Communications | l'Encyclopédie Canadienne

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Communications

Les communications exercent une influence sur toutes les sociétés. Cela est particulièrement vrai au Canada, pays qui doit son développement aux systèmes de communications. Depuis la CONFÉDÉRATION, le Canada occupe un territoire plus vaste que la plupart des empires du passé.
McLuhan, Marshall
Marshall McLuhan exprime sa pensée au sujet de la révolution dans les communications au cours de l'émission-débat \u00ab Take 30 \u00bb diffusée au réseau anglais de Radio-Canada le 1er avril 1965 (avec la permission du réseau de télévision de la Société Radio-Canada).

Communications

 Les communications sont l'élément structurel clé de la société canadienne depuis l'époque où les canots sillonnant les cours d'eau étaient le seul lien entre les villages. Ce sont les communications par voies navigables ou terrestres qui ont rendu possible la fédération canadienne. De nos jours, ce sont les communications électroniques qui rendent possibles la bonne marche des affaires, le processus politique et l'accès à la culture et à l'information.

Les communications exercent une influence sur toutes les sociétés. Cela est particulièrement vrai au Canada, pays qui doit son développement aux systèmes de communications. Depuis la CONFÉDÉRATION, le Canada occupe un territoire plus vaste que la plupart des empires du passé. Gouverner des villages éloignés et les unifier au sein d'une entité politique, sociale et culturelle est lié avant tout à une logistique des moyens de communication. Les communications constituent toujours une tentative pour rapprocher les êtres humains, soit par le chemin de fer, l'avion, le téléphone ou le courrier postal.

La métaphore habituelle par laquelle on décrit le système des communications du Canada est celle du chemin de fer moderne : une infrastructure technique et économique conçue pour tisser des liens est-ouest à l'encontre de l'attraction nord-sud qui semble plus forte. Le système canadien des communications apparaît être le lien commun nécessaire pour inculquer un sentiment communautaire essentiel aux processus démocratiques dans un pays aussi grand et relativement peu peuplé. Pendant plus d'un siècle, on a fait un parallèle entre les communications et la souveraineté nationale du Canada. Peu après l'adoption de la Loi canadienne de la radiodiffusion en 1932, le premier ministre R.B. BENNETT a déclaré au défenseur passionné de la diffusion publique Graham SPRY : « Il se pourrait bien, Graham, que vous veniez de sauver le Canada pour le Commonwealth britannique » (Nash 1994). Les premiers principes du système canadien de diffusion ont été établis à une époque où le Canada faisait ses premiers pas sur la voie de l'indépendance véritable en tant que pays, et nos liens traditionnels avec le Royaume-Uni les ont fortement influencés. Depuis lors, le système contemporain est devenu de plus en plus privé et caractérisé par des liens plus forts avec les États-Unis qu'avec le Royaume-Uni et il a fait l'objet d'efforts répétés en vue d'affirmer la place particulière du Canada dans un monde de plus en plus branché.

Comme les journaux ont perdu une grande partie de leurs revenus publicitaires aux mains des diffuseurs et ensuite de la publicité en ligne, ils font de plus en plus l'objet de fusions ou disparaissent. Néanmoins, ils restent au centre du réseau des communications dans la plupart des communautés des deux langues officielles. Ce sont également les journaux, et non les réseaux de radio et de télévision, qui établissent le calendrier des discussions dans le domaine des affaires publiques, notamment le GLOBE AND MAIL et le NATIONAL POST pour le Canada anglais et LE DEVOIR pour le Canada français. Un sondage réalisé en 2010 par le journal Toronto Star auprès des Canadiens révèle que même la génération de l'Internet fait confiance aux journaux (41 p. 100) et à la télévision (31 p. 100) comme source d'information plutôt qu'aux réseaux sociaux (13 p. 100) et aux blogues (8 p. 100) (« Newspapers Still among the Most Trusted Media », Toronto Star, 15 mai 2010). Bien que la radio, la télévision et les autres nouveaux médias se soient emparés du pouvoir économique des journaux, elles n'en magnifient pas moins le rôle joué par ces derniers dans la formation de l'opinion publique, rôle joué par les journaux depuis l'époque de la colonisation.

