Le Canada et la lutte anti-sous-marine pendant la Première Guerre mondiale | l'Encyclopédie Canadienne

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Le Canada et la lutte anti-sous-marine pendant la Première Guerre mondiale

Lorsque la Première Guerre mondiale a éclaté en août 1914, la Marine royale canadienne (MRC) n’était pas préparée à mener une guerre en mer. Fondée en 1910 seulement, elle se composait alors de deux croiseurs désuets, le NCSM Niobe et le NCSM Rainbow, et d’environ 350 marins réguliers, auxquels s’ajoutent 250 réservistes. Pendant la guerre, on lui a confié un nombre croissant de tâches qu’elle n’était pas en mesure d’accomplir, notamment de protéger les eaux côtières canadiennes contre les U-boot allemands. La MRC s’est démenée pour trouver des navires et des marins, mais elle était mal équipée pour combattre les sous-marins ennemis, qui ont coulé plusieurs navires dans les eaux canadiennes en 1918.

Affiche des obligations de la Victoire 1918

Contexte

En 1910, la Loi sur le service naval est adoptée; cette loi établit la marine canadienne et permet l’achat des NCSM Niobe et Rainbow. L’année suivante, les conservateurs de Robert Borden remportent les élections générales et réduisent le budget de la MRC. Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, la MRC se démène pour obtenir des navires, empruntant des navires à d’autres ministères et en affrétant d’autres à des entreprises commerciales. En outre, plusieurs Canadiens fortunés donnent, prêtent ou vendent (à des prix nominaux) leurs yachts privés à la Marine.

Même avec ces navires, la marine ne peut accomplir que des tâches limitées. Elle examine les navires marchands qui entrent dans le port d’Halifax, balaie les approches du port à la recherche de mines et effectue des patrouilles anti-sous-marines occasionnelles le long de la côte de la Nouvelle-Écosse.

HMCS Niobe

À l’automne 1914, le premier ministre Robert Borden demande à l’Amirauté britannique quelle aide navale le Canada pouvait apporter à la Grande-Bretagne. La réponse du First Sea Lord Winston Churchill n’est pas encourageante : « L’information de l’Amirauté ne pense pas que l’on puisse faire quoi que ce soit d’efficace maintenant, car la construction de navires prend trop de temps et elle conseille de concentrer l’aide canadienne sur l’armée. »

En novembre 1914, Borden demande à l’Amirauté de nouveaux destroyers et sous-marins, qui seraient construits au Canada. Il demande également d’emprunter des navires de la Royal Navy (RN) jusqu’à ce qu’ils soient construits. Or, la Grande-Bretagne n’a pas de navires à prêter.

Campagne sous-marine sans restriction, 1915

Le 1er février 1915, l’Allemagne lance une campagne sous-marine sans restriction contre tous les navires marchands, y compris les neutres, qui se trouvent dans les eaux britanniques. (Voir Opérations des sous-marins allemands.) Après que le paquebot Lusitania est torpillé au large de la côte irlandaise le 7 mai, l’Amirauté avertit que des sous-marins allemands pourraient bientôt commencer à opérer dans la région nord-ouest de l’océan Atlantique et suggère que le Canada établisse des patrouilles côtières anti-sous-marines.

Réponse de la MRC

La MRC n’a cependant pas assez de navires pour établir des patrouilles anti-sous-marines. Elle achète donc d’autres yachts privés et les arme de tubes lance-torpilles et de canons de 3 et 6 livres, ainsi que de quelques canons de 12 livres. Dès le 1er septembre 1915, la MRC dispose d’un nombre suffisant de petits navires pour patrouiller les côtes de la Nouvelle-Écosse, protéger le port de Halifax et mettre sur pied une patrouille dans le golfe du Saint-Laurent. Au même moment, l’Allemagne met fin à sa campagne sous-marine sans restriction, qui a été condamnée par les autres nations.

En novembre 1916, l’Amirauté conseille à la MRC d’augmenter sa patrouille anti-sous-marine sur la côte est à 36 navires équipés de canons de 12 livres. La marine commande 12 dragueurs de mines de type chalutier au Canada, tandis que l’Amirauté en commande 24 autres. Le chef du Service naval canadien nomme le capitaine par intérim Walter Hose pour commander les patrouilles de la côte est. En raison des chaînes de commandement conflictuelles entre la Grande-Bretagne et le Canada et de l’incertitude quant aux diverses responsabilités, Walter Hose fait face à une tâche difficile.

