Hitler et le mur de l’Atlantique
Le Canada est en guerre avec l’Allemagne depuis 1939 déjà. Dès 1944, le vent tourne en faveur des Alliés. Forts de la victoire de la bataille de l’Atlantique, les Alliés poursuivent leur avancée à travers l’Italie (voir bataille d’Ortona). À l’est, les Soviétiques repoussent les machines de guerre allemandes en Russie. Pendant des années, le dirigeant soviétique Joseph Staline demande aux Britanniques et aux Américains d’ouvrir un nouveau front de guerre en envahissant la France par l’ouest. Ce n’est qu’à l’été 1943 que les Alliés s’accordent enfin et prévoient l’invasion pour l’année suivante. On nomme ainsi le général américain Dwight Eisenhower commandant suprême de l’opération Overlord, nom de code de la plus grande invasion amphibie jamais réalisée.
Les Alliés ont besoin d’un port de ravitaillement français pour soutenir adéquatement la Force d’invasion. Toutefois, après le raid désastreux du port de Dieppe, en 1942, durant lequel ont été tués, blessés ou capturés plus de 3369 Canadiens, les stratèges militaires savent bien qu’une attaque navale contre ce port bien défendu est de la pure folie. (voir Les motifs du raid sur Dieppe)
En fait, la majorité de la rive française de La Manche a été transformée en ce qu’on appelle le « mur de l’Atlantique, » constitué de kilomètres de fortifications, de nids de mitrailleuses et de bunkers allemands surplombant les estuaires et les plages, eux-mêmes couverts de barbelés, de fossés antichars et d’autres obstacles.
Que signifie « jour J »?
Lorsque l’on planifie une opération militaire, la date exacte à laquelle l’attaque sera lancée n’est pas toujours connue d’avance. Pour cette raison, le terme « jour J » est utilisé pour désigner la date de commencement d’une attaque. Bien qu’il a été utilisé dans la planification de nombreuses autres opérations, le terme est désormais surtout associé à l’invasion de la Normandie, en France, par les Alliés le 6 juin 1944.
Plans secrets
Devant de tels obstacles et des Forces allemandes aguerries, menées par le légendaire général Erwin Rommel, les Alliés élisent la surprise comme arme de choix. Les Allemands, bien conscients qu’une invasion est imminente, ne savent ni où ni quand elle aura lieu. L’endroit le plus logique est sans conteste le Pas-de-Calais, la côte ouest de la frontière belge, là où La Manche est la moins large et l’itinéraire vers l’Allemagne est le plus court.
Les Alliés, toutefois, ont l’œil sur la Normandie, plus à l’ouest. Au jour J, ils tenteront le débarquement de plus de 156 000 soldats, dont 6 divisions d’infanterie et des unités blindées, sur 5 plages le long des 100 km de la côte et derrière les lignes ennemies. Les Forces américaines attaqueront les plages baptisées Utah et Omaha; les Britanniques prendront d’assaut Gold et Sword; une division canadienne investira la plage répondant au nom de code Juno. Un bataillon de parachutistes canadiens doit également atterrir derrière les lignes allemandes, accompagné par trois divisions de parachutistes américains et britanniques, tout près de la Force d’invasion principale. Cette campagne détient le record de la plus grande invasion amphibie de l’histoire. Plus de 14 000 soldats canadiens débarquent ou sont parachutés dans la zone d’invasion française au jour J. La Marine royale canadienne contribue à hauteur de 110 navires et 10 000 soldats, et l’ARC fournit 15 escadrons de chasseurs et de chasseurs-bombardiers pour l’assaut.
Le secret est vu comme une condition essentielle au succès de la mission : dans le but de convaincre l’Allemagne qu’une invasion se prépare à Pas-de-Calais, on construit une fausse armée de chars, camions et autres équipements en bois et en papier mâché. Entre-temps, la vraie Force d’invasion s’assemble au sud-ouest de l’Angleterre, région qui est entièrement encerclée par les autorités militaires.
Les soldats dans les camps étudient de fond en comble des cartes, des photographies et des maquettes des plages d’invasion construites à partir de renseignements méticuleusement récoltés des mois durant. Les photographies et les maquettes montrent le plan des côtes normandes et les points d’intérêt importants, les maisons, les clochers d’église et promontoires, de façon à ce que chaque officier et soldat connaisse ses objectifs et ce à quoi il doit s’attendre.
LE SAVIEZ-VOUS?
Ernest Adolphe Côté est un important membre des Forces armées canadiennes. Lieutenant-colonel de la 3e Division d’infanterie canadienne, il est responsable de la logistique et de l’approvisionnement d’environ 15 000 soldats et rend compte au commandant de la préparation et de la mise en application des plans administratifs en appui des opérations militaires. Il fait partie du nombre restreint d’officiers informé de la date et du lieu de l’invasion du jour J et, en tant que telle, planifie secrètement la logistique de cet événement pour sa division.
La grande majorité des hommes de la 3e Division d’infanterie qui vont sur les rives de Juno Beach n’ont aucune expérience de combat. Fred Moar, lieutenant du North Shore Regiment du Nouveau-Brunswick, ne fait pas exception à la règle. Pendant plus d’un an, les troupes s’entraînent en Écosse et en Angleterre : « Nous n’avions aucune idée de ce qui nous attendait, dit Moar, mais nous étions prêts à tout. Nous nous croyions les meilleurs. »