Judie Alimonti | l'Encyclopédie Canadienne

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Judie Alimonti

Judie Barbara Alimonti, immunologiste (née le 13 mars 1960, à Kelowna, en Colombie‑Britannique; décédée le 26 décembre 2017, à Ottawa, en Ontario). Judie Alimonti a apporté une contribution notable à l’une des plus grandes réalisations du Canada dans le domaine des sciences médicales et de la santé publique, à savoir la mise au point du vaccin contre le virus Ebola. (Voir aussi Recherche médicale.) De 2010 à 2015, Judie Alimonti a géré le projet de vaccin contre le virus Ebola, à une époque où la recherche était sous‑financée. Elle n’a pas reçu, de son vivant, la reconnaissance qu’elle méritait pour son travail, ses collègues l’ayant même qualifiée d’héroïne méconnue de l’histoire du vaccin contre le virus Ebola.

Illustration de Judie Alimonti, date inconnue.

Jeunesse et formation

Judie Barbara Alimonti est la troisième des quatre enfants nés de Dominico (Nick) et Sheila Alimonti. Elle fréquente l’école secondaire de Kelowna où elle prend part à de nombreuses activités parascolaires, notamment sportives, avec le hockey sur gazon, le soccer et le basketball, et artistiques, avec un groupe de jazz. Une fois adulte, elle conservera cet amour du sport, continuant à jouer au hockey sur gazon et au soccer dans des ligues récréatives féminines. Après avoir obtenu son diplôme d’études secondaires en 1978, elle suit les cours du Canadian College of Massage and Hydrotherapy, à Sutton, en Ontario, dont elle sort diplômée en 1981. C’est là qu’elle rencontre son futur mari, Alan Giesbrecht.

Judie Alimonti et Alan Giesbrecht retournent ensuite à Kelowna, où, au cours des années suivantes, ils exploitent une clinique en tant que massothérapeutes agréés. Cependant, après le décès prématuré de sa mère d’un cancer, il semblerait que la jeune femme ait souhaité apporter une contribution à la société susceptible de véritablement changer la vie de nombreuses personnes. Parallèlement à son activité de massothérapeute, elle décide de suivre un certain nombre de cours de science. Elle s’inscrit ensuite, comme étudiante adulte à temps plein, à l’Université de la Colombie‑Britannique, à Vancouver, où elle obtient un baccalauréat ès sciences en microbiologie, en 1991. Elle poursuit ses études en immunologie, à l’Université du Manitoba et achève, en 1998, une thèse de doctorat, aujourd’hui conservée par Bibliothèque et Archives Canada. Elle obtient son doctorat en microbiologie à l’Université de la Colombie‑Britannique.

Recherche sur le cancer et le VIH/sida

La thèse de doctorat de Judie Alimonti, intitulée « Utilizing the transporter associated with antigen processing (TAP) to enhance immune responsiveness to cancers and viruses » est devenue la base d’un article, publié en 2000, dans la revue Nature Biotechnology. Les données présentées dans cet article seront ensuite utilisées dans la recherche d’un vaccin potentiel contre le cancer du sein. (Voir aussi La recherche sur le cancer du sein au Canada.)

À l’issue de ses études, Judie Alimonti travaille à Winnipeg pour Action Cancer Manitoba, un organisme de compétence provinciale, comme chercheuse sur le cancer. Elle poursuit également des études spécialisées sur le VIH/sida au sein de la faculté de médecine de l’Université du Manitoba (maintenant connue sous le nom de Collège de médecine).

Maladie à virus Ebola – Contexte

Micrographie électronique d’une particule virale Ebola, vers 1976.

La maladie à virus Ebola (MVE), également connue sous le nom de fièvre hémorragique Ebola et plus généralement appelée Ebola, touche les primates, notamment les humains, et d’autres animaux (voir Virus). Cette maladie, très contagieuse, se transmet par contact avec des fluides corporels. Mortelle, elle tue en moyenne environ 50 % des personnes infectées.

Le premier cas d’infection au virus Ebola a été détecté en 1976, à proximité de la rivière Ebola, dans ce qui est aujourd’hui la République démocratique du Congo. Des épidémies de cette maladie, accompagnées de taux de mortalité élevés, se sont poursuivies sporadiquement pendant plusieurs décennies. En 1999, le nouveau Laboratoire national de microbiologie (LNM) du Canada, qui fait partie de l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), situé à Winnipeg, commence à étudier le virus et sa gravité dans des conditions strictes de confinement, extrêmement sécuritaires. Mais, comme l’ont écrit le Dr Francis Plummer de l’ASPC et le Dr Steven M. Jones, en 2017, dans le Journal de l’Association médicale canadienne  : « Il a fallu plusieurs années pour convaincre les organismes de financement de l’importance de consacrer les ressources limitées du Laboratoire national de microbiologie à la recherche sur le vaccin contre le virus Ebola, plutôt qu’à d’autres problèmes de santé publique urgents au Canada. » En raison de ce manque de financement et du départ de certains des principaux chercheurs du LNM, partis pour occuper des postes dans d’autres établissements de recherche, le projet Ebola risque alors d’être mis de côté. (Voir aussi Recherche médicale.)