Épave du môle à Zeebrugge, 1918

Nouvelle menace des U-boot, 1917-18

Le 1er février 1917, l’Allemagne proclame à nouveau une campagne sous-marine sans restriction. En réponse, les Britanniques instituent finalement un système de convois pour la navigation transatlantique. Toutefois, le succès des convois pousse l’Amirauté à croire que les U-boot vont traverser l’Atlantique à la recherche de cibles plus faciles. En réponse à cette menace, la MRC commande 12 autres chalutiers d’acier anti-sous-marins dragueurs de mines au printemps 1917. Chaque navire de 40 mètres et de 350 tonnes a un équipage de 18 personnes et est équipé d’un canon de 12 livres.

Les Britanniques suggèrent également d’organiser des patrouilles aéronavales, mais le Canada ne possède pas d’avions de guerre. En guise de mesure provisoire, deux stations aéronavales américaines sont établies en Nouvelle-Écosse en août 1918, tandis que le recrutement pour un Service aéronaval royal canadien débute le même mois. Entre-temps, l’Amirauté commande 36 chalutiers et 100 bouées dérivantes supplémentaires aux chantiers navals canadiens, qui seront armés par la MRC.

Hydravion Curtiss HS-2L

En mai 1918, des U-boot apparaissent dans les eaux américaines avant de se déplacer vers le Canada. Le 2 août, le U-156 met le feu à la goélette Dornfontein dans la baie de Fundy. Sept autres goélettes sont coulées le long des côtes de la Nouvelle-Écosse au cours des deux jours suivants, suivies de trois bateaux de pêche. Tôt le matin du 5 août, le U-156 torpille le pétrolier britannique Luz Blanca à 55 kilomètres au sud de Halifax avant de s’échapper vers le sud.

Le U-156 revient en Nouvelle-Écosse et patrouille au large de l’île du Cap-Breton. Il capture le chalutier motorisé Triumph et le transforme en un mini-raider équipé d’un canon. Le Triumph coule six goélettes avant que son équipage ne le saborde après avoir épuisé son charbon. Le 25 août, le U-156 coule un autre chalutier, puis capture quatre goélettes. Alors que le U-boot commence à détruire les goélettes, une flottille de quatre navires de la MRC apparaît. Le U-156 s’immerge rapidement et s’enfuit. Les sous-marins allemands coulent six autres navires avant que le U-156 ne quitte les eaux canadiennes pour l’Allemagne en septembre 1918 ; en route, il est coulé par une mine au large de l’Écosse. Le U-155 continue d’opérer au large de la Nouvelle-Écosse, posant des champs de mines le long de la côte néo-écossaise avant de couler un chalutier.

Les Canadiens sont indignés, mais la marine ne peut pas faire grand-chose. La MRC ne dispose que de 11 navires sur la côte est, dont cinq peuvent s’aventurer au-delà des eaux côtières. La Marine se procure trois autres navires auprès d’autres ministères et sept chalutiers en bois auprès de sources américaines.

Évaluation

Dans l’ensemble, le système de convois est la mesure anti-sous-marine la plus efficace en haute mer, tandis que les navires anti-sous-marins se concentrent sur les eaux côtières. Plusieurs navires sont coulés par des U-boot allemands dans les eaux canadiennes, mais la grande majorité sont des bateaux de pêche, ce qui n’a pas affecté l’effort de guerre.

Pendant la guerre, la toute jeune MRC se voit confier des tâches qui dépassent largement ses capacités. Ses navires sont trop peu nombreux et trop petits, en plus d’être sous-armés et sous-équipés. La marine n’a pas non plus assez de marins pour doter ses navires d’un personnel complet, et beaucoup de ses membres ne sont pas assez formés ou expérimentés pour mener une guerre anti-sous-marine. Le Service aéronaval royal canadien, créé en septembre 1918, n’a jamais été en service actif.

UC-97 a Toronto, 1919