Denis Côté | l'Encyclopédie Canadienne

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Denis Côté

Denis Côté, scénariste, producteur, réalisateur, critique (né le 16 novembre 1973 à Grand Falls, au Nouveau-Brunswick). Rebelle prolifique n’acceptant aucun compromis, Denis Côté préfère interpeller son public que lui offrir des histoires limpides de structure classique. Il a été récompensé par de multiples prix et honneurs au Canada et à l’étranger pour ses longs métrages et ses documentaires. Ancien critique de film, Côté écrit, met en scène et produit des films originaux qui sont souvent très minimalistes, étonnamment poétiques, emprunts d’un humour caustique et s’inspirant d’une thématique énigmatique. Il doit à son style pince-sans-rire et à ses personnages marginaux sa réputation internationale d’un des meilleurs auteurs cinématographiques canadiens actuels.


Denis C\u00f4té, 2012.
Image: Eye Steel Film/flickr cc.

Jeunesse et éducation

Côté est montréalais depuis l’âge de deux ans.Né dans une région agricole du Nouveau-Brunswick, il a grandi dans la banlieue, à Longueuil, émerveillé par les films d’horreur qu’il regarde dans le sous-sol de ses parents. Il élargit ensuite sa culture cinématographique en entrant au Collège Ahuntsic de Montréal.Il fréquente régulièrement la Cinémathèque québécoise où il « rencontre tous les cinéphiles de Montréal ».Impatient de se lancer dans le tournage de ses propres films, il collabore avec son professeur, qui deviendra son directeur de la photographie pour plusieurs de ses courts métrages expérimentaux. En 1994, Côté fonde sa propre société de production, Nihilproductions.

Denis Côté
Denis Côté attending the Dejeuner Du Film Francais in Cannes on May 19, 2009, as part of the 62nd Cannes Film Festival. Image: Canadian Press/Calo-MF/ABACAPRESS.COM.
Canadian Press/Calo-MF/ABACAPRESS.COM.

Critique de film acerbe

On raconte qu’il fut critique de film avant de devenir cinéaste mais Côté tournait depuis longtemps des films lorsqu'il commença à les analyser.« Je suis devenu critique de manière fortuite », raconte-t-il.C’est après qu’on lui a demandé de parler du cinéma sur la chaîne de radio montréalaise CIBL qu’il lui est offert un poste de critique de film, qu’il occupera de 1999 à 2005, chez l'hebdomadaire aujourd’hui disparu ici.« Je n’avais aucune idée de ce qu’était le journalisme », explique-t-il. Mais il avait la liberté de « faire comme [il] le sentait ».C’est vraiment instinctif ».Alors qu’il est toujours dans l’équipe d’ici, Côté devient vice-président de l’Association québécoise des critiques de cinéma, AQCC.

Critique acerbe n’ayant que peu d’intérêt pour les titres commerciaux grand-public (« Je pourrais écrire une pleine page sur un film d’Abbas Kiarostami et un paragraphe sur Spiderman »),Côté s’attire les foudres de l’éditeur d’ici, Quebecor.Les distributeurs retirent leurs publicités après avoir pris connaissance des critiques impitoyables de Côté.« J'avais de nombreux lecteurs mais mon patron ne parvenait plus, à cause de moi, à vendre de l'espace publicitaire », se souvient Côté.Après une longue bataille au cours de laquelle ses collègues le soutiennent, il décide de réaliser un rêve plus authentique et se lance alors dans la réalisation de films.

Films de fiction

Côté tourne ses films avec des budgets de broche à foin.« Vous allez rigoler, confie-t-il lors d'une interview réalisée en 2011 par le Globe and Mail , mais depuis 1997, j’ai dépensé en tout et pour tout 2,2 millions de dollars pour 5 longs-métrages et 15 courts-métrages.Curling m’a coûté 1 million de dollars. »Ses films mettent généralement en scène des personnages marginaux qui vivent dans des régions mornes et isolées.

Dans son premier long-métrage, Les États nordiques (2005), qui lui vaut le Léopard d'or au Festival international du film de Locarno, un homme tue par compassion sa mère puis va se cacher dans un coin complètement perdu.Nos vies privée (2007)suit un couple bulgare dont les protagonistes se sont rencontrés en ligne et vont vivre leur relation dans un village québécois.Elle veut le chaos(2008), un projet doté d’un budget relativement plus conséquent, qui met en scène la star française Laurent Lucas et qui vaudra à Côté le prix du Meilleur réalisateur et un prix spécial du jury au Festival du film de Locarno, est basé sur une histoire de vengeance qui se déroule dans l’arrière-pays.

