Réserves à l’Île-du-Prince-Édouard | l'Encyclopédie Canadienne

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Réserves à l’Île-du-Prince-Édouard

Il y a quatre réserves sur l’Île-du-Prince-Édouard, et elles appartiennent à deux Premières Nations (voir aussi Premières Nations sur l’Île-du-Prince-Édouard). Trois de ces réserves, Morell, Rocky Point et Scotchfort, appartiennent à la Première Nation Abegweit, et la réserve de Lennox Island appartient à la Première Nation de Lennox Island. L’Île-du-Prince-Édouard n’est qu’une de deux provinces à faire partie du territoire traditionnel d’un seul peuple autochtone, l’autre étant la Nouvelle-Écosse. Dans ces deux cas, ce sont les Micmacs. Des 1405 Micmacs inscrits à l’Île-du-Prince-Édouard (en 2021), 615 d’entre eux vivent sur les 4 réserves. Les réserves varient en taille, de moins d’un km2 à 5,4km2. La Première Nation de Lennox Island et la Première Nation Abegweit sont toutes deux dirigées par des chefs, qui doivent vivre sur la réserve, et par des Conseillers, qui peuvent vivre sur ou à l’extérieur de la réserve. Les élections sont tenues tous les trois ans, et tous les quatre ans, respectivement.

(carte de l’Encyclopédie canadienne, avec les données de Ressources naturelles Canada offertes en vertu de Licence du gouvernement ouvert – Canada)

Géographie

L’ensemble de l’Île-du-Prince-Édouard fait parti de Mi’kma’ki, le territoire traditionnel non cédé des Micmacs. Traditionnellement, Mi’kma’ki est divisé en sept districts. L’Île-du-Prince-Édouard fait partie du district de Epekwitk aq Piktuk (Île-du-Prince-Édouard et Pictou). Les réserves de l’Île-du-Prince-Édouard ne représentent que 0,13 % de la région totale de la province (soit 7,56 km2 de 5686 km2). La réserve de Lennox Island est une île située dans la partie ouest de l’Île-du-Prince-Édouard, alors que les réserves Scotchfort et Rocky Point se trouvent au centre, et la réserve Morell se trouve à l’est de l’Île-du-Prince-Édouard. Jusqu’en 1973, et jusqu’à la construction de la chaussée, Lennox Island n’était accessible que par bateau et par beau temps, ou jusqu’à ce que la glace soit assez épaisse pour pouvoir traverser durant l’hiver.

Histoire

Au début des années 1700, les Français installent parfois des camps de pêches d’été à Epekwitk (Île-du-Prince-Édouard). À cette époque, des conflits sans fin sévissent entre la Grande-Bretagne et la France pour le contrôle de la région (voirPolitique à l’Île-du-Prince-Édouard). Malgré ces conflits, l’insignifiance militaire relative de l’île signifie qu’elle est laissée en paix pour les Micmacs la plupart du temps. Cependant, en 1720, le gouvernement colonial français encourage les Acadiens à déménager à l’Île-du-Prince-Édouard. Pourtant, le système agricole d’aboiteau (la création de terres à partir de la mer ou de fleuves) des Acadiens, ainsi que leur petit nombre, permet aux Micmacs de conserver leur mode de vie traditionnel. Ceci se poursuit jusqu’à la défaite des Français à Louisbourg en 1758, la déportation des Acadiens de l’Île-du-Prince-Édouard, et la perte de l’Île-du-Prince-Édouard au profit des Britanniques. Ces événements entraînent une explosion de l’immigration britannique. Le chef Baptist La Morue, de l’Île-du-Prince-Édouard, fait partie d’un groupe de chefs micmacs envoyés à Halifax pour signer une série de traités de paix et d’amitié en 1760-1761. Les traités de paix et d’amitié ne gèrent que l’utilisation des ressources par les Micmacs, et la vie pacifique entre les Micmacs et les Britanniques. Les Micmacs ne sont jamais conquis, et leurs terres ne sont jamais octroyées, données ou cédées. Par conséquent, Mi'kma’ki en entier, avec l’Île-du-Prince-Édouard, était et est toujours un territoire micmac.

Réserve de Lennox Island

Entre 1764 et 1765, le gouvernement colonial britannique charge le capitaine Samuel Holland d’arpenter l’Île-du-Prince-Édouard. Samuel Holland divise la terre en 67 lots, et ces lots de terre sont ensuite donnés par un processus de loterie. Les résidents micmacs ne sont pas consultés. De plus, certaines îles au large de la côte de l’Île-du-Prince-Édouard ne sont pas rattachées aux lots. En 1772, Lennox Island est rattaché au lot 12 et est concédé à James Montgomery. Celui-ci donne la permission aux Micmacs, qui y vivaient déjà, de rester.

