Mary Riter Hamilton | l'Encyclopédie Canadienne

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Mary Riter Hamilton

Mary Matilda Hamilton (née Riter), artiste (née le 7 septembre vers 1867 à Teeswater, en Ontario; décédée le 5 avril 1954 à Coquitlam, en Colombie-Britannique). Mary Riter Hamilton était une peintre qui a exposé ses œuvres en Europe et partout au Canada. Peu après l’arrêt des combats à la fin de la Première Guerre mondiale, Mary Hamilton se rend en Europe pour peindre les champs de bataille avant qu’ils ne soient déblayés (voir Artistes de guerre). Elle y peint en trois ans 350 toiles qui témoignent de la destruction et de la dévastation causées par la guerre.

Mary Riter Hamilton

Jeunesse et début de carrière

Mary Matilda Riter naît le 7 septembre 1867 ou 1868 à Teeswater, en Ontario. Elle est la benjamine d’une fratrie de cinq enfants. Au début des années 1880, sa famille déménage dans une propriété située à Clearwater, au Manitoba.

Mary Hamilton se découvre un goût pour le dessin dès sa plus tendre enfance. Adolescente, elle suit une formation de chapelière à Emerson, au Manitoba. Lorsque son patron déménage à Port Arthur, en Ontario (aujourd’hui Thunder Bay), Mary Hamilton le suit. Elle y rencontre Charles Hamilton et le couple se marie en juillet 1889. Charles Hamilton est à l’époque un marchand de produits secs et sera propriétaire, avec sa femme Mary, de la boutique Paris Dry Goods House.

En 1892, Mary donne naissance à un enfant mort-né et Charles meurt l’année suivante. Avant la disparition de son mari, Mary Hamilton étudie les arts à Toronto. En 1894, elle déménage à Winnipeg pour poursuivre ses études en art. Elle y ouvre un studio de peinture sur porcelaine où elle enseigne et produit des œuvres pour subvenir à ses besoins.

Formation artistique en Europe

À Toronto, les professeurs d’art de Mary Hamilton l’encouragent à se rendre en Europe pour y poursuivre ses études. Elle part étudier les arts à Berlin en août 1901. En 1903, elle déménage à Paris pour y continuer sa formation. Un puissant coup de pouce vient animer sa carrière en 1905, lorsqu’elle expose au Salon de Paris, l’une des plus grandes expositions d’art annuelles, et qu’une de ses peintures est reproduite sur la couverture d’un magazine français. En 1906, elle revient à Winnipeg pour voir sa famille et exposer ses travaux. Elle revient à Paris l’année suivante pour continuer à pratiquer dans les arts.

Mary Riter Hamilton

Carrière d'avant-guerre au Canada

Mary Hamilton revient au Canada en 1911 pour prendre soin de sa mère malade. Elle expose ses œuvres à Toronto, Montréal et Ottawa. Elle revient un temps à Winnipeg, mais déménage par la suite à Victoria, en Colombie-Britannique, en 1912, où elle continuera à enseigner et à produire des œuvres. Mary Hamilton expose ses œuvres en plusieurs endroits dans l’Ouest canadien et les revues de l’époque parlent d’elle comme d’une artiste réputée, célébrée et distinguée. La princesse Patricia et le premier ministre sir Robert Borden achèteront certaines de ses peintures.

Art militaire de la Première Guerre mondiale

Mary Hamilton habite à Victoria lorsque la Première Guerre mondiale éclate. À l’époque, elle prévoit depuis longtemps de revenir à Paris. Elle doit cependant rester au Canada et tient un studio de portrait à Victoria. Durant la guerre, elle demande au Fonds de souvenirs de guerre canadiens de l’envoyer sur les lignes du front en tant qu’artiste de guerre, mais sa requête est rejetée (voir L’art et la Grande Guerre). Seuls les artistes hommes obtiennent des commandes pour aller travailler sur le front. Leurs collègues féminins doivent se contenter de témoigner de l’effort de guerre au Canada (voir Représentations du front intérieur : les femmes du Fonds des souvenirs de guerre canadiens).

Mary Hamilton a l’occasion de visiter les champs de bataille après la fin de la guerre, en 1918. Elle reçoit une commande de l’Amputation Club of British Columbia (aujourd’hui The War Amps) pour une peinture de paysages représentant des champs de bataille, pour leur magazine The Gold Stripe, destiné aux anciens combattants. La peinture doit témoigner de l’impact de la guerre et célébrer la mémoire de ceux qui sont tombés. Mary Hamilton part rapidement, en mars 1919, pour l’Europe afin d’y capturer l’état des champs de bataille, des cimetières et des villes en ruines avant le début des travaux de reconstruction.

Elle arrive en France et demeure au début avec les militaires canadiens, mais voyage ensuite toute seule. Elle parcourt la France et la Belgique, visitant les sites des grandes batailles canadiennes, telles que celles de la Somme, de la crête de Vimy et d’Ypres. Elle doit faire face à de rudes conditions, vivant dans des abris inadéquats et devant souvent se contenter de maigres repas. Les paysages qu’elle peint sont jonchés de mines terrestres et d’obus non explosés. Dans une interview enregistrée en 1922, Mary Hamilton explique pourquoi elle travaille dans ces conditions : « J’ai décidé que je devrais pouvoir me rendre là où nos hommes sont allés dans des conditions bien plus terribles, et je suis très fière d’avoir pu, même de façon modeste, célébrer le courage de mes compatriotes ».