Avec son quatrième film, Curling (2010), considéré comme son œuvre la plus accessible, Côté remporte son deuxième prix du Meilleur réalisateur à Locarno.Le film raconte l’histoire d'un bricoleur, dans une région rurale, qui vit avec sa jeune fille tout en la contrôlant et en la maintenant déconnectée du monde extérieur.Dans Curling et Vic + Flo ont vu un ours (Vic + Flo Saw A Bear,2013), un film qui suit un couple de lesbiennes tout juste sorties de prison et qui remporte un Ours d'Argent au Festival du film de Berlin, une violence latente plane sur les personnages et la campagne où se déroule l'histoire.

Documentaires

Les documentaires de Côté sont aussi non-conformistes que ces films de fiction.Que ta joie demeure (2014) est une méditation, en partie dramatisée, sur l’impact des machines dans les usines.Deux autres documentaires ont été particulièrement remarqués pour leur style et leur contenu non conventionnels et déstabilisants.

Carcasses (2009) dépeint un personnage excentrique qui passe ses journées à démonter et à remonter des vieilles voitures qu’il empile dans le parc à ferrailles où il a élu domicile.Programmé à Cannes et au Festival international du film de Toronto, la plus grande partie du film est composée de longs plans exposant sans aucun lyrisme ce personnage qui s’adonne à ses rituels quotidiens apparemment absurdes, autant de scènes découpées en une juxtaposition de situations.Dans Bestiaire (2012), projeté lors du festival de cinéma de Sundance et du Festival international du film de Toronto, les animaux d’un zoo viennent percer l’écran grâce à des prises de vue extrêmement rapprochées.Le film est clairement conçu pour inciter le spectateur à poser des questions embarrassantes axées sur l’objet et le sens.

Carcasses, Curling et Vic + Flo ont vu un ours sont apparus sur la liste des dix meilleurs longs métrages canadiens l'année de leur sortie à l'occasion du Festival international du film de Toronto.« J'ai un faible pour les festivals du cinéma, explique Côté, je ne peux pas le cacher.Si un film peut être projeté aux 30 festivals du film qui ponctuent généralement une même année, je trouve ça très bien. »

Défenseur de causes

À travers son œuvre et ses déclarations publiques, Côté défend l’idéal moribond d’un cinéma personnel, d’auteur. Il montre que les films peuvent être contemplatifs et guidés par un thème tout en manquant apparemment d’une trame narrative discernable et n’étant donc pas guidés par une histoire.« Je ne suis pas obsédé par l’idée de divertir.Je ne suis pas non plus obsédé par la narration et l'évocation d'une histoire, explique-t-il, je m'intéresse plutôt aux formes. »Ironiquement, Côté a également déclaré qu’il était obsédé par les techniques de narration.

Alors qu'il est critique de film, Côté croise le fer avec les distributeurs qui réagissent aux critiques qu’il fait de leur film.En février 2014, il se confronte à l’exposant Vincenzo Guzzo, du Québec, qui se plaint publiquement que les films d’art et d’essai au Québec ne rapportaient rien au box-office.« Je ne comprends pas pourquoi les journalistes accordent la moindre attention à cet homme, a déclaré Côté.Ce n’est qu’un pitre ».

Rétrospectives

Côté a été acclamé sur la scène internationale pour ses films qui ont fait l'objet de plusieurs rétrospectives dans le monde entier.À Montréal, la Cinémathèque québécoise a proposé une rétrospective en novembre 2008.À Ottawa, l'Institut canadien du filma suivi en mai 2011 avec Entre Nous: The Films of Denis Côté; l’Institut a également publié une monographie portant le même titre et proposant plusieurs essais sur les films du cinéaste.À Vancouver, la Cinémathèque a programmé en mars 2014 une rétrospective intitulée Drifting States: The Films of Denis Côté.Des rétrospectives similaires se sont tenues à Vienne et à Saint-Pétersbourg, en Israël, à Prague, Toronto, New York, Barcelone et à La Rochelle, en France.


Prix

  • Meilleur montage(Seconde valse), Festival du film de l'Atlantique (2001)
  • Prix de bronze (La sphatte), Brno B16, République Tchèque (2004)
  • Léopard d'or – Vidéo (Les états nordiques), Festival international du film de Locarno (2005)
  • Grand Prix Indie Vision (Les états nordiques), Jeonju, Corée (2006)
  • Meilleur metteur en scène (Elle veut le chaos), Festival international du film de Locarno (2008)
  • Mention spéciale du jury des jeunes (Elle veut le chaos), Festival international du film de Locarno (2008)
  • Meilleur film canadien (Elle veut le chaos),Festival international du cinéma francophone en Acadie (2008)
  • Meilleur metteur en scène (Curling), Festival international du film de Locarno (2010)
  • Meilleur long-métrage expérimental (Bestiaire), Festival du film de Greenpoint (2012)
  • Prix Alfred Bauer (Vic and Flow Saw a Bear), Festival du film de Berlin (2013)
  • Meilleur scénario (Vic and Flo Saw A Bear), FIFF de Namur (2013)
  • Mention spéciale du jury (Que ta joie demeure), FICUNAM de Mexico (2014)

Lecture supplémentaire

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