George Manuel

George Manuel, O. C., LL. D. (né le 17 ou le 21 février 1921 dans le territoire traditionnel Secwépemc, Colombie-Britannique ; décédé le 15 novembre 1989 à Kamloops, Colombie-Britannique) était un militant autochtone de la nation Secwépemc qui a été actif en politique autochtone au niveau local, national et international (voir Peuples autochtones au Canada). Il est connu pour avoir été le président de la Fraternité des Indiens du Canada (FIC, aujourd’hui l’Assemblée des Premières Nations) de 1970 à 1976, ainsi que le fondateur du Conseil Mondial des Peuples Indigènes en 1975.

 

George Manuel, O. C., LL. D. (né le 17 ou le 21 février 1921 dans le territoire traditionnel Secwépemc, Colombie-Britannique ; décédé le 15 novembre 1989 à Kamloops, Colombie-Britannique) était un militant autochtone de la nation Secwépemc qui a été actif en politique autochtone au niveau local, national et international (voir Peuples autochtones au Canada). Il est connu pour avoir été le président de la Fraternité des Indiens du Canada (FIC, aujourd’hui l’Assemblée des Premières Nations) de 1970 à 1976, ainsi que le fondateur du Conseil Mondial des Peuples Indigènes en 1975.  

Jeunesse

Né en 1921 sur le territoire traditionnel Secwépemc, George Manuel a passé sa jeunesse auprès de ses grands-parents. Son grand-père Dick Andrews, guérisseur traditionnel influent dans sa communauté, lui a transmis l’importance des traditions Secwépemc. George Manuel naît à une époque où l’économie traditionnelle fondée sur la chasse, la cueillette, la pêche et le partage des aliments est encore bien implantée et s’intègre à l’acquisition de nouvelles techniques d’élevage et d’agriculture. Il témoigne combien tout au long de sa jeunesse, l’effet des règlements fédéraux et des politiques provinciales, combiné aux restrictions mises en place par les agents gouvernement canadien chargés des réserves, finissent par démanteler cette économie traditionnelle.

À l’âge de neuf ans, George Manuel entre au pensionnat indien de Kamloops où il apprend l’anglais. Il y est confronté directement au colonialisme canadien représenté par les religieux qui dirigent l’institution (voir Pensionnat indiens). Leur objectif est de transformer les jeunes autochtones en Canadiens. George Manuel ne reste pas longtemps à l’école, car il attrape la tuberculose et doit séjourner au Coqualeetza Indian Hospital de façon continue entre l’âge de 12 et de 15 ans.

Débuts en politique locale (1950-1959)

Une fois guéri de la tuberculose et sorti de l’hôpital, George Manuel occupe différents emplois. Il travaille dans une scierie hors de la réserve Shuswap, un emploi qui lui procure une certaine sécurité financière et qui lui permet de fonder une famille. Peu politisé à l’époque, il se concentre sur sa jeune famille. C’est une série de petites frustrations avec les représentants du gouvernement canadien qui l’encourage à s’impliquer en politique locale.

D’abord, la question de l’irrigation des terres de la réserve l’encourage à se présenter aux rencontres du conseil de bande de sa communauté. C’est lors de ces rencontres qu’il en vient à comprendre les rapports de pouvoir entre l’agent gouvernemental et le conseil de bande, le premier détenant véritablement le pouvoir dans la réserve.

Suite à cette première rencontre avec le pouvoir local, George Manuel entre en conflit avec l’agent fédéral en place dans sa communauté lorsque le gouvernement fédéral, par l’entremise de son agent, tente de mettre fin aux subventions médicales octroyées aux membres de la communauté dans la foulée de l’adoption en 1951 d’une réforme de la Loi sur les Indiens. Ayant reçu dans sa jeunesse de l’aide médicale, George Manuel prend à cœur cette mesure.

Après avoir discuté des conséquences de cette nouvelle mesure avec le médecin de la communauté, George Manuel décide d’écrire à Andrew Paull, un militant squamish bien connu dans la province. Inspiré par l’appui moral de ce dernier, il refuse de payer ses frais médicaux, geste qui encourage les membres de sa communauté à venir lui montrer leurs propres factures médicales, qu’il les encourage à ne pas payer. Ce premier combat politique, qui touche des sujets locaux, marque le début du militantisme de George Manuel.

Saut en politique provinciale et nationale (1959-1970)

Dans les années qui suivent cette première expérience en politique, George Manuel s’implique au niveau régional, dans des organisations politiques et des groupes et associations sociales ou sportives. Plusieurs facteurs le poussent à l’avant-scène.

Il intègre entre autres le Aboriginal Native Rights Committee of the Interior Tribes of British Columbia, une organisation formée en 1959 qui rassemble les communautés autochtones de l’intérieur de la province. La création de cette organisation survient l’année même du décès d’Andrew Paull, alors que la Fraternité des Indiens d’Amérique du Nord, qu’il dirigeait, perd en influence. Des militants autochtones annoncent alors une conférence pour renouveler cette dernière en adoptant une nouvelle constitution et une vision pan-nationale. George Manuel se joint à cette organisation, qui trouve un deuxième souffle et qui prend position sur les questions liées aux droits territoriaux et au droit de vote au niveau fédéral.