Les médias de masse forment une toile élaborée et très sensible qui s'étend à tout le pays et dont les mailles sont les JOURNAUX, MAGAZINES, stations de radio et de télévision ainsi que les autres médias : blogues, films en ligne et sites web, tous apparus comme corollaires des nouveaux médias numériques. Les gens et les entreprises qui exploitent un grand nombre des établissements médiatiques traditionnels ont des liens étroits et leur rôle peut souvent être interverti. En faisant passer leur contenu par divers médias qu'elles possèdent, les entreprises de communication lui donnent un maximum de visibilité. Il est possible qu'une émission de la radio soit diffusée par une station de télévision appartenant à la même société mère, et le site web d'un journal peut contenir des extraits vidéo provenant du groupe de nouvelles télévisées du même propriétaire. Au 21e siècle, les communications au Canada sont devenues la cible principale d'une convergence technologique et commerciale intense (voirCONVERGENCE DES MÉDIAS).

Le marché canadien des médias

Dans les communications canadiennes, l'économie mêle la participation du secteur privé et du secteur public et on y voit aussi des partenariats entre le privé et le public. L'entreprise privée joue un rôle de plus en plus important dans le domaine de la radio et de la télédiffusion, surtout depuis les années 1960. Toutefois, certaines localités, surtout dans le Nord, ne pourraient bénéficier du développement des communications sans la participation active du gouvernement (voirCOMMUNICATIONS DANS LE NORD). Par exemple, en Saskatchewan, c'est la société de la Couronne Sasktel qui fournit les services de téléphonie. Comme beaucoup de régions rurales du Canada, la Saskatchewan n'a pas semblé un marché attrayant pour les premiers investissements privés dans les communications. Depuis la fin des années 1930, le gouvernement canadien a aussi sa propre agence cinématographique, l'OFFICE NATIONAL DU FILM, qui produit et distribue des films canadiens et offre des archives en ligne détaillées.

L'industrie canadienne du cinéma et de la télévision profite aussi d'un soutien et d'un apport publics par l'entremise d'incitatifs fiscaux et de normes sur le contenu. Elle bénéficie également de l'appui d'organismes de financement tels que le Fonds des médias du Canada, financé par le gouvernement du Canada et par les redevances que doivent payer les fournisseurs de services de satellite et de câble, secteur fort rentable. Les diffuseurs et distributeurs ont profité jusqu'à maintenant d'une protection contre la concurrence étrangère et d'un système réglementaire complexe qui limitent l'étendue de la concurrence dans ce secteur.

La source législative des règles régissant le secteur des communications se trouve dans la Loi sur la radiodiffusion, la Loi sur les télécommunications, la Loi sur la radiocommunication et les décisions et politiques de l'organisme fédéral de réglementation, le CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES (CRTC).

Il y a seulement quelques sociétés puissantes capables de fournir toute la panoplie d'infrastructures et de services qui ont dominé le développement des communications au Canada et on peut difficilement parler d'un système uniforme pour tout le pays. Les marchés du contenu des communications au Canada se divisent principalement en deux systèmes : un modèle de langue française qui a un auditoire fort et constant pour les produits de l'intérieur et un marché de langue anglaise soumis à la pression incessante due à la facilité d'accès au contenu américain, à sa popularité et à son faible coût. En fait, pendant ses deux premières décennies, la télévision canadienne a eu pour effet de renforcer l'identité québécoise en produisant une génération de rédacteurs, de vedettes de la télévision et de commentateurs, dont le plus célèbre a été René LEVESQUE à Radio-Canada dans les années 1950, qui est devenu premier ministre de sa province en 1976.

Quand il a évalué le développement des réseaux de communication utilisant les satellites en Europe et la perte des monopoles publics de la plupart des États au profit d'un système mixte public-privé dans les années 1980, le chercheur du Royaume-Uni Richard Collins a écrit que le milieu se « canadianisait ». C'est-à-dire que l'Atlantique ne pouvait plus garder l'Europe à l'abri des signaux de la radio et de la télévision américaines et que les monopoles de diffusion qui avaient existé jusque-là allaient devoir apprendre à coexister avec le secteur privé.