La Dre Judie Alimonti et le vaccin contre le virus Ebola

Judie Alimonti commence à travailler pour l’ASPC, en tant que scientifique contractuelle, en 2005. Elle se porte volontaire pour reprendre le dossier Ebola et, entre 2010 et 2015, elle est chef du projet de vaccin contre le virus Ebola. Judie Alimonti concentre ses efforts sur l’élaboration d’un vaccin qui serait d’une qualité suffisamment élevée pour être classé comme respectant les règles GMP (bonnes pratiques de fabrication). Le travail s’avère laborieux et fastidieux, mais elle est pleinement dévouée à cette cause. En dépit d’un poste précaire sous un contrat renouvelé d’une fois sur l’autre, elle reste pleinement mobilisée sur ce projet, refusant même une offre d’emploi à temps plein qui ne correspond pas au niveau du travail qu’elle effectue.

Opération « Skunk Works »

Alors qu’elle travaille sur le vaccin Ebola, Judie Alimonti met en place ce que l’on appelle une opération « Skunk Works », c’est‑à‑dire le recours à une procédure innovante, impliquant un petit groupe de personnes travaillant en dehors des canaux normaux de recherche et développement, au sein d’une organisation. Elle est impliquée dans toutes les décisions concernant le projet. Parmi ses diverses tâches, elle met au point des essais pour montrer que les matériaux expédiés à un fabricant de vaccins ne contiennent pas de micro‑organismes susceptibles de contaminer le produit par inadvertance. Plus tard, elle effectuera d’autres essais pour garantir que les vaccins qui lui sont retournés par le fabricant sont également exempts d’agents pathogènes. Dans un article de 2020 dans STAT, le Dr Frank Plummer, directeur scientifique du LNM de 2000 à 2014, décrit Judie Alimonti comme « une scientifique très méticuleuse et méthodique »; dans ce même article, le Dr Gary Kobinger, chef de l’unité spéciale des agents pathogènes au LNM, précise que sans le dévouement de Judie Alimonti qui, selon lui, « y mettait tout son cœur et travaillait tard le soir et les fins de semaine », le vaccin contre le virus Ebola n’aurait probablement jamais pu être mis à l’essai et homologué.

Épidémies d’Ebola

En 2014, une épidémie d’Ebola éclate en Afrique de l’Ouest. À la fin de 2016, le virus a causé la mort de 11 325 personnes. En réponse à cet épisode, le Canada fait don à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de flacons du vaccin contre le virus Ebola sur lequel Judie Alimonti travaille. Il est cependant nécessaire que le vaccin ainsi donné réussisse des essais cliniques avant de pouvoir être utilisé (voir aussi Épidémiologie). Les essais cliniques menés montrent que le vaccin est efficace et la campagne de vaccination qui s’ensuit permet de sauver des milliers de vies. C’est à Judie Alimonti qu’il revient d’organiser la distribution mondiale du vaccin aux partenaires de l’opération lors des essais cliniques.

Lorsqu’une nouvelle éclosion d’Ebola éclate en République démocratique du Congo, en 2018, le vaccin a été approuvé pour une utilisation dans ce pays et plus de 260 000 personnes sont immunisées. En 2019, le vaccin est approuvé pour une utilisation en Europe, et est également autorisé aux États‑Unis par la Food and Drug Administration (FDA).

Fin de carrière et décès

Dans la foulée de ses travaux sur le vaccin contre le virus Ebola, Judie Alimonti est recrutée, en 2015, par le Centre de Recherche en Thérapeutique en Santé Humaine (TSH) du Conseil national de recherches du Canada, à Ottawa. Là, elle conduit des recherches sur un vaccin contre le virus Zika, et bien qu’elle et ses collègues aient accompli des progrès sur ce projet, son état de santé l’empêche de poursuivre ses travaux. Après son décès d’un cancer, Alan Giesbrecht déclare, dans un article de 2018 de l’Ottawa Citizen : « Ma femme s’est investie corps et âme dans ce travail [le vaccin contre le virus Ebola] et a travaillé jour et nuit pour atteindre les normes mondiales les plus élevées. Elle aurait pu avoir recours à un soutien plus important. »

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