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Michel Chartrand

Michel Chartrand, syndicaliste, imprimeur et politicien québécois (né le 20 décembre 1916 à Outremont, Québec; décédé le 12 avril 2010 à Montréal, Québec).

Michel Chartrand, syndicaliste, imprimeur et politicien québécois (né le 20 décembre 1916 à Outremont, Québec; décédé le 12 avril 2010 à Montréal, Québec). Treizième enfant d'une famille qui compte sept garçons et sept filles, Michel Chartrand fait son primaire chez les Clercs de Saint-Viateur à l'Académie Querbes et ses premières années d'études classiques au Collège Jean-de-Brébeuf, puis comme pensionnaire au Collège de Sainte-Thérèse. À dix-sept ans, il devient moine cistercien à la Trappe d'Oka, qu'il quitte deux ans plus tard pour des raisons de santé.

Formation et début de carrière

Tout en suivant des cours de typographie chez les Frères des écoles chrétiennes, Michel Chartrand travaille bénévolement pour le mouvement Jeunesse indépendante catholique (JIC) et devient secrétaire des Jeunesse patriotes. Il s'oppose cependant à l'appui que ce groupe nationaliste veut donner à Maurice Duplessis aux élections suivantes et joint les rangs de l'Action libérale nationale (ALN). Ce parti vient d'être fondé par Paul Gouin, un dissident de l'Union Nationale, et Michel Chartrand en devient l'organisateur politique en 1938.

Toujours actif au sein de la JIC et des Jeunesse patriotes, il s'inscrit à la Faculté des sciences sociales, économiques et politiques de l'Université de Montréal, suit les cours d'histoire de l'abbé Lionel Groulx et fréquente l'École des Sciences sociales du père Georges-Henri Lévesque. Après un mois d'entraînement militaire en 1941, Chartrand est renvoyé du Canadian Officer Training Corps pour avoir refusé de remplir les formulaires imprimés uniquement en anglais.

Déterminé à travailler pour les causes sociales, il fonde une coopérative de vêtements à bas prix et milite au sein du mouvement coopératif « Maître chez nous ». C'est à ce moment qu'il se lie d’amitié avec Alfred Rouleau (futur président du mouvement Desjardins). Ensemble, ils voyagent au Lac-Saint-Jean pour tenter d'y implanter des coopératives de fabriques de vêtements. Le 17 février 1942, Michel Chartrand épouse Simonne Monet, alors propagandiste pour la Jeunesse étudiante catholique (JEC), avec qui il aura sept enfants.

Alors qu'il travaille comme typographe à l'imprimerie Stella, Michel Chartrand milite activement avec la Ligue de défense du Canada qui s'oppose à la conscription. Il devient membre fondateur du Bloc populaire canadien et organisateur politique de Jean Drapeau, le candidat des conscrits. Il est lui-même candidat de ce parti aux élections du 11 juin 1945.

La grève de l’Amiante

Le début de la grève des travailleurs de l’amiante (voir Grève de l’amiante) à Thetford Mines et à Asbestos, en 1949, marque un tournant dans la vie de Michel Chartrand. À l'invitation de représentants de la Confédération des travailleurs catholiques du Canada (CTCC), il se rend à Asbestos pour parler aux grévistes et s'implique dès lors dans le mouvement syndical (voir Centrales syndicales québécoises). Il devient organisateur pour la Fédération nationale du vêtement et agent d'affaires pour le Conseil central de Shawinigan, pour le syndicat de Rubin à Sherbrooke puis pour le Syndicat du commerce.

Intervenant dans la grève des travailleurs de l'Alcan de Shawinigan, dans la mobilisation des travailleurs et travailleuses de la Wabasso, et dans la grève des employé(e)s de Dupuis Frères, Michel Chartrand subit plusieurs arrestations et procès au cours de l'année 1952 (voir Histoire des travailleurs du Québec).

