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Transgenre

Le terme transgenre, souvent dit trans, est un terme générique qui désigne les personnes dont le genre ne correspond pas au sexe qui leur a été assigné à la naissance. La première clinique au Canada à se consacrer aux soins de santé des personnes transgenres a ouvert ses portes en 1969. À partir des années 1970, un mouvement plus large des droits des transgenres a commencé à prendre de l’ampleur. Lors des dernières décennies, nous avons pu voir la croissance d’une meilleure compréhension sociale des problèmes trans et de l’avancement des droits des trans. Cependant, au cours des dernières années, nous avons pu constater l’augmentation de la discrimination et des sentiments anti-trans. Le recensement canadien de 2021 a révélé que 0,33 % de la population de plus de 15 ans, soit environ une personne sur 300, s’identifie comme transgenre ou non binaire.

Définition et contexte

Le terme transgenre est un terme vaste qui inclut les hommes et les femmes transgenres ainsi que les personnes non binaires qui estiment que leur genre ne se conforme pas exactement au modèle binaire, homme et femme. Le terme non binaire est en lui-même son propre terme générique qui inclut les personnes qui s’identifient comme étant sans genre ou agenre, genre fluide, genderqueer, avec un troisième ou un autre genre, ou de toute autre façon qui n’est pas binaire. (Voir Identité de genre.) Toutefois, ce ne sont pas toutes les personnes non binaires qui s’identifient comme étant des personnes transgenres. (Voir aussi Bispiritualité.)

Les personnes transgenres effectuent souvent une transition sociale en changeant leur apparence, leurs vêtements, leur nom, ou leurs pronoms. La transition juridique consiste à changer les noms et les marqueurs sexospécifiques sur les documents d’identité. Ceci peut souvent causer des problèmes bureaucratiques. La transition médicale peut inclure un traitement hormonal substitutif ou la chirurgie de réassignation sexuelle. Les soins de santé axés sur l’affirmation de genre sont d’une importance vitale pour ceux qui en ont besoin ou qui les veulent, bien que ce ne soit pas toutes les personnes trans, non binaires, ou de genre non conforme qui choisissent la transition médicale.

Le saviez-vous?
La dysphorie de genre est le terme qui désigne l’inconfort que ressentent les personnes transgenres en raison de la déconnexion entre leur genre et leur sexe assigné.


Variance de genres chez les peuples autochtones

De nombreux peuples autochtones ont des concepts pour les personnes qui ne s’identifient pas au genre qui leur a été attribué à leur naissance (voir Bispiritualité). Au moins 155 nations ont des traditions de genre en dehors des normes hétérosexuelles binaires ou du cisgenre traditionnel (lorsque le genre correspond au sexe assigné à la naissance). Par exemple, les Ojibwés utilisent le terme ikwekaazo pour désigner les personnes dont le sexe masculin a été assigné à la naissance, mais qui assument des rôles traditionnellement féminins. Pour les personnes dont le sexe féminin a été assigné à la naissance, mais qui assument des rôles traditionnellement masculins, le terme est ininiikaazo.

Les colons européens ont imposé un genre binaire aux peuples autochtones dans le cadre du processus de colonisation. La professeure Deborah A. Miranda utilise le terme « gendercide » pour décrire l’élimination des peuples autochtones qui ne se conformaient pas au genre binaire imposé par les colons. (Voir Génocide et peuples autochtones au Canada.)

Transition médicale au Canada

La recherche moderne sur la dysphorie de genre remonte à au moins une centaine d’années. En 1910, le médecin allemand Magnus Hirschfeld crée un terme médical pour les identités transgenres. Dans les années 1950, Christine Jorgensen, une Américaine transgenre, devient célèbre après avoir subi des chirurgies de réassignation sexuelle. Elle a contribué à sensibiliser la conscience de l’Amérique du Nord sur les problèmes des transgenres.