Tranchée de la Somme (1919)
Peinture à l’huile sur carton de Mary Riter Hamilton (avec la permission de Bibliothèque et Archives Canada/1988-180-3)

Mary Hamilton exécute ses peintures sur le terrain en dressant son chevalet au milieu des champs de bataille. Lorsqu’elle se retrouve à court de toiles, elle utilise les supports qui lui tombent sous la main. Son matériel doit être portable, car il lui faut souvent parcourir de longues distances à pied. Entre 1919 et 1922, Mary Hamilton crée ainsi quelque 350 toiles sur le front, la plus grande collection de peintures canadiennes sur la Première Guerre mondiale jamais réalisée par un seul artiste. Ses toiles, de style impressionniste et dans lesquelles elle favorise couleurs et formes plutôt que les détails, évoquent les thèmes de la destruction et du renouveau.

Mary Riter Hamilton
Mary Riter Hamilton sur les champs de bataille avec son chevalet et son chien, Old Bob. Un pavillon militaire est visible à l’arrière-plan. Photographie prise aux alentours de 1920.

Les peintures de champs de bataille de Mary Hamilton apparaissent d’abord dans The Gold Stripe, en 1919, puis lors d’expositions en Colombie-Britannique. Elles seront plus tard exposées en France, notamment à l’Opéra de Paris et au Salon de Paris. Elles sont plébiscitées dans toute l’Europe. En 1922, elle reçoit, en France, le ruban pourpre de l’Ordre des Palmes Académiques en reconnaissance de l’ensemble de son œuvre, et est félicitée pour la bravoure dont elle a fait preuve pour représenter les champs de bataille.

Tranchées de la Somme (1919)
Peinture à l’huile sur carton entoilé commercial de Mary Riter Hamilton.

La santé de Mary Hamilton a été affectée par ces trois années passées à vivre dans de mauvaises conditions pour peindre les scènes de destruction. Dans les années qui suivent, elle est hospitalisée en France et au Royaume-Uni. Sa situation financière est de plus en plus précaire. Elle vend ses peintures d’avant-guerre à bas prix pour payer son loyer et peint des foulards en soie à Paris pour se payer son voyage de retour au Canada. Mary Hamilton recevra une médaille d’or pour une de ses écharpes à l’occasion de l’Exposition internationale des arts décoratifs de Paris en 1925.

Vie et travaux de la maturité

Mary Riter Hamilton revient au Canada en 1925, et commence alors la promotion de sa collection sur les champs de bataille. Ses peintures ont eu du succès en Europe, mais elles ne sont pas aussi bien reçues au Canada, probablement parce qu’à l’époque, les Canadiens cherchent à mettre la guerre derrière eux, et peut-être aussi parce que son style de peinture européen contraste avec le style canadien populaire durant cette période (voir Groupe des sept). Mary Hamilton a offert quelques-unes de ses peintures à des anciens combattants, mais a refusé de vendre le reste. Elle a fait don de ses peintures de guerre aux Archives nationales du Canada (qui font maintenant partie de Bibliothèque et Archives Canada).

Mary Hamilton déménage à Winnipeg en 1926, avant de s’installer à Vancouver pour y enseigner et exposer. Son projet de peinture des champs de bataille a pesé sur sa santé. De 1928 jusqu’à sa mort, elle va et vient entre son domicile, les hôpitaux et les institutions psychiatriques. En 1948, elle a déjà perdu la vue et vit dans la pauvreté.

Mary Hamilton s’éteint le 5 avril 1954 à l’hôpital psychiatrique Essendale, à Coquitlam, et sera inhumée aux côtés de son époux, à Port Arthur. Après sa mort, ses travaux ont continué à être exposés au Canada et à l’étranger.

Legs

Marie Riter Hamilton peint 350 œuvres du front de la guerre, la plus large collection de tableaux canadiens de la Première Guerre mondiale faite par un seul artiste. Après son décès, les œuvres de Mary Riter Hamilton continuent d’être exposées, tant à l’échelle nationale qu’à l’échelle internationale.

En 1988, les Amputés de guerre du Canada publient un court documentaire sur Mary Riter Hamilton intitulé No Man’s Land. En 2018, pour marquer le 100e anniversaire des Amputés de Guerre (qui avaient commandé à Mary Riter Hamilton des tableaux de scènes du front de bataille suite à la guerre), le Musée canadien de la guerre lance Résilience — Traces de guerre par Mary Riter Hamilton, 1919-1922. L’exposition temporaire présente 15 tableaux de Mary Riter Hamilton, de la collection de la Bibliothèque et Archives Canada. En 2020, Postes Canada a émis un timbre à l’occasion du jour du Souvenir; le timbre met en vedette l’œuvre Trenches on the Somme (1919) réalisée par Mary Riter Hamilton.

Prix

  • Officier de l’Instruction publique, ruban pourpre, Ordre des Palmes Académiques (1922)
  • Médaille d’or, Exposition internationale des arts décoratifs (1925)
Intérieur d’une casemate, Flandres (1920)
Mary Riter Hamilton, peinture à l’huile sur carton.