Membre fondateur du Syndicat des permanents de la CTCC, il est élu membre du premier exécutif de ce syndicat qui l'engage comme propagandiste en 1953. Conseiller technique au Conseil central de Shawinigan en 1955, il participe aux nombreuses grèves qui affectent la région, subit sept incarcérations et anime une série de tribunes téléphoniques dans la région de la Mauricie.

Il devient ensuite responsable de l'éducation syndicale pour les Métallos de la FTQ à Rouyn-Noranda. Sollicité par Jean-Paul Geoffroy, Gérard Pelletier et Pierre Elliott Trudeau, il adhère au parti CCF (Co-operative Commonwealth Federation), formation socialiste dont la présidente de l'aile québécoise est Madame Thérèse Casgrain. À la suite du Congrès national du parti en 1956, le CCF devient au Québec le Parti social-démocrate (PSD) et Michel Chartrand en devient le chef provincial.

Agent d'affaires au Syndicat des travailleuses et travailleurs du magasin Dupuis Frères à Montréal, il profite de ses vacances pour aller soutenir les grévistes (voir Grève de Murdochville) de la Gaspé Copper Mines (Noranda Inc.) membres des Métallurgistes unis d’Amérique (FTQ). Il prend parole aux nombreuses assemblées syndicales et fait une série d'émissions radiophoniques à Matane et New-Carlisle, mais cette implication auprès d'un syndicat rival lui vaut d'être congédié par la CTCC à son retour de Murdochville.

Candidat pour le PSD à Arvida à l'élection fédérale de 1958, il obtient une victoire morale de 7042 voix. Après avoir été une nouvelle fois défait dans une élection partielle au Lac Saint-Jean, Michel Chartrand fonde une imprimerie, Les Presses sociales. Il y publie des recueils de poésie et des essais de même que la revue Our generation Against Nuclear War et des conventions collectives de travail.

C'est en 1963 que Michel Chartrand fonde le Parti socialiste du Québec (PSQ), se dissociant du CCF, devenu le Nouveau parti démocratique (NPD), dont il ne partage pas les idées sur la question du Québec et des armes nucléaires. Il imprime aussi la Revue socialiste et le journal Le Peuple, organe du Parti Socialiste du Québec.

Le combattant syndical

Michel Chartrand revient au syndicalisme en 1968, après dix ans d’absence. Engagé par Florent Audette, le directeur général du syndicat de la construction de Montréal (CSN), il est responsable de l'éducation syndicale et de la santé et de la sécurité au travail.

Au cours d'une assemblée générale réunissant les délégués du conseil central de Montréal, Michel Chartrand est élu président du Conseil central des syndicats nationaux de Montréal (CCSNM).

L'organisme représente 60 000 membres, affiliés à la Confédération des Syndicats nationaux. Il est aussi élu président de la Caisse populaire des syndicats nationaux.

Fervent adepte du coopératisme depuis sa jeunesse, Chartrand soutient par l'intermédiaire du CCSNM, le journal Québec-Presse, fondé par des militants de groupes syndicaux et coopératifs et participe à l'ouverture du premier supermarché coopératif d'alimentation Cooprix à Montréal.

Comme président du CCSNM, Michel Chartrand a pour objectif de mobiliser les militants, autant du mouvement syndical que des groupes populaires. Il met donc sur pied un service conseil pour l'application de lois à portée sociale concernant l'assurance maladie, l'assistance sociale et les accidents du travail. Le Conseil central de Montréal crée aussi un service d'aide et d'information sur les droits des locataires ce qui initie le concept du bail type. Michel Chartrand collabore personnellement à la fondation du FRAP (Front d'action politique) qui se présente comme parti municipal, en opposition au maire Jean Drapeau. Il participe aussi à la fondation du Front du Québec Français (FQF) et prononce des discours partout au Québec contre le projet de Loi 63 sur la promotion de la langue française.