La première clinique d’identité de genre au Canada ouvre au Clarke Institute of Psychiatry (le « Clarke ») de Toronto en 1969. La première chirurgie d’affirmation de genre largement médiatisée au Canada est pratiquée sur Dianna Boileau en 1970 à Toronto.

En 1973, le Centre Métropolitain de Chirurgie Plastique (maintenant appelé Centre Métropolitain de Chirurgie [CMC]) ouvre à Montréal en tant que clinique privée. Le CMC est le premier centre de chirurgie au Canada à offrir des chirurgies génitales d’affirmation de genre. Elle a été la seule clinique au Canada à effectuer des vaginoplasties (création d’organes génitaux pour femmes trans) durant 45 ans. Un centre de chirurgie trans ouvre ses portes au Women’s College Hospital de Toronto en 2017, et un autre au Vancouver General Hospital en 2019.

Au début, les transitions médicales sont strictement contrôlées par les psychiatres. L’assurance-maladie provinciale ne finance que les chirurgies de réassignation sexuelle pour les patients qui sont diagnostiqués comme étant transgenres. Ce diagnostic implique de devoir subir un grand nombre de tests invasifs et personnels. Certains de ces tests sont les mêmes que ceux utilisés pour examiner les délinquants sexuels criminels que le Clarke traite également. Les patients de l’époque ont décrit que le Clarke était plus intéressé par la recherche que par l’idée d’aider les personnes trans. L’institut avait mauvaise réputation parmi les personnes transgenres.

Les chirurgiens n’opèrent que les personnes dont la chirurgie a été approuvée par une clinique ou par un psychiatre. De plus, le Clarke ne donne son approbation qu’aux personnes qui ont un emploi, sont hétérosexuelles, sont célibataires, et n’ont jamais été reconnues coupables d’un crime. L’institut ne veut que des personnes qui pourraient « passer » pour des cisgenres et se conformer aux rôles de genre binaire.

Obtenir l’approbation pour une chirurgie nécessite de nombreuses évaluations sur une durée d’au moins deux ans. Les candidats doivent vivre selon leur genre durant deux ans avant de pouvoir avoir accès à la chirurgie. Ils doivent également changer tous leurs documents légaux. Ceci est difficile, car la mise à jour des certificats de naissance accuse de longs retards. En combinaison avec les normes strictes du Clarke, ceci signifie qu’il n’y a que peu de personnes recevant leur approbation. Betty Steiner, la directrice de la clinique, a déclaré au Toronto Star en 1982 que sur 600 candidats, seuls 75 ont reçu l’approbation pour des chirurgies.

À la fin des années 1970, l’accès à de nombreuses chirurgies et aux hormones d’affirmation de genre est disponible, mais strictement limité. Ceci fait en sorte que certaines personnes trans du Canada vont rechercher des soins chirurgicaux à l’étranger, ce qui donne des résultats variables.

Dans les années 1990, le financement provincial pour les chirurgies d’affirmation de genre en Ontario devient un ballon de football politique alors que les gouvernements considèrent le retrait de la couverture des procédures afin de couper dans les coûts. En 1998, le gouvernement progressiste-conservateur de Mike Harris suspend cette couverture. Celle-ci n’est rétablie qu’en 2008, après une décennie de campagne menée par des activistes trans locaux.

Au Québec, les patients subissant des chirurgies d’affirmation de genre étaient habituellement envoyés à l’étranger. Il a fallu attendre des décennies pour que les patients québécois puissent se faire opérer dans leur propre province. Les chirurgies sont pratiquées dans des cliniques privées comme le CMC mais elles ne sont couvertes par le système de santé provincial qu’à partir de 2009.

Actuellement, de nombreuses provinces et territoires exigent toujours des notes de la part des fournisseurs de soins de santé mentale pour permettre aux patients d’avoir accès aux soins de transition médicale. Les types de soins de santé disponibles se limitent souvent au traitement hormonal substitutif, aux chirurgies génitales, et à certaines chirurgies du thorax.

