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Artisanat

Il est difficile de définir précisément et de manière commode l'artisanat contemporain, d'abord parce que les concepts sous-jacents changent et, ensuite, parce que dans le langage courant, on utilise à la fois les termes « art » et « artisanat » pour désigner un travail hautement spécialisé.

Artisanat

Il est difficile de définir précisément et de manière commode l'artisanat contemporain, d'abord parce que les concepts sous-jacents changent et, ensuite, parce que dans le langage courant, on utilise à la fois les termes « art » et « artisanat » pour désigner un travail hautement spécialisé. Ce n'est, en bonne partie, qu'au XXe siècle que le mot « artisanat » désigne les objets façonnés. Au XIXe siècle, on désigne ces objets par des termes comme arts appliqués, décoratifs ou ornementaux, qui signifient habituellement objets utilitaires, plaisants pour les sens et dont la réalisation demande une grande habileté.

Malheureusement, l'ornementation excessive de l'époque victorienne jette le discrédit sur les artisans et les arts décoratifs. Situation nouvelle, car plusieurs des plus grands artistes de la Renaissance, orfèvres de métier, ont su exercer leurs talents tant dans la conception de tapisseries murales ou de gobelets que dans la réalisation de décors de théâtre.

Au début du XXe siècle, l'artisanat englobe les objets faits à la main dans le cadre d'une production en atelier ou à domicile. Cette définition s'applique toujours au Tiers-Monde où les techniques artisanales reposent encore sur la tradition transmise des parents aux enfants. Parallèlement à un florissant marché d'objets utilitaires (paniers, pots, boîtes), les articles de luxe ont toujours trouvé preneur, qu'il s'agisse des objets sacrés servant aux cérémonies religieuses ou des articles utilisés par les gens aisés. Cette division existe encore partout. En Europe, en Amérique du Nord et en Australie, ce marché d'objets uniques inclut souvent des « objets d'art », c'est-à-dire des objets dont la fonction est purement esthétique et qui sont fabriqués avec un matériau traditionnellement artisanal (argile, fibres, bois, VERRE, métal, CUIR).

Artisanat contemporain au Canada

Durant les années 50 et jusque dans les années 60, on constate une grande augmentation du nombre de personnes vivant de l'artisanat. Cette croissance peut être attribuée, en partie, à l'idéologie de l'époque prônant l'autosuffisance. De nos jours, cette tendance se maintient, en partie, en raison de l'augmentation significative du taux de chômage, particulièrement dans les provinces de l'Atlantique. Ainsi, beaucoup de chômeurs cherchent à gagner leur vie en devenant artisans et demandent des cours de formation. Simultanément, le nombre d'artisans amateurs et de bricoleurs augmente aussi.

Selon différentes études canadiennes, 1,5 million de personnes consacrent plus de 7 heures par semaine à une activité artisanale. Le recensement de 1991 indique qu'environ 16 000 personnes gagnent leur vie en fabriquant et en vendant des objets d'artisanat. La valeur des ventes au détail de ces objets conçus au Canada représente 500 millions de dollars par année. Le marché des articles originaux de qualité, qui soulignent autant l'individualité de l'acheteur que celle de l'artisan, s'est aussi élargi.

Au Canada, la plupart des matières premières utilisées en artisanat (par exemple, le coton, la soie, le jute) sont importées. Quant au chanvre (dont sont tirés la marijuana et le haschich), la culture en a été interdite il y a 50 ans. Récemment, l'utilisation de matières (par exemple, les peaux, l'ivoire) provenant d'animaux en voie de disparition soulève des inquiétudes. Cependant, la plupart du temps, les artisans emploient des matériaux traditionnels. On s'interroge aussi sur les risques pour la santé que représentent les nouvelles substances : solvants, vernis, glaçures, pigments, plastiques et additifs. On reconnaît aujourd'hui que ces substances sont dangereuses. À leur insu, les artisans et les amateurs ont été soumis à un certain danger en les manipulant. En revanche, l'artisanat a également une grande valeur thérapeutique. Les thérapeutes occupationnels reconnaissent depuis longtemps la valeur des travaux manuels dans le processus de réadaptation, et des millions de personnes, dans le monde entier, prennent tout simplement plaisir à travailler de leurs mains.