Histoire des communications au Canada

La construction du chemin de fer du CANADIEN PACIFIQUE au cours des années 1880, dans le cadre de l'entente politique qui a présidé à la Confédération, constitue un effort pour compenser les effets de désagrégation des vastes espaces canadiens et pour prévenir l'assimilation de l'Ouest du Canada par les États-Unis. Les mêmes motivations ont entraîné la constitution des réseaux de radio, de télévision, de TÉLÉPHONE et de TÉLÉCOMMUNICATIONS. Depuis la première transmission transatlantique de Marconi de l'Angleterre à Saint John en 1901, le Canada est devenu un des pays les plus câblés du monde. Notre pays a lancé le premier satellite de communications national et a joué un rôle international de premier plan dans le développement des médias. Ces apports à l'évolution de l'infrastructure des communications ont été accompagnés de progrès marquants de la réglementation gouvernementale sur la technologie. Ce qui a poussé le plus le développement des communications au pays a été l'omniprésence du centre de médias le plus puissant du monde, les États-Unis, à moins de deux heures de route au sud de la plupart des grands centres urbains du Canada. Assez tôt dans l'histoire du pays, on a compris que, pour avoir une voix unique dans les communications de masse, le Canada aurait besoin d'une intervention poussée dans le marché par l'entremise de la diffusion publique et de la réglementation, par opposition à la démarche de son voisin du sud, fondée seulement sur le marché.

Les débuts de la diffusion

L'origine de la démarche vers un système vraiment national de diffusion au Canada remonte à un bref rapport (13 pages, sans compter les annexes) datant de 1929. C'était le rapport Aird de la Commission royale de la radiodiffusion, à laquelle on a donné le nom de son président, John AIRD, un homme qui admettait ne pas posséder de poste de radio et qui était président de la Banque de commerce. Le document appuyait l'idée que la radiodiffusion est un service public et prédisait que « la radiodiffusion deviendra certainement une grande force dans l'éveil d'un esprit national et dans l'interprétation de l'identité nationale. » Il concluait que le Canada avait besoin d'un système public semblable à celui de la British Broadcasting Corporation créée au Royaume-Uni.

Au début, le rapport Aird semblait condamné à accumuler la poussière sur des tablettes à Ottawa, et c'est probablement le sort qu'il aurait eu sans les efforts de deux jeunes Canadiens, Graham SPRY et Alan Plaunt, qui ont fondé la Canadian Radio League (CRL), une organisation qui s'était donné pour mission de promouvoir les mérites de la radiodiffusion publique au Canada. Cette CRL percevait la popularité des émissions américaines de radio comme une menace à la survie du pays à long terme. Spry a écrit : « Voilà un instrument prestigieux de l'unité et de la culture nationales. Son potentiel est trop grand et son influence et sa portée trop vastes pour qu'on le laisse servir seulement à des fins aussi insignifiantes que de vendre du savon. »

Les démarches intensives menées par Spry et Plaunt au Canada ont gardé le rapport Aird à l'ordre du jour dans les officines du pouvoir. Lors d'un témoignage devant un comité parlementaire sur la radiodiffusion au début de 1932, Graham Spry a résumé lapidairement que, pour le Canada, « ... la question qui se pose est l'État ou les États. » Plus tard cette même année, on a adopté la Loi canadienne de la radiodiffusion qui instituait un diffuseur national, la Commission canadienne de radiodiffusion. Une loi ultérieure allait créer une société de la Couronne en 1936, la SOCIÉTÉ RADIO-CANADA.

En 1932, lorsque le premier ministre R.B. Bennett dépose un projet de loi visant la création d'un réseau de radiodiffusion public, il déclare en Chambre que le pays doit absolument contrôler la radiodiffusion de source canadienne, sans ingérence ni influence étrangères. En l'absence de ce contrôle, la radiodiffusion ne pourra jamais devenir une grande agence de communications pour les affaires nationales ou pour la propagation d'une pensée et des idéaux nationaux. Sans ce contrôle, elle ne saurait devenir l'instrument nécessaire à la diffusion d'une culture reflétant l'unité nationale.

