Arthur Philip Fraser (source primaire) | l'Encyclopédie Canadienne

Project Mémoire

Arthur Philip Fraser (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

« Alors nous avons débarqué et quand j’ai sauté hors du bateau et regardé alentour, et j’ai vu tant de soldats tués ou blessés, j’étais vraiment surpris de voir ça. »

Pour le témoignage complet de M. Fraser, veuillez consulter en bas.


Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.

Médaille d'Arthur Fraser remise par le gouvernement français pour son service à Dieppe, avec la barre d'attache de Dieppe.
Médaille d'Arthur Fraser remise par le gouvernement français pour son service à Dieppe, avec la barre d'attache de Dieppe.
Avec la permission de Arthur Philip Fraser
Médaille remise à Arthur Fraser par le gouvernement français pour son service à Dieppe, vers 1942.
Médaille remise à Arthur Fraser par le gouvernement français pour son service à Dieppe, vers 1942.
Avec la permission du Projet Mémoire/Arthur Philip Fraser

Transcription

19 août 1942, on débarque à 7 heures du matin à Dieppe en France. Nous étions le dernier bataillon à débarquer à Dieppe. C’était un raid. Un raid c’est quand vous attaquez et puis quand le raid est terminé, vous êtes censé rentrer. Mais nous ne sommes jamais rentrés parce que le raid s’était terminé à 11h30 du matin et ceux qui avaient survécu avaient été faits prisonniers de guerre et le sont restés pendant toute la durée de la guerre.

On étais tous sur un petit bateau, tout notre bataillon y était, il y avait à peu près 500 personnes sur un petit yacht. Quand on a débarqué à Dieppe, on a débarqué en ligne droite. Et quand j’ai débarqué, je passe devant un officier et cet officier m’a dit que, j’ai demandé à l’état major sur le bateau, ils ne vous envoient pas car ce raid est perdu. Mais à ce moment là, on ne savait pas pourquoi, ils n’avaient sans doute pas eu le message. J’ai lu des livres qui racontent que les allemands bloquaient cette zone. Alors bien-sûr, quelque soit ce qui s’était dit sur la plage, ça n’est jamais parvenu jusqu’à l’état major sur le bateau.

Alors nous avons débarqué et quand j’ai sauté hors du bateau et regardé alentour, et j’ai vu tant de soldats tués ou blessés, j’étais vraiment surpris de voir ça. J’étais avec un canon de type mortier (3-inch Mortar), c’est un petit canon, vous le tenez dans la main et vous mettez l’obus dans la bouche du canon et ça descend et ça explose et ça monte dans la direction qui fait face à votre canon. Et j’avais trois bombes et je devais les lancer toutes les trois et c’était tout. Dans un raid comme ça, ça va tellement vite devant vous que vous voyez une seule chose et le gars à côté de vous voit les autres choses. C’était tout mélangé. Il y avait un char Churchill qui est arrivé, ce char il est arrivé après nous. Ils auraient dû débarquer, d’après moi, ils auraient dû débarqué avant nous et ils sont arrivés après nous.

C’était des gros chars Churchill qui pesaient dans les 70 tonnes. Et certains d’entre eux ont coulé dans la Manche, c’était ce qu’on avait traversé, la Manche. Et l’un de ces bateaux avait débarqué sur la plage. Je suis allé sur ce bateau et j’ai vu tellement de blessés dessus. Et l’artillerie allemande a commencé à nous pilonner mais ça n’a pas duré longtemps. Et les commandos étaient censés détruire l’artillerie allemande mais ils ont réussi à détruire quelques armes pas toute les armes.

11 heures du matin, le raid était terminé, le destroyer s’est avancé, ils ont baissé le pavillon à la moitié du mât et tout le monde sur le bateau nous a salué nous sur la plage et puis ils ont remonté le drapeau et tous les canons sur ce destroyer ont fait feu sur Dieppe et ils sont partis. Plein de nos gars ont tenté de, de rejoindre ce destroyer mais ils ne pouvaient pas, ils n’avaient aucune chance d’être recueillis. Alors ils sont revenus sur la terre ferme et bien-sûr ils n’avaient pas de vêtements. Ils portaient seulement leurs sous-vêtements. Et ils ont été faits prisonniers de guerre tout comme nous.

Et le jour suivant on nous a mis dans des wagons. C’était marqué sur le côté des wagons 40 hommes ou 8 chevaux. Il y avait de la paille sur le sol et un seau et une bouteille d’eau. On a pris ce wagon de marchandise, c’était, on a atterri à 40 kilomètres de Paris et après trois jours, on nous remet sur le train. Ca nous a pris trois jours pour arriver au camp. On était au camp Stalag VIII B à Lamsdorf. C’était un petit village. C’était un grand camp, je crois qu’il y avait environ dix mille prisonniers de guerre là-bas, parce c’était un camp de travail, quelques uns travaillaient à l’extérieur, et d’autres à l’intérieur du camp. Et ce camp a été ouvert en 1940 après la chute de la France.

Mais on est allé dans un bâtiment, cinq par cinq, et ils nous ont attaché les mains, en diagonale et devant , avec un morceau de ficelle. 24 heures sur 24. Les mains liées ça a duré 55 jours et puis la Croix Rouge internationale est venue nous rendre visite et comme on avait les mains couvertes d’ampoules l’officier a dit aux allemands, qu’ils devaient faire autrement et enlever ces liens. Oh oui, pour aller aux toilettes, on devait y aller par dix et ils envoyaient un secouriste avec nous pour aller dans les toilettes pour remonter nos pantalons. Après 55 jours, il est sorti avec ces chaînes et on s’est retrouvés enchaînés pendant 14 mois. Et les chaînes c’était mieux parce qu’on portait des vêtements d’été et quand l’hiver est arrivé, il faisait très froid mais avec les chaînes, on pouvait mettre nos mains dans nos poches, ce qu’on a fait.

Je ne pourrai jamais tourner la page. Et même ce matin, à 3 heures, je me suis réveillé, le souvenir de la guerre m’est revenu. Souvent ces choses là, ouais, elles me reviennent. Je ne pourrai jamais tourné la page. Oh non, je ne devrais pas dire ça. Quand je travaillais, mon travail tenait la première place et puis je ne pensais jamais à la guerre, seulement le 11 novembre. J’avais l’habitude d’aller au défilé mais autrement, même les copains au travail, n’ont jamais su que j’étais un ancien combattant. Mais après deux ans, quand j’ai pris ma retraite, mon esprit s’est dégagé du travail et les souvenirs de guerre sont revenus. Et ça le fait toujours, ça le fait encore, après tant d’années. Je suis retourné à Dieppe une dizaine de fois. Et la raison pour laquelle je suis retourné à Dieppe, c’était pour, j’ai perdu trois amis sur la plage de Dieppe et c’est la raison pour laquelle j’y suis retourné.

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