée du prix du pétrole de même que la hausse des coûts de stationnement et d'autres coûts incitent les citadins à recourir au transport en commun. L'achat d'équipements neufs permet de rajeunir de nombreux réseaux et d'attirer de nouveaux usagers. Le développement du réseau public repose alors sur les autobus et sur les systèmes ferroviaires traditionnels. Pendant que les réseaux de métro de Toronto et de Montréal s'étendent, d'autres villes tentent de trouver des solutions plus économiques. Le transport léger sur rail (TLR) procure la plupart des avantages du métro à moindre coût, et des lignes de TLR sont inaugurées à Edmonton (1978), à Calgary (1981) et à Vancouver (1986).

Administration, planification et financement

Les changements intervenus dans l'organisation administrative et financière et dans la planification du transport urbain ne sont pas moins spectaculaires que ceux de la technologie. Une planification minutieuse et une utilisation judicieuse du personnel et du matériel s'avèrent nécessaires pour assurer les services aux périodes où les usagers veulent circuler. Il faut veiller à l'entretien des véhicules, et les inspecteurs doivent s'assurer que les horaires des parcours sont respectés et que les usagers paient leur passage. Ces tâches sont coordonnées par l'administration des transports. Au début, le transport en commun était habituellement exploité par des entreprises privées à but lucratif. Les tarifs perçus devaient couvrir les dépenses et rapporter un profit raisonnable sur le capital investi. Plusieurs villes demandaient même aux compagnies privées de payer des droits pour pouvoir circuler dans leurs rues et imposaient d'autres exigences aux réseaux de transport. D'autres villes s'engagent plus directement dans l'organisation du transport, soit qu'elles ne trouvent aucune compagnie privée apte à construire un réseau de tramways, soit que les citoyens hésitent à céder à des intérêts privés un monopole profitable.

Des tramways de propriété municipale sont mis en service à Calgary en 1909 et, en 1911, les premiers tramways de la Saskatchewan, également propriété de la ville, circulent à Regina. En 1921, la nouvelle Toronto Transportation Commission prend le relais des compagnies de tramways privées aussi bien que municipales et s'emploie à étendre leurs réseaux. La propriété privée demeure toutefois prépondérante dans d'autres villes, dont Halifax, Winnipeg et Vancouver, qui seront desservies par des réseaux privés jusque dans les années 50 et parfois après.

Que la propriété en soit publique ou privée, tous les premiers réseaux de transport en commun sont gérés dans l'intention de réaliser des profits, ou du moins de couvrir leurs frais. En quelques années à peine, certains réseaux parviennent difficilement à atteindre cet objectif. Les services des tramways doivent être offerts non seulement de jour, mais aussi de nuit et pendant les week-ends, même si les usagers s'y font plus rares. Il faut aussi affecter un personnel important et une grande quantité de matériel roulant aux heures de pointe.

Les difficultés financières des réseaux augmentent à mesure que les usagers délaissent les transports en commun en faveur de l'automobile. Un nombre réduit de passagers signifie des tarifs plus élevés pour couvrir les frais, et des tarifs plus élevés signifient encore moins de passagers. Les tentatives de réduction des coûts ne sont pas vraiment efficaces, surtout lorsque les frais de fonctionnement des réseaux de transport en commun se mettent à grimper de manière phénoménale. En 1960, le passager canadien moyen permet un profit de 1,7 ¢ par trajet, mais ce profit s'évanouit dès 1971 pour laisser place à une perte de 0,7 ¢ par passager. Les pertes continuent de s'accentuer pour représenter un coût de 38,1 ¢ par passager en 1980 et de 52 ¢ en 1985.

Ce renversement de situation dans les réseaux de transport urbain amène les planificateurs à revoir leur manière de penser. Puisque les réseaux de voies rapides n'arrivent pas à alléger la circulation urbaine, l'aide au transport en commun apparaît comme une solution de rechange viable et peu coûteuse. En reportant ou en annulant volontairement les projets de construction routière et en instaurant des mesures d'aide au transport en commun, on rend la circulation automobile dans les villes relativement peu attrayante comparativement au transport public. Des innovations dans la gestion de la circulation, comme des voies et des rues réservées aux autobus et une signalisation fonctionnant selon la densité de la circulation, sont une façon économique d'accélérer le transport. Les autobus n'ont pas besoin d'aires de stationnement au centre-ville et occupent par passager moins d'espace routier que les automobiles. Au cours des années 70, la plupart des Canadiens s'accordent à dire que les transports en commun devraient recevoir une forme d'aide pour attirer davantage d'usagers et leur permettre de concurrencer l'automobile sur une base équitable. Bon nombre des mesures adoptées pour faciliter la circulation des autobus dans les rues de la ville aident aussi les automobiles, car auparavant les autobus et les autres véhicules se gênaient mutuellement et ralentissaient toute la circulation.

S'étant engagés à appuyer les services de transport en commun, les urbanistes se rendent compte qu'une mainmise directe sur le type et la qualité des services leur permet de procéder à des innovations dans la conception et l'aménagement des villes et des banlieues. L'accès à des services de transport dans une zone particulière est un atout supplémentaire qui en favorise le développement. Si le service de transport est permanent, comme un métro, une ligne de TLR ou un circuit de trolleybus, l'attraction devient encore plus grande comparativement à un parcours d'autobus qui peut facilement être déplacé sans avertissement. Même si elles sont souterraines, on peut suivre les lignes de métro de Montréal et de Toronto du haut des airs en raison du développement très dense qui marque les alentours de beaucoup de stations. Les quartiers résidentiels peuvent devenir plus attrayants si on s'engage à offrir un service de transport en commun permanent et fiable. Au moment de la construction du quartier de False Creek à Vancouver, on a pu épargner des milliers de dollars par unité d'habitation en limitant l'espace réservé aux garages et en fournissant un service de transport en commun régulier en lieu et place d'une deuxième ou troisième automobile par famille. Même dans les banlieues éloignées, souvent difficiles à desservir efficacement par le transport en commun, on a installé des trottoirs à l'extrémité des îlots de façon à amener le transport en commun à distance de marche de toutes les maisons d'un lotissement.

La tendance à favoriser le transport en commun se confirme dans les années 70, alors que le prix du carburant et les coûts du stationnement grimpent de façon vertigineuse. Beaucoup de Canadiens s'en remettent alors au transport en commun pour la première fois de leur vie à la suite de la crise du pétrole. D'autres redécouvrent la marche, la bicyclette ou la motocyclette. Certaines compagnies de transport font l'essai de services d'autobus spéciaux pour permettre au handicapés d'utiliser les transports en commun. Bien que l'automobile joue encore un rôle majeur dans le transport urbain, il est peu probable qu'elle retrouve sa popularité des années 50 et 60.

Les 86 membres de l'Association canadienne du transport urbain exploitent, en 1985, 10 599 autobus, 1 640 wagons de métro et de trains de banlieue, 611 trolleybus, 439 wagons de trains légers et de tramways, ainsi que 73 wagons de capacité intermédiaire (comme le Skytrain de Vancouver). Ces véhicules parcourent ensemble 691 millions de km, transportent 1,4 milliard de passagers payants et créent des revenus de 936 millions de dollars. Ils utilisent 327 millions de litres de carburant diesel, 4,1 millions de litres d'essence et 567 millions de kWh d'électricité. Près de 35 000 personnes travaillent dans cette industrie.

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