Dès lors, la plupart des gouvernements fédéraux et plusieurs commissions royales réaffirment ces points de vue, mais sans grands résultats. Malgré les cotes d'écoute à la baisse, les bulletins de nouvelles et les programmes d'affaires publiques à la télévision attirent l'attention de tous les Canadiens sur les questions d'intérêt national mais, dans la plupart des autres domaines, nos médias ne sont qu'une pâle imitation des médias américains. En conséquence, les communications de masse ont été le terrain sur lequel certaines des plus importantes batailles pour la souveraineté du Canada se sont livrées.

La Loi sur la radiodiffusion est le pilier central de la législation sur les communications radio et télévision au Canada, y compris les systèmes de distribution (câble, satellite et IPTV). Depuis 1932, le Canada a modifié sa loi en 1936, 1958, 1968 et 1991. Plusieurs études clés du gouvernement ont aussi servi à définir la place des communications de masse au Canada. Entre autres le rapport de 1957 de la Commission royale d'enquête sur la radio et la télévision présidée par Robert FOWLER, qui recommandait d'enlever le pouvoir réglementaire au conseil des gouverneurs de la SRC; le rapport de 1965 d'un autre comité que présidait Fowler, qui recommandait la création d'une nouvelle autorité réglementaire canadienne puissante, qui deviendrait éventuellement le CRTC; le Livre blanc sur la radiodiffusion 1966, préparé par Judy LAMARSH, qui mettait l'accent sur l'unité nationale, un des aspects importants de la Loi sur la radiodiffusion de 1968; le Rapport du Groupe de travail sur la politique de la radiodiffusion, dont les coprésidents étaient Gerald CAPLAN et Florian Sauvageau. Le rapport Caplan-Sauvageau rendait compte des changements démographiques et technologiques au Canada moderne et de l'effet de la Charte des droits et libertés. Une de ses recommandations clés était l'adoption d'une nouvelle loi sur la radiodiffusion. Le document de 1986 montre clairement que, malgré des décennies de progrès technologique, les luttes fondamentales pour le maintien d'une voix canadienne dans le domaine des communications ont continué avec ténacité. Gerald Caplan et Florian Sauvageau ont fait remarquer : « Sir John Aird se sentirait en pays connu devant les problèmes et les dilemmes auxquels le groupe de travail a été confronté. »(Canada 1986).

Le système canadien actuel s'est adapté au changement et a reconnu officiellement la place des peuples des PREMIÈRES NATIONS et l'évolution du caractère ethnique de la population dans la Loi sur la radiodiffusion de 1991, qui précise qu'il doit « par sa programmation et par les chances que son fonctionnement offre en matière d'emploi, répondre aux besoins et aux intérêts, et refléter la condition et les aspirations, des hommes, des femmes et des enfants canadiens, notamment l'égalité sur le plan des droits, la dualité linguistique et le caractère multiculturel et multiracial de la société canadienne ainsi que la place particulière qu'y occupent les peuples autochtones. » Il n'est pas arrivé souvent que les forces de la culture nationale aient le dessus, comme ce fut le cas lors de la création de réseaux anglais et français de radio et de télévision par la SRC-CBC ou durant tout le temps où une loi en vigueur de 1975 à 1999 empêchait les magazines américains de créer des versions canadiennes de leurs publications. L'une des principales raisons qui l'expliquent est pécuniaire. Le Canada a un petit marché divisé entre deux groupes linguistiques : en diffusion comme dans l'édition de livres de poche et beaucoup d'autres produits de communication, les Canadiens ont trouvé plus économique et plus pratique d'importer ce qu'ils regardent ou lisent.

Une autre raison est la lutte entre les intérêts publics et privés. De façon générale, les intérêts privés favorisent une américanisation croissante de la culture au Canada, invoquant qu'il est plus rentable et moins risqué de revendre des films, des émissions de télévision ou des disques américains que de les produire au Canada.

