Guy Delisle

Guy Delisle, animateur et bédéiste (né le 19 janvier 1966 à Québec, au Québec). Ses séjours à l’étranger, de même que sa vie familiale, lui inspirent des albums largement autobiographiques, teintés d’humour et de réflexions sociales critiques. Il publie aussi une série d’albums de fiction, intitulée Moroni, à partir de 2001. En 2012, il reçoit le Fauve d’or, prix du meilleur album décerné au Festival international de la bande dessinée d’Angoulême, pour Chroniques de Jérusalem. Ses ouvrages ont été traduits dans de nombreuses langues, dont l’anglais, l’allemand, le polonais, l’italien, l’espagnol, le portugais, le finlandais et le tchèque.

Éducation et carrière

Delisle étudie le cinéma d’animation au Sheridan College, à Oakville, en Ontario. Il travaille par la suite dans de nombreux studios d’animation à travers l’Europe (notamment en Allemagne et à Valence, en Espagne) et en Asie comme animateur, superviseur d’animation et enseignant.

Romans graphiques autour du monde

Les albums Shenzhen, Pyongyang, Chroniques de Jérusalem et Chroniques birmanes réunissent des anecdotes et des réflexions accumulées par Delisle au cours de ses séjours à l’étranger, seul ou avec sa famille – son épouse Nadège travaillant pour Médecins sans frontières. À travers ces ouvrages, l’artiste analyse les mœurs, les conflits sociopolitiques et le quotidien propres à diverses régions et cultures, tout en exposant avec humour les situations d’incompréhension et de malaise.

Lors de son voyage d’affaires à Shenzhen, en Chine, Delisle vit trois mois de solitude extrême, en raison du fossé culturel, des contraintes langagières et du contexte professionnel qui le coupent d’à peu près tout contact humain. L’esthétique de l’album Shenzhen (1998) est d’ailleurs caractérisée par l’utilisation d’une palette essentiellement monochrome, grise ou sépia, et par un cloisonnement étanche des figures simplifiées et des cases. De grands espaces sont laissés vides, faisant certainement référence à la monotonie du quotidien solitaire de l’auteur. Certains dialogues sont écrits en cantonais, ce qui permet au lecteur occidental de ressentir l’incompréhension vécue par l’auteur.

Le roman graphique Pyongyang relate l’expérience de Delisle dans la capitale de la Corée du Nord, où il demeure pendant deux mois pour travailler à une série télévisée. Selon le studio d’animation pour lequel il travaille alors, une clause de confidentialité incluse à son contrat l’interdit de publier tout document portant sur son voyage. Comme Delisle et le directeur de la maison d’édition L’Association qui le représente ne trouvent aucune trace de cette clause, l’ouvrage est néanmoins publié en 2003. Delisle vendra en 2012 les droits de l’album à la compagnie de production New Regency, propriété de 20th Century Fox pour la réalisation d’un film. Le projet, dont Steve Carrell aurait été la tête d’affiche, a cependant été interrompu en phase de pré-production en décembre 2014; Fox se serait retiré à cause des menaces de représailles entourant le film controversé The Interview.

En 2011, Delisle, son épouse et ses deux jeunes enfants déménagent à Beit Hanina, à Jérusalem, où ils résident pendant un an pour le travail de sa conjointe. Chroniques de Jérusalem est un album consacré à cette année de découvertes, de rencontres, d’adaptations et de chocs socioculturels. Grâce à l’exploration et à de nombreux échanges avec des journalistes, soldats, membres de Médecins sans frontières, représentants de l’ONU, prêtres, commerçants, etc., l’auteur tente de comprendre les enjeux complexes des conflits sociopolitiques, religieux et géographiques qui déchirent la région. En parallèle, il expose les défis et situations cocasses qui découlent de l’adaptation de sa jeune famille, plongée dans un contexte culturel totalement différent. De façon chronologique, Delisle raconte donc certaines anecdotes du quotidien, comme sa difficulté initiale à comprendre le système de transport et les heures d’ouverture des épiceries selon les différentes confessions, le tout entrecoupé de conversations complexes sur les conflits et les dangers rencontrés par les membres de la familles et leurs connaissances.

Albums de famille

Le Guide du Mauvais Père, tomes 1 (2013), 2 (2014) et 3 (2015) sont des albums qui réunissent de courts échanges comiques, touchants et parfois quelque peu répréhensibles tirés de la vie familiale de l’auteur. Celui-ci y expose ses maladresses en tant que père, sa surprise face à des questions loufoques, naïves ou rusées posées par ses enfants Louis et Alice ainsi que la tendresse qui unit les membres de la petite famille. L’accent y est mis sur les interactions et les dialogues plus que sur les détails physiques ou l’environnement des personnages; on y retrouve deux dessins monochromes et simplifiés par page, sans cadre.

Les albums Louis au ski (2006) et Louis à la plage (2008) présentent des épisodes de la vie du petit Louis, le fils de Guy Delisle. Chaque page est découpée en plusieurs cases, décomposant chaque instant de ces épisodes afin de plonger les lecteurs dans les réflexions et les actions du petit garçon, presque toujours représenté au centre des cases. D’autres cases présentent plutôt le point de vue de l’enfant. De petits soucis, défis, réussites ou déceptions prennent ainsi de plus grandes proportions aux yeux du jeune protagoniste. Malgré la palette de couleurs plutôt sobre, cette série n’est pas monochrome, contrairement au reste de la production autobiographique de Delisle. La vie de Louis y est présentée avec humour, empathie et tendresse.

Œuvres de fiction

L’inspecteur Moroni est le personnage principal de la seule série de fiction de Delisle, Moroni, qui comprend maintenant 3 tomes. La série plonge le lecteur dans les réflexions de cet inspecteur quelque peu névrosé et angoissé qui souhaite s’illustrer auprès de son patron et qui se confie à son chien, doté de parole. Si les tomes I (2001) et II (2002) sont en noir et blanc, le troisième (2004) est en couleurs.