En effet, le gouvernement progressiste-conservateur de John Diefenbaker révise la politique canadienne relative aux Autochtones, leur octroyant en 1961 le droit de vote aux élections fédérales, ce qui encourage les organisations autochtones régionales du pays à prendre la parole publiquement.

Entre 1965 et 1968, George Manuel est un des premiers Autochtones embauchés pour mettre en œuvre une nouvelle politique de développement communautaire mise sur pied par le Ministère des Affaires indiennes. Après une formation de trois mois en développement communautaire à l’Université Laval, à Québec, il est envoyé dans la vallée du Cowichan, en Colombie-Britannique, en tant qu’agent de développement communautaire. De 1959 à 1966, il siège également à un comité consultatif pour la construction du pavillon autochtone à l’Exposition universelle de 1967 tenue à Montréal (voir Expo 67).

Président de la Fraternité des Indiens du Canada (1970-1976)

En 1968, une nouvelle organisation est créée pour représenter tous les citoyens inscrits comme Indiens au Canada, la Fraternité des Indiens du Canada. À la suite de la campagne menée par des Autochtones en opposition au Livre blanc de 1969, la FIC, sous la présidence de Walter Dieter, devient reconnue par le gouvernement fédéral comme un interlocuteur pouvant représenter les Autochtones du Canada. George Manuel succède à Walter Dieter et devient le deuxième président de l’organisation à la fin de l’année 1970.

C’est sous sa présidence que la FIC devient une organisation de premier plan en politique canadienne. Elle parle directement avec les représentants du gouvernement fédéral et aborde avec eux des questions de droits territoriaux et de droits issus des traités, entre autres.

En plus de son rôle au niveau national, George Manuel innove en fondant la première organisation autochtone internationale, le Conseil Mondial des peuples indigènes, lors d’une rencontre organisée en 1975 à Port Alberni en Colombie-Britannique. Il siège comme président de l’organisation, de sa création jusqu’en 1981. Ce sont 52 délégués provenant de nations autochtones d’Amérique, d’Europe et d’Océanie qui sont présents à la conférence de Port Alberni.

L’idée d’une telle organisation lui vient, notamment, à la suite d’une conversation avec le président de la Tanzanie, Julius Kambarage Nyerere, en 1971. Ce dernier lui conseille d’organiser les communautés autochtones du Canada en s’inspirant de la façon dont lui-même a convaincu les communautés de son pays d’adhérer au projet d’un État indépendant. En 1971 et 1972, George Manuel rencontre des Autochtones notamment en Nouvelle-Zélande, en Australie et en Scandinavie. Ces rencontres et les discussions qui en découlent éveillent en lui le sentiment que les peuples autochtones du monde partagent une histoire commune du colonialisme et qu’ils devraient s’unir pour en contrer les effets.

Dans son essai The Fourth World : An Indian Reality, publié en 1974 et coécrit avec Michael Posluns, George Manuel explicite pour la première fois l’idée d’un « Quatrième Monde » regroupant les peuples colonisés à l’intérieur des États. Il tire cette notion de ses conversations avec le haut-commissaire de la Tanzanie au Canada, Mbutu Milando.

Retour en Colombie-Britannique et Constitution Express (1977-1989)

Après la fin de son mandat comme président de la Fraternité des Indiens du Canada en 1976, George Manuel retourne en Colombie-Britannique et s’implique au niveau provincial. Il devient en 1979 le président de l’Union of British Columbia Indian Chiefs (UCICB), poste qu’il occupe jusqu’en 1981.

C’est en tant que président de l’UCICB qu’il est impliqué dans les pourparlers constitutionnels de 1980 et 1981. Il dirige le Constitution Express, un mouvement créé afin de faire entendre une voix autochtone et de revendiquer une reconnaissance des droits territoriaux autochtones dans les discussions sur la nouvelle constitution canadienne. Grâce à ses efforts et à ceux de centaines de militants autochtones de partout au Canada, la section 35 est ajoutée à la Constitution. Elle reconnaît les droits ancestraux ou issus des traités des peuples autochtones du Canada, notamment en matière de revendications territoriales.

Après ce combat de longue haleine, George Manuel est affaibli par plusieurs crises cardiaques et se retire graduellement de la sphère politique. Il va tout de même participer, conjointement avec Rudolph C. Rÿser, à la création d’un centre de recherche spécialisé sur les questions autochtones, le Center for World Indigenous Studies, fondé en 1979 et incorporé en 1984.

Peu actif dans les affaires publiques au cours des dernières années de sa vie, il décède à l’âge de 68 ans en novembre 1989.

Distinction

Doctorat honorifique, Université de la Colombie-Britannique (1983)

Officier de l’Ordre du Canada (1986)

Collection des peuples autochtones