L'École de Toronto

  Quand l'étude des communications est devenue une discipline universitaire, le Canada a joué un rôle déterminant. Ce qu'on désigne comme « l'École de Toronto » en théorie des communications est l'effet des travaux de deux des professeurs qui enseignaient à l'Université de Toronto au milieu du 20e siècle : Harold INNIS et Marshall MCLUHAN. Les écrits d'Innis ont beaucoup influencé McLuhan, particulièrement Empire and Communications (1950), qui explorait le rôle des médias dans l'établissement et le maintien des civilisations. L'étude des médias de masse dans le milieu intellectuel a commencé avec Harold Innis, mais c'est McLuhan qui est devenu la vedette intellectuelle. Innis est mort en 1952, une année après la publication de son autre œuvre fondatrice, The Bias of Communications, tandis que McLuhan a acquis une renommée internationale dans les années 1960 et 1970, après avoir appliqué sa sagacité de théoricien de la critique littéraire au monde en expansion des communications électroniques. Innis n'a jamais vu le développement à grande échelle de la télévision et McLuhan n'a pas vécu assez longtemps pour voir l'Internet faire l'objet d'une utilisation généralisée, pourtant leurs théories semblaient anticiper le développement de ces nouveaux modes puissants de communication.

En 1923, Innis a publié une version révisée de sa thèse de doctorat sur l'histoire du chemin de fer du Canadien Pacifique. L'étude portait principalement sur les complications financières de ce grand projet public canadien. Il devait encore écrire plus tard sur le rôle des piliers du commerce dans l'histoire du Canada : The Fur Trade in Canada (1930) et The Cod Fisheries (1940). Dans ces livres, Innis a insisté sur les effets de cultures qui s'entrechoquent. Ses recherches sur les piliers de l'économie ont aussi révélé un modèle de division nette, dans l'histoire économique canadienne, entre les centres économiques et la périphérie. Selon Innis, de nouvelles formes de communication éclosent souvent dans l'arrière-pays, où l'organisation est plus souple.

Les écrits d'Harold Innis sur les communications ont exploré le rôle des technologies dans le façonnement de la culture et l'évolution de la civilisation. Une de ses théories qui a gardé sa pertinence fait une distinction entre les effets distincts des médias qui traversent le temps et de ceux qui traversent l'espace. Les médias qui traversent le temps peuvent être des technologies aussi durables que les tablettes de glaise ou de pierre, les manuscrits copiés à la main sur parchemin et les communications verbales. Ce sont des technologies dont le but est de transmettre de l'information pendant des générations, mais l'auditoire qu'elles atteignent est plutôt limité vu leur fragilité et les problèmes de transport. Le développement de médias qui traversent l'espace a commencé véritablement avec la presse à imprimer de Galilée pour arriver aux médias modernes tels que les journaux, la radio, la télévision et les journaux à grand tirage. Ces médias transmettent de l'information à de grands auditoires sur de longues distances, mais ont un faible taux de persistance. Selon la théorie d'Innis, les médias qui traversent le temps favorisent la stabilité, la communauté et la tradition tandis que ceux qui traversent l'espace facilitent le changement, le matérialisme et le pouvoir politique.

Marshall McLuhan, dont les travaux s'appuient sur des études de médias effectuées par l'économiste et pionnier du domaine Harold Innis, croyait non seulement que les médias façonnent notre vision des choses, mais influencent nos actes. Il nous a enseigné à évaluer le degré d'évolution technologique des médias pour comprendre leur influence et découvrir ainsi qu'un processus se répète dans les médias, phénomène auquel McLuhan a donné le nom de « reconnaissance du modèle ». Son interprétation des médias porte sur des technologies aussi variées que l'ampoule électrique et l'automobile.

L'œuvre la plus connue de McLuhan est Pour comprendre les médias (1964). Ce texte clé sur l'étude des médias nous présente, parmi ses théories, celle de McLuhan selon laquelle il y aurait une division entre les technologies des communications en fonction de leurs caractéristiques qu'il définit comme chaudes ou froides. Un médium chaud tel que la radio fonctionne en « haute définition » parce qu'il transmet une quantité d'information importante d'une manière qui demande peu de participation, mais a un effet puissant. McLuhan voyait aussi l'écrit comme un médium chaud à cause de la grande quantité d'information transmise au lecteur.

Quant aux médias froids, ils fonctionnent en « faible définition » et le récepteur doit jouer un rôle plus actif pour déterminer le sens, comme c'est le cas pour un dessin animé, une émission de télévision ou un séminaire (par opposition à une conférence « chaude »). Le récepteur doit combler les vides ou compléter l'information.