Loi sur les mesures de guerre

Le 16 octobre 1970, Michel Chartrand est arrêté aux premières heures de la promulgation de la Loi sur les mesures de guerre, qui fait suite aux enlèvements du conseiller commercial de la Grande-Bretagne, James Richard Cross, et du ministre québécois du travail, Pierre Laporte, par le Front de libération du Québec (FLQ). Accusé de sédition, Michel Chartrand est emprisonné avec Charles Gagnon, Jacques Larue-Langlois, Pierre Vallières et Me Robert Lemieux. Les co-détenus se défendent eux-mêmes au cours d'un procès très médiatisé appelé Le Procès des cinq. Libéré le 17 février 1971 après quatre mois de détention, Michel Chartrand fait une tournée à l'invitation des universités canadiennes, de Fredericton à Vancouver, pour expliquer la situation politique au Québec.

En 1972, il participe aux différentes manifestations des employés des services publics du Québec. La grève générale, organisée par le Front commun intersyndical (voir Grèves du front commun), mène à l'emprisonnement des chefs syndicaux Marcel Pépin de la CSN, Louis Laberge de la FTQ et Yvon Charbonneau de la Corporation des enseignants du Québec (CEQ). Michel Chartrand fait partie des organisateurs de la grande manifestation du 1er mai qui réunit 30 000 personnes pour demander la libération des trois présidents.

Lors du 15e congrès annuel du CCSNM, Michel Chartrand fait adopter l'idée d'une participation à l'organisation du Congrès international de solidarité ouvrière qui donne naissance à l'actuel Centre international de solidarité ouvrière (CISO). Des centaines de délégués du Québec, des pays arabes, de l'Amérique, des Caraïbes et d'Afrique participent à ce congrès qu'il préside en juin 1975 à Montréal. Il participe à un nouveau débrayage du Front commun qui est suivi quelques mois plus tard de la première grève générale au Canada, contre le gel des salaires imposé par le premier ministre Pierre E. Trudeau.

Au congrès de 1978, Michel Chartrand ne se représente pas au poste de président du CCSNM. Il poursuit cependant sa lutte contre le projet de loi 17 sur la santé et la sécurité au travail, s'opposant à Louis Laberge, président de la FTQ et membre du conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST).

En février 1983, Michel Chartrand met sur pied la Fondation pour l'aide aux travailleuses et travailleurs accidentés (FATA). Il défend personnellement les dossiers des accidentés, comme procureur syndical, devant la CSST et la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles (CALP).

Derniers combats et héritage social

Invité à donner des conférences par des groupes populaires et syndicaux, autant que par des étudiants et des associations professionnelles, Michel Chartrand milite pour le revenu de citoyenneté garanti. Se présentant comme syndicaliste, militant anti-pauvreté et conférencier, il publie avec Michel Bernard, le Manifeste pour un revenu de citoyenneté (1999).

Son fils Alain Chartrand, cinéaste, lui consacre un film documentaire Un Homme de parole en 1991. Il retrace par la suite le cheminement de ses illustres parents dans une série télévisée en deux volets : Chartrand et Simonne diffusé en 1999, suivi de Simonne et Chartrand, diffusé en 2003.

Orateur redoutable et d'une grande indépendance d'esprit, Michel Chartrand est reconnu comme un pourfendeur du capitalisme et un fervent ambassadeur de la justice sociale. Héros du contre-pouvoir, ses prises de positions passionnées et très médiatisées ont trouvé un large écho chez les travailleurs, mais aussi chez les cols blancs, les intellectuels et les artistes. Homme intègre, généreux et combatif, il a clamé haut et fort ses principes de liberté et d'égalité, en refusant tout compromis dans la poursuite de ses idéaux. Il est ainsi devenu un symbole flamboyant de courage et de probité pour plusieurs générations de Québécois.

Publications

Michel Bernard et Michel Chartrand, Manifeste pour un revenu de citoyenneté (Montréal : L’Autjournal, 1999).

Prix et distinctions

Doctorat honorifique à titre posthume pour sa contribution au syndicalisme et aux relations de travail au Québec, Université du Québec en Outaouais (2011)

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Lecture supplémentaire

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