Foin d’odeur | l'Encyclopédie Canadienne

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Foin d’odeur

Le foin d’odeur est une herbe aromatique pourvue de longues feuilles satinées. Aussi connu sous les noms d’avoine odorante, d’herbe sainte, de hiérochloë odorante ou de houlque odorante, le foin d’odeur est bien connu des peuples autochtones au Canada et aux États-Unis, qui l’utilisent notamment pour faire des paniers, de l’encens, des remèdes et de la purification par la fumée. Deux espèces très rapprochées se trouvent au Canada : le foin d’odeur commun, Hierochloë hirta sous-espèce arctica, et le foin d’odeur alpin, Hierochloë alpina. En tant que plante sacrée grandement utilisée et vénérée, le foin d’odeur est encore cultivé aujourd’hui et continue de jouer un rôle important dans les cultures autochtones.

Foin d’odeur tressé

Foin d’odeur tressé (Hierochloë hirta sous-espèce arctica) du peuple Bella Coola, en Colombie-Britannique. (photo par Nancy J. Turner)

Description

Le foin d’odeur est une plante herbacée vivace faisant partie de la famille des poacées. Bien qu’il soit généralement classé sous le genre Hierochloë, il peut parfois se trouver dans le genre Anthoxanthum. L’avoine odorante a longtemps été considérée comme appartenant à une seule espèce, Hierochloë odorata, mais les taxonomistes ont récemment établi qu’il en existe jusqu’à quatre espèces différentes, dont deux qui poussent au Canada : le foin d’odeur commun (Hierochloë hirta sous-espèce arctica) et le foin d’odeur alpin (Hierochloë alpina).

Ses longues feuilles plates d’un vert vif peuvent atteindre 50 cm ou plus et ont, à leur base, une teinte rouge distinctive. Ses fleurs, petites et verdâtres, poussent en grappes au bout de longues tiges verticales et effilées. Ses graines, petites et souvent infertiles, germent rarement pour produire de nouveaux plants. Le mode de reproduction le plus courant du foin d’odeur passe plutôt par ses tiges rampantes souterraines. Ces tiges, appelées rhizomes, poussent horizontalement sous la terre, créant ainsi de denses touffes d’herbe pouvant être séparées manuellement pour former de nouveaux plants.

Répartition

Le foin d’odeur (Hierochloë) pousse dans divers écosystèmes et sa répartition est circumpolaire. Les plants du genre Hierochloë proviennent du nord de l’Eurasie, du Groenland, de l’Islande, du Canada et des États-Unis (à l’exception des régions du centre sud et du sud-est). Au Canada, le foin d’odeur commun (Hierochloë hirta sous-espèce arctica) pousse densément près des rivières, des lacs et des prairies humides, et ce, du niveau de la mer aux zones subalpines. Le foin d’odeur alpin (Hierochloë alpina) pousse quant à lui près du niveau de la mer dans l’Arctique et dans les prés et sur les parois rocheuses des régions alpines et subalpines ailleurs au Canada, notamment dans la Chaîne côtière et les Rocheuses.

Récolte

Les méthodes de récolte varient en fonction des traditions culturelles. Tandis que certains coupent les brins d’herbe à leur base, d’autres arrachent la plante par grappes pour conserver la base rosée intacte. En général, le foin d’odeur est récolté à l’été, soit la saison de sa croissance, et les plantes choisies pour la récolte sont celles qui sont en phase végétative et non celles qui sont dotées de fleurs ou de fruits. Plusieurs experts autochtones affirment que la récolte continuelle de foin d’odeur contribue à entretenir la densité de la plante. En effet, les champs négligés tendent à disparaître graduellement et à être remplacés par d’autres espèces de graminées, d’herbes et d’arbustes. Certaines pratiques traditionnelles amènent également les gens à brûler les champs de foin d’odeur après quelques années pour renouveler les plants et stimuler leur croissance.

Utilisations

Le foin d’odeur est reconnu pour son odeur sucrée. Son parfum rappelant la vanille se manifeste surtout lorsque les feuilles sont séchées et est produit par un composé aromatique connu sous le nom de coumarine. La plante peut être éparpillée sur les sols pour rafraîchir l’air d’une pièce, utilisée pour remplir les oreillers et les matelas, tissée pour former des paniers et des chapeaux et brûlée, généralement après avoir été tressée en une longue natte, pour un rituel de purification ou pour en faire de l’encens. On a récemment commencé à utiliser l’avoine odorante en aromathérapie et comme fragrance pour les chandelles et les sels de bain. Dans certaines régions d’Europe, la plante est aussi utilisée pour aromatiser de façon particulière les boissons distillées telles que la vodka. Il existe également de nombreuses utilités médicinales pour le foin d’odeur, allant du traitement des rhumes à celui des maladies sexuellement transmissibles.