Les théories non conformistes de McLuhan ont obtenu une grande reconnaissance publique dans les années 1960 et 1970 et ont fait de lui un personnage de la culture populaire. Des expressions comme « village global » (La Galaxie Gutenberg) et « le médium est le message » (Pour comprendre les médias, 1964) sont devenues monnaie courante, à défaut d'être nettement comprises du public. Le professeur de l'Université de Toronto est devenu un objet d'étude de la culture populaire qu'il analysait pour élaborer ses théories. Il a été invité à l'émission d'information populaire américaine 60 Minutes et la question « Marshall McLuhan, que faites-vous? » est devenue un refrain de l'émission de variétés Rowan and Martin's Laugh-In. Les analystes de la culture populaire comme Tom Wolfe ont écrit des essais sur ses travaux, et McLuhan a joué son propre rôle dans une scène mémorable du film de Woody Allen, Annie Hall, en 1977.

Comme c'est le cas pour de nombreuses vedettes, le public (et le monde universitaire) a fini par s'en désintéresser et McLuhan a passé les dernières années de sa carrière en tant que professeur de l'Université de Toronto dont on entend presque plus parler. Le travail théorique comme le pratiquaient McLuhan et Innis finit par être perçu comme étant technologiquement déterministe, mettant trop l'accent sur la technologie elle-même et pas assez sur le rôle de la politique dans le progrès technologique et celui des intermédiaires individuels dans la modulation de l'effet des médias.

Les idées de McLuhan ont retrouvé de l'envergure vers la fin des années 1990 dans le contexte de croissance des nouveaux médias numériques. La revue populaire de technologie Wired Magazine l'a surnommé « saint Marshall » et l'a cité dans son premier numéro. Il est facile de faire le lien. Des dizaines d'années avant l'avènement d'Internet, McLuhan avait prévu le pouvoir des premières technologies informatiques. Il a dit, en 1966 : « L'ordinateur peut remplacer toute l'ère mécanique. Tout ce qui se faisait dans des conditions mécaniques peut être informatisé assez facilement, y compris notre système d'éducation. » [Trad.].

La Société Radio-Canada

La Société Radio-Canada (SRC) a été créée par une loi du parlement en 1936. Elle n'a peut-être plus le prestige dont elle a joui durant la plus grande partie du siècle précédent, cependant le diffuseur national reste une force centrale des communications au Canada.

Elle offre un éventail de modes de communication dans les deux langues officielles, notamment des émissions de télévision, de la radio sans publicité sur le marché intérieur et international et une présence en ligne qui comprend des archives numériques. Elle doit faire un rapport annuel au parlement par le truchement du ministre du Patrimoine. Son mandat énonce que la programmation de la SRC doit
(i) être principalement et typiquement canadienne,
(ii) refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions,
(iii) contribuer activement à l'expression culturelle et à l'échange des diverses formes qu'elle peut prendre,
(iv) être offerte en français et en anglais, de manière à refléter la situation et les besoins particuliers des deux collectivités de langue officielle, y compris ceux des minorités de l'une ou l'autre langue,
(v) chercher à être de qualité équivalente en français et en anglais,
(vi) contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationales,
(vii) être offerte partout au Canada de la manière la plus adéquate et efficace, au fur et à mesure de la disponibilité des moyens,
(viii) refléter le caractère multiculturel et multiracial du Canada.







En tant que diffuseur public, la SRC a une nature hybride : son financement vient en partie du Parlement et en partie du revenu de la publicité (quoique sa radio ne diffuse pas de publicité). En 2009, elle a reçu du gouvernement canadien 1 070 137 $ et ses recettes publicitaires se sont chiffrées à 356 248 $. Le contenu canadien offert par la SRC est beaucoup plus élevé que celui des diffuseurs privés, qui tendent à se fier aux émissions américaines pour leurs cotes d'écoute.

