Jean Lowe Butler | l'Encyclopédie Canadienne

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Jean Lowe Butler

Alice Maud Eugenia Lowe Butler, surnommée « Jean », spécialiste d’athlétisme, éducatrice (née en 1922, à Toronto, en Ontario; décédée le 11 septembre 2017, à Mobile, en Alabama). Jean Lowe Butler a été l’une des sportives amatrices canadiennes les plus accomplies. Elle a établi des records de l’Ontario aux 100 verges et 220 verges et a détenu le record canadien sur 100 m, en 11,9 s. Athlète universitaire d’élite aux États‑Unis, elle a concouru au 100 m, au 200 m, au saut en longueur et au saut en hauteur, et a remporté des médailles dans chaque épreuve de chaque compétition à laquelle elle a participé. Son exclusion de l’équipe olympique canadienne de 1948 a été controversée. Enseignante pendant 30 ans, elle a été intronisée au Tuskegee University Athletic Hall of Fame en 1985.

Prodige sportive

Fille d’immigrants caribéens, Jean Lowe naît en 1922. Elle commence à courir en compétition, à l’âge de 13 ans, avec le Toronto Ladies’ Athletic Club et plus tard, au sein du Laurel Ladies’ Athletic Club. Elle joue également au basketball pour le Toronto Ladies Club et pour la Hope United Church, et au softball dans la Beaches Ladies’ Softball League. Au secondaire, à l’Eastern High School of Commerce (qui deviendra ensuite l’Eastern Commerce Collegiate Institute et qui s’appelle aujourd’hui la Kapapamahchakwew – Wandering Spirit School), elle remporte les championnats de l’école en athlétisme. Elle joue également dans des équipes disputant les championnats de volley‑ball, de basket‑ball, de softball et de badminton. Membre exécutive de la Girls’ Athletic Society et membre de l’équipe de danse, elle est capitaine des équipes d’athlétisme, de basketball, de volleyball, de softball et de tennis.

Jean Lowe est déjà une spécialiste hors pair des courtes distances à l’Eastern Commerce. Après avoir intégré le Laurel Ladies’ de Toronto Athletic Club, elle établit un record sur 220 verges aux championnats d’athlétisme en salle de l’Ontario de 1941. L’année suivante, elle s’approprie également le record en salle sur 100 verges. Aux championnats d’athlétisme de l’Ontario de 1942, elle remporte cinq épreuves. Elle devient ensuite capitaine de l’équipe du relais 440 verges de Laurel qui domine les réunions d’athlétisme de l’American Amateur Union (AAU), et gagne les championnats 1943, 1944 et 1945. Aux championnats 1943, dans l’Ohio, Jean Lowe court le 100 m en 11,9 s, battant le précédent record canadien établi par Myrte Cook‑McGowan en 1928.

En 1942, Jean Lowe se voit remettre le trophée commémoratif Norman‑Craig récompensant la meilleure sportive de l’Ontario. En 1944, elle est la coureuse principale de l’équipe qui décroche le titre du relais aux championnats de l’AUA, à Harrisburg, en Pennsylvanie.

Départ discret du Canada

En 1942, Jean Lowe rencontre Cleve L. Abbott, directeur sportif du Tuskegee Institute (aujourd’hui la Tuskegee University), une université historiquement réservée aux personnes noires, à Tuskegee, en Alabama, fondée par Booker T. Washington. Cleve Abbott est considéré comme une figure marquante du sport amateur en Alabama. En 1936, il crée les Tuskegee Relays, une importante compétition pour les élèves noires du secondaire des États du Sud. À Tuskegee, des athlètes sont recrutés et se voient offrir des bourses de travail‑études, contribuant à la domination de l’établissement, pendant des décennies, dans les compétitions de l’AUA.