Au début des années 1800, les colons britanniques réalisent qu’il ne reste plus de terre pour que les Micmacs puissent continuer à vivre selon leur mode de vie traditionnel. En 1808, les Micmacs demandent au gouvernement de leur acheter Lennox Island. Trente années passent, durant lesquelles le gouvernement ne fait rien. Et donc, le chef Thomas Le Bone de la tribu indienne des Micmacs envoie une autre pétition, mais cette fois-ci, il l’envoie à la reine et à l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard. Cette démarche rappelle l’existence des Micmacs aux fonctionnaires, ainsi que leur ancienne, et meilleure, association avec les Français. La pétition demande également une parcelle de terrain quelque part sur l’Île-du-Prince-Édouard.

La pétition déclenche une frénésie d’activité vers la fin des années 1830 et au début des années 1840, alors que certaines régions de terres sont suggérées et rejetées. Le gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard aborde David Stewart qui est à l’époque propriétaire de Lennox Island pour que celui-ci vende l’île afin que le gouvernement puisse à son tour fournir des terres aux Micmacs. Cependant, David Stewart demande 1500 livres sterling. Le gouvernement estime que ce montant est bien trop élevé pour la petite île, alors l’idée est abandonnée.

John Thomas Sark

Au milieu des années 1860, les commissaires aux Affaires indiennes, Theophilus Stewart, propose que la Aborigines Protection Society de Londres en Angleterre achète Lennox Island pour les Micmacs. Cette société est un organisme des droits de la personne et un groupe de pression formé en 1837 pour défendre les droits des peuples autochtones dans tout l’Empire britannique. En 1870, la Aborigines Protection Society achète Lennox Island pour 400 livres sterling « à l’usage de la population autochtone de l’Île-du-Prince-Édouard ». Le titre foncier doit être détenu par un conseil d’administration, dont Theophilus Stewart fait partie.

En 1912, les administrateurs de Lennox Island sont soit morts ou soit très âgés. La fiducie est dissolue, et la réserve devient une réserve sous la Loi sur les Indiens.

Réserve Morell et réserve Scotchfort

En 1846, un important propriétaire foncier appelé Charles Worrell fait cadeau de 204 acres de sa terre à six familles micmaques. Le gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard achète par la suite le domaine Worrell en entier, incluant la terre offerte aux Micmacs, et la vend à diverses personnes.

En 1852, le gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard achète des terres dans les lots 15 et 55, et il les réserve à l’usage des Micmacs. Sur le lot 55, la terre est pauvre et les Micmacs ne l’utilisent pas. La terre du lot 15 est excellente, toutefois les colons acadiens s’en emparent rapidement. Cette même année, les commissaires aux Affaires indiennes de l’Île-du-Prince-Édouard convainquent le British Ordnance Department de leur prêter une parcelle de Ordnance Land pour les Micmacs. Ceux-ci utilisent largement cette « Ordnance Reserve », et ils construisent une route et plantent des champs de pommes de terre sur l’ensemble des 10 acres.

Pendant ce temps, les membres de la communauté micmaque, les commissaires aux Affaires indiennes de l’Île-du-Prince-Édouard, et d’autres citoyens inquiets envoient des pétitions au gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard concernant la perte du domaine Worrell, espérant pouvoir remédier à la situation. Cependant, le procureur général de l’Île-du-Prince-Édouard déclare qu’il serait « injuste de voler cette terre à ceux qui l’ont achetée. » Au lieu de cela, le gouvernement suggère une autre parcelle de terrain, 189 acres sur le lot 39, dont 90 acres de terres sont stériles. Le gouvernement l’accorde en 1859, et l’endroit devient la réserve Morrell. Toutefois, les colons sur les terres adjacentes refusent aux Micmacs l’accès à la propriété en refusant de leur permettre de construire une route d’accès à travers leurs terres.

Durant les années 1860, le commissaire aux Affaires indiennes Theophilus Stewart adresse une pétition au gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard pour obtenir plus de terres pour les Micmacs, mais il ne reçoit que des réponses négatives. Theophilus Stewart recommande également la vente des réserves sur les lots 15 et 55, étant donné qu’aucune des deux ne peut être utilisée par les Micmacs. Il suggère que l’argent provenant de la vente soit utilisé pour acheter d’autres terres pour les Micmacs. La vente a lieu en 1866, mais aucune autre terre n’est achetée à ce moment-là.

En plus de vendre les lots 15 et 55 en 1866, le gouvernement saisit la terre de la « Ordnance Reserve ». Il établit un hôpital de contagieux précisément sur les 10 acres utilisés par les Micmacs. En 1873, l’Île-du-Prince-Édouard se joint à la Confédération, et la responsabilité des Micmacs de l’Île-du-Prince-Édouard est transférée à la juridiction fédérale.