L'avènement du câble et du satellite

La croissance de l'industrie du câble à la fin des années 1960 a rendu la réception d'émissions américaines plus facile pour les Canadiens tout en représentant un défi pour le contrôle de sa propre structure de communications par le Canada. L'expansion des systèmes de distribution n'a fait qu'amplifier les difficultés en apportant des signaux dont l'origine est au-delà des frontières du pays. La croissance exponentielle des chaînes dans un système numérique remet en question l'idée que la télévision a le potentiel de contribuer à la cohésion culturelle d'un pays. Comme les trains qui ont vu arriver la concurrence des camions et des avions qui n'ont pas besoin d'une emprise au sol d'un pays en particulier, le réseau des communications doit accepter la nouvelle réalité des satellites et des liaisons Internet, avec leur capacité mondiale de réception et de transmission, et s'y adapter.

La livraison des signaux américains et internationaux à la majorité de l'auditoire place les diffuseurs canadiens dans une position minoritaire dans leur propre pays et complique la tâche de trouver un auditoire national stable pour les émissions dramatiques et de divertissement (voirTÉLÉVISION, DRAMATIQUES DE LANGUE ANGLAISE À LA et DRAMATIQUES À LA TÉLÉVISION QUÉBÉCOISE, LES). À un moment où les communications de masse devraient être florissantes, les productions canadiennes sont reléguées plus que jamais au second plan.

Au Canada, dans le marché des communications, le secteur de la distribution est devenu le plus rentable. En 2009, plus de 90 p. 100 des Canadiens ont accès à la télévision par câble ou par satellite. De 1990 à 2010, la transmission traditionnelle par ondes a connu une réduction radicale de ses usagers. Le contexte télévisuel qui en résulte laisse peu de place aux stations locales moins rentables et laisse plutôt le marché aux réseaux (SRC, CTV et CanWest Global) dans le but de rester concurrentiel face aux diffuseurs étrangers qui arrivent par câble et par satellite.

Beaucoup d'anciens distributeurs par câble et satellite sont devenus des diffuseurs aussi. Shaw (Canwest), Bell (CTV), Rogers (CityTV) et Quebecor/Vidéotron (TVA) sont tous des sociétés de câble ou satellite qui ont acheté de grands diffuseurs et détiennent maintenant les droits d'une grande partie du contenu qu'ils distribuent. (voirTÉLÉVISION).

L'ère du numérique

Le contenu des communications n'est plus limité à être relayé par une technologie en particulier. Le format numérique donne lieu à une croissance exponentielle du choix et la « langue commune » du code numérique permet l'accès au contenu par diverses plateformes. Les grandes entreprises canadiennes de communication sont le fer de lance de la convergence des médias au Canada. En 2009, environ 34 p. 100 des clients du service résidentiel étaient abonnés à des forfaits qui se composaient de la téléphonie locale et d'un ou plusieurs des services suivants : accès Internet, vidéo, téléphonie mobile.

L'Internet est le médium qui recèle le plus de possibilités quant au nombre d'utilisateurs, mais aussi celui qui pose le plus grand défi en matière de réglementation. En 2009, environ 95 p. 100 des ménages du Canada pouvaient avoir accès au service à large bande par l'entremise des lignes terrestres. Comme ce fut souvent le cas dans la plupart des domaines des communications au pays, le développement de l'Internet a été marqué par un rôle prépondérant du gouvernement fédéral et des possibilités commerciales substantielles pour le secteur privé.

Il y a une vingtaine d'années que le Canada a pris le virage des communications numériques universelles. C'est en mars 1993 que le gouvernement a établi le Réseau canadien pour l'avancement de la recherche, de l'industrie et de l'enseignement (CANARIE). Produit de partenariats entre les gouvernements, l'industrie et les communautés de la recherche et de l'éducation, ce lien à haute vitesse par fibre optique donne accès à tous les Canadiens aux avantages de la technologie numérique en profitant des capacités d'Internet.

Industrie Canada a mis sur pied en 1994 le Comité consultatif sur l'autoroute de l'information qui doit conseiller le gouvernement sur une stratégie intégrée visant l'infrastructure nationale des communications numériques. Son mandat est de suggérer des manières d'utiliser l'Internet pour que tous les Canadiens en tirent des avantages économiques, culturels et sociaux.