Pour les peuples autochtones de l’Amérique du Nord, le foin d’odeur est considéré comme une plante sacrée. Pour plusieurs d’entre eux, il représente une espèce clé de la culture et est le reflet de leur identité collective, de leurs valeurs et de leurs croyances. Parmi les histoires racontées sur le foin d’odeur, on retrouve Femme qui tombe du ciel, un récit originel (dont il existe plusieurs versions) provenant des peuples autochtones des Grands Lacs (voir aussi Peuples autochtones des forêts de l’Est au Canada). Dans cette histoire, tous les oiseaux et les animaux sont représentés comme des alliés des humains, personnifiés par la Femme du ciel et qui cherchent à régénérer la terre grâce à des plantes vertes. Dans au moins une version du récit, la première plante utilisée se nomme wiingaashk, soit le mot en anishinaabemowin signifiant « foin d’odeur ».

Panier de foin d’odeur

Panier de foin d’odeur et de frêne noir confectionné par Cecilia Mitchell, Mohawk Akwesasne, en 2001. (photo par Nancy J. Turner)

Les feuilles d’avoine odorante, au moment de la récolte, sont d’un vert vif. Une fois séchées, selon le moment de la récolte et le temps écoulé avant le séchage, elles tournent cependant au vert pâle ou à une couleur rappelant la paille. Pour le tressage en paniers, les feuilles séchées sont trempées puis enroulées ou tressées, seules ou à travers les autres matériaux formant la base. Les confectionneurs de paniers expérimentés assortissent souvent les feuilles séchées de manières différentes pour créer des motifs subtils ou y ajoutent quelques feuilles teintes pour ajouter des touches de couleur. Par exemple, à l’est du Canada et au nord-est des États-Unis, les tresseurs haudenosaunee ajoutent des éclisses de frêne noir aux feuilles de foin d’odeur pour créer des paniers décoratifs aux styles variés. Les feuilles d’avoine odorante sont également utilisées pour confectionner des chapeaux, des poupées et d’autres articles. Les Wolastoqiyik (Malécites) et les Mi’kmaq de l’est du Canada sont eux aussi connus pour leurs paniers de foin d’odeur.

Dans la région des grandes plaines, les Siksika (Pieds-Noirs) et leurs parents trouvent de nombreuses utilités au foin d’odeur, qu’ils appellent sipátsimo. Ils l’utilisent comme encens de cérémonie pour les prières quotidiennes, le brûlent lors d’événements importants pour la tribu, comme la danse du soleil, et purifient les danseurs tribaux avec la fumée. Les Siksika utilisent aussi les feuilles de foin d’odeur pour soulager les maux de garrot, pour remplir les selles et pour donner de l’endurance aux chevaux. Ils inhalent également la fumée du foin d’odeur ou en font une infusion pour soulager les rhumes, la toux et les maux de gorge. L’eau dans laquelle les tiges ont trempé est ensuite utilisée comme nettoyant pour les yeux. 

Champ de foin d'odeur

Esther Hans, Nuxalk, dans un champ de foin d'odeur. (photo par Nancy J. Turner)

Le foin d’odeur est aussi utilisé pour créer des shampoings et des toniques capillaires, et ce, non seulement par les Siksika, mais également par les Nlaka’pamux (Thompson) de Colombie-Britannique, qui appellent l’avoine odorante xásxast (qui se traduit littéralement par bon-bien). Les Nlaka’pamux auraient découvert la plante grâce à leur troc avec les Siksika. D’autres peuples salish du continent, ainsi que les Ktunaxa de la Colombie-Britannique, utilisent aussi le foin d’odeur lors de cérémonies et pour créer des remèdes. Sur la côte ouest du Canada, les Nuxalk (Bella Coola) utilisent l’avoine odorante provenant de l’estuaire de la rivière Bella Coola pour des cérémonies depuis plusieurs générations; selon certains, ils auraient eux aussi découvert les usages de l’avoine odorante grâce aux Siksika, qui auraient visité les Nuxalk à un certain moment au début du 20e siècle.

Les Autochtones aux États-Unis, y compris les Kiowas, les Cheyennes, les Gros Ventres, les Lakotas, les Menominees, les Haudenosaunee américains et les Quinaults, utilisent le foin d’odeur pour les cérémonies religieuses et les purifications de manière similaire à leurs voisins canadiens.