À la fin des années 1870, Theophilus Stewart envoie des pétitions concernant la petite taille de la réserve Morrell en comparaison à la terre de l’ancien domaine Worrell, et concernant également le manque d’accès à la région pour les familles. Ces pétitions aboutissent finalement en décret qui accorde 15 acres supplémentaires en 1879. De plus, en 1880, une route est enfin approuvée pour fournir un accès à la réserve Morell, plus de 20 ans après la création de la réserve.

Toujours en 1879, une terre est mise de côté pour une autre réserve sur les rives de la rivière Hillsborough, au lieu des 115 acres de terre inutiles réservés pour les Micmacs sur le domaine Worrell. Ces acres sont situés près de l’endroit habituel que les Micmacs utilisent pour la pêche et le tir, et deviennent éventuellement connus comme la réserve Scotchfort.

Réserve Rocky Point

Rocky Point

Dans un rapport de 1875, le commissaire aux Affaires indiennes Theophilus Stewart déclare que six familles micmaques vivent depuis les quelques dernières années dans la région de Rocky Point. Les familles font la demande auprès du gouvernement de leur acheter la terre, pour en faire une résidence permanente. Le gouvernement ignore leur demande.

En 1912, Alice Mitchell, une femme micmaque, demande de l’aide juridique et dépose une pétition déclarant qu’elle, son père, son grand-père et son arrière-grand-père vivent tous sur les terres de Rocky Point. Ceci est en réponse à la décision du propriétaire de vendre la terre malgré le fait que les Mitchell y vivent. Lorsque le propriétaire refuse de vendre sa terre au gouvernement, le ministère des Affaires indiennes organise l’achat de la vente d’une parcelle de terre adjacente à l’usage exclusif de la famille micmaque. En 1913, la quatrième et dernière réserve de l’Île-du-Prince-Édouard est créée lorsque trois acres de terre à Rocky Point deviennent la réserve Rocky Point.

Communautés

Première Nation de Lennox Island

Avant 1972, tous les Micmacs vivant à l’Île-du-Prince-Édouard sont considérés comme faisant partie de la Première Nation de Lennox Island. La Première Nation Abegweit est formée en réponse à un conflit concernant le conseil de la Première Nation de Lennox island. La distance séparant les réserves Rocky Point, Scotchfort et Morell de Lennox Island est également un facteur important dans cette situation, car les membres de ces communautés ne sont pas toujours en mesure d’assister aux fonctions et aux réunions de la bande. De plus, un manque important de communication existe entre le conseil de la bande de Lennox Island et les autres membres de la bande.

La question est mise aux voix, et le 7 mars 1972, la majorité de ceux qui sont en mesure d’assister à la réunion vote massivement en faveur de la séparation. Il est entendu que la Première Nation de Lennox Island conserve la réserve de Lennox Island. La réserve Morell, la réserve Rocky Point et la réserve Scotchfort forment ensemble la nouvelle Première Nation Abegweit.

La Loi sur les Indiens et les pensionnats indiens ont presque réussi à éliminer la langue, la culture et l’artisanat micmacs partout à travers Mi’kma’ki. Au cours des dernières années, toutes les facettes de la culture micmaque connaissent une résurgence à l’Île-du-Prince-Édouard. La langue micmaque est maintenant enseignée dans les écoles aux élèves micmacs, et les artisans ainsi que les œuvres d’art micmacs sont recherchés et exposés. De même, la culture micmaque est mise en valeur et célébrée lors de nombreux événements autochtones et grand public tout au long de l’année, et à travers l’Île-du-Prince-Édouard.

Mots-clés : Réserves

Réserve

Terre mise de côté par le gouvernement fédéral pour l’usage d’une bande autochtone. Les réserves sont gérées en vertu de la Loi sur les Indiens.

Établissement

Endroit, généralement sur des territoires provinciaux, où la majorité de la population est autochtone. Contrairement aux réserves, les établissements ne sont pas encadrés par la Loi sur les Indiens.

Bande

Terme colonial défini par la Loi sur les Indiens et désignant un groupe des Premières Nations qui possède, généralement, une terre de réserve. Plusieurs bandes préfèrent la dénomination de Première Nation et ont changé leur nom en conséquence.

Premières Nations

Peuples autochtones du Canada qui ne sont ni métis ni inuits. Le terme « Première Nation » peut aussi désigner une bande ou un peuple faisant partie d’un plus grand groupe autochtone. Par exemple, la Première Nation crie comprend plusieurs petites communautés (ou bandes), comme la Première Nation crie de Beaver Lake, en Alberta, et la Première Nation crie de Moose, en Ontario.

Indien inscrit

Terme juridique appliqué aux membres des Premières Nations dont le nom est inscrit dans le Registre des Indiens, un document tenu par le gouvernement fédéral. Pour obtenir le statut d’Indien inscrit, certains critères définis dans la Loi sur les Indiens doivent être respectés.

Liens externes