Les lois canadiennes sur le droit d'auteur sont mises à rude épreuve par la prolifération de l'accès à Internet. La facilité d'accès en ligne à de la musique, à des films, à des émissions de télévision et à l'écrit oblige les producteurs de contenu et les détenteurs de droits à se démener pour protéger leur investissement. L'industrie de la musique a subi des pertes importantes quand les Canadiens ont cessé d'acheter chez les disquaires et se sont mis à télécharger leur musique sur Internet, l'acquérant de façon légitime sur des sites comme iTunes ou par piratage. La fermeture de détaillants comme Sam the record Man et A and B Sound, des piliers du commerce de la musique, est une conséquence majeure du phénomène.

Le gouvernement a tenté d'endiguer la vague du piratage numérique au moyen du projet de loi C-32, qui modifiait la Loi sur le droit d'auteur. Mais, face à un tollé de protestations, il a dû le déposer à deux reprises.

Les utilisateurs canadiens de l'Internet se sont également ralliés autour de la question de « neutralité du Net ». Les défenseurs de la neutralité souhaitaient que l'Internet reste une plateforme de distribution commune neutre autant pour les utilisateurs que pour les producteurs de contenu. Les fournisseurs d'accès Internet (FAI) prétendaient devoir parfois gérer le flux des utilisateurs d'Internet parce que le nombre accru d'utilisateurs défie la capacité du système. On s'inquiétait aussi de voir les FAI devenir les censeurs en ligne après un cas survenu en 2005 où Telus a bloqué l'accès au site web du Syndicat des travailleurs(euses) en télécommunications durant un conflit de travail. Le blocage a été appliqué au réseau de base de sorte que tous les FAI qui utilisaient Telus se sont vu refuser l'accès, y compris les plus petites entreprises qui utilisaient l'infrastructure du réseau de base de Telus.

Une réglementation du CRTC, entrée en vigueur en 2009, a permis aux FAI de gérer le flux des utilisateurs d'Internet, mais à condition d'en aviser ceux-ci à l'avance.

La télévision numérique

La transmission de signaux analogiques de télévision devrait cesser au Canada le 31 août 2011. Le secteur de la transmission hertzienne (par ondes) a fait l'objet des débats les plus animés lors de la transition au numérique. Avant le changement, les fournisseurs de signaux par câble et satellite géraient leur transition au numérique pour leurs clients. Cependant, les Canadiens qui reçoivent des signaux hertziens, soit environ 10 p. 100 de la population, ont dû acheter un téléviseur muni d'un récepteur numérique ou un convertisseur pour les plus vieux téléviseurs. Les diffuseurs ont eu du mal à se préparer à temps pour l'échéance fixée à 2011 dans les marchés où c'était obligatoire. Du point de vue économique, le problème vient de l'importance de l'investissement en immobilisations nécessaire pour maintenir une couverture comparable en service hertzien dans une industrie que beaucoup considèrent comme un gouffre financier. Sur le plan des politiques publiques, la transition du service hertzien implique un débat normatif central sur la télévision par ondes hertziennes au moyen d'une ressource publique, la bande de fréquences, à laquelle tous les citoyens devraient avoir droit gratuitement. Le passage au numérique de la télévision canadienne a eu lieu deux années après celui qui a eu lieu aux États-Unis, et a fait l'objet d'une coordination suivie entre les deux pays.

Au fil d'une histoire relativement courte, les communications canadiennes ont évolué du canot à la fibre optique. En 1969, l'historien Frank Peers a commenté la relation entre les communications et l'identité nationale ainsi : « Un système de radiodiffusion propre au Canada survit. Il est porteur de valeurs différentes de celles qui dominent le système américain ou britannique. Non seulement il est le reflet de l'expérience canadienne, mais il aide à la définir. » Les communications canadiennes ont évolué bien au-delà de la radiodiffusion, mais à plusieurs titres, elles sont encore le reflet de l'expérience canadienne : ce système de plus en plus international, quoique d'une trame bilingue, soutient un secteur privé rentable qui ne survivrait pas, dans bien des cas, sans une aide publique considérable. (Voir aussiRADIODIFFUSION, RADIO ET TÉLÉVISION.)

Lecture supplémentaire

Liens externes

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