Le rôle précis que Cleve Abbott a joué dans la décision de Jean Lowe de quitter le Canada pour l’Alabama en 1945 n’est pas clair; toutefois, lorsqu’elle demande à devenir citoyenne américaine, ce dernier témoigne en son nom. Sportsnet rapporte à ce sujet : « Son départ soudain de Toronto, à la fin de la guerre [Deuxième Guerre mondiale] semble indiquer que c’est à l’extérieur du pays que s’offraient à elle les meilleures occasions. »

Les raisons personnelles pour lesquelles Jean Lowe a quitté le Canada n’ont pas laissé des traces dans l’histoire. Sportsnet précise qu’elle est revenue au Canada pour participer aux épreuves de qualification olympiques canadiennes de 1948, qui représentaient sa première chance de concourir pour le Canada aux Jeux olympiques. Bien que de nombreux chroniqueurs la considèrent alors comme la meilleure chance du pays dans les épreuves sur courte distance, elle ne réussit malheureusement pas à se qualifier pour les Jeux en terminant sur le podium.

À la suite de ces épreuves, un certain nombre d’organismes sportifs, notamment l’Association athlétique amateur du Canada, ont été accusés de favoritisme envers certaines athlètes lors de ces épreuves de qualification. Les entraîneurs de Jean Lowe ont déposé des plaintes auprès de cette organisation. Le Globe and Mail publie également ces accusations, le chroniqueur Bobbie Rosenfeld soulignant que cinq athlètes de la Colombie‑Britannique avaient été sélectionnées pour sept places, faisant valoir qu’elles avaient reçu un meilleur traitement et se demandant explicitement si « les bruits de discrimination étaient arrivés aux oreilles de la coureuse de couleur Jean Lowe de Toronto ». Après cet épisode, la native de la Ville Reine ne concourra plus jamais pour le Canada.

Carrière avec le Tuskegee Athletics

Jean Lowe participe aux compétitions d’athlétisme au Tuskegee Institute (maintenant la Tuskegee University), de 1947 à 1950, notamment aux championnats d’athlétisme en salle et en plein air sur 100 m, sur 200 m, en saut en longueur et en saut en hauteur. Elle réussit, à chaque occasion, à monter sur le podium et à décrocher une médaille.

Vie après Tuskegee

Après avoir obtenu un baccalauréat ès sciences de Tuskegee en 1950, Jean Lowe enseigne l’éducation physique, les mathématiques et l’anglais pendant un an au Palmer Memorial Institute de Sedalia, en Caroline du Nord. Pendant les 29 années suivantes, elle enseigne au sein du réseau scolaire de Mobile, en Alabama : 19 ans à la Central High School, où elle contribue à la mise en place du premier programme d’éducation physique pour les Afro‑Américains et 10 ans à la John S. Shaw High School, avant d’être, en 1985, intronisée au Tuskegee University Athletic Hall of Fame.

Au cours de ses années d’activité professionnelle dans la région de Mobile, Jean Lowe entraîne des équipes de championnat, en athlétisme et en basketball. Elle entraîne et parraine également des équipes de majorettes et de meneuses de claque, et parraine l’organisation Friends of Exceptional Children.

Jean Lowe a également été membre du conseil d’administration du Deep South Girl Scout Council, dont elle assume le secrétariat depuis 1981, du Mobile‑Tuskegee Area Alumni Club, de la State Street African Methodist Episcopal Zion Church et de l’Alpha Kappa Alpha Sorority, exerçant aussi les fonctions de coordinatrice du conseil des patients pour la Southwest Sickle Cell Anemia Foundation.

Vie personnelle

Jean Lowe épouse Oswald Butler en 1960. Elle décède à Mobile, en Alabama, en septembre 2017, alors qu’elle est membre de la congrégation State Street AME Zion Church. Elle fait don de son corps au programme de dons anatomiques du Collège de médecine de la South Alabama University, à des fins de recherche et d’éducation.

Voir aussi Les athlètes canadiens noirs pionniers; Athlétisme; Organismes du sport amateur.