Traditionnellement, on devenait artisan après un long APPRENTISSAGE ou bien le savoir-faire était transmis de père en fils. De nouveaux concepts en éducation préconisent l'utilisation de matériaux traditionnels, comme l'argile, au primaire, non pas pour apprendre aux élèves à travailler l'argile, mais comme moyen d'expression. Avant la fin des années 60, avant la création des COLLÈGES COMMUNAUTAIRES, très peu d'institutions offrent une formation en techniques artisanales. Par exemple, en Ontario, on fonde une école d'artisanat et de création rattachée au Sheridan College. L'école est cependant un pensionnat qui a pour mission d'offrir des cours d'artisanat et de création à tous les étudiants ontariens. De plus, il existe une forte demande pour des cours du soir et des cours d'été permettant l'apprentissage des techniques élémentaires. En période de récession économique, les écoles d'artisanat et de création qui ne sont pas financièrement autonomes voient leurs programmes supprimés ou interrompus. Parfois, c'est tout un département qui est touché et, en Colombie-Britannique, un collège entier a été fermé. La fermeture d'établissements se poursuit malgré la forte demande pour des cours de formation.

Les communications modernes ont presque éliminé les différents styles provinciaux ou régionaux caractérisant autrefois l'artisanat canadien. Le Québec, avec ses ceintures fléchées, et Terre-Neuve, avec son tissage et ses tapis crochetés, sont les deux seules provinces pouvant prétendre se distinguer, car ces styles traditionnels n'ont pas encore été copiés à grande échelle. Quelques provinces ont acquis une certaine réputation : la Nouvelle-Écosse, entre autres, est bien connue au Canada et aux États-Unis pour ses COURTEPOINTES. On fait beaucoup de CÉRAMIQUE dans toutes les provinces. On enseigne le TISSAGE et l'impression sur tissu partout, et il existe très peu de différences d'une région à l'autre. Même en ce qui a trait aux techniques moins répandues, comme le soufflage du verre, on peut reconnaître un style international. Dans l'ensemble du Canada, le travail des artisans du verre et de la céramique est le plus reconnu à l'échelle internationale, mais ce travail n'est pas l'apanage d'une province en particulier, quoique le Québec et l'Ontario, plus peuplés, regroupent le plus grand nombre d'artisans tandis que la Colombie-Britannique vient non loin au troisième rang.

Associations

Puisqu'il est possible d'apprendre assez rapidement les rudiments de plusieurs techniques, beaucoup d'amateurs essaient de vendre leur production. Cette surabondance d'objets sur le marché nuit aux artisans professionnels et entraîne une diminution de la qualité. Les associations d'artisans tentent depuis longtemps de maintenir certaines normes de qualité dans la conception et la production artisanales. En 1902, en partie à cause d'un intérêt général pour l'artisanat suscité par le mouvement Art nouveau, la Women's Art Association ouvre une boutique à Montréal. Le groupe obtient sa charte en 1906 et devient la Corporation canadienne de l'artisanat (rebaptisée ensuite la Guilde canadienne des métiers d'art). Sa mission est de promouvoir, de renouveler et de répandre la pratique de l'artisanat. Elle aide aussi les artisans à mettre leurs oeuvres en marché, organise des expositions, offre des cours et renseigne le public sur le travail artisanal de qualité. À la demande de sir Wilfred GRENFELL, la Guilde ouvre des centres d'artisanat au Labrador. À Terre-Neuve, le Outport Nursing Committee, fondé en 1920, organise un service par lequel les femmes de la région contribuent au paiement des soins et des services médicaux en tricotant et en tissant des objets qui sont ensuite mis en vente. Ces articles porteront ensuite la marque de commerce NONIA, un acronyme représentant le nouveau nom du groupe (Newfoundland Outport Nurses' Industrial Association).

Dès le début, la Guilde s'intéresse à l'artisanat autochtone. En 1930, elle tient à Montréal une exposition importante d'art inuit. En 1933, elle crée un comité d'autochtones dont la mission est d'encourager un renouveau dans l'ART AUTOCHTONE. En 1940, on lui demande d'y inclure aussi l'ART INUIT. En 1948-1949, la Guilde nomme James HOUSTON représentant de l'Arctique. C'est en grande partie grâce à son travail que l'art inuit prend un nouvel essor.

Chaque province ou territoire possède son association d'artisans. Les associations provinciales comptent environ 9000 artisans professionnels regroupant une variété de disciplines : bois, céramique, impression sur tissu, sculpture souple, bijoux de métal, cuir, peaux, gravure. Le Conseil canadien des métiers d'art est le seul organisme national. Si ces organismes visent encore les mêmes objectifs que la Corporation canadienne de l'artisanat de 1906, ce n'est pas qu'ils n'ont pas su tirer de leçon de l'histoire, mais bien parce que les problèmes de cette époque existent toujours aujourd'hui.

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