En 2021, le Yukon élargit son programme de soins de santé pour couvrir tous les soins liés à la transition. Par conséquent, le Yukon a la couverture médicale la plus complète au Canada pour les transgenres. Toutefois, cette couverture exige toujours la référence d’un fournisseur de soins de santé mentale pour y avoir accès.

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Droits légaux des transgenres

Les personnes trans sont depuis longtemps la cible de haine et de discrimination. La discrimination dans le milieu de l’emploi a conduit des nombres disproportionnés de personnes trans à se tourner vers la prostitution. À une époque, la police est reconnue pour arrêter des femmes trans en présumant qu’elles sont des travailleuses du sexe qui se travestissent. Les personnes trans peuvent rarement avoir accès à des soins de santé d’affirmation de genre en prison. De plus, le fait d’avoir un casier judiciaire empêche les patients d’avoir accès aux soins de santé du Clarke.

Certains droits légaux sont acquis au fil du temps. La décriminalisation partielle du sexe gai au Canada en 1969 est également une victoire pour la communauté transgenre. (Voir L’amendement de 1969 et la (dé)criminalisation de l’homosexualité.) À cette époque, les personnes trans ne peuvent pas facilement changer leur sexe légal. Ceci signifie que les personnes trans hétérosexuelles sont légalement des personnes homosexuelles (et les personnes trans queer sont légalement hétérosexuelles). Cette décision décriminalise donc la sexualité à la fois pour les personnes trans hétéros et queer.

En 1979, au moins six provinces permettent aux hommes et femmes trans de mettre à jour leurs marqueurs de genre sur leurs certificats de naissance. Cependant, ces amendements nécessitent des preuves de chirurgie génitale de réassignation sexuelle, ce qui est largement plus disponible pour les femmes transgenres que pour les hommes transgenres. En 2012, une décision du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario élimine l’exigence de chirurgie en Ontario. Ceci devient la norme à travers toutes les provinces et les territoires en 2017, à l’exception du Nunavut.

Depuis 2017, les personnes non binaires peuvent avoir un X sur leur passeport. La reconnaissance provinciale et territoriale varie. En 2022, l’Alberta, la Colombie-Britannique, le Manitoba, la Saskatchewan, l’Ontario, la Nouvelle-Écosse, l’ Île-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve-et-Labrador, et les Territoires du Nord-Ouest émettent des marqueurs X sur au moins certains des documents d’identité. La Saskatchewan et l’Ontario émettent des certificats de naissance avec un marqueur de genre caché. Cependant, le Québec et le Nunavut continuent de n’offrir que des options binaires.

À partir des années 1990, des affaires judiciaires accordent des droits légaux supplémentaires. Celles-ci comprennent deux affaires en Colombie-Britannique en 1999, qui statuent que les personnes transgenres ne peuvent subir de discrimination dans les syndicats et ne peuvent être congédiées en raison de leur genre. En 2001, le Tribunal canadien des droits de la personne conclut que le transsexualisme est protégé sur la base du sexe ou du handicap. Cette décision permet aux organismes des droits de la personne d’offrir du soutien aux personnes transgenres. Cependant, les critiques considèrent également que cette décision est capacitiste et transphobe, car elle définit le fait d’être transgenre comme un handicap.

En 2017, le gouvernement fédéral adopte le projet de loi C-16. Il ajoute à la Loi canadienne sur les droits de la personne « l’identité de genre et l’expression de genre » comme motifs de discrimination interdits. Il ajoute également l’expression et l’identité de genre comme motifs de déclaration de discours haineux ou de crimes haineux en vertu du Code criminel. (Voir Propagande haineuse.)

En 2022, le Canada interdit la pratique de la pseudoscience de thérapie de conversion. Cette pratique prétend pouvoir changer l’orientation sexuelle ou l’orientation de genre des gens, parfois contre leur gré.